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Parole, matière première de l'histoire

Published online by Cambridge University Press:  22 September 2017

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Sous le titre de Recherches sur la nature et les jonctions du langage, Brice Parain vient de faire paraître un livre original, plein d'idées et de suggestions : livre de métaphysicien à la fois et de psychologue, nourri de Pascal et de Descartes, de Hegel et de Nietzsche et qui ne vaut pas seulement par la hardiesse et l'ampleur de ses thèses maîtresses — mais par le détail des analyses, et par leur ingéniosité.

Par tout ce qu'il a de proprement philosophique, il est bien évident que l'ouvrage échappe à ma compétence comme aux préoccupations normales de notre publication. Mais par tout ce qui étaie, illustre, justifie ses thèmes et ses hypothèses, c'est un livre que l'historien retiendra. Parce que — (je crois bien avoir été le premier, le tout premier parmi œux de ma génération à le dire et à bien étonner, ce faisant, non seulement mes confrères en Clio, mais plus encore peut-être les linguistes, si étroitement, si jalousement murés alors dans leur spécialité) — parce que tout livre sur la parole est fait pour intéresser l'historien. Même s'il ne suit pas les vieux errements de ses pères et ne définit pas l'histoire, une discipline qui s'appuie sur la parole écrite, je veux dire sur les textes — il n'en est pas moins devant la parole, nécessairement, comrnie l'ouvrier devant la matière même de son travail de spécialiste. Autant que personne, plus que personne, il est sensible au mystère de la parole.

Type
Questions de Fait et de Méthode
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1943

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References

page 89 note 1. Chez Gallimard, 1943, in-8°, 196 p., Collection Bibliothèque des Idées.

page 90 note 1. Je ne résiste pas au plaisir de citer ce joli passage qui donnera une idée nette au lecteur de la manière de Brice Parain : « Le langage, agissant contre l'ordre de la liberté pure, est un personnage gênant dans notre commerce avec le monde… Ni sujet ni objet ; n'adhérant ni à l'un ni a l'autre ; suiet lorsque je parle, sujet lorsque je m'écoute ou me lis, distinct pourtant du soleil, de la nourriture et des autres êtres avec lesquels je suis en relation d'existence, distinct du moi pareillement, qui suis tantôt silencieux, tantôt loquace, et souvent silencieux par plénitude, loquace par vanité. Il ne m'envoie pas de gifle si, l'ayant courbé, je le lâche. Fst-il sans effet cenendant sur moi et sur personne ? Visiteur muet, assis sur la chaise d'à côté, qui ne révèle rien de soi et attend tout d'autrui, sa présence seule est, importune. Mais il est. plus personnel encore que fâcheux. Si je le néglige il se venge comme sur le berger de la fable qui crie au voleur mal à propos. Il n'exécute pas, il châtie. » (p. 182).