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Histoire du climat et économie : des faits nouveaux, une interprétation différente

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Jan de Vries*
Affiliation:
Département d'Histoire, Université de Californie

Extract

Un souci constant des historiens du climat est de substituer à des observations anecdotiques et discontinues, des données objectives quantifiables et formant des séries chronologiques ininterrompues et s'étendant sur de longues périodes. Dans un premier temps, cet article allait dans ce sens ; il présentait une série de températures hivernales moyennes en Hollande à partir de 1634. Cette série comblait mes voeux d'historien de l'économie, dans la mesure où elle permettait de déterminer les conséquences des fluctuations annuelles de température en Hollande sur un certain nombre de variables économiques. C'est en cours d'élaboration puis d'analyse de ma série, que j'ai été amené à prendre en considération des données de l'histoire du climat voisines des miennes. Il m'a fallu finalement reconsidérer la théorie même de l'histoire du climat, ce qui m'entraînait très loin de mon propos initial, et de ma sphère de compétence.

Summary

Summary

The new evidence presented and analysed in this article represents the annual number of days a Dutch canal was closed by ice in the period 1634-1839. Correlation and regression analysis were used to estimate average winter temperatures. The same techniques were applied to French wine harvest dates to create a companion series of summer temperatures, but the results uncovered important weaknesses in this source which receive detailed analysis.

The resulting long series of winter temperatures is analysed statistically to identify possible long cycles. The conclusion is that periods of maritime and continental climate alternated, and that these periods have been from 60 to 100 years duration. The “little ice age” concept is examined in the light of these findings.

Finally, the effect to annual changes in winter temperatures on six Dutch economic variables is analysed. Various methods are employed but the results are essentially negative. The effect of climate on the economy is real but subtle; the crude historical indicators of climate at our disposai do not suffice to identify the economic impact ofannual weather fluctuations.

Type
Le Climat Dans L'Histoire
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1977

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References

Notes

1. Si cet article présente quelque intérêt, je le dois pour l'essentiel à mon assistant de recherches David Lansky. Non content de mener à bien les études statistiques, il s'est attelé à la longue et lourde tâche de trouver, et mettre au point, une méthode susceptible de remplacer celles, peu rentables, utilisées jusque-là. Je remercie vivement aussi les membres de la Çlimate Research Unit du K.N.M.I. (Royal Dutch Meteorological Institute), dirigé par le professeur docteur F. H. Schmitt, le docteur C. S. A. Schuurmans a aidé le novice que je suis à seJamiliariser avec les études de météorologie. Les professeurs Nicholas Crafts et A. Roger Byrne, de l'Université de Californie, ainsi que les participants au Colloque d'histoire économique de Berkeley-Stanford, m'ont assisté de leurs suggestions et m'ont fourni les références indispensables.

2. Gemeentearchief Haarlem, Oud Archief 1313-1323 (n° 1 078), Commissarissen der Leidsche Trekvaart, Rekeningen ; A. Labrijn, « Het klimaat van Nederland gedurende de laatste twee en een halve eeuw », Koninklij Nederlandsch Meteorologisch Instituut, Mededeelingen en Verhandelingen, n° 49, 1945.

3. Cette équation a aussi été appliquée aux quelques années postérieures à 1658 pour lesquelles ceux qui dressaient les états mensuels n'ont que les chiffres approximatifs des jours de gel sur les canaux.

4. Une seconde méthode a été tentée, qui consistait à considérer la variable dépendante, la température hivernale moyenne, comme une fonction de (X1), le nombre de jours de gel sur le canal, plus (X2), la période continue la plus longue de gelée. On espérait que la dernière variable indiquerait les chutes de températures au-dessous de zéro les plus spectaculaires, et préciserait le mouvement dégagé par la régression simple décrite ci-dessus. En fait, la différence entre les deux approches n'apporta rien de neuf: régression multiple: Y = 4.13 - 6x1- .02x2 r = .92 ; régression simple : Y = 4.16 - 08x r = .92. La régression simple pouvant être utilisée pour la période antérieure à 1658 pour laquelle on ne dispose que du nombre total des jours de gel sur le canal, on s'en est servi pour calculer la température hivernale moyenne des cent années précédant 1735.

