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Le conseil des anciens. Islamisation et arabisation dans le Bassin tchadien

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Christian Décobert*
Affiliation:
Institut Français d'Archéologie Orientale, Le Caire

Extract

Le fond de la cuvette tchadienne — les rives orientales du lac Tchad et le bassin hydrographique du Bas-Chari — semble avoir été une constante terre de refuge, de peuplements successifs par des groupes venus d'horizons très divers. De cette zone complexe, aux frontières de l'empire du Kanem, puis du Bornou et du Baguirmi, il ne sera pas tenté ici d'écrire l'histoire, ce qui reste d'ailleurs à faire ‘. Résumons simplement.

Summary

Summary

There exist, in the same socio-economic zone to the south-east of Lake Chad, two neighbouring groups, the Kotoko and the Babalia—both converted to Islam, but only the latter thereafter adopting the Arab language. How may one define—and compare—thèse two differing manners of acculturation ?

The transformations, due to Islamic influence, which are observed in a traditional account of the foundation of a Kotoko city, are used to suggest that Islamisation—resting within a stable mythical order—is seen by the new Muslim as a means of returning to and redefining the origin of the group and the city, and the power ofhis leader, “origin” and “power” being provided with new meaning.

In a society which does notfeel threatened. Islamisation will produce only a rebalancing ofcultural éléments, old and new. But in a Muslim community, where the socio-economic structures are so affected that the future ofthat community is in danger, A rabisation émerges as a requisite response.

Arabisation follows conversion to Islam, the latter serving as model of behaviourfor the former.

Type
Le Champ Religieux : Nouvelles Approches
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1982

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References

Notes

1. Une présentation claire, assortie d'une bibliographie essentielle, de l'état des travaux sur l'histoire de la région a été faite par H. Moniot.chap. vin, « Le Soudan central »,pp. 351-352, du t. I de \'Histoire Générale de l'Afrique noire, sous la direction de H. Deschamps, Paris, 1970.

2. Huard, P., « Introduction et diffusion du fer au Tchad », Journal of African History, VII, 3, 1966, pp. 399403 Google Scholar ; P. Beck et P. Huard, Tibesti, carrefour de la préhistoire saharienne. Paris, 1969, p. 231.

3. Boulnois, J., « La migration des Sao au Tchad », Bulletin de l'I.F.A.N., V, 1943, pp. 80120 Google Scholar.

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5. J.-P. Lebeuf, Carte, idem ; A. M. D. Lebeuf, Les principautés kotoko, essai sur le caractère sacré de l'autorité, Paris, C.N.R.S., 1969, carte des migrations p. 38.

6. D. Lange, en coll. avec S. Berthoud, « L'intérieur de l'Afrique occidentale d'après Giovanni Lorenzo Anania (xvie siècle) », Cahiers d'Histoire mondiale, XIV, 2, 1972, p. 351.

7. Palmer, H. R., History of the Twelve Years of the Reign of Mai Idriss Alaoma of Bornu (1571-1583) by his Iman Ahmed Ibn Fartoua, Lagos, 1926 Google Scholar.

8. Voir simplement l'impressionnante bibliographie de J.-P. Lebeuf, Carte, texte, pp. 147-151.

9. L'étude est en cours : je tenterai de définir, à partir de la comparaison de ces deux groupes, babalia et kotoko, ce que peut être une région, une aire de culture matérielle. Dans ce cadre j'aimerais également poser le problème des rapports, à la fois historiques et mythiques, entre ce qui est ethnique et ce qui est professionnel ou fonctionnel.

10. Par exemple: I. M. Lewis éd., Islam in Tropical Africa, Londres, 1966 ; N. Levtzion, Muslims and Chiefs in Wesl Africa : a Study of Islam in The Middle Voila Basin in the Pre-colonial Period, Londres, 1973.

11. Pour s'en convaincre, voir la carte linguistique (établie par J.-P. Caprile) de Ch. Bouquet et J. Cabot, Atlas pratique du Tchad, Paris-Fort-Lamy. 1972.

