Peu d'archives au monde sauraient s'enorgueillir de posséder un fonds d'histoire économique plus riche que celui de Harvard Business School Archives, à Cambridge (Mass.). Parmi les documents italiens, les plus importants de la collection étrangère, notons les archives privées des Barberini, fondateurs d'une banque illustre (81 volumes, dont 27 de comptabilité de banque, 14 livres de ccmptes, etc.) s'étalant sur trois siècles (1630-1818) et projetant un jour nouveau sur les origines de deux banques romaines encore existantes : Banco di Santo Spirito et Monte di Pieta. D'autres documents intéressent les Médicis (1377-1597), ils comprennent notamment 68 lettres de Laurent le Magnifique.

Sur sa demande, qu'il motive dans la note qui suit —et sur les recommandations d'André Meynier, les Annales ouvrent bien volontiers une enquête sur le problème posé par M. Imberdis. Il est incontestablement intéressant. — L. F.

La plupart des auteurs qui se sont occupés d'archéologie agraire distinguent, selon leur forme, les champs carrés et les champs en lanières. Nous croyons préférable d'adopter une division tripartite :

— Champs en lanières, si le rapport de la longueur à la largeur est égal à 8, 10,14 ou davantage.

— Champs rectangulaires, si ce même rapport est faible : 4, 3, 2, etc..

— Champs irréguliers, qui ont la forme d'un polygone quelconque.

Voilà soixante-cinq ans déjà que paraissait le premier volume de la grande synthèse d'Albert Sorel. L'oeuvre monumentale, assurément, eût-elle même répondu à son titre : L'Europe et la Révolution française que, sans aucun doute, elle serait aujourd'hui périmée en partie. Or, de l'Europe, Sorel hier n'a guère étudié et retenu que l'image inexacte et souvent artificielle qu'offrent les rapports des ministres et ambassadeurs. Aussi bien, malgré des aperçus remarquables, cette grande fresque n'est-elle qu'une histoire des relations politiques entre France et pays d'Europe durant la dernière décade du XVIIIe et les premières années du XIXe siècle. Autre péché, si l'on peut dire, cette histoire, encore alourdie, infléchie par la volonté absolue de l'auteur de démontrer qu'aucune conciliation, aucune paix n'était possible entre l'Europe d'Ancien Régime et la Révolution.

En lisant l'étude si attentivement minutieuse dont il va être question ur Les débuts de l'indiennage mulkousien — et ces débuts ont dû poser partout les mêmes problèmes : c'est pourquoi il convient sans doute d'insister, moins peut-être sur les faits nouveaux apportés par de nouvelles recherches d'archives que sur les directions de travail, des remarques de méthode, qui importent sans doute davantage — je ne pouvais m'empêcher de penser à ce qu'écrivait, à propos de morphologie, un jour déjà lointain, H. Baulig avec sa belle conscience de savant prudent : « Je ne crois pas trop m'avancer en disant que, pour essayer de résoudre les problèmes morphologiques de la Porte de Bourgogne, il fallait considérer tout au moins le Rhin et le Doubs sur une grande distance à l'amont et à l'aval, et reprendre, pièce à pièce, en partant des observations, toutes les interprétations antérieures.

Sous la rubrique, qui nous est chère, d'Histoire des-Sentiments, inscrivons l'ingénieux article que R. Baehrel vient de publier dans les Annales historiques de la Révolution française dirigées par notre ami Georges Lefebvre. II s'intitule « Epidémie et terreur : histoire et sociologie ». — Sociologie, oui. Psychologie aussi. De quoi s'agit-il ? D'établir un lien entre la Terreur de 93 et les terreurs que provoquaient autrefois les « pestes ». D'une peur à l'autre, nous dit R. Baehrel, s'il est légitime f!e recourir aux massacres de la Saint-Barthélémy pour comprendre les massacres de Septembre, il est non moins légitime de suivre à travers les générations les manifestations de quelques sentiments puissants « qui dominent la mentalité et engendrent l'action » ; la terreur, incontestablement, compte parmi ces sentiments.

La Collection Que sais-je?, accordant une brillante hospitalité à l'Amérique latine, a publié coup sur coup deux sympathiques bréviaires de l'histoire et de l'économie latino-américaines et un troisième ouvrage, non moins utile et non moins agréable à lire, consacré à la République Argentine.

De la période coloniale jusqu'à «l'Amérique latine libre (?) », Pierre Chaunu a tracé un très brillant condensé historique et cette réussite ne surprendra pas les lecteurs des Annales. On admire avec quel art M. Chaunu a su fait tenir tant de choses, tant d'idées surtout, dans le cadre étroit de 127 petites pages. L'essentiel est dit, bien dit, sur presque tout.

Les Annales veulent signaler sans plus tarder à leurs lecteurs l'apparition du tome VI des Œuvres de Maximilien Robespierre. Ce livre s'inscrit dans le cadre des publications de la Soéiété des Études Robespierristes, jadis animée (à partir de 1909) par Albert Mathiez qui lui assigna, entre autres tâches, celle de publier les oeuvres de Robespierre. « On rie peut douter, écrit dans sa Préface Georges Lefebvre, que, dans sa pensée, la priorité appartenait aux Discours, qui constituent la source essentielle pour l'étude de la pensée et de l'action politique du grand révolutionnaire. » Mais la tâche de les recueillir et de les publier apparaissait si lourde qu'elle fut ajournée — et c'est aux écrits de jeunesse, à la Correspondance et au Défenseur de la Constitution que la Société donna ses premiers soins.

