Hostname: page-component-84b7d79bbc-lrf7s Total loading time: 0 Render date: 2024-07-30T13:40:09.726Z Has data issue: false hasContentIssue false

Quelques précisions relativement au nouveau projet de convention additionnelle à la Convention de Genève du 27 juillet 1929, concernant l'emploi des aéronefs sanitaires en temps de guerre1

Published online by Cambridge University Press:  19 April 2010

Ch.-L. Julliot
Affiliation:
docteur en droit, membre du Comité directeur du Comité juridique international de l'aviation, vice-président des Amis de l'aviation sanitaire.

Extract

Ma première étude publiée par la Revue internationale de la Croix-Rouge dans son numéro 194 de février 1935 (p. 79 et suiv.) m'a valu un certain nombre de demandes d'explications qui m'obligent à quelques précisions. C'est surtout à M. Paul Des Gouttes, à qui m'unissent près de douze années d'une intime collaboration dans ce domaine de l'aviation sanitaire, que je désire fournir ces explications.

Type
Review Article
Copyright
Copyright © International Committee of the Red Cross 1936

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

page 184 note 1 Des Gouttes, p. 134.

page 185 note 1 Je dis ne voir absolument rien qui s'y oppose, mais ce point demande justification en ce qui concerne le personnel civil.

Si on lit attentivement l'art. 21 de la Convention de 1929, on y voit que le personnel sanitaire permanent, ayant droit à une protection également permanente, c'est-à-dire celui qui est visé aux articles 9, alinéa 1er, 10 et 11, est divisé en deux catégories:

10 le personnel dont les attributions sont définies au premier alinéa de l'art. 9, qui appartient au Service de santé et qui, portant un uniforme militaire, n'est tenu, en plus du brassard, à posséder qu'«une pièce d'identité consistant soit en une inscription dans le livret militaire, soit en un document spécial», mais sans qu'une photographie soit exigée;

20 les personnes appartenant aux sociétés de secours nationales ou neutres, ayant les mêmes attributions qu'au 10 ci-dessus et portant aussi un brassard, mais «qui n'ont pas d'uniforme militaire» et qui, à ce défaut, doivent être «munies par l'autorité militaire compétente d'un certificat d'identité avec photographie, attestant leur qualité de sanitaire».

Du personnel civil, il n'est pas question ici. Faut-il en conclure qu'il ne serait pas au bénéfice de la Convention? C'est tout à fait insoutenable. Il y a dans le Code civil français un article 1156 qui dit qu'«on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes». C'est ce principe de bon sens qui doit ici nous guider. Or, la commune intention des parties a été d'admettre au bénéfice de la Convention, en plus du personnel militaire sanitaire, le personnel volontaire des sociétés de secours nationales «dûment reconnues et autorisées par leur Gouvernement» et des sociétés de secours neutres opérant avec l'autorisation du belligérant. Ce personnel volontaire doit donc sa protection à ce que la Société de secours, à laquelle il appartient, est agréée par le Service de santé de l'un des belligérants, dont elle est, en quelque sorte, la mandataire. En tant que mandataire, elle recrute du personnel civil et l'affecte à ses formations; tout le personnel des hôpitaux de la Croix-Rouge est ainsi au bénéfice de la Convention. Pourrait-on admettre un seul instant que le même personnel civil, recruté par le mandant, qui est le Service de santé, personnel affecté à une formation militaire, serait moins bien traité? Autant vaudrait dire que, pour recruter du personnel civil, le Service de santé devrait le faire immatriculer sur les contrôles d'une société de secours, en un mot, qu'il pourrait faire indirectement et indirectement seulement ce qu'il n'aurait pas le droit de faire directement. Ce serait proprement contraire à la commune intention des parties contractantes et à l'esprit de la convention.

Au surplus, pour se convaincre de cette commune intention, il n'est que de se reporter à la rédaction de l'article correspondant de la Convention de 1906, qui était alors l'art. 20: «Le personnel protégé en vertu des art. 9, alinéas 1er, 10 et 11, y était-il écrit, porte fixé au bras gauche un brassard… accompagné d'un certificat d'identité pour les personnes rattachées au Service de santé des armées et qui n'auraient pas d'uniforme militaire».

