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Genèse et fonctionnement de l'État clientéliste en Côte d'Ivoire

Published online by Cambridge University Press:  28 July 2009

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Au moment de leur accession à l'indépendance et au statut d'État légal, les pays africains se sont tous inspirés du modèle occidental d'État-nation unitaire et centralisateur, dans un contexte de profondes divisions sociales donnant libre cours aux particularismes sociaux de toutes sortes, particularismes ethniques, régionaux, religieux, linguistiques, culturels, économiques, démographiques, etc. Posant des obstacles à l'unification nationale, ces profondes divisions du corps social ont fait apparaître des tensions, des conflits, des affrontements et des luttes d'intérêts particularistes qui ont eu, et continuent d'avoir des répercussions sur les conditions d'organisation du nouvel État, sur les modes d'exercice du pouvoir et sur le processus général de développement de la société dans son ensemble.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Archives Européenes de Sociology 1985

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References

(1) Cf. ouvrage, notre, Tribalisme et parti unique en Afrique Noire. Esquisse d'une théorie générale de l'intégration nationale (Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1977)Google Scholar.

(2) Fraternité-Hebdo, 31 octobre 1970, no 601, Ve Congrés du PDCI, Rapport moral par le secrétaire général du parti, p. 20.

(3) Nous avons abouti à une typologie des partis uniques africains d'après le degré de concentration et de personnalisation du pouvoir en leur sein: a)le parti unique composite à direction collégiale, b)le parti unique centralisateur à direction populaire, c)le parti unique atomistique à direction personnelle. Cf. ouvrage, notre, Tribalisme et parti unique en Afrique Noire, op. cit. pp. 240250Google Scholar.

(4) Ce lien entre développement politique et développement économique en Côte-d'Ivoire est bien analysé par Fauhe, Y.-A. et Médahd, J.-F. dans État et bourgeoisie en Côte-d'Ivoire (Paris, Karthala, 1982)Google Scholar.

(5) Plusieurs études ont été faites sur l'extraversion de l'économie ivoirienne depuis les cèlbres études de Amin, Samir, Le développement du capitalisme en Côte-d'lvoire (Paris, Minuit, 1967)Google Scholar, L'Afrique de l'Ouest bloquée (Paris, Minuit, 1971)Google Scholar, et L'accumulation à l'échelle mondiale (Paris, Anthropos, 1971)Google Scholar.

(6) L'institution d'une primature (Premier ministre) puis d'une vice-présidence, envisagées successivement en 1975 et en 1980 dans une suite de révision des textes constitutionnels, demeure jusqu' à ce jour la quadrature du cercle. Cf. notre article Succession of the charismatic leader: the Gordian knot of African Politics, Daedalus, Journal of the American Academy of Arts and Sciences, III (1982) 2, 11–28)Google Scholar.

(7) Des oppositions de clans ou de lignages appartenant à la même tribu, et dont les villages ne sont distants que de quelques kilomètres, conduisent ainsi à la création de plusieurs sous-préfectures pour satisfaire les uns et les autres. Exemples: les sous-préfectures de Gbon, Kouto et Kolia distantes de 3 à 7 kilomètres; celles de Sama-tiguila et de Kaniasso situées sur les deux flancs d'une rivière; celles de Satama So-koro (Satama ancien) et de Satama So-kouta (Satama nouveau); celle de Tiénig-boué contestée par le village voisin de Bouandougou, sans parler des deux sous-préfectures que l'on vient de supprimer pour manque d'administrés (insuffisance de population) dit-on, celle de Samango et celle de Gbéléban (qui aurait été créée à la demande d'un riche transporteur, alors président du syndicat des transporteurs et originaire de ce village), etc. Les exemples de sous-préfectures créées pour des raisons politiques, et non pas techniques, sont innombrables.

(8) Fraternité-Matin, le grand quotidien d'ivoirien d'information du 4 février 1981, n0 4883, p. 11.