5. A. Angot, « Étude sur les vendanges en France », Annales du bureau central météorologique de France, 1883 ; Garnier, Marcel, « Contributions de la phénologie à l'étude des variations climatiques», La météorologie, n° 40, 1955, pp. 291300 Google Scholar; E. Le Roy Ladurie, Times offeast, times of famine, Garden City, New York, 1971, publié d'abord sous le titre Histoire du climat depuis l'an mil.

6. Ladurie, Le Roy, op. cit., p. 60 Google Scholar.

7. Angot, , op. cit., pp. B71B74 Google Scholar et Ladurie, Le Roy, op. cit., pp. 368370 Google Scholar.

8. C'est évidemment la température qui détermine la date des vendanges, mais dans la mesure où on tente d'utiliser ces dates en tant qu'indicateur de la température hivernale, le repérage des variables dépendantes et indépendantes a été inversé.

9. Renou, M. E., « Études sur le climat de Paris (troisième partie, température) », Annales du bureau central météorologique de France, vol. I, 1887, pp. B196B226 Google Scholar. Les observations de Renou commencent plus tôt dans le XVIIIe siècle mais elles ne sont pas considérées comme fiables. Garnier s'est d'ailleurs intéressé à l'étude des dates de vendanges en partie pour corriger ce qu'il y avait de par trop erroné chez Renou.

10. Renou, M. E., « Études sur le climat de Paris (2e partie : La pluie depuis 1688) », Annales du bureau central météorologique de France, 1887, p. 273 Google Scholar.

11. Ladurie, Le Roy, op. cit., p. 64 Google Scholar.

12. C'est évidemment l'erreur type de l'estimation qui permet de mesurer l'éventail.

13. Les dates de vendanges reportées sur le graphique 3 n'ont pas été transformées en estimations de température. Elles ont été au contraire reportées telles quelles une fois l'échelle verticale inversée et sa taille rapportée à l'amplitude des fluctuations de la température estivale après 1735.

14. Labrijn, , op. cit., pp. 8485 Google Scholar.

15. H. H. Lamb, The changing climate, selected papers, Londres, 1966.

16. Winstanley, Derek, «Rainfall patterns and general atmospheric circulation», Nature, 245, 28 septembre 1973, pp. 190194 CrossRefGoogle Scholar.

17. Pour une analyse plus fouillée en conformité avec cette généralisation, voir H. Von Rudloff, Die Schwankungen und Pendelungen des Klimas in Europa, Braunschweig, 1967 et Ladurie, Le Roy, op. cit., pp. 296305 Google Scholar.

18. Les deux équations de régression sont: Y = - 1.16 + 06X (r = 81) pour 1634-1839 (Y = température hollandaise hivernale, X = série de vendanges d'Angot) et Y = 1.99 + .06X (r = .68) pour 1634-1791 (Y = température hivernale hollandaise, X = série des vendanges du nord de la France). Toutes ces données sont exprimées en moyennes mobiles de 31 ans.

19. Dans ce but, les dates de vendanges ont été converties en estimations de la température estivale pour les années antérieures à 1735. On s'est servi des séries de vendanges du graphi-que 3 ; les températures furent estimées à l'aide de l'équation de régression Y = 17.53 - .04X (r = .46).

20. Les autres combinaisons d'années présentant une différence des valeurs moyennes proches de celles-ci correspondent aux années immédiatement antérieures et postérieures.

21. La méthode utilisée pour identifier les périodes antérieures à 1839 fut écartée pour les années postérieures.

22. Voir Lamb, The changing climate et Climate : présent, past and future, Londres, 1972, vol. 1.

23. C. E. P. Brooks, Climate through the ages, Londres, 1949 ; F. E. Matthes, « Glaciers », dans O. E. Meinzer, éd., Hydrology, New York, 1942 ; H. Kinzl, « Die grôsten nacheiszeitlichen Gletschervorstösse in den schwezen Alpen und in der Mont-Blanc Gruppe », Zeitschrift für Gletscherkundes, 1932 ; F. Mayr, « Untersuchungen über Ausmass und Folgen der Klima und Gletscherschwankung seit dem Beginn der postglaziaten Wârmzeit. Ausgewàlte Beispiele aus dem Stubaier Alpen im Tirol », Zeitschrift für Géomorphologie, 1964.

