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L'Art Dans la Production le débat sur Le productivisme en Russie soviétique pendant les années vingt
Published online by Cambridge University Press: 26 July 2017
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Comment l'imaginaire socialiste se situe-t-il dans le rapport entre l'art et la révolution après octobre 1917 ? D'abord il semble se glisser dans des espaces minuscules, entre les interstices les plus cachés, que le caractère scientifique du matérialisme historique avait laissés libres, à la recherche du droit à la création d'une utopie qui se dégagerait de la sphère scientifique. Ensuite il explose en une intense activité onirique, grâce à laquelle il essaie de concevoir une nouvelle société. Négligeant la leçon scientifique du matérialisme historique (qui concerne l'analyse de la société capitaliste) il privilégie la leçon utopique (qui envisage l'édification de la société socialiste), car celle-ci accorde plus d'espace à son activité fantastique.
Summary
The study presented here is based on a considerable body of primary sources— most of which have never been published before outside Russia—allowing us to reconstruct the ideological debate that gave origin to that avant-garde which recognized itself in the slogan “art into production ”. A close examination of these sources shows that the theoretical path which led to productivism and constructivism was not easy but, on the contrary, strewn with dissension and infighting. From the interaction between these different factions was born the idea of an art aiming at the restatement of new forms of life and new social behaviour, an art which was in close connection with production. This connection was based on the identity between the notion of art and that of work postulated by the productivists. Art ceases to be an aesthetic category and becomes simply the process of production of a merchandise. It is the refusal of art for art's sake, of pure art, of an art based on such metaphysical notion as inspiration, talent and creativity. It is the birth of an art of everyday life (byt) which stands at the origins of modem industrial design.
- Type
- L'Art Productiviste en Russie Soviétique
- Information
- Copyright
- Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1997
References
* Je remercie Jeannine Fournier pour son aide dans la traduction de cet article.
1. Nous ne prenons pas ici en considération tous les mouvements qui animent le violent débat littéraire pendant les années vingt (à ce propos voir Magarotto, L., La letteratura irreale, Venise, Marsilio, 1980)Google Scholar, nous limitant à illustrer le parcours du mouvement productiviste.
2. Le Proletkul't (1917-1932) est une organisation artistique et littéraire, particulièrement active entre 1917 et 1920, qui se propose de créer une culture prolétarienne et un art d'origine ouvrière. Le théoricien principal qui inspira le mouvement fut A. A. Bogdanov.
3. La conception productiviste naît au sein du mouvement cubo-futuriste et, initialement, prend forme dans la revue Iskusstvo kommuny (1918-1919). Elle est ensuite développée par le groupe littéraire et artistique du Front de gauche dans l'art (LEF) qui se forme à Moscou en 1922 et publie la revue homonyme (1923-1924). En adoptant la ligne artistique du LEF, le mouvement productiviste emprunte son élaboration théorique au Proletkul't, et en particulier à son théoricien principal A. Bogdanov. Ce qui distingue les deux mouvements, c'est le sujet de leurs programmes respectifs. Le Proletkul't, en tant que projet révolutionnaire, s'adresse uniquement au prolétariat, tandis que le productivisme demande à la classe des intellectuels de réaliser son projet culturel.
4. L'avant-garde sera entendue comme un ensemble hétérogène de différents courants nés en Russie à partir de 1907. Parmi eux le cubisme, le néoprimitivisme, le fauvisme, le rayonnisme. Cf. Marcadé, J.-C., « L'avant-garde dans les arts plastiques avant la révolution », Histoire de In littérature russe. Le XXe siècle. L'âge d'argent, Paris, Fayard, 1987, pp. 440–453 Google Scholar.
5. « Les rues sont nos pinceaux / Les places sont nos palettes / Les mille pages du livre du temps / n'ont pas célébré / les jours de la révolution. » Cf. Majakovskij, V. V., « Prikaz po armii iskusstva » (Ordre à l'armée de l'art), Polnoe sobranie sočinenij(OEuvres complètes), Moscou, 1956, t. 2, p. 15 Google Scholar.
