L’activité intense qui règne dans le secteur de la construction — quasi sans interruption depuis 1950 — s’est poursuivie en 1954. A en juger d’après les statistiques encore fort incomplètes, disponibles actuellement, il semble qu’on ait même enregistré une légère progression par rapport à 1953.

La persistance de cette tendance favorable peut être attribuée à diverses causes. Sans doute les pouvoirs publics exercèrent-ils à l’origine une action déterminante, tant par l’essor donné à l’activité des grands organismes de logement, que par l’encouragement donné aux particuliers, sous forme de primes et de prêts à des conditions avantageuses. Mais ces interventions ne portèrent leurs fruits que sous l’action de causes plus profondes, au premier rang desquelles il faut citer l’accroissement des revenus réels et, comme corollaire, la tendance au relèvement du niveau de vie, particulièrement sur le plan de l’habitation. A cet égard, bien que les bases d’appréciation objective soient assez minces, il paraît certain que les Belges s’habituent progressivement à consacrer une plus grande part de leurs ressources à leur logement. On pourrait même craindre que cette évolution, salutaire en elle-même, atteigne une ampleur exagérée.

Après l’exposé très développé présenté dans cette revue l’année dernière, la présente étude se limitera à commenter à la lumière des statistiques officielles, les faits les plus saillants de l’agriculture belge au cours de l’année 1954. Ce tour d’horizon général nous amènera à établir des comparaisons avec l’étranger, et à évoquer des problèmes plus vastes qui se traduisent par un certain malaise agricole. Cette étude sera donc composée de deux parties bien distinctes :

1° L'agriculture beige en 1954.

2° Problèmes structurels de l'agriculture.

La baisse de l’activité économique dans de nombreux pays en 1953 avait suscité certaines appréhensions. La faiblesse de la conjoncture américaine allait-elle se répercuter sur les économies européennes et en particulier sur la Belgique et la France où paraissaient certains signes de stagnation? L’Allemagne, l’Italie et, dans une certaine mesure les Pays-Bas maintenaient cependant un rythme d’expansion élevé, favorisé par la reconstruction encore inachevée dans ces pays et la découverte d’importartes sources de gaz naturel dans le nord de l’Italie.

Bien que le revenu national des Etats-Unis ait continué a baisser pendant la premiére moitié de 1954, l’économie européenne a, dès le début de l’année, donné des signes de redressement général. La production des pays membres de l’O.E.C.E. a dépassé en 1954 d’environ 8% celle de 1953. Le commerce entre ces pays s’est développé et l’accroissement de leurs exportations vers les pays tiers a compensé la diminution des débouchés vers les Etats-Unis et le Canada. Cette reprise de la conjoncture, basée avant tout sur le dynamisme propre de l’économie européenne, n’a pas été accompagnée des hausses spéculatives de prix caractéristiques des booms que suscitérent le passage brusque d’une économie de guerre à une économie de paix en 1945 et l’évolution inverse en 1950.

1. Au cours de l’année 1954, les prix beiges sont restés dans leur ensemble, relativement calmes, et ils n’ont guère reflété que les mouvements internationaux. On ne discerne donc aucune influence propre à la Belgique, ni même à la conjoncture belge. Cette constatation doit en principe être regardée comme satisfaisante, en ce sens qu’elle montre qu’il n’y a eu dans le pays ni inflation ni déflation, mais équilibre monétaire, à l’intérieur duquel se sont développées les réactions spontanées en matière de prix.

II se confirme par ailleurs que les prix belges ne sont pas plus élevés que ceux qui correspondent à un équilibre suffisant, au point de vue de nos relations Internationales. Certes, il arrive fréquemment que des exportateurs belges se plaignent de rencontrer des concurrents qui peuvent fournir à meilleur compte, ou bien fournir au même prix, mais en s’assurant des bénéfices qui manquent à nos producteurs. Toutefois, il est probable que cette situation n’est pas générate, et qu’elle concerne surtout certaines industries qui sont spécialement atteintes par la concurrence hollandaise, qui à l’intérieur du Benelux s’exerce sans aucune protection douanière. Dans certains cas, les prix étrangers sont faussés par des opérations de troc, ou par des combinaisons triangulares.

Le redressement de la conjoncture mondiale, qui a commencé à s’affirmer au second semestre de 1953, s’est poursuivi et inten-; sifié l’an dernier. Tant qu’il restait des facteurs de production disponibles, l’essor s’est manifesté par une expansion quantitative des économies. Dans le courant de 1954, des raretés se sont fait jour sur les marchés mondiaux et l’approche d’une période de haute prospérité se traduit à présent par des tensions dans le système des prix. Dès maintenant, il apparaît que certaines économies européennes ont atteint — trop tôt, semble-t-il, — le stade du plein emploi : le développement de l’activité y provoque des pressions inflationnistes. Aux Etats-Unis, où le retournement s’est fait quelque peu attendre, l’expansion reste jusqu’à présent quantitative, mais il est certain que les prévisions pessimistes formulées en 1953 par certains économistes d’outre-atlantique s’avèrent non fondées.