Je viens d'apprendre la mort de M. de Sydow, je ne veux pas tarder un seul jour à vous exprimer les sentiments de vive et profonde douleur, que cette perte cruelle me fait éprouver.

Le Président de la Société française de secours aux blessés militaires M. le Cte de Flavigny, se fera l'interprète des regrets de tous les membres de l'œuvre. Mais je sens que j'ai le devoir de rendre hommage personnellement au noble caractère de M. de Sydow, à ses longs services rendus à la cause de l'humanité.

Sous ce titre, il a paru dans la Revue de droit international et de législation comparée, qui se publie à Gand, deux articles dus à la plume de son rédacteur en chef, M. Rolin-Jaequemyns. Cet utile et important travail est ce que nous connaissons de plus complet sur la matière, et nous le recommandons à la sérieuse attention des personnes désireuses de s'éclairer sur la légalité de la conduite des belligérants pendant la guerre franco-allemande. Ecrite par un homme compétent, qui s'est placé à un point de vue exclusivement scientifique et qui appartient à un peuple neutre, cette étude a une grande valeur.

Avant de quitter le duché de Bade, nous signalerons encore à l'attention de nos lecteurs un petit volume, coquettement relié en maroquin rouge, doré sur tranches et orné de 476 vignettes fort bien dessinées. — Hélas! malgré cette belle apparence, on ne peut éprouver qu'une impression pénible à parcourir ces tristes pages; elles nous donnent les Prix courants des appareils sanitaires de la maison Edouard Lipowsky de Heidelberg, fournisseur de S. A. R. le grand-duc de Bade.

La mort de M. de Sydow a été vivement sentie par notre Conseil tout entier; c'est un deuil pour toutes les sociétés de secours et en particulier pour la nôtre, qui n'ignorait pas qu'au milieu des plus rudes aspérités de la guerre, le sentiment chrétien et humanitaire de M. de Sydow n'avait jamais fléchi.

Notre Vice-Président, le Cte Sérurier qui avait eu la bonne fortune de connaître personnellement cet homme d'Etat éminent, s'est empressé dès hier de vous exprimer combien il était affligé de cette grande perte; je viens à mon tour, aujourd'hui, vous témoigner avec quelle sympathie je m'unis à votre douleur.

La guerre civile qui a récemment éclaté dans la partie septentrionale de la Péninsule, a rendu malheureusement nue actualité, nouvelle aux travaux des Sociétés de secours. S'il y a toujours quelque chose de déplorable dans les luttes années de peuple à peuple, et si la lutte des citoyens d'un même pays les nus contre les autres semble être plus triste et plus coupable encore, plusieurs circonstances concourent, dans la guerre actuelle, à diminuer un peu l'horreur et la tristesse qu'inspire cette nouvelle levée de boucliers. Sans doute, le pays en est violemment ébranlé, le crédit se ruine, le travail chòme, le commerce est arrêté, l'agriculture est en souffrance, mais on est heureux d'apprendre au moins que les hommes se battent peu entre eux, qu'il n'y a pour ainsi dire pas eu de bataille, et que les rares rencontres qui ont en lieu ont été peu sanglantes, malgré l'importance que quelques journaux ont essayé de leur donner. Les troupes carlistes sont dans la plaine, et sauf quelques épisodes tragiques, lorsqu'elles voient approcher l'armée régulière, elles se dérobent dans la montagne en attendant d'être en force. L'assaut même d'Oroquieta a été peu meurtrier, comme cela résulte de toutes les statistiques recueillies sur ce point.

M. le Dr Niese a publié une seconde édition de la brochure annoncée déjà dans le précédent Bulletin (p. 106), sur la nécessité de créer un établissement pour la formation de garde-malades. L'auteur ajoute peu de chose à ce qu'il avait déjà dit sur ce sujet; il insiste seulement sur la convenance qu'il y aurait pour toutes les communes de campagne à posséder pour les maladies éventuelles un hôpital-baraque, dont la construction n'est nullement dispendieuse, et qui, divisé en plusieurs compartiments, sous la direction d'une garde, aurait l'avantage d'isoler les malades en cas de besoin, empêcherait la maladie de se communiquer aux autres membres de la famille, et préserverait les malades eux-mêmes des suites fâcheuses qu'entraîne toujours le manque d'aération et la privation d'un air pur.