6. L'organisation scientifique du travail (Not, Naucnaja organizacija truda) trouve son origine dans le taylorisme, fondé sur les principes posés par F. W. Taylor (1856-1915) en 1903. Le but est d'obtenir la productivité maximale à partir d'un bureau de recherches qui précisera quand et comment le travail doit être exécuté, qui classifiera les opérations élémentaires nécessaires à l'exécution de ce travail de façon à prévoir, grâce aux données accumulées, les délais d'exécution correspondants, et enfin qui préparera les instructions concernant les modalités d'exécution et l'outillage nécessaire. Les pivots du système sont à rechercher dans l'analyse des mouvements et le chronométrage. C'est sur la base du taylorisme que se développera le programme de rationalisation-standardisation productive de la Not. L'une des références bibliographiques les plus complètes sur la Not est proposée par Naučnaja orga- nizacija truda dvadcatyh godov. Sbornik dokumentov i materialov (L'Organisation scientifique du travail dans les années vingt. Recueil de documents et de matériaux), Kazan', 1965.
7. C'est ce que W. Benjamin définit comme la perte de l'« aura » : « Au temps des techniques de reproduction, ce qui est atteint dans l'œuvre d'art, c'est son aura. […] En multipliant les exemplaires, elles [les techniques de reproduction] substituent un phénomène de masse à un événement qui ne s'est produit qu'une fois » (cf. Benjamin, W., « L'oeuvre d'art à l'ère de sa reproductibilité technique », Oeuvres, Paris, Denoël, 1971, p. 176 Google Scholar).
8. Brik, O., « V porjadke dnja » (A l'ordre du jour), Iskusstvo v proizvodstve. Sbornik stat“ej (L'art dans la production. Recueil d'articles), Moscou, 1921, pp. 7–8 Google Scholar.
9. Selon A. Bogdanov, le théoricien du mouvement pour la culture prolétarienne (Proletkul't), c'est seulement grâce à la mécanisation de la production que la division du travail, qui comportait une division des travailleurs en organisateurs et exécutants, peut disparaître. Une fois ce conflit social anéanti, la collaboration fraternelle (tovariščeskoe sotrudničestvo) des ouvriers s'avère réalisable. La machine devient la collaboratrice de l'homme et la classe ouvrière découvre l'unité du collectif. Le travail devient un élément de développement et de croissance de cette classe : il se révèle créatif.
10. Boris Ignat'evič Arvatov (1896-1940) est un commentateur littéraire, critique d'art, activiste du Proletkul't et théoricien du LEF. Membre du parti communiste, il a un rôle théorique et pratique dans le Proletkul't de Moscou à partir de 1918. En 1921 il entre à l'Institut de culture artistique (Institut hudožestvennoj kul'tury/Inhuk) et à partir de 1923 il fait partie du collectif rédactionnel de la revue LEF. En 1923 il est interné dans une clinique psychiatrique, ou il reste jusqu'à sa mort, tout en poursuivant sa collaboration avec les revues LEF et Novyj LEF (Le Nouveau Lef)- Parmi ses ouvrages Iskusstvo i klassy (Art et classes), Moscou, 1923 ; Iskusstvo i proizvodstvo (Art et production), Moscou, 1926 ; Sociologičeskaja poetika (Poétique sociologique), Moscou, 1928, Ob agit i proz-iskusste (Art productiviste et d'agitation), Moscou, 1930. C'est à l'intérieur de la pensée arvatovienne que l'on peut retrouver tous les éléments constitutifs de l'idéologie productiviste. Et c'est pour cette raison que nous examinerons dans le détail les documents d'Arvatov où il développe sa théorie productiviste dans toute sa complexité.
11. Arvatov, B., « Na putjah k proletarskomu iskusstvu » (Sur les voies de l'art prolétarien), Pečat’ i revoljucija, 1922, 1, p. 72 Google Scholar.
