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La zone économique exclusive dans la pratique des États

Published online by Cambridge University Press:  09 March 2016

Francis Rigaldies*
Affiliation:
faculté de droit, Université de Montréal
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Summary

The use of the concept of an exclusive Economie zone has increased since the adoption of the United Nations Convention on the Law of the Sea. However, the characterization of this zone varies greatly between States. This article presents an exhaustive survey of the concept of an exclusive Economie zone. The author discusses the types of jurisdiction exercised by States in their uses of an exclusive Economie zone. Disparity exists between the provisions of the Convention and State practice in some specific areas: for example, the provisions on the environment and on scientific research. Despite these exceptions, the author maintains that the basic tenets of the Convention are respected in State practice. State declarations as well as arbitral and judicial decisions show that the Convention and State practice are together evolving to reinforce the basic principles of the concept of an exclusive Economie zone.

Sommaire

Sommaire

Depuis l'entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, nous remarquons une augmentation de l'utilisation du concept de zone exclusive économique; cependant, la caractérisation de ces zones varie énormément entre États. Cet article offre un survol exhaustif de l'utilisation d'une zone exclusive économique. L'auteur ducute des types de juridiction et de la juridiction actuelle exercée par les États dans leurs zones respectives. Il existe une divergence entre les dispositions de la Convention et la pratique des États dans certaines matières, telles l'environnement et la recherche scientifique. Malgré cela, l'auteur conclut que les déclarations d'État et les décisions juridiques et arbitrales nous indiquent que la Convention et la pratique des États évoluent de façon à renforcer les notions de base du concept d'une zone économique exclusive.

Type
Articles
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Copyright © The Canadian Yearbook of International Law/Annuaire canadien de droit international 1997 

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References

1 L.C. 1996, c. 31.

2 Doc. N.U. A/CONF 62/122 et Corr. 1 à 11 (1982), ci-après Convention de 1982. Au 83 mai 1997, cette Convention comptait 116 États parties.

3 Pour une compilation de la pratique des États, voir Smith, R. W., Exclusive Economie Zone claims, An Analysis and Primary Documents, Martinus Nijhoff Publishers, Dordrecht, Boston, Lancaster, 1986Google Scholar, Le droit de la mer, Législation nationale en matière de zone économique exclusive, Division des Affaires maritimes et du droit de la mer, Bureau des Affaires juridiques, Nadons Unies, New York, 1994. Pour une superbe étude de cette pratique des États, on consultera l’incontournable recherche Juda, de L., “The Exclusive Economie Zone: Compatibility of National Claims and the United Nations Convention on the Law of the Sea,” (1986) O.D.I.L. à la p. 1.Google Scholar Les Nadons Unies ont effectué une récente synthèse de la pratique des États dans le domaine maritime intitulée Le droit de la mer, Pratique des Etats au moment de l’entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Division des Affaires maritimes et du droit de la mer, Bureau des Affaires juridiques, Nations Unies, New York, 1994, ci-après Le droit de la mer.

4 Nous excluons les zones contiguēs (qui ne constituent en principe que les 12 premiers milles de la zone économique exclusive et n’ont pas d’intérêt d’ordre économique). Quant au plateau continental, qui constitue par définition selon la Convention de 1982 le sol et le sous-sol de la zone économique, il possède son propre régime juridique, lequel est acquis de longue date et ne fait pas problème.

5 Convention de 1982, art. 21, § 1e.

6 Id., art. 19, § 2i.

7 Il s’agit de compétences totalement exclusives (id., art 245).

8 L’État côtier peut légiférer librement, à la seule condition de ne pas réglementer la construction des navires étrangers, sauf à donner effet aux normes internationales généralement acceptées (id., art. 2, § if et § 2).

9 L’État côtier a la faculté d’interdire tout passage qu’il estime non inoffensif d’un navire privé étranger (Id., art. 25, § 1).

10 L’État côtier exerce sur le sol et le sous-sol de sa mer territoriale une juridiction absolue, ce qui n’est pas le cas sur le sol et le sous-sol de la zone économique, qui constituent du plateau continental (lequel n’est pas la propriété de l’État côtier) (id, art. 2, § 2).

11 Id., art. 3.

12 J. Carroz, infra note 86 à la p. 728, constate que plusieurs des législations sur la mer territoriale de 200 milles contiennent des dispositions sur la gestion des ressources biologiques et l’accès des étrangers et que des permis de pêche sont délivrés en pratique à des pêcheurs étrangers.

13 Voir infra note 37.

14 Le Canada, p. ex., aurait pu appliquer nombre de compétences d’ordre environnemental dans la zone de pêche de 200 milles qu’il possédait de 1977 à 1996.

15 Convention de 1982, art. 121, § 3.

16 Id., art. 57.

17 Id., art. 55.

18 C’est ainsi que le Canada, en vertu de sa récente Loi sur les océans (réf. supra note 1), dispose désormais, au-delà de sa mer territoriale de 12 milles, d’une zone contiguë de 12 milles supplémentaires, qui recouvre les premiers 12 milles de sa zone économique.

19 On note le même phénomène pour les zones de pêche de “200” milles qui varient en pratique de 180 milles à 197 milles (Bahamas, Danemark).

20 En fait, ainsi que l’on vient de le souligner, la mer territoriale existe en dehors de toute proclamation expresse. La détermination de sa largeur constitue par contre, dans un cas de non proclamation, un problème. Le décret philippin précise d’ailleurs que la zone économique est contiguê à la mer territoriale.

21 Quatre-vingt-seize États disposent d’une zone économique exclusive, 17 d’une zone de pêche, 11 d’une mer territoriale de 200 milles. De plus, La Syrie a une mer territoriale de 35 milles et le Cameroun une mer territoriale de 50 milles. Nous retenons le chiffre de 124 (et non 125) afin de ne pas décompter deux fois l’Iran (qui dispose à la fois d’une zone de pêche de 50 milles et d’une ZÉE).

22 Il s’agit des États suivants: Afghanistan, Andore, Arménie, Autriche, Azerbaidjan, Bélarus, Bhoutan, Bolivie, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Éthiopie, Hongrie, Kazakhstan, Kirghizistan, Lesotho, Liechstestein, Luxembourg, Macédoine, Malawi, Mali, Mongolie, Népal, Niger, Ouganda, Ouzbekistan, Paraguay, République centrafricaine, République démocratique du Lao, République de Moldova, République tchèque, Rwanda, Saint-Marin, Saint-Siège, Slovaquie, Suisse, Swaziland, Tadjikistan, Tchad, Turmekistan, Zambie, Zimbabwe.

23 Albanie, Arabie Saoudite, Bahrein, Bosnie Herzégovine, Croatie, Erythrée, Géorgie, Iraq, Jordanie, Koweït, Lettonie, Lithuanie, Singapour, Slovénie, Soudan, Yougoslavie.

24 Chypre, Grèce, Israël, Italie, Libye, Liban, Monaco, Tunisie.

25 Juda, L., “The Exclusive Economie Zone: Non-Claimant States,” (1988) O.D.I.L. 431.Google Scholar En ratifiant la Convention de 1982, la Chine a fait une déclaration annonçant cette future création de ZÉE. Voir Bureau des affaires maritimes et du droit de la mer, Bulletin du droit de la mer, Nations Unies, New York, n° 31 à la p. 8 (ci-après Bulletin du droit de la mer).

26 On pourra consulter à cet égard les statistiques et tableaux présentés dans R.W. Smith, supra note 3, en particulier p. 33.

27 Le premier État à avoir légiféré, le Bangladesh, a créé sa zone en 1974, alors même qu’aucun texte de négociation n’avait été établi par la troisième Conférence (cf. R.W. Smith, supra note 3 à la p. 30).

28 Bulletin du droit de la mer, n° 25, juin 1994 à la p. 29.

29 Convention de 1982, art. 59.

30 Id., art. 56, § 2, qui laisse entendre p. ex. qu’il existe dans le domaine de l’exploration et de l’exploitation de la zone à des fins économiques d’autres activités que celles visant à la production d’énergie à partir de l’eau, des courants et des vents, citées à fins illustratives seulement.