La Société française de Secours aux blessés militaires avait fait établir à Saint-Cloud une ambulance modèle, qui a fait l'admiration de tous les hommes compétents et qui a donné surtout des résultats merveilleux dans l'intérêt des blessés. Il eùt été profondément regrettable de voir disparaître cet établissement destiné à rendre de si intéressants services. Sur l'initiative même de l'habile praticien autrichien, M. le baron Muady, qui l'avait organisée et dirigée, l'ambulance a été offerte gratuitement à l'Administration militaire, qui pourra l'utiliser pour ses convalescents et ses malades.

Le Comité central de l'Association des dames badoises avait commencé pendant la guerre la publication d'un petit journal de Nouvelles (Nachrichten des Centralkomites, etc.), qui paraissait ordinairement deux fois par semaine et qui, plus spécialement destiné à l'œuvre des femmes, donnait aussi quelquefois des détails sur l'œuvre des Comités de la Croix rouge. Cette publication a pris fin avec le 13 janvier. Les motifs qui l'ont fait interrompre (car il est possible qu'elle se relève plus tard), sont de deux ordres: financiers et littéraires. Financiers: le Comité n'a pas cru pouvoir, maintenant que la paix a succédé à la guerre, continuer une dépense que les circonstances ne justifiaient plus. Littéraires: les matériaux proprement dits, les nouvelles manquaient, et il n'y avait pas de rédacteur possible qui pût accepter la tâche et la responsabilité d'une rédaction dans des conditions semblables.

Il est naturel qu'après la conclusion de la paix, les divers comités, sociétés, associations, qui s'étaient formés sur divers points de la France, aient cru devoir, en vue de leurs donateurs, publier soit des rapports généraux sur l'ensemble de leur œuvre, soit des comptes rendus financiers, soit le résultat de leurs observations et de leurs expériences. Mais on comprend que ces travaux se ressemblent sur beaucoup de points et qu'il soit difficile de les analyser tous et de leur consacrer une grande place.

Sans entrer pour le moment dans la discussion du projet de M. G. Moynier dont nous avons donné le texte dans notre dernier Bulletin, projet qui, on se le rappelle, a pour but de fournir une sanction effective aux dispositions de la Convention de Genève, nous dirons seulement quo l'accueil qui lui a été fait presque partout, est la meilleure preuve que ce projet répond à un besoin général et que par conséquent la question doit être étudiée sérieusement.

Le Département de la guerre a publié en août dernier, comme circulaire no 3, et au nom de la direction médicale, le volumineux Rapport sur les cas de chirurgie observés de 1865 à 1871. C'est un fort volume in-40 de 296 pages, d'une nature presque exclusivement technique, destiné par les détails dans lesquels il entre, à servir de base à des conclusions ultérieures sur la préférence à donner à certains procédés ou à l'emploi de certains traitements.

Ce sera plus tard une étrange histoire, pleine d'intérèt, pleine aussi d'enseignements de tous genres, que celle de la charité sur les champs de bataille pendant la dernière guerre de France. Les rapports qui se multiplient de mois en mois, et qui, au milieu d'une foule de détails semblables, présentent tant de divergences, tant de leçons, d'observations, de faits, d'épisodes, de points de vue différents, pourront fournir matière à des volumes d'histoire, à des traités de chirurgie et à des études philanthropiques nombreuses. Il faudra pour cela du temps et du loisir. Pour le moment, c'est un dédale, un pêle-mêle dans lequel on a de la peine à se reconnaître. Chacun raconte ce qu'il a vu, et dans le conflit armé de deux puissantes nations, quand chaque jour est marqué par une bataille ou par une escarmouche, quand cinq cents ambulances sont répandues sur la surface du territoire, quand on se trouve tour à tour en face de Français et d'Allemands, parlementant avec des amis ou avec des ennemis, occupé de blessés ou de prisonniers, recevant des ordres du maréchal Mac-Mahon ou du général Cluseret, en ville ou à la campagne, dans l'abondance et dans la disette, en été ou en hiver, le jour ou la nuit, il est évident que les récits varient et s'accentuent différemment. L'analyse même de ces rapports, quelque intéressant que soit chacun pris en particulier, devient tout ensemble difficile et fastidieuse.

