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Environnement et styles de développement*
Published online by Cambridge University Press: 25 May 2018
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Après l'anti-roman et la contre-culture, la non-croissance. Trois symptômes, certes très différents, de la remise en question des valeurs par une société à la recherche de nouvelles parades idéologiques aux problèmes demeurés insolubles malgré les progrès spectaculaires de la croissance matérielle ou apparus à la suite de celle-ci : le malaise généralisé des jeunes, la persistance de la misère, l'agression contre l'environnement, la frustration du Tiers Monde qui en est à se demander si au concept même de développement, fondé sur l'efficacité, ne devrait pas se substituer celui de la libération, axé sur la justice sociale et la création d'un homme nouveau.
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- Histoire et Environnement
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- Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1974
Footnotes
Étude réalisée dans le cadre du Programme des Nations Unies pour l'Environnement.
References
1. Goulet, D., The Cruel Choice. A new Concept in the Theory of Development, New York, 1973, pp. XII-XXIGoogle Scholar.
2. Voir à ce sujet le rapport du Symposium des Nations Unies sur la Population, les Ressources et l'Environnement (Stockholm, septembre-octobre 1973).
3. Cette métascience sociale est postulée et pratiquée par M. Godelier. Voir Horizon, Trajets marxistes en anthropologie, Paris, 1973, pp. 13-82.
4. Voir à ce sujet notre article « Histoire globale et Prospective du Tiers Monde », Diogène, n° 73.
5. Febvre, L., La Terre et l'Évolution humaine, Paris, 1922 Google Scholar.
6. Le présent travail représente en partie notre étude « Ecodesarrollo : un aporte a la defenición de estilos de desarrollo para America Latina » préparée pour le Cepal en juillet 1973.
7. Churchman, W., The Systems Approach, New York, 1968 Google Scholar.
8. L'environnement humain se compose bien entendu aussi d'hommes (voir Maldonado, T., Environnement et idéologie, Paris, 1972, p. 15 Google Scholar).
9. En ce sens l'ouvrage de F. Engels sur les conditions de la classe laborieuse en Angleterre apparaît comme un classique de la littérature sur l'environnement.
10. La catégorie des techniques non destructrices du milieu est plus large que celle des « techniques douces », définies à la fois comme ne portant aucune atteinte au milieu, n'exigeant pas beaucoup de capital ni de hautes qualifications, et pouvant par surcroît être appliquées à une petite échelle. Voir à ce propos : P. Harper, « ‘ Technologies douces ’ et critique du modèle occidental de développement », Perspectives, vol. III, n° 2, 1973, et notre critique parue dans la même revue, sous le titre : « ‘ Techniques douces ’, projets de civilisation, développement».
11. On ne saurait trop insister, dans ce contexte, sur l'importance d'instituer un système de comptes patrimoniaux de la nature pour être à même de bien repérer les consommations qui impliquent l'amenuisement irréversible du capital de la nature ou, si l'on préfère, le taux d'exploitation de l'environnement (pour ce dernier concept, voir le beau livre de R. G. Wilkinson, Poverty and Progress, an Ecologyc Model of Economie Development, London, 1973 ; et également Dasmann, Freeman, Milton, Ecological principles for Economie Development, London, 1973 Google Scholar.
12. Maurice F. Strong, Directeur Exécutif du Programme des Nations Unies pour l'Environnement, a lancé l'idée d'éco-développement au cours de la première réunion du Conseil Administratif de ce Programme, tenu à Genève en juin 1973.
13. Comme l'écrit, à juste raison, l'économiste pakistanais Mahbub Ul Haq, « the developing countries have no choice but to turn inwards, in much the same way as Communist China did twenty-three years ago, and to adopt a différent style of life, seeking a consumption pattern more consistent with their own poverty—pots and pans and bicycle and simple consumption habits—without being seduced by the life style of the rich » (« Crisis in Development Stratégies », World Development, vol. I, n° 7, 1973, p. 29).