31 Haïti, p. ex., affirme disposer de compétences résiduaires “selon la loi” et non selon le droit international.

32 Une survivance probable de l’époque où il disposait d’une mer territoriale de 200 milles. Dans le même sens, voir la Déclaration de Cap Vert lors de sa signature de la Convention de 1982 et celle, récente, de l’Inde, lors de la ratification de la Convention (Bulletin du droit de la mer n° 29 à la p. 8). L’Uruguay, à l’occasion de la Déclaration émise lors de la signature, retient la même formule relativement à la ZEE. La chose ne manque pas de surprendre, puisque l’Uruguay précise dans la même déclaration que “[l]es dispositions de la Convention relatives à … la zone économique exclusive sont compatibles avec les objectifs et les principes fondamentaux dont s’inspire la législation de l’Uruguay en ce qui concerne sa souveraineté et sa juridiction sur l’espace maritime adjacent à ses côtes …jusqu’à 200 milles marins.” L’Uruguay ayantratifié la Convention de 1982, ceci revient à dire que la ZÉE constitue à ses yeux de la mer territoriale, puisque l’Uruguay dispose actuellement d’une mer territoriale de 200 milles.

33 L’Allemagne, dans la déclaration émise lors de son adhésion à la Convention de 1982 (Bulletin du droit de la mer, n° 27 aux pp. 7 et 8) estimait que les États côtiers ne peuvent y contrôler les manoeuvres militaires. L’Italie, lors de la ratification, spécifiait: “les droits de l’État côtier dans cette zone n’incluent pas le droit d’obtenir notification des exercices ou manoeuvres militaires ou de les autoriser” (Bulletin du droit de la mer, n° 27 à la p. 5). Les États-Unis ont récemment réaffirmé la liberté de navigation en ZÉE, même au profit des navires qui transportent des déchets dangereux selon la Convention de Bâle: Bulletin du droit de la mer, n° 31 à la p. 39.

34 Décret du 8 avril 1977.

35 Déclaration en date du 6 avril 1977, en vigueur dès publication et notifiée aux gouvernements concernés. Notons que le Décret du 8 avril 1977 (supra note 34) fait allusion à cette déclaration en préambule. Le Brésil et Haïti ont ratifié la Convention de 1982.

36 Par exemple, les Maldives (signataires de la Convention de 1982). L’Inde, le Pakistan, Maurice et les Seychelles prétendent pour leur part pouvoir imposer des corridors de navigation dans certains secteurs de leur zone économique (infra notes 40, 106 et 158–59).

37 Le Pérou, l’Uruguay et (autrefois) l’Argentine.

38 Déclaration émise lors de la ratification, Bulletin du droit de la mer, n° 27 à la p. 5. Les États européens se sont objectés de la même façon à toutes les interprétations de diverses conventions qui porteraient atteinte à la libre navigation en ZÉE. Voir sur ce point Le droit de la mer, supra note 3 à la p. 133.

39 Paradoxalement, le Nigéria ne semble pas revendiquer de compétences dans les domaines couverts par la zone contiguë. Il faut dire qu’il a opté pour une mer territoriale de 30 milles.

40 Inde, Maurice, Pakistan, Seychelles, p. ex. L’Inde et le Pakistan se donnent la possibilité d’appliquer toutes leurs lois en ZÉE, comme si celle-ci constituait une partie du territoire étatique. Voir Le droit de la mer, supra, note 3 à la p. 72. Nombre d’États africains réaffirment par contre dans leur législation le principe de la liberté de navigation et de survol dans leur ZÉE (Le droit de la mer, id. à la p. 36).

41 Bulletin du droit de la mer, n° 27 à la p. 5.

42 Id., aux pp. 7–8.

43 Bien rares seront les États qui n’exploiteront pas les possibilités que leur offre la Convention, sauf ceux qui ont opté pour une simple zone de pêche de aoo milles. Pourtant, bien que disposant d’une authentique ZÉE, l’Argentine ne revendique de juridiction qu’à l’égard des ressources naturelles et Qatar (qui opte pour une “zone territoriale”) limite sa juridiction aux ressources naturelles et halieutiques. On verra plus loin que quelques États ont renoncé à exercer des compétences dans certains secteurs comme la recherche scientifique (le tiers environ, dont les États-Unis). La quasi-totalité des lois accordent aux États côtiers — minimalement — des compétences sur les ressources naturelles et en matière environnementale.

44 La plupart des auteurs refusent ce qualificatif de “préférentiel.” Cette terminologie, employée par la CIJ dans l’affaire des Pêcheries (Royaume-Uni/Islande; R.F.A./Islande), arrêt, Recueil CIJ. 1974 à la p. 3, leur semble dépassée. Elle témoignait pourtant du souci de la Cour d’opposer une approche “exclusiviste” des droits de l’État côtier en matière halieutique au sens que donne à ce qualificatif le droit, tant conventionnel que coutumier, relatif au plateau continental et une approche strictement “préférentielle,” c.-à-d. prioritaire, au bénéfice de l’État côtier. Même si la Cour retenait ce dernier concept au profit des seuls États en situation de “dépendance spéciale” à l’égard de la pêche (ce qui n’est pas le cas dans la Convention de 1982), il nous semble qu’il demeure tout-à-fait adapté au régime de l’exploitation des ressources halieutiques non sédentaires de la zone économique. Si l’on peut parler de compétences exclusives au bénéfice de l’État côtier, c’est seulement au chapitre de la conservation et de la gestion des ressources, et non de leur exploitation, sauf à prouver qu’il n’existe pas de surplus. Dans ce sens, J.E. Bailey, infra note 86 à la p. 1275 et sa note 49.

45 Convention de 1982, art. 61, § 1.

46 Id., art 62, § 2.

47 L’État côtier “shall… give access to the surplus of the allowable catch …” dans la version anglaise, et “darà acceso a ostros Estados al excedente de la capture permissible …” dans la version espagnole.

48 Convention de 1982, art. 62, § 3.

49 Ibid.

50 Id., art. 69 à 71. Les “ESL-GD” sont en pratique les grands perdants de la Convention. Les ESL et les GD en développement réclamaient un droit d’accès égal aux ressources biologiques des États voisins afin d’obtenir une part équitable du TAC (les ESL développés ne pouvant bénéficier d’un tel droit que dans les ZÉE des États voisins développés). En pratique, les ESL n’ont obtenu que “… le droit de participer, selon une forme équitable, à l’exploitation d’une part appropriée du reliquat [nous italiques] des ressources biologiques …” des États voisins (art. 69, § 1 ), avec de nombreuses réserves (art. 6g, § 2), les ESL développés ne disposant de ce droit que dans les ZÉE des États voisins développés. Les GD en développement et ceux qui ne peuvent prétendre à une ZÉE ont obtenu les mêmes droits, avec les mêmes restrictions (art 70, § 1 et 2 ). Il existe quelques dispositions spécifiques concernant les ESL et les GD en développement (art. 69, § 3 et 70, § 4), mais qui ne génèrent aucune garantie supplémentaire à leur profit Pire encore pour les ESL-GD, les faibles “droits” dont ils disposent ne contraignent pas les “… États côtiers dont l’économie est très lourdement tributaire de l’exploitation des ressources biologiques de leur zone économique exclusive” (art. 71). Il va sans dire que cette dernière disposition peut concerner des États par ailleurs développés. J. Carroz, infra note 86 à la p. 716, fait état du recul effectué à l’égard des ESL-GD entre 1977 (TNCO) et 1980 (TNCO Rév. 2). On note en effet une diminution des droits des ESL-GD (voir note 18) qui se double d’une augmentation des droits des États côtiers en raison de la baisse des cas de soumission à des modes obligatoires de règlement des différends (p. 717).

