Dans leurs éditions respectives du manuscrit ouï;gour de Touen-houang, Pelliot chinois 3509, où figure le conte bouddhique du Prince Bien-pensant et de son mauvais frère, Huart et Pelliot ont tous deux lu, à la p. 2, 1. 4, ‘qar(i)š’, sans avoir réussi, cependant, à expliquer cette forme de façon satisfaisante. En fait, le mot doit se lire qars, défini par Kāšγarī comme ‘vêtement (=étoffe) de poil de chameau et de laine de mouton’, mot.qui a persisté en čagatay au sens de ‘châle, bande d'étoffe dont on se ceint les reins’ (cf. M. Pavet de Courteille, Dictionnaire turc-oriental, Paris, 1870, 400; et W. Radloff, Versucheines Wörterbuches der Türk-Dialecte, II, St. Pétersbourg, 1899, col. 205). On rencontre Le mot qars à maintes reprises, d'ailleurs, dans d'autres manuscrits ouïgours du dixième siècle provenant de la grotte murée de Touen-houang. De ces textes, il ressort: (1) que les pièces de qars étaient qualifiées, dans presque tous les cas et à l'exclusion de toute autre couleur, de ‘blanches’ (yürüŋ) ou de ‘rouges‘ (qizil); (2) que les pièces de qars rouge valaient plus que les pièces de qars blanc dans la proportion de deux à trois: autrement dit, deux pièces rouges valaient trois pièces blanches; (3) qu'un mounton valait quatre pièces de qars rouge, ou encore, dans un autre cas, trois pièces de rouge et une pièce de blanc, de même qu'une peau (de mounton ?) valait deux pièces de qars rouge; (4) que le qars était une étoffe tissée (cf. notamment qars toqiyur, ‘ils tissent le qars’, à la p. 2, 1. 4, du ms. Pelliot chinois 3509 précité); et(5) que le qars pouvait servir à faire des vêtements, vu qu'il était commandé par tant de tonluγ (= la quantité d'étoffe requise pour un costume).