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La Catégorie «Femme/s» dans la discrimination sur le sexe

Published online by Cambridge University Press:  18 July 2014

Michelle Boivin
Affiliation:
Faculté de droit, section de droit civil, Université d'Ottawa

Abstract

This paper deals with a crucial problem in feminist theory and in law, namely the issue of the “Woman/Women” category. Does the presence of a single man invalidate the label and remove the issues from the field of equality between the sexes? Moreover, in order to avail oneself successfully of the non-discrimination provision of the Canadian Charter of Rights and Freedoms, does one necessarily have to prove prejudice towards all women, or seek a remedy likely to improve the situation of all women? Is the category “Woman” necessarily universal and all-embracing? To answer these questions, the author deals with the relationship between women and men and concludes that this relationship is not one of absolute binary opposition, but rather of secular domination. The author then analyzes the category of Women in relation to society as a whole where women are often subsumed into minorities, absorbed into the family or collapsed into “Universal” Woman. Fully recognizing the arbitrary and artificial character as well as the deceptive and reductionist aspects of categories per se, the author observes nonetheless that the law obliges us to keep the category of “Woman” for as long as women will not have collectively attained an economic, legal, political, symbolic, etc. status equal to that of men collectively.

Résumé

Dans cet article, l'auteure analyse un problème crucial en théories féministes et en droit, soit la question de la catégorie «Femme/s». Y a-t-il une catégorie «Femme/s»? Cette catégorie est-elle exclusive, si bien que la présence d'un seul homme, par exemple, invalide l'étiquette et écarte la question du domaine de l'égalité des sexes? De plus, pour faire valoir avec succès les dispositions de non-discrimination de la Charte, faut-il nécessairement démontrer un préjudice à l'endroit de toutes les femmes sans exception? En d'autres termes, la catégorie «Femme/s» est-elle nécessairement universelle et totalisante? Pour répondre à ces questions, l'auteure aborde les rapports Femme/Homme pour conclure à l'absence d'une opposition binaire absolue, mais l'existence d'une domination séculaire. L'auteure analyse ensuite la relation Femme/Société, où les femmes sont trop souvent assimilées aux minorités, ravalées dans la famille ou réduites à la «Femme Universelle». Dénonçant le caractère arbitraire et artificiel ainsi que les aspects déformants et réducteurs du processus de catégorisation, l'auteure constate que le droit force le maintien de la catégorie «Femme/s» jusqu'à ce que l'ensemble des femmes atteignent le même statut économique, juridique, politique, social, symbolique, etc., que l'ensemble des hommes.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Canadian Law and Society Association 1998

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References

1. On entend ici par «catégorie» «la classe dans laquelle on range des objets de même nature» ou un «ensemble de personnes ayant des caractères communs». Voir Le Nouveau Petit Robert (Paris, Le Robert, 1993) [ci-après Petit Robert]. Une anecdote qui fait sourire. Quelle est la caractéristique commune à un vice-président des États-Unis, un inventeur, un guerrier, un gangster et un réalisateur de cinéma, soit: Al Gore, Alexander Graham Bell, Alexandre le Grand, Al Capone et Alfred Hitchcock? Tous ces hommes ont fait l'objet de l'émission «Biography» à la chaîne de télévision Arts and Entertainment au cours de la semaine du 23 au 27 juin 1997, sous le thème «You Can Call Me Al» (le titre «You Can Call Me Al» est repris d'une chanson de Paul Simon). Un exemple loufoque de la facilité avec laquelle on peut créer des catégories de tout genre et de toute nature.

2. Janzen et Govereau c. Platy Enterprises Ltd., [1989] 1 R.C.S. 1252.

3. Cependant, dans la hiérarchie du marché actuel du travail, ceux qui disposent du pouvoir de harceler les autres sexuellement sont en majorité les hommes, alors que les personnes les plus susceptibles d'être harcelées sont surtout les femmes. «[L]e harcèlement sexuel est utilisé dans une société sexiste pour […] “souligner, par implication, la différence entre les sexes, l'infériorité des femmes par rapport au groupe masculin dominant”, et pour “rappeler aux femmes la condition inférieure qu'on leur attribue.”» Ibid. à la p. 1284 [sources omises] [c'est nous qui soulignons].