51 Selon la Convention de 1982, art. 62, § 4, l’État côtier peut légiférer, notamment, sur les questions suivantes: délivrance de licences assorties de paiement de droits ou autres contreparties; détermination des espèces dont la pêche est autorisée, des quotas de prises, par navire ou par État; fixation de l’âge et de la taille des poissons pouvant être péchés; réglementation des zones de pêche, du type, du nombre, de la taille des navires et engins de pêche; fourniture de statistiques sur les captures et participation à des programmes de recherche; obligation d’accepter des observateurs à bord des navires; obligation de décharger tout ou partie des prises dans les ports de l’État coder; participation à des entreprises conjointes; obligations de transfert de technologie, etc.

52 Id., art. 62, § 4, al. K.

53 On voit le chemin parcouru avec l’établissement des zones économiques exclusives. Auparavant en effet, c’était l’État d’immatriculation qui veillait à ce que les navires immatriculés chez lui respectent les conventions internationales dans le domaine des pêches ou les quotas éventuellement établis par les organisations internationales compétentes, à supposer qu’il soit partie à ces accords ou membre de ces institutions. Il va sans dire, en tout état de cause, que l’État d’immatriculation manquait sérieusement de motivation pour assurer le respect de ces normes, ce qui n’est pas le cas pour l’État côtier dans sa propre zone.

54 T. Treves, infra note 86 à la p. 158, citant en sa note 169 une recherche de la FAO, estime qu’environ 35 États ont des législations prévoyant des peines d’emprisonnement. Antigua et Barbuda ainsi que le Bangladesh et le Portugal notamment prévoient des peines de prison en cas de violation de leurs lois sur la pêche, qui seraient en contradiction avec l’art. 73 de la Convention de 1982 si elles étaient appliquées à des étrangers.

55 Il est important à cet égard de noter que si les différends concernant l’interprétation ou l’application des dispositions de la Convention portant sur la pêche sont réglés par des procédures obligatoires aboutissant à des décisions obligatoires, “… l’État côtier n’est pas tenu d’accepter que soit soumis à un tel règlement un différend relatif à ses droits souverains sur les ressources biologiques de sa zone économique exclusive ou à l’exercice de ces droits, y compris son pouvoir discrétionnaire de fixer le volume admissible des captures et sa capacité de pèche, de répartir le reliquat entre d’autres États et d’arrêter les modalités et conditions établies dans ses lois et règlements en matière de conservation et de gestion” (art. 297, § 3a) ). Par contre, la Convention prévoit un recours à une formule de conciliation obligatoire si l’État côtier refuse arbitrairement de fixer un TAC ou d’attribuer une portion du reliquat à un autre État (art. 297 § 3b)i, ii, iii et section II de l’Annexe V). Voir J. Carrez, infra note 86 à la p. 717.

56 Inter alia, Antigua et Barbuda, qui parle d’“autorité exclusive” sur la pêche, terminologie aussi utilisée par la Dominique (alors que, pour le Bangladesh, c’est la propriété des ressources naturelles qui est exclusive), Costa Rica, Guinée (qui interdit même la pêche étrangère), Oman (qui se donne “ail sovereignty” sur les ressources halieutiques).

57 Inter alia, Bélize, Cap Vert (sa loi de 1992 constitue un recul sur celle de 1977, infra note 59), Haïti, Kiribati, Iran, Jamaïque, Mauritanie, Micronésie, Namibie, République dominicaine, Saint-Vincent-et-Grenadines, Suède, Qatar.

58 Inter alia, Barbade, Birmanie, Bulgarie, Cambodge, Corée du Nord, Côte d’Ivoire (qui fait allusion à des accords de réciprocité), Djibouti, Émirats arabes unis (la loi de 1980 faisait référence à l’admission des tiers en cas de surplus, ce qui n’est plus le cas avec la loi de 1993), France (qui interdit la pêche étrangère en application d’une loi de 1888, sauf aux partenaires communautaires, ou sur la base d’accords ou de réglementation nationale), Gabon (qui affirme toutefois l’accès prioritaire des nationaux), Grenade, Guatémala, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Guyana (il s’agit d’une zone de pêche, mais une ZÉE pourrait être créée selon la loi), Inde, Kenya, Madagascar, Malaisie, Maldives, Maroc, Maurice, Nigèria (allusion aux accords internationaux), Pakistan, Philippines, Pologne, Saint-Kitts-et-Névis, Sainte-Lucie, Samoa occidental, Seychelles, Sénégal, Suriname, Tanzanie, Togo (qui s’engage à conclure des traités d’accès aux tiers dans le contexte de la “solidarité interafricaine”), Turquie, Vanuatu, Yémen. Soulignons que le Maroc manifeste de bonnes intentions à l’égard des États sans littoral de la région, sans pour autant leur reconnaître de priorité d’accès. C’est dans cette catégorie que l’on trouve le plus grand nombre de législations prévoyant des peines d’emprisonnement pour les pêcheurs étrangers: Barbade (jusqu’à 2 ans), Birmanie (jusqu’à 10 ans), Grenade (jusqu’à 5 ans), Inde (jusqu’à 3 ans), Maurice (jusqu’à 5 ans), Philippines (jusqu’à 10 ans), Seychelles (jusqu’à 5 ans), Suriname (jusqu’à 6 ans), Tanzanie (jusqu’à 5 ans), Vanuatu (jusqu’à 5 ans), Yémen (jusqu’à 3 ans).

59 Notons que la législation du Cap Vert en 1977 prévoyait l’accès des tiers au surplus dans le cadre d’accords bilatéraux, option abandonnée avec la loi de 1992, qui ne mentionne plus désormais la pêche étrangère. Ceci est d’autant plus surprenant que le Cap Vert, entre temps, a ratifié la Convention de 1982.

60 Comores, Cuba, Fiji, Mexique, Nouvelle-Zélande, Tonga, Vénézuela.

61 Fédération de Russie, Honduras, Indonésie, Nioué, Norvège, Portugal, Sao Tomé et Principe, Trinité-et-Tobago.

62 Affaire de “La Bretagne” (Canada-France), Tribunal arbitral, 17 juillet 1986, (1986),R.G.D.I.P. à la p. 713. § 53.

63 Art. 311, § 2. Le Tribunal arbitral dans l’Affaire de “La Bretagne,” supra note 62, écrit “Même si la Convention des Nations Unis sur le droit de la mer faisait actuellement droit entre les deux Parties, le Tribunal note qu’elle ne porterait certainement pas atteinte au régime conventionnel établi par l’Accord de 1972, en raison de la clause contenue dans son article 311, paragraphe 2 …”

64 Art. 311, § 3.

65 J. Carroz (infra, note 86 aux pp. 733 et s.), estime que les traités sont de trois sortes. Certains sont basés sur la réciprocité, d’autres prévoient un retrait graduel des étrangers, d’autres enfin, les plus nombreux, déterminent les conditions d’accès des tiers. Beaucoup de ces traités reprennent les mécanismes de l’art. 62 de ce qui était alors le TNCO (États-Unis, URSS en 1976, Canada, Mexique, Nouvelle-Zélande), sans toutefois reconnaître un droit d’accès aux tiers (constatation discutable pour le Canada, selon nous). Les traités font par ailleurs souvent allusion à la nécessité de réduire les perturbations économiques (Norvège-Pologne, Canada-Pologne, Japon-URSS, p. ex.).

