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Instruments de droit international public pour lutter contre la torture

Published online by Cambridge University Press:  19 April 2010

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Bien que l'idée du «respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous» ait fait son chemin depuis la Seconde Guerre mondiale dans les quatre coins du monde et ait marqué de son empreinte tant le droit interne de nombreux Etats que le droit international public, il est considéré comme établi que la torture, qui représente une atteinte grave à la dignité inhérente à la personne humaine, est pratiquée depuis des années et continue de l'être dans de nombreux pays soit systématiquement, soit au cas par cas. La torture, par laquelle «une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne», a surtout pour objectif l'extorsion de renseignements et d'aveux, mais aussi l'intimidation et l'avilissement, et enfin la punition — illegitime — pour un acte que la personne a réellement commis ou qu'elle est soupçonnée d'avoir commis. Les techniques de torture comprennent la privation de nourriture et de sommeil, l'alternance abrupte du froid et du chaud, du silence et du bruit, l'isolement total, le manque d'information, le fait d'induire en erreur, l'emploi de la force brutale contre le corps jusqu'à la mutilation durable, la menace de mort, l'agression sexuelle, l'usage de l'électricité ou le recours à des produits chimiques et pharmaceutiques.

Type
Lutte Contre la Torture
Copyright
Copyright © International Committee of the Red Cross 1989

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References

1 Le Comité international de la Croix-Rouge, dont les délégués visitent régulièrement des lieux de détention, a déclaré dans un rapport publié en 1976: «L'usage répété, voire systématique, de la torture, sur instructions supérieures ou par une tolérance complice des responsables, sous des formes violentes ou selon des moyens psychologiques et chimiques, est un cancer qui paraît ne cesser de croître aujourd'hui et menace les fondements mêmes de la civilisation. En effet, de toutes les armes, la torture n'est-elle pas la plus cruelle et la plus nocive?» (Voir, : Le Comité international de la Croix-Rouge et la torture, Revue internationale de la Croix-Rouge (RICR), no 696, décembre 1976, p. 710).Google Scholar

2 Voir, l'article premier de la Convention des Nations Unies du 10 décembre 1984Google Scholarcontre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

3 Le professeur Kooijmans, M. P., «Rapporteur spécial pour les questions relatives à la torture», désigné en 1985Google Scholar par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, écrit dans son rapport annuel de 1987: «La torture reste un phénomène répandu dans le monde d'aujoud'hui, et le Rapporteur spécial se trouve confirmé, par l'information qu'il a reçue, dans sa conviction qu'aucune société, quel que soit son système politique ou sa coloration idéologique, n'en est totalement protégée», doc. E/CN.4/1987/13, p. 22.

4 M. P. Kooijmans conclut son rapport annuel pour 1987 par la constatation suivante: «La torture doit être vue et considérée objectivement par tous, gouvernements ou individus, pour ce qu'elle est: une annihilation criminelle de la personne humaine, que ne peut justifier aucune idéologie ni aucun intérêt supérieur, puisqu'elle détruit la base même de la société», op., cit., p. 27.

5 Cette Convention élaborée dans le cadre des Nations Unies est entrée en vigueur le 26 juin 1987, après que 20 instruments de ratification ou d'adhéion eurent été déposés. Au 1er novembre 1988, 34 Etats étaient liés par cette Convention.

6 Cette Convention a été adoptée le 26 juin 1987 par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe et a eté soumise à la signature le 26 novembre de la même année. Le 1er novembre 1988, tous les 21 Etats membres du Conseil de l'Europe avaient signé cette Convention, huit d'entre eux (Grande-Bretagne, Irlande, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Suède, Suisse, Turquie) l'avaient ratifiée. La Convention entrera en vigueur le 1er février 1989.

7 Voir le texte dans Rodley, Nigel, The treatment of prisoners under international law, Paris/Oxford, 1987, pp. 307309.Google Scholar

8 Les deux projets sont publiés chez Alois, Riklin (éditeur), Conventions internationales contre la torture, Série de publications de l'Association suisse de politique étrangère, vol. 6, Berne, 1979.Google Scholar

