Dans une société où le système scolaire joue un rôle déterminant dans la reproduction des positions et de la structure de classes, l'histoire de l'alphabétisation et de l'instruction semble d'emblée et comme « naturellement » devoir être confondue avec l'histoire de la scolarisation. Autrement dit, l'histoire institutionnelle tend à s'imposer comme la seule manière logique d'appréhender l'histoire du passage d'une société à la culture écrite. Et la substitution de l'histoire de l'institution scolaire à l'histoire sociale du processus d'alphabétisation qui peut s'opérer par des formes (institutionnalisées ou peu institutionnalisées) extrêmement diverses, est encore facilitée par la permanence d'un débat politique périodiquement réactualisé où s'affrontent des thématiques de l'école — libératrice ou normalisatrice — qui ont au moins en commun de reconnaître un rôle décisif à l'institution scolaire.

L'origine des plantes domestiques identifiées et la précoce sélection des grains mentionnée par les géoponiciens antiques relèvent des premiers rituels d'offrandes aux dieux plus que de la consommation alimentaire elle-même. J. R. Harlan et J. G. Hawkes s'accordent pour admettre que les groupes humains utilisèrent toutes sortes de plantes partout où ils vécurent, les ressources locales étant exploitées selon une économie des moyens où s'insèrent tous les éléments des éco-systèmes ; le bilan entre énergie fournie et résultat de la récolte reste en faveur de l'économie de cueillette, pour peu que la diversité originelle des herbes et des grains soit réalisée.

A la fin du XVIIe siècle, Al Yūsī, dans ses , évoque un conteur qui, sur la place publique, à sa façon, campe la diversité régionale et sociale du Maroc. Le Fassi, dit-il, si on lui demande ce qu'il préfère manger dira : des pigeons à la sauce, le Marrakchi... du pain de blé et de la viande de mouton, le 'arubī... — paysan arabophone — du barkūksh — sorte de couscous — avec du lait et du beurre frais, le berbère... de la bouillie de millet ou de sorgho, 'asīda 'anilī, et enfin le Dr'āwi réclamera la datte bu faqqūs de Tagmadert avec de la soupe, harīra. Pour la plus grande joie de son auditoire, il le fait dire à chacun dans son parler. Notre lettré veut-il simplement typer des personnages, ou est-il désireux d'illustrer la sagesse de l'ordre voulu par Dieu lorsqu'il ajoute qu'il serait vain.

Le dernier ouvrage posthume de Maurice Lombard, Les textiles dans le monde musulman du VIIe au XIIe siècle, a été rédigé, comme les précédents, à partir de notes laissées par l'auteur et constitue, à ce titre, le tome III de la série « Études d'économie médiévale » publiée chez Mouton. Il vient utilement combler, comme celui sur les métaux, une lacune importante de l'historiographie de l'Islam. Les textiles constituaient, au même titre que la terre, une des sources principales de richesse au Moyen Age. Pourtant, jusque-là, seuls les textiles de l'Occident médiéval avaient été étudiés. C'est dire l'importance de l'ouvrage de M. Lombard et son opportunité. En introduction, l'auteur met en rapport développement des techniques et essor urbain dans le monde musulman, d'autant que les conquêtes musulmanes ont abouti à la « constitution d'un grand domaine unifié », brochant sur trois domaines techniques — Empire sassanide, Syrie et Egypte byzantines, pays barbares de la Méditerranée occidentale.