12. Greenberg, J. H., Studies in African Linguistic Classification, New Haven, 1955, p. 49 Google Scholar ; Lukas, J., « The Linguistic Situation in Lake Chad Area », Africa, IX, 1936, pp. 332349 CrossRefGoogle Scholar.

13. H. Carbou, La région du Tchad et du Ouaddaï, Paris, 1912, t. 2, pp. 337-338 ; J.-P. Caprile, Études et documents sara-bongo-baguirmiens, thèse de doctorat de troisième cycle, Paris, 1972, dactylo., 1.1, pp. 26-27 et 54-60 ; Ch. Bouquet et J.-P. Caprile, « Note sur le berakou, langue en voie d'extinction des Babalia du Bas-Chari », 15 p.. communication au XIe Congrès de la S.L.A.O., Yaoundé, 1974.

14. La Chronique de Kousseri devait être éditée par J. Boulet et J. C. Zeltner aux Éditions de l'O.R.S.T.O.M., Paris, mais l'entreprise ne semble pas aboutir.

15. A. M. D. Lebeuf. Principautés, pp. 65-66 et 73-76.

16. Pour une lumineuse mise au point sur la notion de déperdition, B. Cerquiglini, La parole médiévale, Paris, Éditions de Minuit, 1981, pp. 116-119.

17. A. M. D. Lebeuf, Principautés, pp. 65-66, par commodité les Notes n'ont pas été reprises ici.

18. Husn est autant l'habitat fortifié par un mur de défense que le mur lui-même.

19. La connotation « nomadisme » de l'ethnonyme Azràb est très forte dans le Bas-Chari.

20. Bilâd doit être pris ici dans son sens le plus vague de « zone, secteur, région ».

21. La phrase arabe est sans équivoque : ce sont bien les Arabes qui donnent le poisson aux Sao.

22. Tin. « boue, argile » : c'est ici l'argile mêlée de paille qui sert à la fois à faire le mortier et les briques séchées.

23. Le mot « prêtre » est peut-être abusif, l'expression vraie est « les gens des idoles ».

24. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 131.

25. Cartes IGN, Afrique centrale au 1:200 000, Fort-Lamy (ND-33-IV) et Makari (ND-33-III).

26. J.-P. Lebeuf et A. MASSON DETOURBET, La civilisation du Tchad, Paris, 1950, pp. 44-56 ; A. M. D. Lebeuf, Principautés, pp. 53-80.

27. A. M. D. Lebeuf, « Boum Massénia, capitale de l'ancien royaume du Baguirmi », Journal de la Société des Africanistes, XXXVII, 2, 1967, p. 233.

28. Selon une communication personnelle de J.-P. Magnant.

29. A. M. D. Lebeuf, Principautés, pp. 56-73 (cités de Logone-Birni, Kousseri, Logone-Gana, Douvoul, Houlouf, Gawi).

30. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 71.

31. J. C. Zeltner, « Histoire des Arabes sur les rives du lac Tchad », Annales de l'Université d'Abidjan, F, II, 2, 1970, pp. 109-237.

32. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 73, pp. 240-241.

33. J.-P. Lebeuf, Archéologie tchadienne, Paris, 1962, p. 82.

34. Je voudrais remercier ici Monsieur P. Vidal-Naquet qui m'a suggéré cette remarque.

35. Cl. Lévi-Strauss, La pensée sauvage, Paris. 1962, pp. 297-299.

36. Cl. Lévi-Strauss, Anthropologie structurale, Paris, 2e éd., 1974, p. 248. Je prends évidemment quelques risques en plaquant de façon peremptoire ce schéma d'analyse sur un objet qui n'est qu'approximativement apte à un tel traitement. Mais outre que le bricolage me semble opérationnel, en tout cas clair et parlant, il est toujours possible de dire aux anthropologues structuralistes qu'ils furent parfois des bricoleurs de génie en allant chercher chez les linguistes, par exemple, quelques concepts opératoires.