4. Ibid. Le fait que certains hommes puissent parfois vivre des situations analogues ou même identiques n'était pas concluant pour deux raisons. Les hommes ne servent pas généralement d'objet sexuel et ne se retrouvent pas systématiquement dans des postes subalternes. Le harcèlement sexuel des hommes n'est pas justifié pour autant, mais il n'est pas systémique ni fréquent. En revanche, dans la mesure où les femmes évoluent dans un monde conçu par et pour des hommes, où elles n'ont que peu de débouchés, où leurs salaires inférieurs ne leur garantissent que rarement l'autonomie financière, les femmes en tant que catégorie sont dans une situation d'infériorité systémique. Dans ce cas, la possibilité qu'un homme se retrouve dans la même situation qu'une femme n'était pas déterminant, pas plus que le fait que toutes les femmes ne soient pas touchées.

5. Bliss c. Canada (P.G.), [1979] 1 R.C.S. 183.

6. Brooks c. Canada Safeway Limited, [1989] 1 R.C.S. 1219.

7. Ce renversement est d'autant plus étonnant qu'il est signé par le juge en chef d'alors, le juge Dickson, le seul qui siégeait déjà à la Cour suprême en 1979 et qui avait souscrit à la décision antérieure.

8. Thibaudeau c. La Reine (M.R.N.), [1995] 2 R.C.S. 627 infirmant [1994] 2 C.F. 180 (C.F.A.) [ci-après Thibaudeau]. Comme on le sait, en Cour fédérale d'appel, le juge Hugessen conclut que la disposition attaquée est discriminatoire et retient comme motif analogue «celui des parents séparés qui ont la garde des enfants», motifs auxquels souscrit le juge Pratte, alors que le juge Létoumeau fait valoir sa dissidence sur un autre point (ibid. à la p. 205). La décision Thibaudeau sera infirmée par une majorité des juges de la Cour suprême.

9. Symes c. Canada (M.R.N.), [1993] 4 R.C.S. 695 confirmant [1991] 3 CF. 507 (C.F.A.) [ci-après Symes].

10. La représentation de la Femme que se fait une société va déterminer dans une large mesure ses rapports avec elle-même, avec-la société dans son ensemble et avec les hommes.

11. Egan c. Canada (Développement des ressources humaines), [1995] 2 R.C.S. 513 [ci-après Egan].

12. Miron c. Trudel, [1995] 2 R.C.S. 418 [ci-après Miron].

13. Thibaudeau, supra note 8.

14. Voir par exemple l'opinion de la juge McLachlin dans Miron, supra note 12, qui élabore une analyse en deux étapes (à la p. 485), alors que le juge Gonthier, dans son opinion dissidente, élabore la sienne en trois étapes (aux pp. 435 et s.). La juge L'Heureux-Dubé utilise également trois étapes, mais différentes (aux pp. 466 et s.), et arrive au même résultat que la juge McLachlin, pour constituer la faible majorité de 5 contre 4.

15. L'ensemble de la recherche fera l'objet d'une publication ultérieure.

16. Iyer, Nitya, «Categorical Denials: Equality Rights and the Shaping of Social Identity» (1994) 19 Queen's L.J. 179 aux pp. 190–91.Google Scholar

17. Law Society of British Columbia c. Andrews, [1989] 1 R.C.S. 143 [ci-après Andrews].

18. Ainsi, dans l'arrêt Thibaudeau, supra note 8, à partir du moment où la Cour suprême choisit comme motif de discrimination les «parents gardiens séparés ou divorcés», le groupe qui doit servir aux fins de comparaison devient les parents gardiens non divorcés ni séparés. Il s'ensuit inévitablement que l'analyse ne tiendra pas compte de l'impact du régime sur le parent gardien par opposition au parent non-gardien. Voir la discussion ci-dessous.

19. Restons-en, pour nos fins, à la relation Femme/Homme selon les définitions biologiques habituelles, tout en reconnaissant que, dans ce domaine, une foule de possibilités demeurent inexplorées jusqu'à présent. Voir la discussion ci-dessous.

