Deux mots ont fait fortune dans la littérature historique et anthropologique traitant de la société marocaine : zaouia et makhzen. D'ordinaire, le premier terme est rendu par confrérie religieuse, le second par État central. Mais cette traduction oublie les sens premiers qui réfèrent avant tout à deux espaces. Le premier est le lieu où se réunissent les partisans d'une voie mystique (tarīqa) pour la méditation, la prière et la perpétuation de la tradition instituée par le fondateur ; le second est le lieu où doivent s'accumuler les moyens majeurs de gouvernement : le trésor. Deux espaces donc interdits, où ne sont admis que des spécialistes dûment qualifiés : des hommes consacrant leur vie, dans un cas au service de Dieu, dans l'autre à celui de l'État.