66 La Convention de 1982 accorde à l’État côtier des compétences variables au chapitre de la protection de l’environnement. Elles semblent importantes en matière d’immersion, puisqu’elles sont identiques à celles dont dispose l’État côtier dans sa mer territoriale (art. 210, § 5). C’est dire qu’il a le droit d’autoriser, réglementer et contrôler l’immersion en zone économique exclusive. Il peut donc la refuser. La réglementation nationale ne doit d’ailleurs pas être moins efficace que la réglementation de caractère mondial, c.-à-d. la Convention de Londres du 29 décembre 1975 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et autres matières, telle qu’amendée en 1978 et 1980, ST/LEG/SER.B/16, p. 464. L’État côtier doit aussi, selon l’art 216, § la, assurer la mise en application dans sa ZÉE des normes en matière d’immersion établies par les organisations internationales compétentes ou découlant de conventions internationales. On ne peut malheureusement pas tenir le même raisonnement dans le domaine de la pollution par les navires. En l’occurrence, la victoire des grandes puissances maritimes est évidente. Il n’y a en effet que si les normes internationales s’avèrent inadéquates pour répondre à des problèmes environnementaux spécifiques dans certains secteurs de sa zone économique que l’État côtier peut recourir à l’adoption de règles nationales propres, lesquelles ne constituent que la mise en oeuvre de normes internationales établies par l’organisation internationale compétente pour répondre à de telles situations. Encore faut-il que ladite organisation ait décidé que les secteurs concernés de la zone économique répondent bien à une situation particulière. En tout état de cause, les règles nationales ne devront jamais imposer aux navires étrangers de normes de construction ou de conception autres que celles que détermine le droit international (art. 246, § 5 et 6). Dans le cas des zones économiques recouvertes de glace, toutefois, l’État côtier a le droit d’adopter et de faire appliquer toute réglementation nationale non discriminatoire visant à prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin par les navires (art. 234). Il s’agit d’une victoire canadienne. Quant aux pouvoirs de l’État côtier à l’égard de navires étrangers dans sa zone économique en matière environnementale, ils sont pour le moins ténus. En effet, si un navire étranger enfreint les lois de l’État côtier ou la réglementation internationale applicable à la zone, il peut intervenir pour lui demander des informations (art. 220, § 3). Si cette infraction entraîne des rejets importants causant ou susceptibles de causer une pollution notable, l’État côtier peut procéder à l’inspection matérielle du navire (art. 220, § 5). Ce n’est que s’il y a preuve manifeste que l’infraction a entraîné des rejets causant ou susceptibles de causer des dommages importants que l’État côtier pourra intenter une action, notamment ordonner l’immobilisation du navire (art. 220, § 6). On n’insistera pas sur le caractère dérisoire de ces dispositions aux yeux des États côtiers soucieux de protéger leur littoral.

67 Inter alia, Bangladesh, Barbade, Bélize, Birmanie, Brésil, Colombie, Côte d’Ivoire, Émirats arabes unis, Guinée équatoriale, Haïti, îles Solomon, Inde, Iran, Jamaïque, Kiribati, Malaisie, Maroc, Maurice, Mauritanie, Nouvelle-Zélande, Pakistan (pour certaines régions définies), Philippines, Pologne, Saint-Vincent et Grenadines, Samoa occidental, Seychelles, Sri Lanka, Suriname, Suède, Tonga, Trinité et Tobago, Vanuatu, Yémen.

68 Côte d’Ivoire.

69 Haïti, Pakistan (“tout ce qui est nécessaire”); Bangladesh (“tout ce qui est approprié”).

70 Sri Lanka, Pologne: “le droit polonais de l’environnement s’applique à la zone économique exclusive.”

71 C’est en effet son droit que de réglementer, autoriser et mener la recherche scientifique. Aucune recherche ne peut être effectuée sans son consentement (art. 246, § 2). Si ce droit n’est pas qualifié d’exclusif par la Convention (à la différence de la mer territoriale selon l’art. 245), c’est que, dans le cas de recherches strictement scientifiques, qui ont pour but d’accroître les connaissances sur le milieu marin, l’État côtier consent normalement à la réalisation des projets (art. 246, §3). C’est là une satisfaction pour les grandes puissances maritimes, attachées traditionnellement à la liberté de la recherche. Si par contre le projet a une incidence directe sur l’exploration et l’exploitation des ressources naturelles, l’État côtier disposera du pouvoir discrétionnaire de refuser son consentement à l’exécution du projet de recherche (art. 246, § 5). Le succès est ici celui des pays en développement, assurés de contrôler de façon absolue la recherche appliquée dans leur zone. On notera que l’ensemble des dispositions sur la recherche scientifique en zone économique s’applique aussi au plateau continental à ceci près que les États côtiers ne disposent généralement pas de leur pouvoir discrétionnaire de refuser leur consentement à l’exécution de projets de recherche appliquée pour la partie du plateau qui excède la zone. Il y a là compensation à la reconnaissance des droits des États à large plateau au-delà de 200 milles de leurs côtes.

72 Le tiers environ des États possédant une ZÉE n’ont aucune prétention en matière de recherche scientifique ou de contrôle des installations et ouvrages à fins économiques.

73 Exclusive Economie Zone of the United States of America, Presidential Proclamation N° 5030, Statement by the President, The White House, Office of the Press Secretary, March 10, 1983, (1983) I.L.M. 465. Traduction de l’auteur.

74 Il convient de souligner ici les difficultés qu’il peut y avoir à distinguer les îles artificielles des installations et ouvrages. De façon générale, on peut dire que les îles artificielles sont des structures fixes qui se distinguent des îles en ce que leur création implique une intervention humaine (caractère artificiel). Les installations et ouvrages sont aussi des structures artificielles érigées en mer et caractérisées par leur fixité. Elles se distinguent des îles artificielles par une moindre permanence et une dimension généralement inférieure. Les plates-formes fixes de forage en font partie.

75 Convention de 1982, art. 60, § 1.

76 Ibid.

77 Voir p. ex. les déclarations de l’Allemagne et de l’Italie (supra note 33) à l’occasion respectivement de leur adhésion et ratification de la Convention de 1982.

78 Tant à l’occasion de la signature que de la ratification de la Convention de 1982, le Brésil affirme de tels droits exclusifs. Dans sa récente loi, il confirme ce principe avec plus de nuances toutefois puisque ce droit exclusif “de réglementer … la mise en place et l’utilisation d’îles artificielles, d’installations et ouvrages” semble ne devoir s’opérer que “dans l’exercice de sa juridiction.” Il y a là un autre vestige hérité de l’ancienne mer territoriale de 200 milles.

79 Lors de la signature de la Convention, le Cap Vert déclarait que cette dernière “ne donne à aucun État le droit de construire, d’exploiter ou d’utiliser sans le consentement de l’État côtier des installations ou des structures dans la zone économique d’un autre État, qu’il s’agisse de celles prévues dans la Convention ou qu’elles soient de tout autre nature.” Le Cap Vert a repris cette déclaration lors de la ratification de la Convention. Dans sa récente loi, il confirme (et spécifie) sa juridiction exclusive sur la mise en place et l’utilisation d’îles artificielles, d’installations et ouvrages.

80 En signant la Convention, l’Uruguay formulait la même déclaration que le Cap Vert (supra note 79). On sait que l’Uruguay possède encore une mer territoriale de 200 milles.

81 Inter alia, Birmanie, Honduras, Inde, Indonésie, Maldives, Maurice, Pakistan, Philippines, Seychelles, Sri Lanka, Vanuatu.