20. «The false premise is the assumption of two closed categories into which all human beings can be classified on an either/or basis and the attaching to these of qualities of femininity or masculinity. Whilst it is true that the great majority of people can be so classified biologically, there are nevertheless a minority who cannot be. Social and psychological behavioural traits are socially constructed and the “differences within each sex far outweigh the differences between the sexes”.» Voir O'Donovan, Katherine, «Transsexual Troubles: The Discrepancy Between Legal and Social Categories» dans Edwards, Susan, dir., Gender, Sex and the Law, Beckenham (Kent), Croom Helm, 1985, 9 à la p. 18.Google Scholar

21. Voir généralement à ce sujet Laqueur, Thomas, Making Sex: Body and Gender From the Greeks to Freud, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1990.Google Scholar

22. Ibid. aux pp. 4–17.

23. Thibaudeau, supra note 8 à la p. 205.

24. Il poursuit: «Aussi, me semble-t-il que l'on ne puisse logiquement prétendre qu'une règle par ailleurs neutre crée une discrimination fondée sur le sexe pour la simple raison que ses effets se font sentir sur un plus grand nombre de personnes d'un sexe que de l'autre. Je ne crois pas non plus que c'est ce qu'entend le juge Iacobucci dans l'arrêt Symes lorsqu'il dit d'une loi qu'elle a des effets préjudiciables “disproportionnés” sur les femmes ou que “plus” de femmes que d'hommes en souffrent. L'élément clé n'est évidemment pas le nombre, mais la nature des effets; c'est la qualité et non la quantité qui importe. Si la loi qui entraîne des effets préjudiciables à l'égard des hommes, bien que ces derniers soient moins nombreux ou qu'ils soient moins susceptibles d'en souffrir, on ne peut soutenir logiquement que la discrimination est fondée sur le sexe. Cela ne signifie évidemment pas que la Charte n'est pas violée car, dans de telles circonstances, il est fort probable qu'un autre motif de discrimination entre en jeu.» Ibid. à la p. 205.

25. Petit Robert, supra note 1.

26. Plusieurs féministes soutiennent que la pensée dichotomique aurait un caractère patriarcal puisqu'elle établit des hiérarchies et offre un appui conceptuel à des structures sociales et idéologiques qui assurent le maintien des positions privilégiées de certains hommes au sein de l'ordre social. Dans une oeuvre magistrale sur l'epistemologie, la philosophe féministe Lorraine Code redéfinit la connaissance comme inextricablement constituée d'éléments objectifs et subjectifs, tant dans sa nature, sa possibilité de réalisation que dans sa justification épistémologique. Pour ce faire, Code critique la pensée dichotomique parce qu'elle est purement formelle, sans référence au monde extérieur et simpliste dans son choix forcé entre A et non-A. Voir Code, Lorraine, What Can She Know? Feminist Theory and the Construction of Knowledge, Ithaca, Cornell University Press, 1991 à la p. 27 et s.Google Scholar La théorie postmoderne rejoint la théorie féministe sur ce point. Voir Tong, Rosemarie, Feminist Thought: A Comprehensive Introduction, Boulder (Colorado), Westview, 1989 à la p. 219 et s.Google Scholar

27. Selon cette doctrine dite «des deux sphères», femmes et hommes sont égaux, dans leur domaine d'activité respectif, celui de la femme étant largement confiné au foyer (d'où la «reine du foyer»). Ces deux sphères correspondent, à peu de chose près, à la dichotomie public/privé, «utilisée en droit pour définir la sphère d'autonomie personnelle (le «privé», le cercle des droits et libertés, zone qui échappe, en principe, au contrôle de l'État libéral). Voir généralement à ce sujet Boivin, Michelle, «Les Acquis du féminisme en droit: Reconceptualisation de la représentation des femmes et de leur place dans la société canadienne» (1995) 36 Les Cahiers de droit 27 aux pp. 32–33CrossRefGoogle Scholar [ci-après «Les Acquis du féminisme en droit»].

28. Ibid. à la p. 40.

29. Slogan féministe attribué à l'américaine Betty Friedan. Voir Friedan, Betty, La Femme mystifiée, Paris, Denoël-Gonthier, 1964Google Scholar [traduction de The Feminine Mystique].

