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Une Critique “Beachienne” de la Littérature d'Expression Anglaise Récente Portant sur les Femmes et la Sexualité en Afrique Subsaharienne1

Published online by Cambridge University Press:  13 May 2014

Marc Epprecht*
Affiliation:
Queen's University, epprecht/epprecht@qsilver.queens.ca

Extract

Cet article a trois objectifs. Premièrement, attirer l'attention sur quelques contributions de David Beach à l'historiographie de l'Afrique subsaharienne. Deuxièmement, faire reconnaître l'importance de quelques travaux portant sur l'Afrique subsaharienne inspirés par le féminisme et la théorie “queer”. Et troisièmement, démontrer une démarche d'historien qui promet de renforcer une analyse qui est généralement déjà solide. Je conclus avec quelques suggestions “beachiennes” pour faire augmenter l'intérêt chez les intellectuels et universitaires africains pour l'étude de l'histoire des femmes, de la différence sexuelle, et de la sexualité.

Commençons par une explication du mot “beachien.” David Beach était un des pionniers de l'étude de l'histoire des Shona du Zimbabwe et, plus récemment, de la province du Zambèze au Mozambique. Il était moderniste jusqu'au bout des ongles. Il croyait en la valeur et la possibilité de la quête de la vérité. Ce n'était pas une croyance naïve en une vérité immuable. Il avait plutôt conscience du fait que certaines assertions sont moins véridiques que d'autres. Selon David c'est la vocation de l'historie(ne) de lutter contre les distorsions, les erreurs et la démagogie autant des politiciens que des autres historien(ne)s. Alors, quand j'utilise le terme “critique beachienne”, je parle de méfiance envers les métanarrations simplistes et de l'histoire efficace (ou “usable” comme on dit en anglais). Ce parti pris implique la résolution—voire un fanatisme—pour vérifier chaque mot (et chaque chiffre) des données sans exception. Enfin, l'exemple de Beach évoque une loyauté profonde envers l'Afrique et une foi en l'apport positif du travail sérieux et honnête des historiens et historiennes au peuple du continent et pour leur bien.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © African Studies Association 2001

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Footnotes

1

Cet article a été présenté à la conférence de l'Association canadienne des études africaines à l'Université d'Alberta, en mai 2000. On y honorait David Beach de Zimbabwe qui est mort soudainement et tragiquement en février 1998. Je l'ai écrit en français pour présenter mes respects à David de façon concrète. Bien qu'il ne parlait pas français, il aurait apprécié ce geste simple envers l'esprit du multilinguisme, si important en les études africaines. Je suis redevable à Johanne Perron, Lisa McKnee et le Conseil de recherches en sciences humaines (Canada). Je voudrais aussi remercier Allison Goebel, Aline Germain-Rutherford, Dennis Cordell, Sandy Ramos, et Gill Beach pour leur encouragement et leur aide.

References

2 Quelques travaux féministes ou pro-féministe africaines qui m'ont inspiré dans ce type de critique sont ceux de Meena, Ruth, ed., Gender in Southern Africa: Conceptual and Theoretical Issues. (Harare, 1992)Google Scholar, Nfah-Abbenyi, Juliana, Gender in African Women's Writing: Identity, Sexuality, and Difference (Bloomington, 1997)Google Scholar et Zeleza, Paul Tiyambe, Manufacturing African Studies and Crises. (Dakar, 1997).Google Scholar Une vue d'ensemble de l'histoire et de la situation contemporaine des femmes de l'Afrique australe, écrite et produite dans l'esprit féministe et collaboratif est donnée dans Bookie M. Kethusile, Alice Kwaramba, Barbara Lopi (compilatrices). Beyond Inequalities: Women in Southern Africa. (Harare, 2000).Google Scholar

3 Grâce à l'érudition de David Beach j'ai acquis une nouvelle compréhension de la pratique historiographique pendant mes trois années comme son collègue à l'Université de Zimbabwe (bien entendu, le peu d'erreurs de compréhension qui ont pu se glisser dedans sont entièrement miennes). Par exemple, il faut voir en particulier sa critique méticuleuse de Thomas Hoffman: Beach, David, “Cognitive archeology and imaginary history at Great Zimbabwe,” Current Anthropology 39(1998), 4772.CrossRefGoogle Scholar David se considérait héritier de la tradition de Jan Vansina (voir, par exemple, les soucis exprimés dans Henige, David, “Gambit Declined: Pervasive Doubt about Systemic Doubt” in Harms, Robert W.et al., eds., Paths Toward the Past: African Historical Essays in Honor of Jan Vansina. (Atlanta, 1994), pp. 7796).Google Scholar On peut trouver deux évaluations détaillées de l'oeuvre de Beach chez Pikirayi, Innocent, “David Beach, Shona History, and the Archeology of ZimbabweZambezia 26(1999), 135–44Google Scholar, et Liesegang, Gerhard, “The Contributions of David Beach to the History of Mozambique Before 1918: a Balance and Perspectives for Further Research,” communication nonpubliée, présentée à la conférence de l'Association canadienne des études africaines à l'Université d'Alberta, mai 2000.Google Scholar