37. Celui que A. M. D. Lebeuf (Principautés)appelle devin est, attaché au culte du varan ou du serpent, le garant de l'ordonnance terrestre et/ou céleste, celui qui a la connaissance du calendrier, de la place des étoiles… Ce n'est pas le kàhin qui, pour combler un déficit de connaissance ressenti communément (par le groupe) comme une paralysie nuisible, un frein à l'action, connaît seul des techniques (par exemple l'oniromancie, très répandue chez les Arabes) qui apporteront des réponses permettant ou interdisant le déblocage et la réalisation de ces actes au sein du groupe.

38. A. M. D. Lebeuf, Principautés, pp. 90-91.

39. J.-P. Lebeuf et M. Rodinson, « Généalogies royales des villes kotoko (Goulfeil, Kousseri, Makari) », Éludes camerounaises, I, 23-24, 1948, pp. 40.44.

40. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 91 et dessin p. 94.

41. Cela est vrai pour la fondation du Kordofan, du Darfour, du Wadday. Cf. P. M. Holt, « Holy Families and Islam in the Sudan », dans Studies in the History ofNear East, Londres, 1973, p. 128 ; O'Fahey, « Islam, State and Society in Dâr Fur », dans N. Levtzion éd., Conversion to Islam, New- York-Londres, 1979, p. 192.

42. J. Boulnois, « Migration », p. 105.

43. T. Fahd, La divination arabe, Leyde, 1966, pp. 521-527.

44. Goody, J., « The Impact of Islamic Writing on the Oral Cultures of West Africa », Cahiers d'Études africaines, XI, 1971, pp. 458459 Google Scholar.

45. J. Mouchet, « Note sur la conversion à l'islamisme, en 1715, de la tribu Wandala », Études camerounaises, 1946, pp. 105-107.

46. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 72.

47. Narrative ofTravels andDiscoveries… par Denham, Cijvpperton and Oudney dans Missions to the Niger, E. W. Boviu. éd., Cambridge, 1966, t. 3, p. 548.

48. H. Carbou, La région, t. 2, p. 338.

49. Ch. Bouquet et J.-P. Caprile, op. cit.

50. Ch; Bouquet, « Aperçu démographique et socio-économique du groupe babalia (Tchad) ». Cahiers dÉtudes africaines, 63-64, 1976, pp. 615-626.

51. Pour une thèse de troisième cycle de Phonologie comparée de trois parlers arabes du Tchad, à paraître.

52. Il leur était apparemment possible d'aller ainsi, une partie de l'année au moins, de Dal à Massakory, sur quelque 80 kilomètres.

53. Rapport scientifique de la Mission Foureau, 1.1, p. 288.

54. J. Maley, « Études palynologiques dans le bassin du Tchad et paléo-climatologie de l'Afrique nord-tropicale de 30 000 ans à l'époque actuelle », Travaux et Documents de l'O.R.S.T.O.M., Paris, 1981, p. 512. Le niveau du lac était de 283,5 m peu avant 1900 et de 281 m en 1907.

55. Les renseignements d'ordre botanique sont de Ch. Bouquet.

56. Ch. Bouquet, op. cit.

57. Ch. Décobert, « Note sur les Babalia de N'Djamena », Annales de l'Université du Tchad, III. 1975, pp. 225-245.

58. Ch. Bouquet, op. cit.

59. Idem.

60. Ch. Décobert, op. cit.

61. V. Lanternari, « Désintégration culturelle et processus d'acculturation », Cahiers internationaux de Sociologie, 1966, p. 123.

62. Confondre : définir l'un en disant que c'est l'autre.

63. A. M. D. Lebeuf, Principautés, p. 71.

64. Invariablement les informateurs terminaient leurs récits en précisant : « mais un texte arabe existe chez l'imam Untel ». A. M. D. Lebeuf pense que ces textes existent vraiment.

65. « Car ce n'est pas en fonction de leur condition véritable, mais de l'image qu'ils s'en font et qui n'en livre jamais le reflet fidèle, que les hommes règlent leur conduite » : G. Duby, « Histoire sociale et idéologies des sociétés », dans Faire de l'Histoire, Paris. 1976. sous la direction de J. Legoff et P. Nora, t. I. Nouveaux problèmes, p. 148.