30. Voir la discussion ci-dessous. Les étudiantes de Polytechnique n'ont pas été abattues parce qu'elles étaient des femmes—et potentiellement féministes—mais parce que Marc Lépine était fou. Et ce, même s'il avait en poche la liste de ses victimes et affirmait vouloir tuer des femmes qui prenaient la place des hommes. Voir aussi, au sujet de l'attentat du 6 décembre 1989, Guillaumin, Colette, «Folie et norme sociale» dans Sexe, Race et Pratique du Pouvoir: L'idée de Nature, Paris, Côté-femmes, 1992, 143 aux pp. 143–49Google Scholar; publié aussi dans (1990) 22 Sociologie et Sociétés 1.

31. C'est ce qu'on appelle dans les milieux féministes, l'égalité vengeresse (equality with a vengeance). Ce n'est pas là un phénomène récent. Les femmes ont toujours eu à subir ce genre de mesures dites égalitaires, dans des cas où l'incohérence du système juridique aurait dû crouler sous le poids du ridicule et de l'absurde. Ainsi, pendant la Révolution française, fondée sur le principe «Liberté, Égalité, Fraternité», Olympe de Gouges revendiquait le droit de vote pour les femmes puisqu'elles étaient déjà admises à monter à l'échafaud dans la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Voir l'article X de la Déclaration des droits de la femme (1791) de Gouze, Marie, dite Olympe de Gouges dans Sarde, Michèle, Regards sur les Françaises: Xe siècle—XXe siècle, Paris, Stock, 1983 à la p. 527.Google Scholar

32. Susan B. Anthony qui a voté illégalement a été condamnée à payer 100$ d'amende. United States c. Anthony, 24 Fed. Cas. 829 (Circuit Court, N.D. New York, 1873).

33. Voir notamment R. c. Bain, [1992] 1 R.C.S. 91 à la p. 113, où le juge Gonthier, citant l'arrêt Sherratt, déclare que «les caractéristiques fondamentales [du jury sont] l'impartialité et la représentativité».

34. Rose c. La Reine (1972), 19 C.R. 66 (C.S.) aux pp. 68–69: «Il n'y a pas lieu, en l'occurrence, de conclure que les femmes sont privées de leur liberté et de leur égalité devant la loi parce qu'elles ne sont pas appelées à servir comme jurés. Une telle fonction n'est pas un attribut essentiel de la liberté et de l'égalité du citoyen devant la loi; c'est plutôt une responsabilité onéreuse qui ne leur a pas été imposée jusqu'à ce jour» [c'est nous qui soulignons].

35. Brodsky, Gwen et Day, Shelagh, La Charte canadienne et les droits des femmes: Progrès ou recul, Ottawa, Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, 1989 aux pp. 295–98.Google Scholar Le Tableau des arrêts sur l'égalité des sexes y indique clairement que, des 44 poursuites fondées sur l'article 15 de la Charte pendant les trois ans qui ont suivi son adoption, 35 ont été initiées par des hommes et seulement neuf par des femmes. C'est aussi vrai aux États-Unis. Voir MacKinnon, Catharine, «Difference and Dominance: On Sex Discrimination» dans MacKinnon, Catharine, Feminism Unmodified: Discourses on Life and Law, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1987, 32 à la p. 44.Google Scholar

36. Symes, supra note 9.

37. Ibid. à la p. 771. Pourtant, l'essentiel du problème n'échappe pas au juge Iacobucci qui dit aussi qu'«il est difficile de contester que l'Histoire a confondu les “besoins des hommes d'affaires et les besoins des affaires”, comme le suggère le professeur Macklin. Par conséquent, dans la mesure où le droit fiscal traditionnel placerait les frais de garde d'enfants dans les frais “personnels” pour la simple raison que ces dépenses sont faites pour que le contribuable soit “disponible” pour travailler—et en l'absence de l'art. 63—, on pourrait affirmer à bon droit que l'évolution de la composition de la classe des affaires et de la structure sociale exige une nouvelle approche conceptuelle.»