(9) Les fonctions de régulation sociale de la « palabre africaine » et du « dialogue » à l'ivoirienne sont analysées dans notre article Démocratie de l'arbre à palabre et bois sacré (Essai sur le pouvoir parallèle des sociétés initiatiques africaines) [Colloque: Sacralité, pouvoir et droit en Afrique, Paris, 2–5 janvier 1980Google Scholar, Université de Palis 1, Panthéon-Sorbonne, Laboratoire d'anthro-pologie juridique], Annales de l'Université d'Abidjan, Série D (Lettres), XIII (1980), 67106Google Scholar.

(10) Faure, Y.-A. et MÉdard, J.-F., État et bourgeoisie en Côte-d'Ivoire, op. cit., p. 55Google Scholar.

(11) Ibid. p. 55.

(12) Interpreéer cette interaction entre différentes catégories sociales uniquement en termes de lutte de classes selon la conception marxiste classique (classe bourgeoise contre classe prolétarienne) voilerait certains aspects très importants des mécanismes sociaux actuellement en jeu dans la plupart des États africains. Nous ne voulons pas nier l'émergence de véritables classes sociales dans la formation sociale qui nous occupe: il y a bien l'équivalent d'une classe bourgeoise regroupant l'ensemble des catégories dirigeantes en question; et d'une classe pro-létarienne regroupant toutes les autres catégories sociales. Mais les relations de dépendance ethnique, le haut degré de clientélisme et l'atomisme social qui leur est lié freinent énormément le processus de formation de classes sociales proprement dites, le prcessus de formation d'une conscience de classe notamment pour les catégories correspondant au prolétariat, empêchant ainsi la perception des conflits en termes de lutte de classes. Nous nous placons ici bien sûr au niveau des acteurs politiques et sociaux eux-mêmes, et non à celui de l'analyste (qui peut percevoir la situation en termes de lutte de classes). Mais les membres des catégories dirigeantes tissent des liens de clientèle et de dépendance personnelle ou ethnique avec les membres des autres catégories sociales, si bien que l'analyste, pour aboutir à une interprétation objective des relations actuellement établies entre les dirigeants et la société, devra orienter ses investigations sur les interactions entre ethnicité, classes sociales et État, à la manière de Young, Crawford dans son article, Patterns of social conflict: state, class and ethnicity, Daedalus, op. cit. 7198Google Scholar, ou de Joel SAMOFF, Pluralism and conflict in Africa: ethnicity, interests, and class in Tanzania (Congrès mondial de science politique, Comité de recherche sur le pluralisme socio-politique, Rio de Janeiio, août 1982). Dans la même optique, celle de Gramsci par exemple, la classe politique (regroupant les catégories dirigeantes) peut êltre considérée comme un groupe hégémonique accaparant toutes les positions stratégiques de pouvoir au sein de la société afin de per-pétuer sa domination sur les autres groupes, ce groupe hégémonique pouvant être une classe sociale ou un groupe ethnique, géné-ralement une combinaison des deux par le biais du clientélisme, comme nous l'avons interprété dans notre article: Le tribalisme, stratégie de participation au pouvoir dans les États africains (de la démocratic médiatisée à l'illusion démocratique) [Colloque État et société en Afrique Noire, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, Centre de recherches africaines, 19–20 septembre 1980], Annales de l'Université d'Abidjan, Série D (Lettres), XIV (1981)Google Scholar; ou encore dans la Revue francaise d'histoire d'outremer, LXVIII (1981), nos 250–251–252–253, pp. 311324Google Scholar.

(13) Cette structure polyarchique du pouvoir dans les gouvernements africains de parti unique, issue du dosage ethnique et du clientélisme, est particulièrement mise en évidence dans l'article auquel nous venons de faire allusion (Tribalisme, stratégie de participation au pouvoir…) et dans ouvrage, notre, Tribalisme et parti unique en Afrique Noire, op. cit. pp. 308323Google Scholar.

(14) Cf. notre rapport: La gestion démocratique du pluralisme socio-politique en Afrique, op. cit. (où nous traitons du cas ivoirien en le comparant à d'autres cas).