Les Annales ont parlé, à plusieurs reprises, du grave problème des revues régionales — étroitement lié au problème des Sociétés Savantes provinciales. Nos lecteurs seront contents d'apprendre que, de divers côtés, des initiatives se manifestent, qui sont encourageantes.

Hier, c'était une vieille société jurassienne, la Société d'Émulation du Jura, fondée en 1817, recréée en 1864, qui se trouvait devant un grave problème. Pour des raisons financières, elle n'a rien publié depuis 1946, sinon un volume hors série consacré à la Révolution de 48 dans le Jura (il a été en son temps signalé ici même). Mais cependant, elle a vécu. Elle a entendu des communications (de notre regretté collaborateur l'abbé Berthet notamment) qui se sont accumulées sans connaître les presses. Comment sortir de là ? La solution adoptée est élégante.

Depuis une dizaine d'années, les banlieues urbaines — et la banlieue parisienne en particulier — sont devenues domaines de recherches pour les géographes et les historiens. Heureuse orientation car la banlieue, milieu riche et vivant, transition entre ville et campagne, avait été trop négligée. Sans doute les débuts de cette recherche sont-ils hésitants, les méthodes diverses peu sûres ; les documents d'archives dispersés ou rares ; les enquêtes directes difficiles. Les obstacles n'ont pas arrêté les chercheurs.

Problème préalable : peut-on, historiquement et géographiquement, délimiter et définir la banlieue ? René Clozier en cherche les fondements dans l'organisation des transports et les migrations alternantes quotidiennes sur lesquelles H. Bunle avait déjà attiré l'attention. C'est là une base solide, si elle ne peut être retenue qu'à partir du moment où les moyens de transports sont assez complets et rapides, au XXe siècle.

Le livre de J.-B. Duroselxe achève de combler une lacune regrettable que d'autres avaient commencé récemment à réduire. Grâce à cette grosse étude, à celles de Georges Hoog et de Henri Rollet, nous connaissons désormais l'essor difficile au XIXe siècle d'un mouvement qui a manifesté son ampleur après la première guerre seulement, et surtout après 1944.

L'ouvrage est très érudit. Il travaille en terre presque vierge, à l'aide de brochures rares, d'archives familiales difficiles à rejoindre, de documents dispersés à travers tout l'éventaire des Archives publiques. Le casier « catholicisme social» n'existe encore nulle part. Pas même dans le Grandin. Or cette érudition est vigoureusement maîtrisée et pose d'importants problèmes.

L'Institut Français de l'Afrique Noire manifeste une activité sans cesse accrue, sous l'impulsion de son directeur Th. Monod, qui anime les bonnes volontés et pousse les recherches dans toutes les directions. Les publications se succèdent. Les volumes du Bulletin sont toujours plus gros ou plus nombreux par année : les retards de publications sont pratiquement rattrapés et trois numéros sont sortis pour 1950; les Notes africaines, trimestrielles, paraissent régulièrement ; de nouveaux catalogues ont été publiés ; la collection des Mémoires vient de s'enrichir, ces derniers mois, de cinq volumes dont quatre sont consacrés aux Sciences naturelles ; le Mémoire du Dr R. Maire et de Th. Monod sur la flore et la végétation du Tibesti est très neuf et contient, en plus d'un catalogue des plantes et de leurs noms en langue teda, une précieuse mise au point sur le milieu physique, introduction bienvenue à l'admirable Dictionnaire ethnographique teda de Gh. et Marguerite Le Cœur qui vient de sortir dans les mêmes publications.

Au Guide pratique des Bibliothèques de Paris que nous avait procuré en 1937 M. Emile Leroy, et que les Annales avaient alors signalé, mais qui se trouvait épuisé, on substituera ce Répertoire des Bibliothèques de France dont le premier volume est consacré aux Bibliothèques de Paris. Deux autres doivent suivre relatifs aux bibliothèques des départements et aux centres de documentation. Sur la Bibliothèque Nationale, les Bibliothèques de l'Université de Paris, les bibliothèques générales d'étude — et de vulgarisation, les bibliothèques dites spéciales, selon le classement adopté, on trouvera tous les renseignements désirables.

M. Maurice-A. Arnould nous révélerait, si besoin, l'inestimable valeur des registres paroissiaux, ces sources de la démographie historique et de l'histoire sociale, par l'Inventaire modèle qu'il a consacré à L'ancien étatcivil en Hainaut. Dans un article antérieur, il nous avait déjà procuré une mise au point bibliographique, fort utile, des ouvrages généraux et des travaux régionaux, concernant non seulement la Belgique, mais encore la France, la Hollande et l'Allemagne. L'introduction de son récent Inventaire reprend l'historique de cette documentation. On sait la rareté des registres antérieurs au Concile de Trente, qui prescrivit l'enregistrement des mariages et des baptêmes ; celui de Givry — l'ancêtre — n'a-t-il pas permis de mesurer les effets de la peste noire en Bourgogne ? Toutes les vicissitudes de l'ancien état « civil » sont ainsi évoquées ; dans l'Évêché de Cambrai, correspondant pour la majeure partie au Hainaut, il faut même attendre le XVIIIe siècle pour voir procéder, à partir de 1719, à un rigoureux enregistrement des décès. La plupart des séries conservées à Mons, remontent au XVIIe siècle, mais elles ont été fort mutilées par les pertes de guerre, de Louis XIV à nos jours (à Tournai encore, en 1940).