38. Voir à ce sujet la revue exhaustive de Brownmiller, Susan, Femininity, New York, Linden Press/Simon & Schuster, 1984.Google Scholar Signalons aussi que le caractère entièrement social de la «féminité» pose problème dans le cas des lesbiennes. Comment font-elles pour échapper au processus de socialisation, du moins dans son aspect d'hétérosexualité obligatoire?

39. Scott, Joan, «Genre: Une catégorie utile d'analyse historique» (1988) 37–38 Les Cahiers du GRIF 125 à la p. 126.CrossRefGoogle Scholar Elle ajoute: «Le “genre” soulignait également l'aspect relationnel des définitions normatives de la féminité […] pour introduire une notion relationnelle dans notre vocabulaire d'analyse [L]e «genre» était un terme proposé par celles qui soutenaient que la recherche sur les femmes transformerait fondamentalement les paradigmes à l'intérieur de chaque discipline. Les chercheuses féministes ont très tôt signalé que l'étude des femmes n'ajouterait pas seulement de nouveaux thèmes mais qu'elle allait également imposer un réexamen critique des prémisses et des critères du travail scientifique existant.» Ibid.

40. de Beauvoir, Simone, Le Deuxième Sexe, Paris, Gallimard, Collection Folio/Essais, 1949 [renouvelé en 1976, vol. 1].Google Scholar

41. Scott, supra note 39 à la p. 140.

42. Delphy, Christine, «Le Patriarcat, le féminisme et leurs intellectuelles» (1981) 2 Nouvelles Questions Féministes 59 à la p. 65.Google Scholar [c'est nous qui soulignons]

43. MacKinnon, Catharine A., Toward a Feminist Theory of the State, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1989 à la p. xiii.Google Scholar

44. Laqueur, supra note 21 à la p. 12 et sources y citées.

45. MacKinnon, supra note 35 à la p. 40 [c'est nous qui soulignons].

46. Thibaudeau, supra note 8 à la p. 206. Il poursuit: «D'autre part, la loi imposant un test physique susceptible d'être plus facilement réussi par la plupart des hommes aurait des effets disproportionnés sur les femmes, même si certains hommes échouaient le test et que certaines femmes le réussissaient difficilement. Le test serait qualitativement différent, même pour les femmes qui le réussiraient, et il prêterait le flanc à la contestation pour discrimination fondée sur le sexe. Dans chaque cas, les effets de la loi doivent être soupesés; il ne suffit pas de compter le nombre de personnes touchées.»

47. Young, Claire F. L., «It's All In The Family: Child Support, Tax, and Thibaudeau» (1995) 6:4Forum Constitutionnel 107 à la p. 109.Google Scholar Voir aussi Philipps, Lisa et Young, Margot, «Sex, Tax and the Character: A Review of Thibaudeau v. Canada» (1995) 2 Revue d'études constitutional Challenge 221 aux pp. 240–47Google Scholar; Zweibel, Ellen, «Thibaudeau v. R.: Constitutional Challenge to the Taxation of Child Support Payments» (19931994) N.J.C.L. 305 à la p. 317.Google Scholar

48. Petit Robert, supra note 1 à la définition du mot «charme».

49. The Random House Dictionary of the English Language, The Unabridged Edition, N.Y., Random House, 1967 [ci-après The Random House Dictionary], donne la définition suivante du mot «berdache»: «(In some American Indian tribes) a man who adopts the dress and social role of a woman».

50. Viau, Louise, «L'Égalité des sexes en droit criminel: Un parcours sans fin?» (1996) 1 Revue canadienne de droit pénal 89 à la p. 101.Google Scholar

51. Ibid.

52. Ibid. aux pp. 101–05.

53. Voir généralement à ce sujet, Boivin, Michelle, «La Féminisation du discours: Le pourquoi» (1997) 9 Revue Femmes et Droit 235Google Scholar [ainsi que les sources y citées].

54. de Beauvoir, supra note 40 aux pp. 14–15 [c'est nous qui soulignons].