82 Ces trois types de relations sont rappelées par J. Charney, infra note 86 à la p. 238.

83 Plateau continental de la mer du Nord (Danemark/R.F.A.; Pays-Bas/R.F.A.) arrêt, Recueil CIJ. 1969 à la p. 3, § 61.

84 Ibid.

85 Id., § 70.

86 La doctrine, en effet, pour l’essentiel, s’est manifestée entre 1987 et 1994. On consultera tout particulièrement Attard, D., The Exclusive Economie Zone in International Law, Clarendon Press, Oxford, 1987Google Scholar; Bailey, J. E., “The Exclusive Economie Zone: its Development and Future in International and Domestic Law,” (1985) Louisiana L.Rev. 1270Google Scholar; Burke, J. E., “National Legislation on Ocean Authority Zones and the Contemporary Law of the Sea,” (1981) O.D.I.L. 289Google Scholar; Caminos, H. et Molitor, MR., “Progressive Development of International Law and the Package Deal,” (1985) AJ.I.L. 871Google Scholar; Carroz, J., “Les problèmes de la pêche à la Conférence sur le droit de la mer et dans la pratique des États”(1980) R.G.D.I.P. 705Google Scholar; Charney, J. I., “The Exclusive Economie Zone and Public International Law,” (1985) O.D.I.L. 233Google Scholar; Grohn, J., “The Future of the Law of the Sea: Consequences of a Non-Treaty or Non-Universal Treaty Situation,” (1983) O.D.I.L. 1Google Scholar; Hudson, C., “The EEZ as Customary International Law,” (1980) S.D.L.R. 673Google Scholar; Kwiatkowska, B., The 200 Mile Exclusive Economie Zone in the International Law of the Sea, Dordrecht, Lancaster, Boston, 1989Google Scholar; Lee, L. T., “The Law of the Sea Convention and Third States,” (1983) A.J.I.L. 541Google Scholar; Lévy, J. P., “Les Nations unies et la Convention de 1982 sur le droit de la mer,” (1995) R.B.D.I. 11Google Scholar; Macrae, L. M., “Customary International Law and the United Nation’s Law of the Sea Treaty,” (1983) California Western Int’l LJ. 181Google Scholar; Mfodwo, S. K. B., Tsamenyi, B. M. et Blay, S. K. N., “The Exclusive Economie Zone: State Practice in the African Adantic Region,” (1989) O.D.I.L. 445Google Scholar; Vicuña, F. Orrego, “La zone économique exclusive: régime et nature juridique dans le droit international,” Recueil des cours de l’Académie de droit international, Martinus Nijhoff Publishers, Dordrecht, Boston, Lancaster, 1986–IV 9, ci-après (1986)Google Scholar; Orrego, F. Vicuña, The Exclusive Economie Zone, Regime and Legal Nature under International Law, Cambridge University Press, Cambridge, New York, Port Chester, Melbourne, Sidney, 1989, ci-après (1989)Google Scholar; Paolillo, F. H., “The Exclusive Economie Zone in Latin American Practice and Legislation,” (1995) O.D.I.L. 105Google Scholar; Sohn, L. B., “The Law of the Sea: Customary International Law Developments,” (1985) The American University L.Rev. 271Google Scholar; Treves, T., “Codification du droit international et pratique des États dans le droit de la mer,” Recueil des cours de l’Académie de droit international, Martinus Nijhoff Publishers, Dordrecht, Boston, Lancaster, 1990–IV 9Google Scholar; Wolfrum, R., “The Emerging Customary Law of Marine Zones: State Practice and the Convention on the Law of the Sea,” (1987) N.Y.I.L. 121.Google Scholar

87 Rappelons que l’art. 310 autorise les États, lorsqu’ils signent la Convention, la ratifient ou y adhèrent, à émettre des déclarations qui ne sont pas des réserves, et qui visent notamment à harmoniser leurs lois et règlements avec la Convention.

88 Voir sur ce point, inter alia, J. Charney, supra note 86 aux pp. 240–41.

89 Inter alia, R. Wolfrum, supra note 86 à la p. 144: “National Legislation reflects the coastal State’s rights, although not always to the same extent as corresponding obligations vis-à-vis other States.”

90 Dans ce sens, voir T. Treves, supra note 86 aux pp. 179–80.

91 La zone de pêche de 200 milles, justifiée par le courant de Humboldt, couvrait à compter de 1945 le littoral pacifique de l’Amérique du sud, quand la mer épicontinentale s’étendait au large de la côte atlantique, recouvrant le large plateau continental.

92 Les législations établissant la juridiction sur la mer épicontinentale remontent à 1946 (Argentine, Panama). Celles sur les 200 milles à 1947 (Chili, Pérou).

93 Rappelons que la CIJ, dans l’Affaire des Pêcheries, supra note 44, avait refusé en 1974 l’extension de la zone de pêche islandaise de 12 à 50 milles. Il est vrai qu’il s’agissait d’une zone de pêche exclusive, qui remettait en cause les droits conventionnels de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne.

94 Certains auteurs vont même jusqu’à soutenir — ce que nous contestons — l’existence automatique de la zone au bénéfice des États côtiers dès lors qu’ils sont parties à la Convention de 1982.

95 C’est le cas par exemple pour F. Orrego Vicuña ( 1989), supra note 86, qui cite cependant certains auteurs hésitants à cet égard (Akehurst, Flemming, Scovazzi, selon B. Kwiatkowska) et d’autres, soviétiques en particulier (Kolodkin, Zakharov) qui sont en désaccord. Il cite de nombreux auteurs à l’appui du caractère coutumier du concept de ZÉE (Elias, Evensen, Galindo Pohl, Gov, Quéneudec, Oxman, Treves, Dupuy, Vukas). On peut ajouter F.H. Paolillo ( supra note 86) et S.K.B. Mfodwo et al. (id.) notamment. Voir enfin D. Attard, supra note 86, et les auteurs qu’il cite (aux pp. 303–7).

96 Dans l’Affaire de la délimitation du plateau continental entre la France et le Royaume-Uni, décision du 30 juin 1977, Documentation française, Paris, septembre 1977 (I.S.B.N.: 2-11-000064-3), la France soutenait qu’il existait un consensus sur la zone économique exclusive (§45). Le Royaume-Uni, pour sa part, estimait que ce relatif consensus n’impliquait pas que le concept soit devenu coutumier puisque plusieurs questions restaient à régler: contenu de la juridiction de l’État côtier, statut de la zone par rapport à la haute mer (§ 46). Le Tribunal arbitral ne se prononce pas directement sur la question. Il se contente d’admettre que “… un développement du droit coutumier [pourrait] permettre, dans certaines conditions, que les États concernés acceptent la modification ou même l’abrogation de droits et d’obligations conventionnels existant précédemment” (§ 47). Le Tribunal tiendra compte de ces développements récents pour affirmer que les règles coutumières en matière de délimitation du plateau continental sont comparables à celles établies par la Convention de 1958 (§ 65). Ces hésitations du Tribunal à se prononcer sur le caractère coutumier de la zone économique s’expliquent par le fait qu’il n’avait pas vraiment besoin de le faire. Par ailleurs, peu d’États avaient créé une zone économique exclusive avant la rédaction de l’arbitrage.

97 Affaire Tunisie-Lybie, Recueil C.I.J. 1982, § 100. À cette époque, une soixantaine d’États avaient créé une zone économique (et 16 une zone de pêche)

98 Affaire du golfe du Maine, Recueil CIJ. 1984, § 94. À cette date, environ 70 États disposaient d’une zone économique. L’année suivante, dans l’Affaire du plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), arrêt, Recueil CIJ. 1985, la Cour confirmait que “… les deux institutions du plateau continental et de la zone économique exclusive sont liées dans le droit moderne” (§ 33) et que “…l’institution de la zone économique exclusive … s’est intégrée au droit coutumier” (§ 34). Le gouvernement britannique affirmait de même en 1984 que “the concept of the EEZ has developped into customary international law,” Hansard, House of Lords, vol. 457, col. 1301: December 4, 1984, cité par D. Attard, supra note 86 à la p. 299, note 253.

99 Dans ce sens, D. Attard, supra note 86 aux pp. 288–89 et C. Hudson, id. à la p. 677.

100 Voir notamment Affaire du plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/ Malte), supra note 98, § 34.

101 Voir notre article, “La nouvelle loi canadienne sur la protection des pêcheries côtières: légitimité n’est pas légalité” ( 1994) Espaces et Ressources maritimes à la p. 252.

102 Voir notamment Attard, Treves, Vicuña, Wolfrum. Ce dernier auteur (supra note 86 à la p. 144) estime: “… [t]he newly created regime on … exclusive Economie zone … [has] already become part of international customary law … However, the acceptance of the regime on … the exclusive Economie zones … does not mean that all specific regulations of the Convention on the Law of the Sea have been accepted by State practice.”

103 Le Tribunal arbitral est d’avis que “la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer et la pratique suivie par les États en matière de pêches maritimes pendant le déroulement de cette conférence ont cristallisé et consacré une nouvelle règle internationale, selon laquelle dans la zone économique exclusive, l’État côtier dispose de droits souverains aux fins de l’exploration et de l’exploitation, de la conservation et de la gestion des ressources naturelles” (§ 49), terminologie qui reprend l’art. 56, § 1a) de la Convention. Réf. supra note 62.