14. Il ne faut jamais oublier que le concept même de ressources naturelles relève de la culture ; comme le dit C. O. Sauer les ressources naturelles sont les estimations d'une civilisation sur son milieu (cité par Gourou, P., Pour une géographie humaine, Paris, 1973, p. 240 Google Scholar).
15. Voir à ce propos le récent discours de Robert S. McNamara, Président de la Banque Mondiale (” Address to the Board of Governors », Nairobi, 24 septembre 1973) et les travaux du Comité de planification de Développement des Nations Unies et l'Institut de Recherche des Nations Unies pour le Développement Social sur l'approche unifiée à la planification.
16. Le développement traditionnellement défini signifie toujours une priorité inconditionnelle reconnue à la culture sur la nature. Par contre, comme le souligne Claude LÉVistrauss, chez les primitifs le rapport entre la culture et la nature se revêt d'une certaine ambiguïté : cette dernière est à la fois pré-culture et sous-culture, mais surtout contient une composante surnaturelle (Anthropologie structurale II, Paris, 1973, p. 374).
17. Voir en particulier J. B. R. Whitney, « Ecology and Environmental Control in China's Development Expérience », numéro spécial de The Armais ofthe American Academy of Political and Social Science, mars 1973, vol. 31, n° 1, pp. 95-109.
18. Ce terme anglais consacré par Emerson, repris dans le contexte qui nous intéresse par Ghandhi, et plus récemment encore par Nyerere (Ujamaa : Essays on Socialism, Dar Es Salaam, 1968) a un contenu que la traduction française habituelle — développement autocentré — rend très imparfaitement.
19. Voir, entre autres, Lévi-Strauss, C., La Pensée Sauvage, Paris, 1962, pp. 3–47 Google Scholar, et : J. Barrau, « Plantes et comportement des hommes qui les cultivent. L'oeuvre ethnobiologique d'André Haudricourt », La Pensée, n° 171, octobre 1973, pp. 37-46.
20. C. Geertz, « Two Types of Ecosystems », dans A. P. Vavda, éd., Environment and Cultural Behaviour, New York, 1969, pp. 3-25.
21. Voir par exemple pour les « chacras » d'Indiens : Meggers, B. J., Amazonia : Man and Culture in a Counterfeit Paradise, Chicago, 1971 Google Scholar, et S. Varese, « Au sujet du colonialisme écologique », Les Temps Modernes, avril 1973 ; pour les jardins de Polynésie : R. A. Rapaport, «The Flow of Energy in an Agricultural Society», Scientific American, September 1971.
L'Institut International de Recherche sur le Riz vient de commencer un programme de recherches sur « multiple cropping » conçu comme une relève de la « révolution verte », à la mesure du petit paysan qui manque de capital et d'accès aux terres irriguées, mais pourrait parfaitement se saisir d'une technique qui dépendrait essentiellement de son travail et de la connaissance du milieu et lui offrirait une possibilité d'augmentation et de diversification de sa production. (Voir : G. Conway, J. Romm, Ecology and Resource Development in Southeast Asia, The Ford Foundation Office for Southeast Asia, 1973.)
22. Il se trouve des naturalistes pour justifier l'abattage de la forêt avec des arguments pseudo-scientifiques. Henrique Pimenta Veloso, conseiller du Gouvernement brésilien, ne vient-il pas d'expliquer que la forêt amazonienne est en train de vieillir dangereusement et de dégénérer sous le poids des lianes et qu'il faut donc en abattre 30 % avant qu'il ne soit trop tard ? (O Estado de São Paulo, 4 septembre 1973) ? Ses déclarations ont suscité un commentaire caustique du Jornal do Brasil du 5 septembre : apparemment le savant écologiste aurait une âme de bûcheron et d'éleveur de bétail.