55. Ibid.

56. Rousseau, Jean-Jacques, Émile ou De l'éducation, Paris, Garnier Frères, 1907 aux pp. 430–40Google Scholar, cité dans Gallant, Corinne, La philosophie … au féminin, Moncton (N.-B.), Éditions d'Acadie, 1984 à la p. 37.Google Scholar

57. Voir la discussion ci-dessus.

58. Voir «Medical Science Wrestles with “Third Sex”» The Ottawa Citizen (12 avril 1997) A5.

59. Thibaudeau, supra note 8 aux pp. 204–05.

60. Ibid. à la p. 205.

61. «Smelling a Rat in Medical Research» article tiré de The Economist, reproduit dans The [Toronto] Globe and Mail (22 mars 1993) A7, sous la rubrique «Genden». On ajoute: «This is just one example of the ways in which medical research has been biased by taking the male as typical of the species—among humans as well as among animals.»

62. Ibid. à la p. A7: «[S]tudies demonstrating ASA's efficacy were conducted almost entirely on men. The animal tests of potential drugs for stroke have mostly been done on male rats, too, and young ones, at that». Ibid.

63. Ibid.

64. Ibid.

65. Santé et Bien-être Canada, Communiqué de presse du 25 septembre 1996.

66. Ibid. [c'est nous qui soulignons].

67. Voir, notamment, Québec, , Premier Rapport de la Commission des Droits civils de la Femme, (6 février 1930) [Commission Dorion] à la p. 9Google Scholar, où l'on affirme: «[D]ans le domaine toujours des droits privés, la femme, en tant que femme, a les mêmes droits que l'homme, et elle peut les exercer tout comme l'homme peut le faire. Elle ne peut exiger, il est vrai, d'être nommée tutrice, sauf à ses enfants, mais il s'agit là d'une charge quasi publique, où c'est l'intérêt d'un tiers qui est en jeu; pour ce qui est des droits civils proprement dits, la loi n'en enlève aucun à la femme parce qu'elle est femme» [italiques de l'original].

68. Danielle Juteau et Laurin, Nicole, «L'Évolution des formes de l'appropriation des femmes: des religieuses aux “mères porteuses”» (1988) 25:2Revue canadienne de Sociologie et d'Anthropologie 183 à la p. 190CrossRefGoogle Scholar [notes omises]. Elles ajoutent d'ailleurs: «Reconnaître que l'appropriation collective des femmes est antérieure à leur appropriation privée, c'est comprendre pourquoi le sort des femmes s'est si peu amélioré; ce n'est pas en échappant à l'appropriation privée ni en vendant sa force de travail que l'on réussit à se soustraire à sa classe de sexe.» Ibid. à la p. 192.

69. Voir généralement à ce sujet Boivin, Michelle, «L'Évolution des droits de la femme au Québec: un survol historique» (1986) 2 RJFD 53 aux pp. 55–58.Google Scholar

70. La distinction public/privé sert de support intellectuel aussi bien à la doctrine des «deux sphères» qu'à la doctrine libérale des «droits et libertés», qui échappent au contrôle de l'État. L'État libéral était à l'origine l'assemblée des pères de famille et femmes et enfants y étaient représentés par le père dans le monde «public». Voir notamment Dhavernas, Odile, Droits des femmes, pouvoir des hommes, Paris, Seuil, 1978, aux pp. 341–42.Google Scholar Le pouvoir de l'État s'arrêtait à la porte du foyer, là où le mari chef se chargeait de maintenir l'ordre dans la famille et disposait pour ce faire d'au moins deux outils juridiques complémentaires: le devoir légal d'obéissance de l'épouse et le droit de correction, qui l'autorisait notamment à faire emprisonner ses enfants sur demande, à ramener son épouse à la maison manu militari ou à la battre, sans toutefois aller jusqu'à la tuer.

71. Millett, Kate, La Politique du mâle, Paris, Stock, 1971 à la p. 39.Google Scholar Elle poursuit: «[J]ouant un rôle de médiateur entre l'individu et la structure sociale, la famille assure contrôle et conformité là où les autorités politiques et autres ne suffisent pas. En tant qu'instrument fondamental et unité de base de la société patriarcale, la famille et son rôle sont des prototypes.» Ibid.