12. Parmi eux on peut citer O. Brik, N. Čužak, A. Gan, B. Kušner, V. Percov et N. Tarabukin.
13. En 1919 la rédaction de la revue Iskusstvo kommuny (L'art de la commune) avait ouvert le débat sur l'art dans la production. Cf. « Ot redakcii » (De la part de la rédaction), Iskusstvo kommuny, 1919, 5, p. 1 ; I. Puni, « Tvorčestvo zizni » (La création de la vie), ibid. , 1919, 5, p. 1 ; Bankovskij, , « Tupik» (Le cul-de-sac), ibid., 1919, 7, p. 2 Google Scholar ; F. Birbaum, , « K voprosu Iskusstvo i proizvodstvo » (L'art et la production), ibid., 1919, 8, p. 2 Google Scholar ; Baulin, P., « K voprosu ob iskusstve v promyšlennosti » (L'art dans l'industrie), ibid., 1919, 13, p. 2 Google Scholar. A ce propos, cf. Zalambani, M., « Le origini del dibattito su arte e produzione nella Russia bolscevica degli auni 20», Classe, 1988, 2/3, pp. 115–131 Google Scholar. Pour une bibliographie concernant le productivisme, cf. Lodder, C., Russian Constructivism, New Haven-Londres, 1983 Google Scholar.
14. Cf. Arvatov, B., « Iskusstvo i proizvodstvo » (Art et production), Gorn (La forge), 1922, 2 (7), pp. 103–108 Google Scholar et «Iskusstvo i proizvodstvo» (Art et production), ibid. , 8, pp. 119-131. Ces deux articles contiennent les éléments constitutifs fondamentaux du texte Iskusstvo v proizvostve (L'art dans la production) publié en 1926.
15. B. Arvatov, « Iskusstvo i proizvodstvo » (Art et production), Gorn, 1922, 8, pp. 128- 131 et Arvatov, B., Iskusstvo i proizvodstvo(Art et production), Moscou, 1926, pp. 74–130 Google Scholar.
16. B. Arvatov, « Art et production », Gorn, art. cité, p. 125.
17. « Tezisy po iskusstvu, prinjatye na zasedanii presidiuma CK vserossijskogo Proletkul'ta 25 maja 1923 goda » (Thèses sur Fart adoptées à la séance du Praesidium du Comité central du Proletkult panrusse le 25 mai 1923), Gorn, 1923, 8, p. 4.
18. Sur la littérature factuelle cf. G. Conio, Le constructivisme russe, op. cit. , t. II, pp. 151- 203. On trouvera la même opposition dans un autre domaine artistique, le cinéma. Ici la polémique qui se développe concerne le cinéma du « fait » et la fiction (cf. Albera, F., Eisenstein et le constructivisme russe, Lausanne, 1990, en particulier p. 158 Google Scholar). La généralisation de ce débat peut être le fruit de la contiguïté des disciplines, artistiques ou non, qui va caractériser les années vingt. Il s'agit d'un processus qui commence par les études des formalistes ; ces derniers tendent bien vite à une rationalisation fondée sur les disciplines « fortes » (comme les mathématiques) auxquelles ils empruntent leur langage scientifique. Le formalisme passe d'une approche littéraire à une approche scientifique : « Le passage accompli par la théorie du formalisme de l'avant-garde artistique à l'avant-garde scientifique se trouve ne pas être occasionnel ni inexplicable : à ce niveau, les deux démarches sont ensemble et se conjoignent » (cf. Théorie de la littérature, textes des formalistes russes réunis, présentés et traduits par T. Todorov, Paris, Le Seuil, 1965, p. 22). C'est de la fusion de ces deux niveaux que naît un échange interdisciplinaire entre les opérateurs des domaines littéraires, artistiques et scienti- tiques, fusion qui comporte pour chaque discipline l'utilisation d'un langage qui lui était inconnu jusqu'alors : ces différentes disciplines commencent à s'interpénétrer. Voilà comment ic formalisme se sert de la méthode scientifique-mathématique (R. Jakobson lui-même, en 1961, prépare l'édition d'un essai intitulé Structure of Language and its Mathematical Aspects, Proceedings of Symposia in Applied Mathematics, Xii), voilà aussi comment l'art se fond avec l'ingénierie, et la question constructiviste devient l'objet de débats dans tous les domaines artistiques.
19. Le courant de critique littéraire formaliste s'impose en Russie entre 1915 et 1930. Il naît avec le Cercle linguistique de Moscou (pendant l'hiver 1914-1915) comme mouvement promoteur d'études linguistiques et poétiques ; en 1917 se forme la Société pour l'étude du langage poétique (Opojaz), qui agit de concert avec le Cercle moscovite. En 1926, à l'image de ce dernier, naît le Cercle linguistique de Prague. Dès sa naissance, le mouvement formaliste privilégie dans ses recherches linguistiques l'œuvre littéraire, pour en examiner la matière et la construction et pour tenter d'expliquer à l'aide de termes techniques comment cette dernière est fabriquée (cf. ŠKlovskij, V., « Iskusstvo kak priëm » (L'art comme procédé) [1917], Otcorii prozy(La théorie concernant la prose), Moscou, 1929, pp. 7–23 Google Scholar.