104 Dans ce sens, F. Orrego Vicuña (1986), supra note 86 aux pp. 77–79.

105 Voir à cet égard les développements de T. Treves, supra note 86 aux pp. 183–87. Dans l’affaire de la Délimitation des espaces maritimes entre le Canada et la République française, sentence du 10 juin 1992, reproduite dans J.-Y. Morin, F. Rigaldies, et D. Turp, Droit international public, Notes et documents, 2e éd., Les Éditions Thémis, Montréal, 1992 à la p. 645, le Tribunal arbitral, au § 88, parle du “principe de la liberté de la navigation dans la zone de 200 milles, garande par l’article 58 de la Convention de 1982, disposition qui représente à n’en pas douter le droit international coutumier, au même titre que l’institution de la zone de 200 milles elle-même.”

106 C’est le cas pour l’Inde, Maurice, le Pakistan et les Seychelles. Même si ces lois ne violent pas en elles-mêmes la Convention, le risque demeure (supra note 40).

107 Supra note 86 à la p. 262. Le juge Evensen, cité par D. Attard, supra note 86 à la p. 305, semble partager globalement ce point de vue.

108 On peut citer Galindo Pohl, tel que rapporté par D. Attard, id. à la p. 305. Voir aussi, de façon générale, L. Macrae, supra note 86 à la p. 222.

109 “Customary International Law After the Convention,” dans Krueger, R. B. et Riesenfeld, SA. (dir.), The Developing Law of the Oceans (Law of the Sea Institute Conference 1984), Honolulu, 1985 à la p. 45.Google Scholar

110 Voir en particulier F. Orrego Vicuña (1989), supra note 86 aux pp. 330–31.

111 Voir F. Orrego Vicuña ( 1989), supra note 86 à la p. 231 (et la référence à W. Burke en note 10). Dans son commentaire joint à sa Proclamation du 1 o mars 1983 concernant la zone économique exclusive, le président Reagan affirmait que les dispositions de la Convention concernant les usages traditionnels de la mer “generally confirm existing maritime law and practice,” tandis que l’exploitation des grands fonds marins “remains a lawful exercice of the freedom of the high seas open to all nations,” The White House, Office of the Press Secretary, March 10, 1983, supra note 73. Lors de la succession en 1995, la Slovénie déclarait considérer la partie V de la Convention consacrée à la zone économique “comme faisant partie du droit commun international coutumier.” Bulletin du droit de la mer, n° 28, juin 1995 à la p. 4.

112 T. Treves, supra note 86, cite le Royaume-Uni, qui s’inscrit en faux contre cette attitude (p. 49). Dans le même sens, l’Iran, en signant la Convention de 1982, émettait une déclaration à l’effet que la notion de zone économique exclusive et certaines autres dispositions “sont simplement issues d’un effort de compromis et ne visent pas nécessairement à codifier les coutumes ou les usages (la pratique) existant déjà et considérés comme ayant un caractère obligatoire.” Bulletin du droit de la mer, n° 25, juin 1994 à la p. 32. Dans une note diplomatique récente, datée du 3 mai 1995, l’Iran reprend cette même thèse. Bulletin du droit de la mer, n° 31 à la p. 37.

113 Voir W. Burke, supra note 111 à la p. 231.

114 On peut fournir les exemples suivants: Australie, Bulgarie, Canada, Indonésie, Islande, Norvège, République dominicaine, Thaïlande, Tuvalu, Vénézuala, Vietnam. Remarquons que si la loi de Tuvalu se dit: “en accord avec le droit international,” elle mentionne que cette conformité n’est pas un principe justiciable, compte tenu du caractère flou du droit international (en 1983).

115 Art. 61 et 62, § 1.

116 Telle est l’opinion du Tribunal arbitral dans l’Affaire de la “Bretagne” (supra note 62, § 51–53) qui semble admettre sans autre démonstration (ce que l’on peut déplorer) le caractère coutumier des articles 61 et 62 (sauf si l’État côtier a conclu avec des tiers des accords à l’effet inverse). Cette opinion est partagée par plusieurs auteurs, dont J. Chamey, supra note 86, et T. Treves, id. aux pp. 152–53.

117 Opinion appuyée inter alia par D. Attard, supra note 86 à la p. 290.

118 La Guinée constitue une exception (supra note 56). De façon générale, les études de la FAO, notamment Fisheries Regulations under Extended Jurisdiction and International Law (FAO Fisheries Technical Paper No. 223) (1982) eíReport of the Expert Consultation on the Conditions of Access to the Fish Resources of the Exclusive Economie Zones (FAO Fisheries Report No. 293) (1983) tendent à prouver que même si les législations qui reprennent les art. 61, 62 et 73 sont rares, la FAO est d’avis que ces articles constituent la base principale de la pratique des États, particulièrement en Amérique latine. Dans Le droit de la mer, supra note 3, les Nations Unies estiment que la pratique de ces États ne contrarie nullement les dispositions de la Convention, mais exploitent la latitude qu’elle leur offre (p. 181).

119 Pour des exemples de “rentabilisation,” voir Le droit de la mer, supra note 3 à la p. 46.

120 Fleischer, C. A., “La pêche” dans Dupuy, R.-J. et Vignes, D., (dir.), Traité du nouveau droit de la mer, Economiea et Bruylant, Paris, Bruxelles, 1985 aux pp. 909–10.Google Scholar

121 Id. aux pp. 909–10.

122 Churchill, R. R. et Lowe, A. V., dans The Law of the Sea, Manchester University Press, 1988,Google Scholar constatent que beaucoup des États qui ont réduit l’accès des ders à leur ZÉE ont accru leurs propres prises, qu’ils soient développés (Canada, États-Unis, Islande, Mexique, Nouvelle-Zélande) ou non (Guinée Bissau, Indonésie, Malaisie, Pakistan, Sri Lanka): pp. 148–49.

123 Le Décret sur les zones dépêche du Canada (zones 1, 2 et 3), DORS/71.81, ( 1971 ) 105 Gaz. Can. II, 822, était basé sur la nouvelle Loi sur la mer territoriale et les zones dé pêche, adoptée en 1970, L.R.C. 1985, c. T-8. On consultera à cet égard avec profit les excellents articles de A. Braēn, “Le contrôle par le Canada des pêches étrangères dans sa zone de pêche exclusive,” (1983) A.C.D.I. à la p. 3, et “La réglementation canadienne des pêches,” (1996) Annuaire de droit maritime et océanique à la p. 97. Dans cet article, il rapporte (p. 102) que “le total des allocations réservées par le Canada en 1977 aux pêcheurs étrangers s’élevait à 59 800 tonnes. En 1992 ces allocations avaient chuté à 55 000 tonnes.”

124 Voir Rigaldies, F., “Le statut du golfe du Saint-Laurent en droit international public,” (1985) A.C.D.I. 80 aux pp. 126 et s.Google Scholar

125 Décret sur les zones de pêche du Canada (zones 4 et 5), DORS/77-62, ( 1977) III Gaz. Can. II, 115 et Décret sur les zones de pêche du Canada (Zone 6), DORS/77–173, (1977) III Gaz. Can. II, 652.

126 L’adoption de la nouvelle Loi sur les océans, supra note 1, ne change rien à l’état antérieur de la situation, en particulier la dualité des zones de pêche canadiennes (voir l’art. 16 de la Loi).

127 Voir Léger, G. A., “Les accords bilatéraux régissant la pêche étrangère dans les eaux canadiennes,” (1978) A.C.D.I. 116.Google Scholar

128 La coopération régionale est parfois impressionnante à cet égard, tant dans le Pacifique sud qu’en Amérique latine.

129 R.R. Churchill et A.V. Lowe, supra note 122 à la p. 148, soutiennent que certaines puissances halieutiques ont tout de même accru leurs prises globales (Japon, URSS, Corée du Sud, Roumanie), quand d’autres ont été moins fortunées (Allemagne de l’Est, Portugal, Bulgarie).

