Hostname: page-component-76fb5796d-9pm4c Total loading time: 0 Render date: 2024-04-26T17:12:37.626Z Has data issue: false hasContentIssue false

Le voyage au paradis. La christianisation des traditions folkloriques au Moyen Age

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Giuseppe Gatto*
Affiliation:
Traduit de l'italien par Jean-Claude Schmitt)

Extract

Le Moyen Age a été traversé par toute une littérature de voyages dans l'audelà et de visions de l'au-delà. Cette littérature, qui illustre l'attrait du surnaturel et du merveilleux dans la sensibilité médiévale, présente selon les époques des caractères divers : perspective eschatologique dans les Dialogues de Grégoire le Grand, connotation politique dans les visions de l'époque carolingienne, récits plus complexes de voyages et de visions aux xiie et xiie siècles, au moment de l'éclosion du genre.

A propos de cette littérature de visions, et plus particulièrement de voyages en quête du paradis terrestre, A. Graf avait déjà attiré l'attention sur un texte bref de la première moitié du xiiie siècle ; contenu dans un manuscrit de la bibliothèque Raczinski de Poznan, il relate l'étrange aventure survenue à un fils de duc sur le versant italien des Alpes.

Summary

Summary

The article presents an analysis of a short 13th century taie, relating a journey to Paradise, shows how the process of Christianization hinged on three motifs : 1) the dual invitation; 2) time expressed in terms of marvels ; 3) the taboo transgressed. This text reveals a threefold code (aristocratie, peasant and clerical) sprung from oral tradition, as the anonymous author explicitly indicates, fully aware of the Christianizing process he is performing.

Type
La Culture Médiévale
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1979

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

Notes

1 Patch, E. R., The other world according to descriptions in médiéval literature, Cambridge, Mass., 1950 CrossRefGoogle Scholar; Ebel, U., «Die Literarischen Formen der Jenseits- und Endzeitvisionen », dans Grundriss der romanischen Literaturen des Mittelalters, vol. VI, t. I, Heidelberg, 1968, pp. 181215.Google Scholar

2 J. Le Goff, , La civilisation de l'Occident médiéval, Paris, 1964, pp. 197 ss.Google Scholar

3 Dans le livre IV des Dialogues, après avoir raconté les diverses visions de l'au-delà à la demande du diacre Pierre : « Quod hoc est, quaeso, quod in his extremis temporibus tam multa de animabus clarescunt, quae ante latuerunt; ita ut apertis revelationibus atque ostensionibus venturum saeculum inferre se nobis atque aperire videatur ? Grégoire répond : Ita est; nam quantum praesens saeculum propinquat ad finem, tantum futurum saeculum ipsa jam quasi propinquitate tangitur, et signis manifestioribus aperitur » (Migne, PL., LXXVII, 397). Cf. Bardy, G., « Les pères de l'Église en face des problèmes posés par l'Enfer », dans L'Enfer, Paris, 1950, p. 173.Google Scholar

4 Levison, W., Die Politik in den Jenseitsvisionen desfrùhen Mittelalters, Bonn, 1921; et dans Aus rheinischer und frànkischer Frùhzeit, Dusseldorf, 1948, pp. 229246.Google Scholar

5 Graf, A., Miti, leggende e superstizioni del Medio Evo, Turin, 1892-1893, vol. I, pp. 9092 Google Scholar; cf. Bar, F., Les routes de l'autre monde. Descentes aux Enfers et voyages dans l'au-delà, Paris, 1946, p. 113.Google Scholar

6 Schwarzer, J., « Visionslegende », Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1882, pp. 338351.Google Scholar

7 « Crescente et comedentium numéro res decrescere nesciunt… illo forsitan dispensante ibi substantiam rerum qui panibus quinque satiavit totidem milia hominum quique prius in nuptiis aquas mutavit in vinum. »