24. Même si la relation inverse entre les tendances des températures estivales et hivernales n'exigeait pas que la définition du Petit âge glaciaire se référât à la température hivernale plutôt qu'annuelle, il ne serait pas sans intérêt de s'attacher à la température hivernale, dans la mesure où ses fluctuations dominent celles de la température estivale dans le calcul des moyennes annuelles.

25. Ladurie, Le Roy, op. cit., p. 225 Google Scholar.

26. Ibid., p. 227.

27. Ibid., p. 237.

28. Ibid., pp. 243-244.

29. Les prix sont tirés de N. W. Posthumus, Inquiry into the history of prices in the Netherlands, v. 2, Leyde, 1964 ; les cargaisons de céréales sont de N. E. Bang et K. Korst, Tabeller over skibsfart og varetransport gennen oresund, 1497-1660 et 1661-1783, 7 vol., Copenhague, 1906-1953; les enterrements à Rotterdam sont d'A. M. Van der Woude et G. J. Mentink, De demografische ontwikkeling te Rotterdam en Cool, Rotterdam, 1965 ; les enterrements à Edam sont Van Der Woude, d'A. M., Het Noorderkwartier, v. 3, Wageningen, 1972, pp. 635638 Google Scholar.

30. Les conséquences sur l'économie des périodes climatiques identifiées dans cet article sont évidemment d'un grand intérêt, mais les techniques utilisées ici ne permettent pas de déceler les conséquences à long terme. Les données disponibles sont incapables de rendre compte de toutes les variables et des processus d'adaptation qui interviennent dans le long terme (et dont on peut faire fi pour le court terme).

31. Dans une autre tentative, on a effacé l'influence des tendances à long terme sur les variables économiques en ayant recours aux écarts des moyennes mobiles de 50 ans, tandis que les températures hivernales étaient exprimées en écarts par rapport à la température moyenne de l'ensemble de la période. On a obtenu des coefficients de corrélation presque semblables à ceux adoptés ici.

32. J. P. M. Woudenberg, « Het verband tusschen het weer en de opbrengst van wintertarwe in Nederland », Koninklijk Nederlandsch Meteorologish Instituut, Mededeelingen en Verhandelingen, n° 50, 1946.

33. Voir dans Van Der Woude, A. M., Het Noorderkwartier, v. 3, pp. 654659 Google Scholar, les chiffres annuels des têtes de bétail dans la Hollande des trente dernières années du XVIIIe siècle. Il apparaît que le nombre de têtes diminue en quantités variables les années où les températures sont froides au mois de mars. Cette baisse est particulièrement sensible en 1785-1786, 1795 et 1800.

34. Boekel, P. N., De zuivelexport van Nederland tot 1813, Utrecht, 1929, pp. 210-211 Google Scholar.

35. Un autre produit était directement affecté par les variations de la température hivernale moyenne : la tourbe, qui était le principal combustible de la Hollande. Malheureusement, les trois séries du prix de la tourbe dont on dispose sont incomplètes et on ne peut s'y fier entièrement. Les institutions qui fixaient les cotations payaient parfois les mêmes prix pendant plusieurs années consécutives. On ne peut pas savoir, par conséquent, si les prix étaient relativement stables ou si cette stabilité apparente était le fait de contrats d'approvisionnement à long terme. En outre, les cotations étant annuelles, il est impossible de discerner les pointes saisonnières qui devraient correspondre aux hivers particulièrement rigoureux. Néanmoins, en dépit de ces imperfections, ces séries de prix laissent apparaître des hausses sensibles pour les années débutant par des hivers très froids. C'est le cas des années 1672, 1679, 1692, 1709, 1740, 1763, 1785 et 1795. Mais tous les hivers froids n'eurent pas de telles conséquences. On ne connaît que le cours annuel de la production de tourbe. On peut admettre que la production était élastique, en sorte que les hivers froids avaient pour conséquence de donner du travail à des milliers de chômeurs qui trouvaient à s'employer dans les tourbières. Ce travail ne s'effectuant pas l'hiver, on peut penser qu'il était nécessaire que fussent dressés de larges inventaires. Malheureusement, on ne sait pratiquement rien de cette industrie, essentielle pour l'économie de la République hollandaise.

36. Voir Smith, L. P. : « The signifiance of climate variations in Britain », dans UNESCO, Changes in climate, proceedings of the Rome symposium, Nations unies, 1963, pp. 455463 Google Scholar.