130 CA. Fleischer, supra note 120 aux pp. 909-10. D’autres auteurs (Orrego Vicuña, Burke) paraissent exclure l’existence d’un droit coutumier d’accès des tiers. Plus nuancés, R.R. Churchill et A.V. Lowe, supra note 122 à la p. 234, estiment que “…there may be a rule of customary international law that coastal States must give foreign vessels access where there is a surplus (academic opinion is divided on this question).”

131 Carroz, J. et Savini, MJ., dans “The New International Law of Fisheries Emerging from Bilateral Agreements,” 1979, Marine Policy 70.Google Scholar

132 Rappelons que le Tribunal arbitral dans l’Affaire de “La Bretagne” (supra note 62), soulignait le caractère coutumier de l’ensemble de l’art. 62 de la Convention.

133 T. Treves, supra note 86 à la p. 156, souligne “le caractère faible de l’obligation de l’État côtier.” Il croit cependant pouvoir “penser que la pratique de reconnaître un accès au reliquat pourra s’étendre” (id.). D. Attard, su/ira note 86 aux pp. 161-63, partage globalement la même opinion.

134 T. Treves, supra note 86 à la p. 157, a cependant décelé l’ordonnance togolaise de 1977, ainsi que de rares lois (Maroc). Il n’y a pas, selon lui, d’accords bilatéraux concernant les ESL-GD. On peut toutefois citer des accords récents Bolivie-Pérou en date du 24 janvier 1992 (Bulletin du droit de la mer, n° 21 à la p. 87).

135 La doctrine confirme cette constatation. Inter alia, D. Attard, supra note 86 à la p. 308. Les Nations Unies (Ledroit de la mer, supra note. 3 à la p. 12) confirment cette opinion.

136 J. E. Bailey, supra note 86 aux pp. 1279-80), constatant qu’un tel droit n’existe que dans la ZÉE d’un État côtier voisin non dépendant de la pêche, constate que plus cet État côtier pêche, plus il est dépendant. Il s’ensuit que le prétendu droit d’accès des ESL-GD se réduit d’autant.

137 Art. 73.

138 Dans ce sens, D. Attard, supra note 86 aux pp. 291–92.

139 T. Treves, supra note 86 à la p. 159, mentionne que la Guinée Bissau, le Cap Vert et le Canada ont retiré leurs lois en ce sens.

140 La position du Canada est typique à cet égard. La Loi sur les océans, dans son art 14b), donne au Canada compétence “… à la [sic] protection et la préservation du milieu marin,” reprenant ainsi la formulation de l’art. 56, § 1b) (iii) de la Convention de 1982. Ce dernier article cependant subordonne la compétence de l’État côtier au respect des “dispositions pertinentes de la Convention,” soit la partie XII consacrée à la “protection et préservation du milieu marin,” ce que ne fait pas la loi canadienne. En pratique, la juridiction du Canada en matière environnementale dans sa zone économique s’exercera en vertu de lois établies, soit essentiellement la Loi sur la marine marchande du Canada (L.R.C. 1985, c. S-9), révisée pour la circonstance, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (L.R.C. 1985 (4esupp.),c. 16),révisée elle aussi, et la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques (L.R.C. 1985, c. A-1 2 ). Techniquement, s’agissant des deux premières lois, le Canada s’est contenté de substituer les termes “zone économique exclusive” à ceux de “zone de pêche,” sans modifier aucunement le régime juridique préétabli.

141 Convention de 1982, art. 237. Il convient de remarquer qu’une vingtaine de conventions globales ou régionales ont été adoptées pendant la troisième Conférence ou depuis l’adoption de la Convention de 1982 (Le droit de la mer, supra note 3 à la p. 17).

142 J. Charney, supra note 86, dans sa note 96A, cite le cas du Mexique.

145 Dans ce sens, J. Charney, supra note 86, D. Attard, id. à la p. 92.

144 T. Treves, supra note 86 à la p. 169.

145 On ne se surprendra pas de voir cette position défendue par le Brésil et l’Uruguay, ainsi que par le Cap Vert.

146 Vukas, B., “L’udlisadon pacifique de la mer, dénucléarisation et désarmement,” dans Dupuy, R.-J. et Vignes, D. (dir.), supra note 120 aux pp. 10471056Google Scholar–57.

147 F. Orrego Vicuña, supra note 86 (1989) à la p. 262.

148 Lorsque ces lois sont anciennes, elles peuvent être justifiées par l’absence de consensus dans le cadre de la troisième Conférence. Lorsqu’elles sont récentes, elles exploitent souvent les ambiguïtés de la Convention: voir l’article de F.H. Paolillo, supra note 86, pour la pratique latino-américaine à cet égard. La Convention constitue dans ce cas une caricature de ce que peut générer le consensus: une “rencontre d’arrière-pensées.”

149 De telles craintes ont initialement été exprimées par B. Oxman et R.-J. Dupuy en particulier à de nombreuses occasions.

150 Cette opinion est partagée par plusieurs auteurs (Wolfrum, Paolillo). Voir tout particulièrement D. Attard, supra note 86 aux pp. 307–8.

151 F. Orrego Vicuña, supra note 86 (1986) à la p. 121.

152 Ce droit n’existe évidemment pas en cas d’absence de surplus. Voir T. Treves, supra note 86, note 363. Dans l’Union européenne, où il n’y a pas de surplus, l’accès des tiers est conditionné par la réciprocité. Notons qu’il n’existe pas de différence notable dans le comportement des États qui ont établi une simple zone de pêche (et non une ZÉE complète) au large de leurs côtes. Voir Quéneudec, J.-P., “Les rapports entre zones de pêche et zones économiques exclusives,” (1990) German Yearbook of International Law 138.Google Scholar

153 J. E. Bailey, supra note 86 à la p. 1280, conclut: “…it seems certain that coastal States will never permit such participation, and thus, articles 69 and 70 will never be more than words.”

154 Voir en particulier le principe 21 de la Déclaration de la Conférence de Rio sur l’environnement et le développement, 13 juin 1992 (1992) R.G.D.I.P. 975.

155 T. Treves, supra note 86 à la p. 169.

156 Dans l’Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, (Nicaragua/États-Unis), Fond, Recueil C.I.J., 1986 à la p. 14, la CIJ, au § 188, affirmait devoir “…s’assurer de l’existence, dans le droit international coutumier, d’une opinio juris… Cette opinio juris peut se déduire entre autres, quoique avec la prudence nécessaire, de l’attitude des parties et des États à l’égard de certaines résolutions de l’Assemblée générale …#x201D; Et la Cour de citer la Résolution 2625 (XXV) sur les relations amicales, précisément adoptée par consensus.

157 Plateau continental de la mer du Nord, supra note 83, § 78. On consultera avec profit les excellents développements consacrés à Y opinio juris par D. Attard, supra note 86 aux pp. 297 à 301. Dans l’Affaire du golfe du Maine, supra note 98, la CIJ fait un lien manifeste, au § 94 de son jugement, entre l’adoption de la majorité des dispositions de la Convention par consensus et l’existence de règles cou-tumières correspondantes: la non entrée en vigueur — à l’époque — de la Convention de 1982 “n’enlève rien au fait du consensus qui a été réuni sur des parties importantes de l’instrument et n’empêchent surtout pas de constater que certaines dispositions de la Convention relatives … à la zone économique exclusive … n’ont pas rencontré d’objections lors de leur adoption .… Les dispositions dont il s’agit, bien que portant la marque du compromis qui a présidé à leur adoption, peuvent être considérées comme conformes actuellement au droit international général en la matière.”

158 “La Cour ne pense pas que, pour qu’une règle soit coutumièrement établie, la pratique correspondante doive être rigoureusement conforme à cette règle. Il lui paraît suffisant, pour déduire l’existence de règles coutumières, que les États y conforment leur conduite d’une manière générale et qu’ils traitent eux-mêmes les comportements non conformes à la règle en question comme des violations de celle-ci et non pas comme la manifestation d’une règle nouvelle.” Réf. supra note 156, § 186.