9 Voir pour la Convention de l'ONU du 10 décembre 1984: Message du Conseil fédéral concernant la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, du 30 octobre 1985, Feuille fédérale 1985, volume III; Dominicé, Christian, «Convention contre la torture: de l'ONU au Conseil de l'Europe», dans Völkerrecht im Dienste des Menschen, Festschrift für Hans Haug, Berne, 1986Google Scholar; Hailbronner, Kay/Randelzhofer, Albrecht, «Zur Zeichnung der UN-Folterkonvention durch die Bundesrepublik Deutschland», EuGRZ, 13 e année, 1986, cahier 22Google Scholar; Haug, Hans, «Internationale Konventionen gegen die Folter», dans Etudes et essais sur le droit international humanitaire et sur les principes de la Croix-Rouge en l'honneur de Jean Pictet, Genève — La Haye, 1984Google Scholar; Nowak, Manfred, «Die UNO-Konvention gegen die Folter vom 10. Dezember 1984», EuGRZ, 12 e année, 1985, cahier 5Google Scholar; Ibid., «Recent Developments in Combating Torture», dans Netherlands Institute of Human Rights, Newsletter, Utrecht, no 19, 1987; Alois, RiklinGoogle Scholar (éditeur), cf. Note 8; Nigel Rodley , cf. Note 7; Stefan Trechsel, «Probleme und aktueller Stand der Bemühungen um eine UN-Konvention gegen die Folter», dans Österreichische Zeitschrift für öffentliches Recht und Völkerrecht, 33 (1982).

10 La définition du terme de «torture», telle qu'elle apparaît dans la Déclaration de l'Assemblée générale de l'ONU du 9 décembre 1975, précise: «Ce terme ne s'étend pas à la douleur ou aux souffrances résultant uniquement de sanctions légitimes, inhéientes à ces sanctions ou occasionnées par elles, dans une mesure compatible avec l'ensemble des Règies minima pour le traitement des détenus». Or, le critère des Règies minima est supprimé dans la Convention de 1984.

11 Le 26 novembre 1987, les représentants des Etats membres, réunis à Genève, ont élu les membres du «Comité contre la torture». Le mandat de président de ce Comité a été confié au professeur Joseph Voyame, citoyen suisse membre du Comité.

12 Voir à propos de l'activité comparable du Comité des droits de l'homme institué dans le cadre du Pacte international relatif aux droits civils et poiitiques (du 19 décembre 1966), Tomuschat, Christian, «Zehn Jahre Menschenrechtsausschuss — Versuch einer Bilanz», dans Vereinte Nationen, 35e année, Bonn/Coblence, 5/1987.Google Scholar

13 Le 1er novembre 1988, 14 des 34 Etats parties ont fait les déclarations appropriées. Il s'agit des pays suivants: Argentine, Autriche, Danemark, Espagne, Equateur, France, Luxembourg, Norvège, Suède, Suisse, Togo, Tunisie, Turquie et Uruguay.

14 Au 1er novembre 1988, les Etats parties suivants avaient déclaré nepas reconnaître, en vertu de l'article 28, la compétence du Comité pour procéder à des enquêtes: Afghanistan, Biélorussie, Bulgarie, Hongrie, République démocratique allemande, Tchécoslovaquie, Ukraine et URSS.

15 Les Conventions de Genève de 1949 (voir en particulier l'article 126 de la IIIe Convention et l'article 143 de la IVe Convention) stipulent que les représentants des puissances protectrices, mais également les délégués du CICR sont autorisés à se rendre dans tous les lieux où se trouvent des prisonniers de guerre ou des personnes civiles protégées (notamment des internés civils), en particulier dans tous les «lieux d'internement, de détention et de travail». Ils ont accès à tous les locaux utilisés par les personnes protégées et peuvent s'entretenir avec elles sans témoin. La fréquence et la durée de ces visites ne sont pas limitées. Ces visites ne sauraient être interdites qu'en raison d'impérieuses nécessités militaires et seulement à titre exceptionnel et temporaire. En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international, le CICR peut offrir ses services aux parties en conflit (cf. article 3 commun aux quatre Conventions).

En plus des personnes privées de liberté et protégées par les Conventions de Genève, les délégués du CICR ont visité depuis 1919, mais en particulier depuis la Seconde Guerre mondiale, quelque 500 000 «détenus politiques» dans près de 80 Etats. Voir à cet égard Moreillon, Jacques, Le Comité international de la Croix-Rouge et la protection des détenus politiques, Lausanne, 1973Google Scholar; Ibid., «Le Comité international de la Croix-Rouge et la protection des détenus politiques», RICR, no 671, novembre 1974, p. 650, no 676, avril 1975, p. 201; Ibid., «La solidarité internationale et la protection des détenus politiques», RICR, no 729, mai-juin 1981, p. 127; Comité international de la Croix-Rouge, «Activités de protection et d'assistance du CICR dans les situations non couvertes par le droit international humanitaire», RICR, no 769, janvier-février 1988, p. 9.