8 « Hec semita ducit ad domum meam, quam tamen nemo novit prêter me et animal, cui sedeo; alius si quis temptaverit, in via deceptus errabit. »

9 « Post angustiam montium in latissimam terram venit et leticie plenam… per viam artam et angustam, sed cujus finis duxit ad vitam et viventium terram. »

10 « … et ipse letabundus et laudans inebriatus ab ubertate domus dei. »

11 «faciunt… de Castro claustrum, de palatio templum; nomen et dignitas ducisfit abbatis. »

12 «… in terra viventium stetit hospes et solus inter mortuos liber. »

13 Aarne, A., Thompson, S., The types offolktales (FFC 184), Helsinki, 1961, pp. 161162.Google Scholar

14 Propp, V., Morphologie du conte, trad. frse, Paris, 1970.Google Scholar

15 L'on pourrait aussi appliquer facilement les schémas élaborés par A. Dundes pour l'analyse des récits nord-américains; l'on aurait un schéma de ce type : L. LL/L. LL/ Int./ Viol./ Cons., c'est-à-dire : « Lack-Lack Liquidated » (bis), « Interdiction », « Violation », « Conséquence ». Dundes, A., The morphology ofNorth American Indian folktales (FFC 195), Helsinki, 1964 Google Scholar; idem, « Structural typology in Nord American Indian folktales », dans Dundes, A., The study of folklore, Englewood Cliffs, N.J., 1965, pp. 206215.Google Scholar

16 Graf, A., Miti, Leggende…, op. cit., p. 92.Google Scholar

17 Meisen, K., «Der in den Himmel entrùckte Bràutigam », Rheinisches Jahrbuch fur Vokskunde, 1955, pp. 143144 Google Scholar : « Erant duo milites, socii valde familiares, quorum unus dixit ad socium suum » : « Amice, tali die curiam tenebo, et volo quod tu permittas mihi quod in ea servias. » Et Me respondit.- « Et ego tali die curiam tenebo, et volo quod tu similiter servias. Et permiserunt sibi mutuo. Antequam vero primus teneret curiam suam, socius suus defunctus est. »

18 K. Meisen, art. cité, pp. 118-175; idem, «Die spàteren volkstiimlichen Varianten der Erzàhlung von dem in den Himmel entrùckten Bràutigam », Rheinisches Jahrbuch fur Volkskunde, 1956, pp. 173-228.

19 Delarue, P., Teneze, M. L., Le conte populaire français, II, Paris, 1964, pp. 155156.Google Scholar

20 Mackay, D. E., The double invitation in the legend of Don Juan, Stanford Univ. California, 1943.Google Scholar

21 Petzoldt, L., Der Tote als Gast. Volkssage und Exempel (FFC 200), Helsinki, 1968.Google Scholar

22 Cf. aussi Petzoldt, L., « Don Juan in der volkstùmlichen Uberlieferung. Ein Beitrag zur Gliederung des Typs AaTh 470 A “The offended skull” », Laografia, 1965, pp. 354363.Google Scholar

23 Klapper, J., Erzàhlungen des Mittelalters, Breslau, 1914, pp. 356357 Google Scholar: « Erat quidam bibulus, iuxta quoddam morans cimiterium, quod omni vespere ebrius pertransibat. Nocte quadam, dum domi redire debebat, in via cymiterium transivit et cerebellum ibi reperit. Et commotus inquit : Quid iaces hic, miserum cerebellum ? Veni in domum meatn et ego de cena mea providebo. Cui respondit cerebellum : Progredere, quoniam sequar te. » Cf. idem, « Die Quellen der Sage vom toten Gaste », dans Eestschrift zur Jahrhundertfeier der Universitàt zu Breslau, Breslau, 1911, pp. 202- 231.