159 On peut ainsi citer quelques cas de législations (Inde, Maurice, Pakistan, Seychelles) qui outrepassent les dispositions de la Convention de 1982 en matière de pêche (sauf Maurice), d’installations et d’ouvrages, d’environnement et qui accordent à l’État des compétences douanières et fiscales dans des secteurs désignés de la zone. Trois de ces États, en outre, prévoient des peines de prison pour non respect des règlements de pêche (Inde, Maurice, Seychelles). L’Inde prévoit aussi de fixer éventuellement des conditions d’entrée des navires dans des zones désignées ainsi que la détermination de voies de navigation. De façon générale, la poignée d’États qui se donnent la possibilité de créer des “zones désignées“ à l’intérieur de leur ZÉE s’attribuent des pouvoirs potentiellement excessifs dans ces zones (ce qui est le cas pour l’Inde, Maurice, le Pakistan et les Seychelles). Voir en particulier T. Treves, supra note 86 à la p. 210.

160 L’Inde, Maurice, les Seychelles sont ainsi parties à la Convention, ce qui n’est pas le cas du Pakistan.

161 Ceci en vertu de la troisième hypothèse envisagée par la CIJ dans les Affaires Plateau continental de L• mer du Nord, supra note 83, § 70, à l’effet qu’une disposition purement conventionnelle qui possède un caractère normatif et est insusceptible de réserves peut constituer la base d’une règle générale de droit Cette règle, qui apparaît suite à la convention, résulte “… du fait pour une part de l’influence exercée par celle-ci et pour une autre de la pratique ultérieure des États.” Cependant plusieurs conditions s’imposent pour établir une telle règle. À cet égard, “…il se peut que, sans même qu’une longue période se soit écoulée, une participation très large et représentative à la convention suffise, à condition toutefois qu’elle comprenne les États particulièrement intéressés” (§ 73). On peut certes considérer qu’avec n6 États parties, cette condition est aujourd’hui remplie, mais de fraîche date seulement compte tenu de la lenteur du processus de ratification par les grandes puissances maritimes tout particulièrement À cet égard, la Cour constatait en 196g que la signature de la Convention de 1958 sur le plateau continental remontait à plus de dix ans et son entrée en vigueur à moins de cinq ans. Elle ajoutait (§ 74):

Bien que le fait qu’il ne se soit écoulé qu’un bref laps de temps ne constitue pas en soi un empêchement à la formation d’une règle nouvelle de droit international coutumier à partir d’une règle purement conventionnelle à l’origine, il demeure indispensable que dans ce laps de temps, aussi bref qu’il ait été, la pratique des États, y compris ceux qui sont particulièrement intéressés, ait été fréquente et pratiquement uniforme dans le sens de la disposition invoquée et se soit manifestée de manière à établir une reconnaissance générale du fait qu’une règle de droit ou une obligation juridique est en jeu. Tel n’est précisément pas le cas à l’heure actuelle dans les secteurs de la recherche scienüfique et de l’environnement. La CIJ semble de plus accorder peu de poids à l’acdvité unilatérale d’États qui sont ou sont bientôt devenus parties à une convention comme preuve de l’élément matériel de la coutume (§ 76).

162 D. Attard, supra note 86 à la p. 294, estime que le modèle de la ZÉE établi par la Convention de 1982 en tant que tel (“as such“) passe le test de la constance et de l’uniformité (uniformité qui n’a pas à être absolue). F. Orrego Vicuña, supra ( 1986 et 1989) note 86, passim, estime lui aussi qu’une grande partie de la Convention reflète la coutume. De même, J.E. Bailey, supra note 86 à la p. 1284, dresse une liste généreuse des éléments de la Partie V qui se retrouvent dans la coutume. Voir aussi ses conclusions générales aux pp. 1294–97.

163 J. Charney, supra note 86 à la p. 237.

164 T. Treves, supra note 86 à la p. 286, estime que l’entrée en vigueur de la Convention de 1982 à l’égard des États parties aura pour effet de promouvoir la limitation des revendications excessives et d’autoriser la contestation des abus. J. E. Bailey, supra note 86, remarque que les États qui ont tendance à ne pas respecter la Convention sont souvent les pays en développement, qui sont ceux qui adhèrent le plus à la Convention. Ceci donne un intérêt tout particulier à son entrée en vigueur (p. 1295).

165 Tel est le cas pour le Brésil, Cap Vert, les Philippines (qui ont affirmé corriger leur constitution pour la rendre conforme aux dispositions de la Convention sur les eaux archipélagiques), Sao Tomé et Principe, l’Uruguay (respect douteux dans ce cas, puisque ce pays revendique une mer territoriale de 200 milles). En ratifiant récemment la Convention, la Grèce se disait prête à assumer l’ensemble des droits et obligations en découlant, tout en déterminant elle-même quand et comment elle exercera ces droits: Bulletin du droit de la mer, n° 29 à la p. 7. Compte tenu du caractère flou de certaines dispositions conventionnelles, il faut être conscient du fait que “si un État agit d’une manière apparemment inconciliable avec une règle reconnue, mais défend saconduite en invoquant des excepdons ou justifications contenues dans la règle elle-même, il en résulte une confirmation plutôt qu’un affaiblissement de la règle, et cela que 1’attítude de cet État puisse ou non se justifier sur cette base” (Affaire des Activités militaires au Nicaragua et contre celui-ci, supra note 156, § 186. Dans Le droit de la mer, supra note 3, les Nations Unies estiment que ce sont souvent les lois les plus anciennes qui dérogent à la Convention. Ainsi en est-il des lois sur les “zones désignées“ qui sont antérieures à 1982. En Asie, les dispositions législatives prévoyant des compétences exclusives sur l’ensemble des installations et ouvrages ainsi que les îles artificielles sont anciennes. Dans cette même région, les lois qui prévoient une “juridiction exclusive” de l’État côtier en matière environnementale datent des années 70, quand celles qui ont été adoptées dans les années 80 parlent de “juridiction,” conformément à la Convention. En Afrique, 11 lois sur la ZÉE sont postérieures à 1982, 13 antérieures. Or, 6 de ces dernières ont été changées pour les mettre en accord avec la Convention ( p. 35 ). En 1991 en particulier, la Namibie a exclu de sa loi les compétences qu’elle prétendait exercer en ZÉE dans les domaines fiscal, douanier, sanitaire et de l’immigration (p. 36). Dans sa récente loi en date du 16 mai 1995, l’Ukraine évoque explicitement en préambule le fait que sa législation est basée sur la Convention de 1982 et va, dans l’art. 32, jusqu’à préciser que la Convention (ou tout autre traité liant l’Ukraine) l’emporteront sur toute disposition incompatible de la loi: Bulletin du droit de la mer, n° 30 aux pp. 49 et 59.

166 Environ 40 États disposent d’une ZÉE ou d’une zone de pêche de 200 milles sans être parties à la Convention de 1982.

167 Les objections prennent plus de poids si la Convention est considérée comme représentative du droit coutumier.

168 J. Charney, supra note 86 aux pp. 257-58, donne l’exemple à cet égard des compétences résiduaires. Pour F. Orrego Vicuña (1989), supra note 86 à la p. 251, l’adhésion massive à la Convention aidera à régler les inadéquations Convention-coutume en incitant à la longue la pratique à se conformer à la Convention. Or, la coutume présente un intérêt tout particulier depuis que la CIJ a affirmé, dans les Affaires du plateau continental de la mer du Nord, supra note 83, son caractère objectif et — partant — son applicabilité universelle (p. 42, § 70). Pour la Cour, les règles coutumières doivent par nature “… s’appliquer dans des conditions égales à tous les membres de la communauté internationale et ne peuvent être subordonnées à un droit d’exclusion exercé unilatéralement et à volonté par l’un quelconque des membres de la communauté à son propre avantage” (Id., pp. 39–40, § 63). Voir K. Marek, “Plateau continental et sources du droit international dans la décision de la C.I.J. du 20 février 1969,” (1970) R.B.D.I. à la p. 53.

169 Dans ce sens, J. Charney, id. à la p. 258.