4 Hunt, Voir Nancy Rose, “Introduction” à Hunt, Nancy Rose, Liu, Tessie P., and Quataert, Jean, eds., Gendered Colonialisms in African History (Oxford, 1997)Google Scholar pour un compte-rendu récent de cette historiographie et, pour quelques exemples récents d'études en profondeur de l'histoire des femmes, du genre et de la sexualité en Afrique, N'Dri, Thérèse Assié-Lumumba, Les Africaines dans la politique: Femmes Baoulé de Côte d'Ivoire (Paris, 1996)Google Scholar; Morrell, Robert, ed., Special edition on Masculinities, Journal of Southern African Studies 24/4(1998)Google Scholar; Lindsay, Lisa A. and Miescher, Stephan, eds., Men and Masculinities in Modern Africa (Portsmouth NH, sous presse)Google Scholar; Mager, Ann Kelk, Gender and the Making of A South African Bantustan: A Social History of the Ciskei, 1945-1959 (Portsmouth NH, 1999)Google Scholar; Ogbomo, Onaiwa W., When Men and Women Mattered: A History of Gender Relations Among the Owan of Nigeria (Rochester, 1997)Google Scholar; Barnes, Theresa, ‘We Women Worked So Hard’: Gender, Urbanization and Social Reproduction in Colonial Harare, Zimbabwe, 1930-1956 (Portsmouth NH, 1999)Google Scholar, et (si vous me permettez) Epprecht, Marc, ‘This Matter of Women is Getting Very Bad’: Gender, Development, and Politics in Colonial Lesotho (Pietermaritzburg, 2000).Google Scholar

5 Le besoin de faire des recherches dans les langues indigènes d'Afrique ouvre un autre débat, souvent marqué par des partis pris et par la passion. Oyéwùmí, Voir Oyèrónké, The Invention of Women: Making an African Sense of Western Gender Discourses (Minneapolis, 1997)Google Scholar pour un point de vue plus ou moins Pan-Africaniste. Il faut signaler que tous les intellectuels africains ne sont pas d'accord avec elle. Au contraire, beaucoup ont reconnu récemment le fait que la discrimination contre les femmes fait partie des structures internes des langues africaines, tout comme elle est présente dans les langues européenes. Voir “Against all odds: African languages and literatures into the 21st century—Conference closing resolutions (Asmara declaration) of January 17, 2000. Voir aussi Onukawa, M.C., “The Chi Concept in Igbo Gender-NamingAfrica 70(2000), 107–17CrossRefGoogle Scholar, pour une examination des “deeply engrained gender biases” dans une culture parfois citée comme moins oppressive que les cultures européenes envers les femmes.

6 Berger, Iris and White, E. Frances. Women in Sub-Saharan Africa. Bloomington, 1999, 131–59.Google Scholar

7 Flora, EdouwayeKaplan, S., ed., Queens, Queen Mothers, Priestesses, and Power: Case Studies in African Gender (New York, 1997).Google Scholar

8 Green, December, Gender Violence in Africa: African Women's Responses (New York, 1999).Google Scholar

9 Nnaemeka, Obioma, ed. Sisterhood, Feminisms and Power: From Africa to the Diaspora (Trenton, 1998).Google Scholar

10 Berger, /White, , Women, p. 131Google Scholar, cite “lack of space” (besoin de garder des proportions raisonnables).

11 Voir, notamment, Knibiehler, Yvonne et Gontalier, Regine, La Femme an Temps des Colonies (Paris, 1985)Google Scholar, mais aussi, pour un exemple d'une autre époque, Marie-Andre, Soeur, La Femme Noire en Afrique occidentale (Paris, 1939).Google Scholar

12 David Beach a fait une recherche considérable et commençait à écrire une histoire trans-frontière quand il est décédé. Beach, Voir David, “As origens de Moçambique e Zimbabwe: Paiva de Andrada, a Companhia de Moçambique e a Diplomacia Africana, 1881-1981,” Arquivo 13 (April 1993), 580Google Scholar (une traduction de The Origins of Mozambique and Zimbabwe: The Companhia de Moçambique and African Diplomacy,” communication non-publiée, le Dept. d'Histoire, l'Université de Zimbabwe, 1992).Google Scholar

