Josiah Royce relates the following story concerning the writing and publication of Johann Gottlieb Fichte's first major work, the Attempt at a Critique of All Revelation.

Fichte … called upon Kant at Königsberg, in July, 1791. The aged, prudent, and … highly economical philosopher regarded this reverent, fiery, but obviously impecunious young disciple with a certain suspicion, and received his confidences coolly. The rebuff only heated Fichte the more. He tarried in Königsberg two months, in order … to write, for presentation to Kant, a work on religious philosophy, which, once finished, proved to be so thoroughly in Kant's spirit that, when in the spring of the next year the book was published anonymously, it was very generally hailed by Kant's admirers as a new production of the master's own genius. Kant himself had to correct this misapprehension, and in doing so named, and now with warm praise, the real author.

L'idée d'une Société des Nations (Völkerbund) que propose Kant à la fin du dix-huitième siècle semble, de prime abord, placée sous le signe de la banalité. Ne correspond-elle pas au voeu généreux, quoique souvent confus, exprimé par les penseurs des Lumières, de faire reculer les guerres qui déshonorent l'humanité et de promouvoir, par le droit des gens, la paix à laquelle jusqu'alors les humanistes s'étaient contentés de rêver en mêlant la politique et l'éthique? Ne trouve-t-on point en elle l'écho amplificateur de la «république européenne» qui, en cette époque où tout s'ébranle, est devenue le lieu commun d'une sensibilité intellectuelle qui croit à la solidarité culturelle et politique du Vieux Continent? N'est-elle pas aussi l'aboutissement de la volonté qui se manifeste en son siècle de rompre avec la culture classique et l'Ancien Régime, étant entendu que l'on pense alors généralement cette rupture comme la condition d'une communauté axiologique nouvelle entre les hommes de bonne volonté?

The architectonic of the Nicomachean Ethics, as that has come down to us, corresponds closely to that of Plato's Republic. That the substance of the Aristotelian ethic, both in its main orientations and in the texture of its argumentation, is Platonic through and through, is of course not in dispute. What appears not to have been noticed is the correspondence between the ways in which the two works are organized. The correspondence is so extensive that it seems hard to doubt that Aristotle (or whoever put the Ethics together) hung his work on Plato's armature. If that is the case, much light should be shed on the later project by divergences between the tactics of the two works at the main points of coincidence. On the assumption that the Republic is a highly structured work and the Ethics is not evidently so, the procedure followed is analogous to that recommended and followed by Socrates in the Republic (368D): confronted by two apparently similar messages, one hard and one easy to read, we should read the easy one first and then look to see if the hard one says the same.

Nous voudrions montrer que, contrairement à une opinion que certains groupes de pression font tout pour répandre, le droit à la vie a pour corollaire la peine de mort comme pierre angulaire de la justice pénale. Nous passerons en revue quelques unes des raisons avancées pour l'abolition de cette peine: boucherie sauvage, rituel barbare, assassinat légal, et nous répondrons comme Socrate à Polos: « ce n'est pas un argument que tu nous opposes ici, c'est un épouvantail ». Nous montrerons ensuite que quelque répugnance que doive éprouver tout homme de sens et de coeur à appliquer une telle peine, quelque disposition qu'il ait à la mansuétude et à la miséricorde, et en raison même de ces dispositions, il doit admettre aussi que la justice pénale est condamnée à perdre tout critère objectif lorsqu'on exclut ce principe qu'ôter la vie du prochain, ou la mutiler gravement, expose à perdre la sienne. Or il n'est pire danger pour le respect des droits humains que le subjectivisme moral et juridique: ce qui rend presque vaine la question de savoir si la peine de mort est un « déterrent » efficace ou inefficace. En outre si elle est juste, elle est respect du coupable qui la doit subir, et par conséquent, contrairement à ce qu'une certaine démagogie sen-timentale avance, signe et facteur d'humanité. Il est significatif que Socrate et Jésus, qui l'ont subie injustement, n'aient jamais mur-mure contre elle. Au contraire Robespierre, qui était pour l'abolition en 1789, fit de la guillotine la première institution de l'Etat en 1793. Une humanité abolitionniste peut craindre de connaître en pire le même destin.