23. Le livre déjà cité de Meggers porte le sous-titre significatif de paradis contrefait. Gourou, dont les appréciations des possibilités virtuelles de l'Amazonie ont beaucoup évolué, écrit dans son dernier ouvrage : « il est plus réaliste — et scientifique — de penser que c'est l'absence de techniques agricoles et de techniques d'encadrement adéquates qui n'a pas permis d'établir en Amazonie une agriculture permanente et abondamment productrice. Si une civilisation ingénieuse avait pris naissance en Amazonie, on ne manquerait pas de dire qu'elle avait été favorisée par l'immense étendue des terres cultivables, par l'abondance et la régularité des pluies et par un admirable réseau navigable, unique au monde » (Pour une géographie humaine, Paris, 1973, p. 95).
24. Voir, à titre d'exemple, l'excellent article de James Sholto Douglas, « L'Agrisylviculture pour accroître la production alimentaire de la nature », Impact : science et société, Unesco, vol. Xxiii, n° 2, 1973.
25. Voir Deffontaines, P., L'homme et la forêt, Paris, 1969, pp. 37 et 44Google Scholar. Voir aussi, pour des exemples du róle que la forêt jouait dans l'alimentation pendant le haut Moyen Age et l'intégration de l'agriculture, de l'élevage et de la sylviculture, Duby, Georges, Guerriers et paysans, VIIe-XIIe siècles, Paris, 1973 Google Scholar.
26. Gourou, P., Leçons de géographie tropicale, Paris, 1971, pp. 160–161 Google Scholar.
27. Voir R. Revelle, « Population and National Resources—Land and Water Resources », Document préparé pour le Symposium des Nations Unies sur Populations, Ressources et Environnement (Stockholm, 26 sept.-5 oct. 1973).
28. La culture européenne s'oppose à ce sujet à celle de l'Orient musulman, comme le note à juste titre J. L E Goff : « Un grand manteau de forêts et de landes troué par des clairières cultivées, plus ou moins fertiles, tel est le visage de la Chrétienté —- semblable à un négatif de l'Orient musulman, monde d'oasis au milieu des déserts. Ici le bois est rare, là il abonde, ici les arbres sont la civilisation, là la barbarie. La religion née en Orient à l'abri des palmes se fait jour en Occident au détriment des arbres, refuge des génies païens, que moines, saints, missionnaires abattent impitoyablement. Tout progrès de l'Occident médiéval est défrichement, lutte et victoire sur les broussailles, les arbustes ou, s'il le faut et si l'équipement technique et le courage le permettent, sur les futaies, la forêt vierge, la ‘ gaste forêt ‘ de Perceval, la selva oscura de Dante » (La Civilisation de l'Occident médiéval, Paris, Arthaud, 1967, p. 169).
29. Le grand biologiste anglais Julian Huxley est arrivé à une conclusion semblable à propos des savanes africaines. Voir : « Riches of Wild Africa », dans Essays ofa Humanist, Harmondsworth, 1966, pp. 177-201.
30. H. Dickinson décrit les pratiques chinoises où l'on obtient jusqu'à 8 000 kg de poisson par année et hectare d'étangs soumis à une gestion très élaborée, y compris l'alimentation des poissons par des escargots, par des chrysalides de vers à soie, des feuilles de patates douces, et enrichie par le fumier de porc (Rural China, 1972 Rapport publié par la School of Engineering Science, Universityof Edinburgh, p. 33). Nous avons visité en Amazonie péruvienne une pisciculture expérimentale où les poissons étaient nourris aux termites, ce qui entrouvre les possibilités d'un maniement novateur des chaînes trophiques.
Pour un tour d'horizon, très exhaustif, des problèmes d'aquaculture, voir : Bardach, J. E., Ryther, J. H. and McLarney, W. O., Aquaculture. The Farming and Husbandry of Freshwate and Marine Organisons, New York, 1972 Google Scholar.
31. Gourou, P., Pour une géographie humaine, Paris, 1973, p. 27 Google Scholar.
32. Voir les études de N. W. Pirie, un pionnier du sujet, et en particulier le volume édité par lui : Leaf Protein : lis Agromomy, Préparation, Quality and Use, Blackwell Scientific Publications for the International Biological Programme, Oxford and Edinburgh, 1971.