20. A propos de la contiguïté des disciplines, voir la note 18.
21. Cf. B. Arvatov, Sociologičeskaja poetika (Poétique sociologique), Moscou, 1928.
22. lbid. , p. 31.
23. C'est dans la sphère de l'organisation sociale que vont intervenir les procédés poétiques qui, bien distincts de ceux du langage pratique, organisent dans la fantaisie ce qu'il y a de désorganisé dans la vie de tous les jours. Mais quand la réalité sera « organisée socialement », 1 “ art pénétrera dans la vie et le langage pratique-utilitaire aussi acquerra une « nature expressive » jusqu'alors apanage de l'art. Le langage pratique aussi sera donc à même d'organiser les matériaux de la vie. (lbid. , pp. 60-64).
24. lbid. , p. 32.
25. lbid. , pp. 37-38.
26. Arvatov, B., « Prolétariat i levoe iskusstvo » (Le prolétariat et l'art de gauche), Vestnik iskusstv (Le messager des arts), 1922, 1, p. 10 Google Scholar.
27. B. Arvatov, Iskusstvo i proizvodstvo (Art et production), op. cit. , p. 91.
28. Cf. « Institut hudožestvennoj kul'tury » (L'Institut de culture artistique), Russkoe iskusstvo (L'art russe), 1923, 2-3, p. 86.
29. B. Arvatov, Iskusstvo i proizvodstvo (Art et production), op. cit. , p. 91.
30. B. Arvatov, « Na putjah k proletarskomu iskusstvu » (Sur les voies de l'art prolétaire), op. cit. , p. 73.
31. L'ingénieur est un personnage nouveau, né au 16e siècle en Hollande, et qui peu à peu a gagné l'Europe, cf. Bol'saja Sovetskaja Enciklopedija (Grande Encyclopédie soviétique), Moscou, 1972, vol. 10, p. 272 Google Scholar ; il naît de l'exigence de résoudre les problèmes de construction, puisque l'empirisme des techniques artisanales n'était plus à même d'y faire face. Au 13e siècle déjà le problème s'était posé et avait été résolu grâce à la collaboration entre des constructeurs et des savants mathématiciens. C'est ainsi que commence un processus qui prendra fin vers le milieu du 17e siècle quand la « méthode galiléenne transforme la connaissance exacte de la nature en un pur travail intellectuel, l'affranchissant de toute contrainte liée à l'unité de l'esprit et de la main propre à l'artisan », cf. Sohn-Rethel, A., Lavoro intellettuale e lavoro manuale, Milan, 1977, p. 113 Google Scholar.
32. « Le moyen de travail converti en automate se dresse devant l'ouvrier, pendant le procès de travail même, sous forme de capital, de travail mort qui domine et pompe sa force vivante », Marx, cl. K., Le capital, Paris, Éditions sociales, 1973, livre I, t. II, p. 105 Google Scholar.
33. Lénine, lui-même, qui avait défini le taylorisme en 1913 comme un « système scientifique pour pressurer l'ouvrier » (cf. Lenin, V. I., « Naučnaja’ sistema vyžimanija pota », Pss, Moscou, 1961, 23, pp. 18–19 Google Scholar ; trad. frse « Un système” scientifique “ pour pressurer l'ouvrier », OEuvres, Moscou, 1969, 8, pp. 618-619) dès l'année suivante considérait le taylorisme comme un instrument qui permettait l'amélioration des conditions de travail (cf. Lenin, V. I., Pss, 24, p. 371 ; trad. frse, Oeuvres, Moscou, 1959, 20, p. 158 Google Scholar).