Talking to oneself can seem either a perfectly daft activity or, if not that, an activity the practicality of which requires us to make some psychological suppositions we would otherwise prefer to avoid. If we know something, there will be no need to inform ourselves of it; while if we do not know it, we will have nothing to tell ourselves. Hence, it would seem, either it is perfectly pointless to tell ourselves anything or, when we talk to ourselves, the informer and the informed are somehow distinct, and one of them can know something the other does not yet know. Similarly ifwe ask ourselves a question, then unless the asker and the asked are somehow distinct, we will either know the answer, in which case there was no need to ask, or not know it, in which case it will be useless to ask.

La première partie de la grande étude de Husserl sur le thème de la Krisis a pour titre «La crise des sciences comme expression de la crise radicale de la vie de l'humanité européenne». Par cette formulation, on pourrait être porté à croire que Husserl voit dans la crise de la science la simple conséquence secondaire d'une crise beaucoup plus profonde se situant à l'échelle de l'humanité européenne entière. Et pourtant il n'en est rien. Dans la suite du texte, Husserl s'applique à démontrer que le rapport d'implication entre l'humanité en crise et les sciences doit plutôt être considéré à l'inverse. Le problème de l'humanité européenne réside au premier chef dans cette crise des sciences; si bien qu'il est sans doute possible, dans un premier temps, de voir dans la crise des sciences une simple «expression » de la détresse de l'Europe, mais à y regarder de plus près, c'est celle-là qui est cause de la crise radicale de la vie de l'humanité européenne.

It is widely assumed that the arguments tendered by Sokrates in the Protagoras involve serious logical fallacies. My contention is that this view is mistaken, and I shall argue that Sokrates makes no significant logical errors in this dialogue. I shall begin with a few general assertions about the dialogue as a dramatic whole, since I believe that a grasp of the general theme and character of the dialogue is essential for understanding the argumentation.

Les travaux de Jean Piaget sur le développement cognitif ont largement mis en relief ce que comporte de génétique toute acquisition de connaissance sensible ou intellectuelle. Bien plus: le pere de la psychologie dite justement genetique voit dans la genése, entendue au sens de processus selon lequel le sujet connaissant construit l'objet, ce qui definit essentiellement toute connaissance. On sait que cette these piagetienne s'oppose á l'enseignement d'Aristote, qui conçoit la connaissance comme adaptation sui generis d'une faculte a un objet donne independamment du sujet et voit l'essence du connaitre dans une simple copie des choses, dans un acte ou l'intelligence devient l'objet. Ne serait-ce qu'en raison de cette opposition, on n'aura pas tort de qualifier d'anti-genetique la psychologie de la connaissance d'Aristote. D'autant plus que la psychologie aristotelicienne n'est pas une psychologie scientifique au sens moderne du terme, de sorte qu'on y chercherait en vain des concepts a caractere operationnel tel le concept piagetien de genese. Pourtant, comme cet article tachera de le mettre en evidence, Aristote est loin d'avoir neglige l'aspect genese (sinon au sens piagétien, du moins au sens qui releve de l'experience commune et de la reflexion philosophique) que comporte la connaissance sensible et intellectuelle. Conjointement a ses prises de position sur la nature de la connaissance, on trouve chez Aristote une description des activites sensibles et intellectuelles qui laisse au sujet bien plus d'initiative et s'avere bien plus « genetique » qu'on ne le suppose habituellement.

In 1977 the Consultative Group on Ethics with Respect to Research Involving the Use of Human Subjects submitted its report to the Canada Council. Shortly thereafter the report was published under the title Ethics: Report of the Consultative Group on Ethics. Upon publication it was distributed to academic institutions in Canada with an invitation for reaction and response.

Ten years ago in a Critical Notice of Ryle's Collected Papers (Dialogue 11/4 [1972], 600) I remarked that among its various essays those on the topic of thinking were the most impressive. There were half a dozen of them, written at intervals between 1951 and 1968. The puzzlement that provoked them went on unabated until the end of his life, as is shown by a posthumous collection of papers on the topic now published under the title On Thinking. They were all written after 1968, and one even appeared in print in 1976, the year of his death. The papers thus continue Ryle's dedicated, multi-faceted attack on what he regarded as an elusive multi-faceted problem. In this critical notice I shall comment on the last phase of a philosophical campaign of more than a quarter of a century and attempt an assessment of its upshot.