33. Voir Gore, S. B. and Joshi, R. N., « The Exploitation of weeds for leaf protein production », dans Tropical Ecology with an Emphasis on Organic Production, Athens (Georgia), 1972, pp. 137–146 Google Scholar.
34. C'est ainsi qu'au XIe Congrès International des Grands Barrages, tenu à Madrid en juin 1973, la délégation soviétique a annoncé la construction en Ukraine d'une usine pour l'extraction des protéines à partir de plantes qui infestent les lacs artificiels.
35. Voir O. Björkman, J. Berry, « High-Efnciency Photosynthesis », Scientific American, vol. 229, n° 4, October 1973, pp. 80-93.
36. World Housing Survey, préparé par les soins des Nations Unies (Doc. E/C.6./129), New York, 1973.
37. Voir à ce sujet Amos Rapaport, Pour une anthropologie de la maison, Paris, 1972 ; Pierre Deffontaines, L'homme et sa maison. Géographie humaine, Paris, 1972 ; et, pour la maison arabe, l'excellent livre de Hassan Fathy, Construire avec le peuple, Paris, 1971 ; Gilberto Freire a étudié l'adaptation à l'éco-système de la maison coloniale brésilienne dans A Casa Brasileira, Rio de Janeiro, 1971.
38. A titre d'exemple parmi d'autres, mentionnons la maison expérimentale construite à l'Université McGill au Canada : le soufre, sous-produit du raffinage du pétrole, a servi de matériau, l'énergie éolienne a été maîtrisée pour produire de l'électricité, l'énergie solaire pour faire la cuisine et chauffer l'eau. La créativité des auteurs s'est surtout manifestée au niveau de l'économie de l'eau : séparation de trois qualités d'eau selon les usages, recyclage et épuration à l'aide de l'énergie solaire, captation d'eaux pluviales, condensation de l'humidité de l'air, choix de méthodes simples et judicieuses d'aspersion pour se laver, etc. (A. Ortega and collaborateurs, The Ecol Opération, Montréal, 1972).
39. Citons encore une fois, à titre d'exemple, le bel ouvrage de Hassan Fathy.
40. Voir l'excellente étude de Charles Correa, Self-Help City, the Internai Organization of Metropolitan Areas, présentée au Symposium des Nations Unies sur la Population, les Ressources et l'Environnement (Stockholm, 26 sept.-5 oct. 1973)
41. Soit à partir d'algues, soit à partir de fumier, comme cela se fait déjà en Inde ; dans ce dernier cas, il s'agit d'un progrès économique important, car la bouse de vache sert traditionnellement de combustible, le bois étant rare ; le nouveau procédé permet d'extraire, à l'échelle du village, à l'aide d'un appareil simple, le combustible et d'obtenir par surcroît de l'engrais.
42. Voir P. Gourou, « La Civilisation du végétal », Indonésie, n° 1 (5), 1948 ; et du même auteur : La Terre et l'homme en Extrême-Orient, Paris, 1972, en particulier les pages 26 à 29.
43. Voir à ce propos l'ouvrage d'E. Raynaud, Investissements humains. Illusions et réalités, Paris-La Haye, 1969.
44. Voir à ce propos l'article déjà cité de J. B. R. Whitney, « Ecology and Environmental Control… », l'étude de Chang Kuang-Tou, Chen-Chun-Ting, Li Kuei-Fen et Liu Ling-YAO, Construction of Dams for Water Conservancy, Peking, 1973 ; et pour une formulation générale des possibilités dans le domaine de l'application de méthodes intensives de main-d'oeuvre pour la conservation des ressources, voir notre contribution au Colloque de Founex, de 1971 : « Environmental Quality Management and Development Planning : Some Suggestions for Action », dans Development and Environment, The Hague-Paris, 1972.
45. Pour plus de détails, voir notre article : « A Welfare State for Poor Countries », Economie and Political Weekly, vol. VI, n° 3, 4, 5, January 1971.
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- Cited by