24 « Quamvis per modicam horam defuisset, que sibi tamen mille annos videbatur. » Dans la tradition folklorique plus récente, le thème du temps pénètre plus directement et explicitement dans la «légende» de Don Juan: Petzoldt, L., Der Tote als Gast, op. cit., pp. 178 ssGoogle Scholar (Estonie, Allemagne, Pologne, Irlande). Au sujet de l'inversion, on peut citer un parallèle dans la culture iranienne : dans l'enfer décrit dans l'Jrdâ Viràf Namak les tourments sont si durs que les condamnés après trois jours à peine pensent qu'ils y ont passé neuf mille ans ( Foot-Moore, G., Storia délie religioni, trad. it., Bari, 1961, vol. I, p. 294 Google Scholar). Pour le folklore, cf. Hartland, E. S., The science offairy taies, Londres, 1891, pp. 224 ss.Google Scholar

25 J. Klapper, , Erzàhlungen des Mittelalters, op. cit., pp. 347348.Google Scholar

26 Propp, V., « Les transformations du conte merveilleux », dans Morphologie du conte, op. cit., pp. 171-200. Cf. son étude « L'albero magico sulla tomba », dans V. Propp, Edipo alla luce del folclore, Turin, 1975, pp. 339.Google Scholar

27 Map, W., De nugis curialium, James, M. R. éd., Oxford, 1914, dist. I, cap. xi.Google Scholar

28 Paris, G., « Lais inédits. Guingamor », Romania, 1879, pp. 5059.Google Scholar

29 Meyer, P., « Les manuscrits des sermons français de Maurice de Sully », Romania, 1876, pp. 466487.CrossRefGoogle Scholar

30 Pour les récits de Jacques de Vitry, et de Polonais, Martin le, cf. Rôhrich, L., Erzàhlungen des spàten Mittelalters, vol. I, Berne-Munich, 1962, pp. 130131.Google Scholar

31 F.C. Tubach, Index exemplorum (FFC 204), Helsinki, 1969, n° 3378, p. 263. Le motif pénètre aussi dans l'hagiographie : Grosjean, P., « S. Caelani cum ave colloquium », Analecta Bollandiana, 1929, pp. 3943.Google Scholar

32 Dans l'édition due à C. Guarisco, Milan, 1972, p. 82.

33 Le texte est rapporté par Rôhrich, L., Erzàhlungen…, op. cit., pp. 135138.Google Scholar

34 Rôhrich, L., Erzàhlungen…, op. cit., pp. 124145.Google Scholar

35 J. Schwarzer, « Visionslegende », art. cité, pp. 338-339.

36 Pour un autre récit du xive siècle, cf. Herbert, J. A., Catalogue of romances in the department of manuscripts in the British Muséum, vol. III, Londres, 1910, pp. 584585 Google Scholar (provenant du monastère des Augustins de Waldhausen, Autriche). A un récit du xve siècle fait référence Mussafia, A., Uber die Quellen des altfranzôsischen « Dolopathos », Vienne, 1865, pp. 1416.Google Scholar Dans ces deux cas l'histoire est très semblable, y compris dans les détails, à la version citée par J. Schwarzer, « Visionslegende », cité.

37 Korner, H., « Chronica novella, usque ad annum 1435 deducta », dans Eccard, J. G., Corpus historicum medii aevi, Francfort-Leipzig, 1743, c. 452 ss.Google Scholar

38 « Et ad ipsius preces sepulchrum sponse sue aperitur. Sponsa eius recens et facie rutilons invenitur, que brachys extensis iuvenem monumentum ingredientem inter brachia complectitur ipso obdormiente in filio Virginis gloriose omnibus fratribus cernentibus. »

39 A cette contraction/dilatation du temps correspond quelque chose d'analogue concernant l'espace, dans la vision de Gunthelm chez Hélinand de Froidmont (Migne, P.L., CCXII, 1060- 1063) : Gunthelm voit une « capellam in aère pendentem » qui lui apparaît « parvam » : mais saint Benoît lui dit : » Nescis, quam lata et ampla, quam alla et pretiosa sit intus. » Et en effet l'intérieur est assez ample pour accueillir les saints et la Mère de miséricorde.