Parmi les nombreuses questions qu'ont fait naître, ou plutôt qu'ont réveillées les événements de l'année dernière, il en est deux qui nous paraissent avoir attiré plus particulièrement l'attention des hommes compétents français. L'une est celle de la réforme des hôpitaux, l'autre celle de la réorganisation du corps de santé militaire. Cette dernière est plus urgente, plus actuelle peut-être en France qu'ailleurs; la première est partout à l'ordre du jour, et l'on peut dire qu'en théorie la cause est gagnée.

On se rappelle le Questionnaire qu'a publié, il y a un peu plus d'une année, la Société anglaise de secours aux blessés, curieux document d'une grande importance pratique par la nature des questions posées et par le grand nombre de réponses qui y ont été faites (voir notre Bulletin no 9).

Nous continuons de résumer les rapports et comptes rendus qui nous parviennent sur l'œuvre de la Croix rouge et sur l'organisation des différents services d'ambulances pendant la guerre. Si les détails, souvent les mêmes, ne présentent pas toujours un bien grand intérêt, ils concourent par leur groupement à faire mieux comprendre l'importance de l'œuvre dans son ensemble, en même temps qu'ils mettent en saillie quelques lacunes ou quelques défectuosités auxquelles il conviendra de porter remède.

Le dernier numéro du Bulletin International mentionne (page 7) parmi les livres reçus, le «Rapport sur les opérations de la Société britannique nationale pour venir en aide aux soldats tombés malades, ou blessés, pendant la guerre franco-allemande de 1870 el 1871.»

Côle-d'Or.—Aux détails contenus dans le dernier Bulletin, p. 80 et 81, tels que nous les avons donnés d'après le rapport du comité, le travail de M. Vernes n'ajoute que peu de chose, il entre seulement dans plus de détails sur l'ambulance mobile de M. le Dr Dugast, et nous saisissons avec plaisir cette occasion de recommander comme extrêmement attachante la lecture du volume qui raconte les aventures de l'ambnlance de la Côte-d'Or. C'est M. le Dr Dugast lui-même qui a écrit les Souvenirs intimes de l'ambulance mobile de la Côte d'Or (255 p. in-120, 2 fr., se vend au profit des orphelins de la guerre). Le vénérable sexagénaire a 1'expérience de la vie pratique, mais il a conservé la fougue, le feu, la sève montante de la jeunesse; ses jugement sont pleins de hardiesse, ses observations pleines de finesse; il donne des coups de boutoir á droite et à gauche, ne ménageant ni amis ni ennemis, frappant sur les Prussiens, qui sont l'ennemi, et frappant également sur les alliés d'un jour, les garibaldiens; attaquant l'intendance, attaquant les mobiles, parlant souvent de la revanche immanquable, et ne respectanl que trois choses: la religion, telle qu'il la comprend: la monarchie, telle qu'il la rêve; et la charité, telle qu'il l'exerce.

C'est par erreur que, dans notre Bulletin no 11, page 156, le nom de M. le D Nuel a été remplacé par celui de M. le Dr Schmit. Tout ce paragraphe concerne M. Nuel. M. Schmit, en nous demandant cette rectification, ajoute: « Je ne veux pas m'attribuer un mérite qui appartient à d'autres. Je n'ai pas été dans les hôpitaux, ni sur les champs de bataille; mon âge et mes infirmités ne me le permettaient pas; mais j'ai voué la majeure partie de mon temps aux travaux du Comité central.

« Le Comité central de la Société néerlandaise de secours aux militaires malades et blessés en temps de guerre, a l'honneur de vous annoncer que S. M. le roi a daigné accorder à M. le Docteur J. Bosscha, sur sa demande, la démission la plus honorable de ses fonctions de Président du Comité central, et l'a reconnu membre honoraire de la Société; que, par arrêté du 4 mai 1872, no 10, S. M. a nommé à la présidence du Comité central son adjudant général, M. le chevalier F.-J.-A. de Stuers, lieutenant général en retraite, dont l'entrée en fonctions a eu lieu le 16 mai.