34. Arvatov, B., « Iskusstvo i proizvodstvo » (Art et production), Gorn, 1922, 2 (7), p. 104 Google Scholar.
35. En 1918 O. Brik avait déjà préconisé une révolution de la culture matérielle pour arriver à une révolution de la vie quotidienne. Et la première de ces révolutions devait se réaliser dans le cadre des espaces qui lui étaient destinés, comme les « Instituts de culture matérielle », où les artistes devaient « se préparer à créer de nouveaux objets d'usage quotidien pour le prolétariat », O. Brik, « Drenaž iskusstva » (Le drainage de l'art), Iskusstvo Kommuny (L'art de la commune), 1918, n. 1, p. 1. D'autre part, pendant la période prérévolutionnaire, l'intérêt pour la culture matérielle en Russie était déjà très développé. S'il naît sous le tsar Pierre le Grand, c'est au 19e siècle qu'il connaît son plein essor quand, en 1859, on assiste à la création de la Commission d'Archéologie, un organisme d'État qui détiendra la gestion de cette science. C'est sur la base de cet organisme qu'en 1919 Lénine signe, au nom du gouvernement soviétique, un décret qui donne naissance à l'Académie d'histoire de la culture matérielle, cf. Bolsaja, Sovetskaja Enciklopedija (Grande Encyclopédie soviétique), Moscou, 1970, vol. 2, p. 281 Google Scholar et pp. 286-289. Cette sanction officielle reconnaît une discipline qui prend place au tout premier plan des recherches historiques des pays de l'Est. L'intérêt que le matérialisme historique, porte aux conditions matérielles, vues comme des infrastructures, fournit le substrat théorique justifiant le développement des recherches en ce sens.
36. L'emploi de matériaux non nobles et l'étude de la forme, vue comme but du processus artistique, sont un héritage cubiste.
37. B. Arvatov, Iskusstvo i proizvodstvo (Art et production), op. cit. , p.l 17.
38. Pour une bibliographie au sujet de la Not en Russie soviétique, cf. Bertolissi, S., « L'” organizzazione scientifica del lavoro “ nella Russia sovietica degli anni venti », Studi di storia sovietica, Rome, 1978, pp.3–86 Google Scholar.
39. Le CIT (Central'nyj Institut Truda, Institut Central du Travail) fut fondé en 1921 comme organisme central de l'État dans le but d'étudier, d'appliquer et de faire de la propagande pour les principes de la NOT.
40. Le Sovnot (Sovet po naučnoj organizacii truda, Soviet pour l'organisation scientifique du travail) fut fondé en 1923, au sein de la RKI (Rabočaja i Krest'janskaja Inspekcija, Inspection Ouvrière et Paysanne) dans le but de coordonner l'activité des instituts qui s'occupaient de la Not.
41. Arvatov, B., « Iskusstvo i organizacija byta » (L'art et l'organisation de la vie quotidienne), Pecat’ i revoljucija (Presse et révolution), 1926, 4, p. 85 Google Scholar.
42. lbid. , p. 87.
43. lbid.
44. lbid.
45. lbid. , p. 89.
46. lbid.
47. Vsevolod Emil'evič Meyerhold — 1874-1940. Metteur en scène et acteur. Après la révolution de 1917 il proclame l'« Octobre théâtral », pour la création d'un théâtre politique d'agitation. Il est le créateur de la biomécanique, étude des mouvements de l'acteur fondés sur le taylorisme.
48. Ippolit Sokolov fut le fondateur de la gymnastique du travail, qui reposait sur l'étude des rythmes des gestes de travail, pour les appliquer à la gymnastique et au théâtre.
49. La définition que Meyerhold donne de la biomécanique est la suivante : « La biomécanique tend, de façon expérimentale, à établir les lois du mouvement de l'acteur sur scène, et elle étudie des exercices pour entraîner l'acteur fondés sur les règles du comportement humain », Mejerhol'D, V., Stat“i, pis'ma, reči, besedy (Articles, lettres, discours, conversations), Moscou, 1968, II, p. 582 Google Scholar.
50. Sokolov, I., « Industrial'naja žestikuljacija » (La gesticulation industrielle), Ermitaž (Ermitage), 1922, 10, p. 6 Google Scholar.
51. Sokolov, I., « Revoljucija byta» (La révolution de la vie quotidienne), Ermitaž (Ermitage), 1922, 13, p. 4 Google Scholar.