40 Que l'on veuille ou non penser à une origine celtique, par analogie avec ce qu'a affirmé L. L. Hammerich pour le motif du chant de l'oiseau ( Hammerich, L. L., « Mônch Félix », Stammler, W. et Langosch, K., Die deutsche Literatur des Mittelalters. Verfasserlexikon, III, Berlin, 1943, pp. 425427 Google Scholar), ce n'est pas un problème d’ « origine » qui est intéressant ici. Pour la large diffusion du motif dans le folklore européen : Hartland, E.S., The science offairy taies, op. cit., chap. VII, VIII, IX : « The supernatural lapse of time in fairyland », pp. 161 ss.Google Scholar

41 L'équivalence d'un jour divin à mille ans terrestres est attestée dans le judaïsme postbiblique ( Graves, R., Patai, R., I miti ebraici, trad. it, Milan, 1969, pp. 5253 Google Scholar); voir aussi le passage du Coran, 2, 261, où Allah révèle sa puissance en faisant mourir puis ressusciter un homme qui croit être mort la veille ou quelques heures auparavant, alors que cent années se sont écoulées en réalité.

42 Dans le même manuscrit du xive siècle cité à la note 36, un récit parle d'un prêtre qui accepte l'invitation d'une jeune fille à aller célébrer la messe dans le château de sa dame. A l'offertoire, la dame descend « de superiori parte ecclesie » et dépose un petit enfant sur l'autel. Au moment de la consécration, l'enfant va dans les mains du prêtre, et celui-ci, en extase, poursuit l'élévation pendant une période qui en réalité dure 500 ans. Quand il retourne dans sa paroisse, à la première bouchée de nourriture, il devient un vieillard, puis il reçoit les sacrements et meurt. ( Herbert, J. A., Catalogue of romances…, op. cil, p. 591.Google Scholar)

43 Pour un rapprochement du Lai de Guingamor des légendes et des interdits mélusiniens : cf. Lecouteux, C., « La structure des légendes mélusiniennes », Annales ESC, 1978, pp. 294306.Google Scholar

44 Au contraire, l'interdit est également implicite dans la « Leggenda di tre santi monaci, i quali andarono al Paradiso terrestre », dans Zambrini., F. Miscellanea di opuscoli inediti o rari dei sec. XIV e XV, Turin, 1891, pp. 165178 Google Scholar; une autre version, dans laquelle les trois moines demeurent au paradis 700 ans et non 300 ans, dans D'Ancona, A., Bacci, O., Manuale délia letteratura italiana, Florence, 19131914 Google Scholar, 2e éd., vol. I, pp. 437 ss. Un examen de cette légende italienne du xive siècle, dans Coli, E., II paradiso terrestre dantesco, Florence, 1897, pp. 135 ss.Google Scholar

45 Kôhler, R., « Uber den Trattato délia superbia e morte di Senso », dans Kleinere Schriften (Boite, J., éd.), vol. II, Berlin, 1900, pp. 406435 Google Scholar, examine quelques récits dont le schéma est : 1) un jeune homme va dans une terre merveilleuse dans laquelle on ne s'aperçoit pas de l'écoulement du temps et où personne ne meurt; 2) il désire revoir sa terre et ses parents; 3) il lui est interdit de descendre de cheval; 4) il transgresse l'interdit : aussitôt la Mort arrive. Rapproché de ce récit, notre texte pourrait révéler, peut-être, une lointaine analogie avec un mythe de l'origine de la mort ? De R. Kôhler il faut aussi rappeler : « Zur Légende vom italienischen jungen Herzog in Paradiese », Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1882, pp. 96-98; réédité avec d'importants suppléments de Bolte, J., dans Kleinere Schriften, vol. II, pp. 224241.Google Scholar

46 Plusieurs exemples dans Hartland, E. S., The science offairy taies, op. cit. pp. 37 ssGoogle Scholar; pour des interdits analogues dans des récits de peuples « primitifs » : Roheim, G., Les portes du rêve, trad. frse. Paris, 1973, pp. 304, 305, 306, 308, 309, 328Google Scholar; voir en outre à la page 309 un récit Kiwai dont la structure présente quelque analogie avec notre texte.