13 Beach, lui-même, n'a pas echappé à cet effet: voir Beach, David, “Zimbabwe: Pre-colonial History, Demographic Disaster, and the University,” Zambezia 26 (1), 533.Google Scholar

14 van Sertima, Ivan, ed., Black Women in Antiquity (New Brunswick NJ, 1985)Google Scholar, cité à plusieurs occasions dans Amadiume, Ifi, Re-Inventing Africa: Matriarchy, Religion, and Culture (London, 1997).Google Scholar

15 Bleys, Rudi C., The Geography of Perversion: Male-to-Male Sexual Behaviour Outside the West and the Ethnographic Imagination, 1750-1918 (New York, 1995).Google Scholar

16 Mrs.Lancaster, Hugh (E.G. Carbutt), “Some Minor Superstitions and Customs of the Zulus,” Folklore Journal 2(1880), 1215Google Scholar, cité dans Bleys, Geography, 198n107.

17 Johnston, H.H., British Central Africa (London, 1897), 408–09Google Scholar, cité dans Bleys, Geography, 198n107.

18 Hutchinson, Thomas, Ten Years Wandering Among the Ethiopians (London, 1861), 129–30Google Scholar, cité dans Bleys, , Geography, 125.Google Scholar

19 Col. MacLean, John, Compendium of Kafir Laws and Customs (Grahamstown, 1906), 115Google Scholar, cité dans Bleys, Geography, 124.

20 David, et Livingstone, Charles, Narrative of an expedition to the Zambesi (London, 1865), 284Google Scholar, cité dans Bleys, Geography, 124.

21 Voir, par exemple, Miller, Joseph, “Nzinga of Matamba in a New Perspective,” JAH 16(1975), 201–16CrossRefGoogle Scholar; Thornton, John, “Legitimacy and Political Power: Queen Nzinga, 1624-1663,” JAH 32(1991), 2540CrossRefGoogle Scholar ou (une présentation fictionalisée de l'ère d'exploration) Castilhon, J.L., Zingha, Reine d'Angola: Histoire Africaine, ed. Graille, Patrick et Quillerie, Laurent (Bourges, 1990[1769]).Google Scholar

22 Beach, David, “An Innocent Woman, Unjustly Accused? Charwe, Medium of the Nehanda mhondoro Spirit, and the 1896-97 Cental Shona Rising in Zimbabwe,” HA 25(1998), 2754.Google Scholar

23 Coquery-Vidrovitch, Catherine, African Women: A Modern History, trans. Raps, Beth (Westview, 1997Google Scholar, traduit de Les Africaines: L'histoire des femmes d'Afrique noire du XIXe au XXe siècle, Paris, 1994Google Scholar).

24 Ibid., 232, 47, and 16, réspectivement. Peut-on blâmer la traductrice? Dans l'original, par exemple, l'auteure a écrit “Dans des sociétés très oppressives pour les femmes, comme chez les Tswana, la sorcellerie, qu'elles en soient les adeptes ou les adversaires, étaient pour elles la seule échappatoire” (85) et “La vie commune se réduisait le plus souvent à la nuit passée ensemble” (30). Il me semble que ce n'est ni justifié (voir les travaux signalés en note 4) ni approprié pour une non-Africaine de passer un tel jugement.

25 Ibrahim, Huma, “Ontological Victimhood: ‘Other’ Bodies in Madness and Exile—Toward a Third World Feminist Epistemology” in Nnaemeka, Obioma, ed., The Politics of (M)Othering: Womanhood, Identity and Resistance in African Literature. (New York, 1997).Google Scholar

26 C'est encore plus fort dans l'original: “elles [les associations féminines] tiennent des discours étonnamment anti-féministes” (1994:251).

27 Maqagi, Sisi, “Who Theorizes?” dans Daymond, Margaret, ed., South African Feminisms: Writing, Theory and Criticism, 1990-1994 (New York, 1996), 2743.Google Scholar

28 Mikell, Gwendolyn, ed., African Feminism: The Politics of Survival in Sub-Saharan Africa (Philadelphia, 1997).CrossRefGoogle Scholar

29 Howard, Voir Rhocla E., “Occidentalism, Human Rights, and the Obligations of Western Scholars,” Canadian Journal of African Studies 29(1995), 110–29Google Scholar, pour une explication du terme occidentalisme, et Obioma, Sisterhood, pour les débats sur les rapports entre les féminismes occidentaux et africains (les auteures on résolus, à la fin du livre, de lutter contre les stéréotypes, l'exclusivité et le chauvinisme de quelques expressions d'“Africana womanism.”)

30 Oyéwùmí, Invention of Women.

31 Beach, David, “Teaching Zimbabweans University History: Some Notes,” communication nonpubliée, U. de Zimbabwe, Dépt. d'Histoire (Février 1987).Google Scholar