52. Arvatov, B., « Kakoj teatr nužen rabočemu klassu ? » (Quel théâtre faut-il à la classe ouvrière ?), Corn, 1923, 8, p. 251 Google Scholar.
53. Arvatov, B., « Teatr i plakat » (Le théâtre et l'affiche), Zrelisca (Spectacles), 1923, 60, p. 7 Google Scholar. En 1922 Arvatov avait écrit : « Le théâtre prolétarien ne peut pas ne pas devenir l'instrument d'une reconstruction du byt : c'est là la logique inflexible du mouvement ouvrier », Arvatov, B, « Otražat', podražat’ ili stroit’ ? » (Refléter, imiter, ou construire ?), Gorn, 1922, 1 (6), p. 109 Google Scholar.
54. B. Arvatov, Ob agit i proz-iskusstve (Art productiviste et d'agitation), Moscou, 1930, p. 115.
55. Mejerhol'D, V., « Aktër buduščego » (L'acteur du futur), Ermitaž. (Ermitage), 1922, 6, p. 10 Google Scholar.
56. Ibid.
57. Ibid.
58. Mejerhol'D, V., « Zadači hudozestvennogo prosveščenija » (Les tâches de l'instruction artistique), Vestnik teatra(Le messager du théâtre), 1921, 80-81, p. 7 Google Scholar.
59. Branche de la psychologie, fondée par V. M. Behterev, elle s'est développée pendant les années 1900-1930. Cette science est fondée sur la prémisse qu'aucun processus mental n'existe sans une manifestation objective. En conséquence toute action peut être considérée comme une réponse à une stimulation.
60. « La gymnastique du travail est l'éducation gymnico-théâtrale du geste de travail. Pour la rationalisation des mouvements de travail selon les méthodes modernes de l'organisation scientifique du travail, une culture du geste du travail est indispensable », Sokolov, I., « Industrial'no- ritmičeskaja gimnastika » (La gymnastique rythmique industrielle), Organizacija truda, 1921, 2, p. 144 Google Scholar.
61. I. Sokolov, « Industrial'naja žestikuljacija » (La gesticulation industrielle), art. cité, p. 6.
62. Cf. I. Sokolov, « Industrial'no-ritmičeskaja gimnastika » (La gymnastique rythmique industrielle), art. cité, p. 114.
63. B. Arvatov, « Teatr kak proizvodstvo » (Le théâtre en tant que production), O teatre (Sur le théâtre), Tver', 1922, p. 120.
64. V. Mejerhol'D, « Aktër buduščego » (L'acteur du futur), art. cité, p. 10.
65. S. I. Oèrgov, Slovar’ russkogo jazyka (Dictionnaire de la langue russe), Moscou, 1968, p. 432.
66. Perrot, P., Les dessus et les dessous de la bourgeoisie, Bruxelles, 1984, p. 9 Google Scholar.
67. Ibid. , p. 17.
68. Varst [ Stepanova, V. ], « Kostjum segodnjašnego dnja-prozodežda » (Le costume d'aujourd'hui - le vêtement de travail), LEF, 1923, 2, p. 65 Google Scholar.
69. Ekster, A., « Prostota i praktičnost’ v odežde » (Simplicité et aspect pratique dans les vêtements), Krasnaja Niva (Le champ rouge), 1923, 21, p. 31 Google Scholar.
70. Sur le vêtement-signe, cf. P. Perrot, op. cit. , pp. 15-19.
71. De la centaine de dessins pour tissus de Stepanova, vingt seulement furent produits, cf. A. Lavrent'EV, Varavara Stepanova. Una vita costruttivista, Milan, p. 83.
72. Ekster, A., « V konstruktivnoj odežde » (Le vêtement constructiviste), Atel'e (Atelier), 1923, 1, pp. 4–5 Google Scholar.
73. Varst, op. cit. , p. 68.
74. Ce phénomène ne se vérifie pas seulement en Russie. La reconnaissance du « statut utilitaire » (cf. P. Perrot, op. cit. , p. 15) de l'habillement sportif est à dater en France au tout début du 20e siècle (cf. P. Perrot, Le travail des apparences, Paris, 1984, pp. 193-194), quand on reconnaît à la femme aussi le droit de pratiquer un sport.