47 « At juvenis plenus adhuc gratia et epula spiritus, quam de terra viventium attulit, comedere noluit, cogitans non cibum qui périt, sed qui permanet in vitam eternam… fncipit tamen manducare panent hominum, qui paulo ante manducaverat panem angelorum. »

48 Quelque chose d'analogue se trouve dans des textes japonais qui traitent de voyages dans l'au-delà : tandis que l'on ne doit pas manger dans la « terre des morts », au paradis le « voyageur » se voit offrir la nourriture merveilleuse du ciel; C. Blacker, « Other world journeys in Japan », dans Davidson, H. R. E., The journey to the other world, Londres, 1975, pp. 4272.Google Scholar

49 Derrière la scène de chasse on pourrait entrevoir quelque chose d'autre, si l'on accepte un parallèle avec les deux chiens gardiens ou guides de l'au-delà dans diverses mythologies indoeuropéennes : G. Roheim, Les portes du rêve, op. cit., pp. 294-295; cf. Widengren, G., Die Religionen Irans, Stuttgart, 1965, p. 40 Google Scholar; Eliade, M., Histoire des croyances et des idées religieuses, vol. I, Paris, 1976, p. 345.Google Scholar

50 Il n'est pas nécessaire de citer la vaste littérature ethnographique sur les relations entre morts, récoltes, abondance, dans le contexte de civilisations agricoles. De même, il ne sera pas nécessaire de rappeler que la couleur blanche de la monture n'est pas indifférente, étant donné son caractère fantomatique qui la lie au monde des morts.

51 « 19. Quod de Castro claustrum factum et omnia in melius commutata. Expectantes sed non spectantes pater et mater filium suum cogitant de futuro et toto corde conversi ad deum de pompa seculi dei ordinavere servitium. Locum de quo amissus estfilius, faciunt habitaculum sibi, de Castro claustrum, de palatio templum. Vasa mense principis in vasa fundantur altaris, ornatus curie fit ecclesie, nomen et dignitas ducis fit abbatis; pectora manibus, genibus pavimenta tunduntur, ubi prius nuge agebantur et ludicra; ubi antea bos vidue vorabalur, viduis orphanisque datur elemosina; stipendia militum, dona scurrarum, munera hystrionum fiunt monachorum sustentationes, peregrinorum esceptiones, subsidia pauperum, levamina infirmorum, sed et omnium solatia indigentium. Sic iocus, sic res, sic mutati sunt animi. Et haec mutatio dextere excelsi. »

52 Krzyzanowski, J., « Legend in literature and folklore », Fabula, 1967, pp. 111 ssCrossRefGoogle Scholar; pour le procès de transformation du conte en légende, cf. l'étude de Le Goff, J., « Mélusine maternelle et défricheuse », Annales ESC, 1971, pp. 587622.Google Scholar