16 Pictet, Jean, ancien vice-président du CICR, faisait également partie de ce groupe. Le projet de convention fut publié dans Wirksam gegen die Folter, édité par la Commission des droits de l'homme de la Fédération des Eglises protestantes de la Suisse, Bâle/Fribourg, 1977.Google Scholar

17 Voir, notamment à ce sujet: «Torture: Comment rendre efficace la Convention internationale; un projet de Protocole facultatif», publié par le Comité suisse contre la torture et par la Commission internationale de juristes, 2e édition, Genève, 1980Google Scholar, ainsi qu' Alois, Riklin (éditeur), Internationale Konventionen gegen die Folter, Série de publications de l'Association suisse de politique étrangère, vol. 6, Berne, 1979.Google Scholar

18 Voir, Conseil de l'Europe, Assemblée parlementaire, Rapport sur la protection des personnes privées de liberté contre la torture et les traitements ou peines cruels, inhumains ou dégradants, présenté par Berrier, N., Doc. 5099, 7 juillet 1983.Google Scholar

19 Sur l'origine et la teneur de la Convention, voir notamment: Conseil de l'Europe, Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, Texte de la Convention et rapport explicatif, Doc. H (87) 4, 7 juillet 1987; Message du Conseil fédéral concernant la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, du 11 mai 1988, Feuille fédérale 1988, Volume II; Haug, Hans, «Auf dem Weg zu einer internationalen Konvention gegen die Folter», Referat vor der Konferenz der Leiter von Anstalten des Schweizerischen Straf- und Massnahmenvollzugs, paru dans Der Strafvollzug in der Schweiz, cahier 1, 1981Google Scholar; Nowak, Manfred, «Recent Developments in Combating Torture», Netherlands Institute of Human Rights, Newsletter no 19, septembre 1987Google Scholar; Vigny, Jean-Daniel, «La Convention européenne de 1987 pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants», Annuaire suisse de droit international, XLIII, 1987.Google Scholar

20 La notion de «privation de liberté» s'entend au sens de l'article 5 de la CEDH. Les visites peuvent être effectuées dans tous les «lieux» où des personnes sont détenues par une autorité publique, qu'il s'agisse d'une détention provisoire ou préventive, de l'exécution d'une peine privative de liberté, de détention administrative ou éducative, d'intemement pour des raisons médicales ou de privation de liberté fondée sur le droit pénal militaire.

21 Selon les propositions du Comité suisse contre la torture et de la Commission internationale de juristes, l'accomplissement des visites — à l'instar de celles du CICR — aurait été principalement la tâche des délégués, agissant selon les directives et sous la surveillance du Comité. La disposition selon laquelle les visites sont effectuées en règie générale par au moins deux membres du Comité — agissant normalement à temps partiel — comporte le risque que leur fréquence, du moins celle des visites périodiques, soit moindre.

22 Pour cet examen du traitement de personnes privées de liberté, il est judicieux de recourir aux «Règles pénitentiaries européennes» (Recommandation adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe le 12 février 1987). Voir, aussi «Standard Minimum Rules for the Treatment of Prisoners», approuvé par la Résolution 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957Google Scholar du Conseil économique et social de l'ONU, et amendé par la Résolution 2076 (LXII) du 13 mai 1977; reproduites dans Nigel Rodley, Note 7, pp. 327–341.

23 Voir sur la pratique des visites de prisonniers sur la base des expériences faites par le CICR, Nicole, Laurent, «Torture: The need for a dialogue with its victims and its perpetrators», dans Journal of Peace Research, Norwegian University Press, septembre 1987.Google Scholar

24 J. D. Vigny (Note 19) écrit: «L'article 9 équivaut à une réserve négociée dans le corps même de la Convention», p. 72.

25 Cette Convention ayant été ratifiée, au 1er février 1988, par le Guatemala, le Mexique, la République dominicaine et le Surinam elle est ainsi entrée en vigueur. Voir le texte dans Nigel Rodley, Note 7, pp. 322–326.

26 Les rapports suivants ont paru sur le Colloque de Montevideo: Tortura: Su Prevención en las Américas, Visitas de Control a las Personas Privadas de Libertad, Montevideo, juillet 1987; The prevention of torture in the Americas, visits to persons deprived of their liberty, Genève, Janvier 1988.

27 Le système europeen des visites est financé par les Etats membres du Conseil de l'Europe dans le cadre de son budget.

28 M. P. Kooijmans écrit dans son rapport du 9 janvier 1987 adressé à la Commission des droits de l'homme de l'ONU: «Une mesure qui pourrait avoir un important effet préventif serait l'application d'un système de visites périodiques des lieux de détention ou d'emprisonnement par un comité d'experts»… «La périodicité de ces visites aiderait à convaincre les gouvernements d'y voir un moyen de coopération et non pas de dénonciation. Appliquer cette idée dans les systèmes régionaux de protection des droits de l'homme, (…) ne ferait pas obstacle à la conclusion d'une convention universelle, dont les Etats soumis à un système de visites dans le cadre régional pourraient fort bien devenir parties. Une autre solution serait de suspendre l'application du système mondial aux Etats déjà soumis à un système régional» op. cit., pp. 25 et 26.