Cette rédaction très générale comprenait aussi bien le personnel civil du Service de santé que le personnel civil des sociétés de secours. La nouvelle rédaction a voulu apporter des précisions, imposer des photographies, mais elle n'a pu vouloir, sans le dire expressément, opérer cette révolution qui aurait consisté à retirer au personnel civil recruté directement par le Service de santé le bénéfice de l'immunité, autrement dit interdire pratiquement le recrutement de ce personnel dans les formations de l'avant tout au moins. La vérité est que les rédacteurs de 1929 n'ont pas pensé à cette catégorie de personnel civil et ils en sont excusables, car au cours de la dernière guerre, si les formations sanitaires alliées de l'arrière ont recruté et employé du personnel civil, celles de l'avant y ont eu très peu recours et la question de l'immunité de ce personnel ne s'est pas posée.

Elle ne s'est pas posée parce que les circonstances ne l'ont pas voulu: au cours de cette guerre, on a vu, sur le front français, des femmes, anglaises le plus souvent, qui conduisaient des automobiles sanitaires employées sur le front même; elles portaient le brassard et il ne m'est pas revenu qu'il y ait eu la moindre difficulté à ce sujet.

De même, en 1914, quand le 20e corps d'armée a quitté Nancy, le Service de santé a réquisitionné sur place des automobiles civiles et les a aménagées pour le transport des blessés couchés. Ces voitures étaient conduites par des civils dégagés d'obligations militaires et ont assuré leur service jusqu'à la fin de 1914. Le Service de santé français leur avait donné des brassards et aucune protestation n'a été formulée. Il est vrai qu'aucun de ces conducteurs n'est tombé au pouvoir de l'ennemi et il est vrai également que la convention en vigueur était celle de 1906, mais nous venons de voir que son esprit se perpétue dans celle de 1929. M. Des Gouttes, à la page 157 de son Commentaire de la Convention de 1929, admet d'ailleurs que le personnel civil réquisitionné en vertu de l'art. 5 de la Convention, pouraider momentanément à l'œuvre de secours aux blessés, peut valablement porter le brassard. A plus forte raison, le personnel régulièrement rattaché au Service de santé et à sa solde.

En somme, au cours de la dernière guerre — répétons-le — la question de l'immunité du personnel civil ne s'est pas posée dans la pratique. Il n'en serait pas de même dans un conflit éventuel, où la France serait intéressée. Le Service de santé militaire français a prévu formellement, dans certaines de ses formations sanitaires mobiles de campagne (hôpitaux d'évacuation primaire et secondaire, hôpitaux complémentaires d'armée), qui opéreront normalement dans la zone des armées, l'emploi d'un personnel civil recruté sur place, soldé par lui et qui sera exclusivement utilisé au service des malades et blessés en traitement, pour l'entretien des locaux et pour l'exécution des services généraux indispensables au fonctionnement d'un centre hospitalier. Ce personnel civil devra porter le brassard et posséder le certificat d'identité avec photographie attestant sa qualité de sanitaire. La vertu de ce brassard et de cette pièce ne saurait être révoquée en doute. Et elle saurait d'autant moins l'être, si le belligérant employant ce personnel a eu le soin de se conformer à l'art. 13 de la Convention voulant que, dès le début des hostilités, les belligérants s'entendent au sujet de la correspondance des grades de leur personnel sanitaire, afin que celui-ci, en cas de capture et pendant la durée de leur rétention, bénéficie du même traitement que le personnel correspondant du belligérant capteur. A cet égard, M. Des Gouttes (p. 86) dit que le personnel volontaire est entièrement assimilé, quant à ses devoirs et ses droits, au personnel officiel. Le personnel civil du Service de santé, comme le personnel civil des sociétés de secours, doit, en conséquence, faire l'objet d'une entente relativement à la correspondance sinon des grades, du moins des différentes catégories, auxquelles ses diverses unités peuvent appartenir, et cela ne serait-ce que pour la détermination du droit à la solde. Cette entente entre les belligérants est de nature à lever toute espèce de doute relativement à l'immunité du personnel civil. Il n'en est pas moins fâcheux de constater la lacune de la Convention de 1929 relativement au sort d'une catégorie non négligeable de personnel sanitaire.