53 Goff, J. Le, « L'Italia fuori d'Italia », dans Storia d'italia, vol. II, Turin, 1974, pp. 1974 ss.Google Scholar

54 « 1. Rem aggredio dicere dictam mihi, a me creditam, jocundam miraculo, utinam et firman testimonio. Testem ejus dare non possum; cum tamen uni viro hic rumor asserebatur, qui certe Médis et Persis, Graecis ac barbaris ad fidem faciendam sufficeret, si ipse relulisset : Episcopus, utferiur, Banbergensis Eberhardus Roma veniens attulit eum. In Alpibus Italiae accepit illum in monasterio Cluniacensis ordinis, cujus nomen incognitum. 2. Qualiter episcopus susceplus est et edoctus hanc hystoriam. Hoc, ut diximus, monasterium episcopus adiit déclinons aestus Augusti, qui, ut ajunt, gravis est ad portandum etiam indigenis, magis autem peregrinis. Cum Caesare tune fuit in Italia, et Mue ei declinandi licentia. Susceptus a pâtre monasterii beneficium bénigne suscepit, familiariter aliquandiu degens ibi vidensque ordinem, mores et opes monasterii. Querit ab abbate domus etatem. fundatorum dignitatem, animadvertans et considérons in omnibus disciplinam domus, ordinis honestatem. Respondit abbas mira quedam et grandia, que nullus ei crederet, nisipatesceret res ipsa et annalibus suis haberetur asscripta. »

55 « 35. Apollogeticum scriptoris et quod hystoria hec contempni non debeat nec contentione defendi. Historiam hanc scripsi ut comperi, fions ejus non sum ego, canalis illius esse non abnuo. Non abnuo, inquam, qui rivum ad me venientem de ore viri spiritualis exceperim et sine diminulione trajecerim nec adjectione corruperim. De meo, fateor, nil affinxi salvo eo quod scriptoribus licet, si rébus consequentias dedi, si novis apte vetera miscui, si lignum Moysi, si salem Helisei, si denique ex aqua vinum Christi adjunxi, non certe fallendi causa, sed gratia dulcoris augendi. Nec moveat, quod agrestis et acefala videtur historia non habens nomina personarum vel locorum apposita. Hinc si dignetur accipere, lectori volo, si valeo, satisfacere. Is qui mihi retulit, illiteratus fuit, nec ipse, ut vulgo dicitur, ex suo digito suxit, sed a literato rem audiens materne lingue verba retinuit, alterius lingue vocabula retinere non potuit : Ego referentem libenter audivi, materiam, fateor, amavi, scripto judicavi dignam, velim et a me bene digestam. Hoc in fine adicio, quod in predicti Eberhardi episcopi verba ego jurarem et vere hystoriam veram si ipsum habuit relatorem. Nulli tamen fidem extorserim, sed nec ulli suaserim rem contempnere, cum vera possit hystoria esse et sine teste, et pium sit, id quod edificat et dei redolet gloriam facile credere. Sane lectorem exoratum velim ne de levitate me judicet, qui scribam omne quod audio; teneat mecum apostoli in hac parte sententiam : « Omnia probate; quod bonum est tenete, ab omni specie mala abstinete vos ». Ceterum curam meam et ipse suscipiat, cum beato Job rem, quam nescit, diligentissime investiget, et cum invenerit, de Ma, sicut dignum est, judicet. Sciscitetur, queso, de hystoria ista, si ab episcopo dicta, quo loco accid(er)it, que personarum vocabula sint, si plus seu minus stilus noster gesta sonuerit, et quidquid veritas inveniendo probaverit, hoc et mihi cum Mo pre meo placebit, immo nec meum nisi quod verum est erit. »

56 Lecoy de La Marche, A., Anecdotes historiques, légendes et apologues, tirés du recueil inédit d'Etienne de Bourbon, Paris, 1877.Google Scholar

57 Voir l'étude de J. Le Goff, « Mélusine maternelle et défricheuse », cité.

58 Le Goff, J., « Culture cléricale et traditions folkloriques dans la civilisation mérovingienne », Annales ESC, 1967, pp. 780791 Google Scholar; «Culture ecclésiastique et culture folklorique au Moyen Age. Saint Marcel de Paris et le dragon », dans Ricerche storiche ed economiche in memoria di C. Barbagallo, Naples, 1970, pp. 51 -90; « Mélusine maternelle et défricheuse », cité.

59 En ce qui concerne les exempta comme point de rencontre entre culture folklorique et culture savante, je renvoie aux séminaires coordonnés par J. Le Goff à l'École des hautes études en sciences sociales.