Inclassable. C'est le qualificatif qui vient à l'esprit de celui qui s'interesse à l'oeuvre de Pierre Vidal-Naquet. Pierre Vidal-Naquet est et se veut avant tout historien. Mais il ne s'agit pas là d'une étiquette qui l'enferme dans une période donnée, dans un genre déterminé. S'attachant à des domaines aussi différents que l'économique, le social, le politique, le religieux et le philosophique, l'intérêt de Pierre Vidal-Naquet va de l'antiquité aux derniers rebondissements de l'actualité, de la Grèce ancienne à la France actuelle et à l'Etat d'Israël.

Robert Nozick's adherence to Locke's puzzling doctrine about punishment can seem strange. Why does Nozick follow Locke in claiming that individuals in a state of nature have a right to punish any wrongdoer?

Here reflection on this question proceeds by stages to a conclusion that Nozick as well as any other state-of-nature theorist of similar stripe should find disturbing. For, as we shall see (in section 1), what Nozick describes as the general right of a minimal state to punish cannot arise within a state of nature from the more plausible right of individuals to punish only those who harm them.

In his book Engineered Death: Abortion, Suicide, Euthanasia and Senecide, John Woods uses an argument from analogy to establish the following conclusion: even if one grants that foetuses are not persons but only potential persons, killing foetuses is murder. Murder, according to Woods, is the defeasibly wrongful violation of the right to life ascribed to persons. If this argument is successful, it would of course have profound consequences for the ongoing philosophical debate over the morality of abortion. Whether or not they hold that foetuses are persons, philosophers would be forced to adopt the same moral attitude toward foeticide as they would adopt toward the killing of persons. That is, the killing of foetuses and the killing of persons would be defeasibly wrong in the same way; their wrongfulness could be defeated only in special and limited circumstances, perhaps like those suggested by Judith Thomson in her “Defense of Abortion”.

Dans le troisième paragraphe de la troisième section de la Grundlegung, Kant dénonce une «espèce de cercle dont, à ce qu'il semble, il n'y a pas moyen de sortir» (450, 18–19, 187). Indispensable à l'interprète de cette section, l'identification de ce cercle s'annonce cependant difficile. En effet, l'objet du débat, la justification de l'éthique, suggère déjà des cercles possibles. On n'évitera donc d'en prêter trop rapidement, par respect ou par vanité, la dénonciation à Kant qu'en s'accrochant à ses ipsissima verba: «Nous nous supposons libres dans l'ordre des causes efficientes afin de nous concevoir dans l'ordre des fins sous (unter) des lois morales, et nous nous concevons ensuite soumis (unterworfen) à ces lois parce que nous nous sommes attribué (beigelegt haben) la liberté de la volonté» (450, 19–23, 187).

Egoism, the subject of this book, is of unending interest to moral philosophers. Campbell reasonably compares it to scepticism in epistemology: just as it is a touchstone of a good epistemological theory that it should show us why scepticism is unsatisfactory, so it is often taken to be a touchstone of a good moral theory that it shows us what is wrong with egoism. The parallel is imperfect in an interesting way, though; for while scarcely anyone in epistemology ends up rejecting the “touchstone” and outrightly advocating scepticism, this does happen in moral philosophy with egoism. In attempting to expose the deficiencies of egoism, we are not tilting against windmills, nor pushing over straw men. And I think it clear that inquiries such as this could have very real implications for practice as well; in this, as in many things, I concur fully with the author.

L'anthropologie en l'absence de l'homme: le dernier ouvrage de Fer-nand Dumont nous apporte la réflexion d'un praticien des sciénces de l'homme, et notamment de la sociologie, autour de ce que l'auteur appelle, en un sens d'ailleurs trés large, l'anthropologie.

C'est dire tout de suite qu'il s'agit essentiellement ici d'une pensée portée au second degré sur un premier « discours », ou un savoir déjà constitué: celui que pratique, ou auquel prétend l'anthropologue luimême. Critique d'une exploration qui, en un autre sens il est vrai, se veut elle-même critique, l'entreprise de Fernand Dumont se meut ainsi en général dans une atmosphère plutôt raréfiée.