RÉSUMÉ.Cette contribution s'interroge sur les origines et sur les premières utilisations des forces navales dans la région de la mer Égée, de c. 700 à 480 av. J.-C. En comparant les nombreux témoignages iconographiques et textuels avec les très rares preuves archéologiques, elle démontre que les grandes flottes de navires de guerre n'apparurent que tardivement et probablement seulement en Égypte, dans l'empire Perse et chez les Grecs au VIe siècle av. J.-C.
ABSTRACT.This contribution discusses the origins and early use of naval forces in the Aegean Sea region from c. 700 to 480 BC. It assesses the very limited archaeological evidence and uses the more abundant iconographic and textual evidence to show that large fleets of purpose-built warships were a late development, probably only appearing in Egypt, in the Persian Empire and among the Greeks in the 6th century BC.
Lorsque, selon Homère, les Achéens partent à la conquête de Troie, c'est grâce à une véritable flotte de guerre. Mais il faut attendre sept siècles par rapport à la logique du mythe, trois siècles par rapport à l'époque de sa rédaction, pour qu'une telle flotte ait une réalité historique dans le monde grec, soit à l'époque où nous la voyons en action à Salamine (480 av. J.-C.), lors de la seconde guerre médique. N'est-ce qu'un paradoxe ou est-ce une réalité?
Si tout navire peut être amené à se défendre et donc à être transformé, que cela ait été prévu au départ ou non, en bateau de guerre, tout navire n'est pas nécessairement apte à faire partie d'une flotte de guerre. En effet, une flotte de guerre suppose au moins trois choses : une unité de conception dans l'emploi des navires, ce qui demande à la fois une volonté politique et une identification parfaite des missions, et donc une stratégie générale ; une unification au moins minimale dans les types de navires et des possibilités nautiques qui les caractérisent, ce qui exige que chacun d'entre eux puisse naviguer en groupe et non de façon totalement indépendante de son voisin ; une unité d'utilisation, ce qui suppose à la fois une identification suffisante des possibilités d'attaque et de défense ouvertes à chaque type de navire et la mise au point d'une tactique qui intègre à la fois les aléas du combat propres à chaque navire et la recherche du but commun.