75. A. Ekster, op. cit. , p. 4. L'opposition entre tenue individuelle et prozodežda perpétue le dualisme entre la haute couture et la confection qui s'affirme déjà en France pendant la seconde moitié du 19e siècle. Le sur-mesure et la confection en série se présentent comme des phénomènes opposés mais complémentaires, car ce n'est qu'à partir du rapport modèle dominant/ modèle subalterne que le vêtement sur mesure atteste sa valeur distinctive. Cf. P. Perrot, Les dessus…, op. cit. , pp. 329-330. C'est ainsi que, même en Russie, porter un modèle fait sur mesure signifiera vouloir prendre ses distances par rapport aux changements sociaux en cours, à une société de l'égalité qui tend à supprimer la valeur distinctive de l'habillement.
76. R. König voit dans ce phénomène une manifestation de l'éclectisme et du syncrétisme, qu'il considère comme des aspects essentiels du processus d'accumulation de la mode, surtout quand l'incapacité à élaborer à partir de la situation contingente empêche toute impulsion innovatrice, cf. R. König, Umanità in passerella, Milan, 1988, p. 65. En réalité, tout nous porte à penser que le recours aux éléments folkloriques, dans notre cas, est davantage le fruit d'une attitude mentale lente à mourir qu'un manque d'idées nouvelles.
77. Cf. B[Rik], O., [V proizvodstvo !] (A la production !), LEF, 1923, 1, pp. 105–108 Google Scholar ; trad. frse dans G. Conio, Le constructivisme russe, op. cit. , t. II, pp. 43-44.
78. La signification du terme « constructivisme » est extrêmement ambiguë. Pour Gabo et Pevsner le constructivisme est surtout une recherche esthétique formelle (cf. N. Gabo, A. Pevsner, Realističeskij manifest (Le manifeste réaliste), Moscou, 1920; trad. frse «Le manifeste réaliste », dans G. Conio, Le constructivisme russe, op. cit. , t. 1, pp. 315-318), tandis que pour le premier groupe de constructivistes (cf. « Pervaja programma rabočej gruppy konstruktivistov », Ermitaz, 1922, 13, p. 1), la notion de constructivisme coïncide pratiquement avec celle de productivisme. Selon nous, le constructivisme désigne plutôt un mouvement artistique, tandis que le productivisme est un courant qui élabore une théorie sociale (non esthétique) de production de l'art. Le productivisme s'insère donc dans l'histoire des idées, alors que le constructivisme appartient surtout à l'histoire de l'art.
80. « L'art productif a ses racines dans la vie de travail et non sur le Parnasse. Le vieux Pégase est mort, remplacé par la voiture Ford. » Cf. N. Tarabukin, op. cit. , p. 41 ; trad. frse p. 476
81. A la fin de la guerre civile la classe ouvrière est réduite à un million d'éléments, un tiers de ce qu'elle était en 1917. Cf. Fitzpatrick, S., « The Bolsheviks’ Dilemma. Class, Culture and Politics in the Early Soviet Years », Culture et Révolution (sous la direction de M. Ferro et S. Fitzpatrick), Paris, 1989, p. 122 Google Scholar.
82. Legoff, J., «Les mentalités. Une histoire ambiguë », Faire de l'histoire, Paris, 1986, vol. 3, p. 114 Google Scholar.
83. Roginskaja, F., « Tekstil i hudožestvennaja kul'tura » (Le textile et la culture artistique), Sovetskoe iskusstvo (L'art soviétique), 1926, 4, p. 14 Google Scholar.
84. Cf. StrižEnova, T., « TekstiF » (Le textile), Sovetskoe dekorativnoe iskusstvo 1917-1945 (L'art décoratif soviétique), Moscou, 1984, p. 138 Google Scholar.
85. Les conditions de l'économie soviétique des années vingt, et le manque d'investissements pour réaliser sur une vaste échelle l'organisation scientifique du travail seront les causes principales de son échec. Nous savons en effet qu'à la fin des années vingt, les travailleurs qui avaient suivi les cours de l'Institut Central du Travail (le CIT est fondé en 1921, son rôle consiste à étudier, appliquer et répandre les principes de la Not) étaient à peu près 500 000, tandis que les entreprises et les établissements qui utilisaient les méthodes CIT pour l'organisation scientifique du travail n'étaient certainement pas plus de 400, cf. CIT i ego metody NOT (Le CIT et les méthodes de la Not), Moscou, 1970, p. 32.
86. Braudel, F., Civilisation matérielle, économie et capitalisme XVe-XVIIIe siècle, Paris, Armand Colin, 1979, vol. 1, p. 290 Google Scholar.
87. Prise dans son sens anthropologique comme ensemble des valeurs, conceptions, croyances et modèles de comportement qui caractérisent le mode de vie d'un groupe social.
88. William Morris (1834-1896), poète et artiste anglais qui, à partir de l'idée de J. Ruskin d'un art expression de la joie dans le travail (cf. J. Ruskin, The Stones of Venice, 1852, en particulier au chapitre « The Nature of Gothic »), souhaitait voir naître une société socialiste où « men will assuredly be happy in their work, and that happiness will assuredly bring forth décorative, noble, popular art », cf. Morris, W., « The Lesser Arts. Delivered Before the Trades' Guild of Learning, December 4, 1877 », Collected Works, Londres, 1914, vol. XXII, pp. 26–27 Google Scholar.
89. Bauhaus (1919-1933), école d'architecture et d'arts appliqués fondée à Weimar par l'architecte W. Gropius, précurseur de l'architecture moderne fonctionnelle. Cette école voulait réaliser une oeuvre unitaire à travers la fusion entre l'aspect monumental et décoratif. Des artistes de tout premier ordre sont appelés à y enseigner, entre autres : Klee, Feininger, Kandinskij, Schlemmer, Moholy-Nagy. En 1933 le nazisme en décréta la suppression.
90. Cf. Gropius, W., « Principi delia produzione del Bauhaus », dans Maldonado, T. (sous la direction de), Tecnica e cultura, Milan, 1979, pp. 269–272 Google Scholar et «Programma del Bauhaus statale di Weimar », dans H. M. Wringler, // Bauhaus : Weimar Dessau Berlino 1919-1933, Milan, 1972, pp. 37-38.
91. Il existe bien d'autres différences entre ces deux mouvements mais surtout en ce qui concerne la deuxième phase du Bauhaus (1925-1930), on perçoit de nombreuses analogies avec le Vhutemas et l'expérience constructiviste. Ces deux mouvements sont liés par une évidente identité d'idéaux, fruits du vaste débat concernant une union possible entre l'art et la technique, débat que l'on retrouve dans l'Europe entière pendant ces années-là.
92. Cf. Maldonado, T., Disegno industriale : un riesame, Milan, 1976 Google Scholar.
93. Si pendant les années trente, aux États-Unis surtout, c'est la forme esthétique (styling) qui joue un rôle prépondérant, de nos jours le statut utilitariste et le statut esthétique ont tellement fusionné qu'il est difficile de soutenir qu'une forme esthétique ne recouvre aucun caractère fonctionnel, ne serait-ce qu'à un niveau inconscient.
94. Cf. Baudrillard, J., Pour une critique de l'économie politique du signe, Paris, Gallimard, 1972, pp. 7–58 Google Scholar. Mais pour Baudrillard le design moderne est surtout le triomphe de l'« économie politique du signe, dont il a été, avec le Bauhaus, la première théorisation rationnelle », ibid. , p.248.
95. « Le fait capital de nos sociétés […] c'est précisément l'extraordinaire généralisation de la mode, l'extension de la forme mode à des sphères jadis extérieures à son procès, l'avènement d'une société restructurée de fond en comble par la séduction et l'éphémère, par la logique même de la mode », Lipovetsky, G. L'empire de l'éphémère. La mode et son destin dans les sociétés modernes, Paris, 1991, p. 14 Google Scholar. A noter que pour Lipovetsky ce rôle de la mode assume une connotation positive, il devient « l'agent par excellence de la spirale individualiste et de la consolidation des sociétés libérales », ibid. , p. 16.
96. Un grand nombre d'objets et de croquis de l'avant-garde des années vingt sont réutilisés par le design moderne.
97. Cf. J. Baudrillard, Pour une critique de Véconomie politique du signe, op. cit. , pp. 236- 237.
97. Cf. J. Baudrillard, Pour une critique de Véconomie politique du signe, op. cit. , pp. 236- 237.
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