72. Dumont, Micheline et al. , L'Hìstoire des femmes au Québec depuis quatre siècles, Montréal, Le Jour, 1992 à la p. 365Google Scholar [ci-après collectif Clio].

73. 48 Vict 1885, c. 32. L'employeur devait également accorder une heure pour le repas du midi, qui n'était pas comptée dans les heures de travail. Cette loi s'appliquait uniquement aux entreprises comptant plus de 20 employé–es. Ibid. à la p. 193.

74. Elle ironise: «Peut-être un simple exemple hypothétique suffira-t-il à illustrer plus clairement le fait que cette inégalité découle de la LIR (Loi de l'impôt sur le revenu) plutôt que du droit de la famille. Supposons que dans le cadre d'un nouveau programme conçu pour tenir compte des coûts élevés liés au maintien de deux domiciles, le gouvernement décide de fournir une subvention nette de 1 000$ à tous les couples séparés afin de les aider à satisfaire les besoins financiers de leurs enfants. Supposons en outre que cette subvention nette de 1 000$ provient de la remise d'une somme de 2 000$ au conjoint non gardien et du prélèvement d'un impôt de 1 000$ du conjoint gardien. Supposons enfin que le nouveau programme prévoit la possibilité pour le conjoint gardien de revendiquer sa quote-part de la subvention nette en recourant aux procédures actuelles du droit de la famille, mais qu'aucun mécanisme n'a été officiellement établi pour assurer le partage équitable de ces avantages et obligations supplémentaires. Un tel programme a-t-il pour effet de conférer un avantage aux conjoints non gardiens et d'imposer un désavantage aux conjoints gardiens? A-t-il pour effet de créer un fardeau ou un avantage inégal?» Thibaudeau, supra note 8 aux pp. 654–55.

75. Eichler, Margrit, Les Six Péchés capitaux sexistes, Québec, Presses de l'Université Laval, Les Cahiers de recherche du GREMF (Groupe de recherche et d'échange multidisciplinaires féministes), 1985 à la p. 3.Google Scholar Ces péchés, en matière de recherche, sont: la sur-généralisation ou la sous-spécification; le postulat d'un dualisme naturel entre les sexes; le postulat d'une réalité sociale identique pour les deux sexes; le postulat d'un comportement approprié au sexe; le double standard et la décontextualisation.

76. Voir l'opinion dissidente de la juge L'Heureux-Dubé dans l'arrêt Thibaudeau, supra note 8 à la p. 653.

77. Voir généralement à ce sujet Philipps et Young, supra note 47 aux pp. 295–96, où les auteures dénoncent l'idéologie familiale qui ne tient aucunement compte de la valeur économique du travail (bénévole?) des femmes.

78. [1991] 1 R.C.S. 489.

79. Thomas, Audrey, «Who can cee the “other” in mother?» Intertidal Life, Toronto, Stoddart, 1984 à la p. 136.Google Scholar

80. Voir notamment à ce sujet Ontario (Human Rights Commission) c. Simpsons Sears Ltd., [1985] 2 R.C.S. 536; Commission scolaire régionale de Chambly c. Bergevin, [1994] 2 R.C.S. 525; Central Alberta Dairy Pool c. Alberta (Human Rights Commission), [1990] 2 R.C.S. 489; Canadien National c. Canada (Commission des droits de la personne), [1987] 1 R.C.S. 1114. Ces principes tirés d'arrêts portant sur les dispositions des codes des droits de la personne s'appliquent de la même manière à l'interprétation de l'article 15 de la Charte. Voir Andrews, supra note 17; Symes, supra note 9.

81. Miron, supra note 12 à la p. 498 [c'est nous qui soulignons].

82. Hawthorne, Nathaniel, The Scarlet Letter, NewYork, Dodd, Mead, 1948Google Scholar [roman publié pour la première fois en 1850].

83. Ibid. aux pp. 266–67.

84. Art. 188 C.c. B.-C.

85. Symes, supra note 9 à la p. 522.

86. Voir notamment à ce sujet Boyd, Susan, «Can Law Challenge the Public/Private Divide? Women, Work and Family» (1996) 15 The Windsor Y.B. Access Just. 161.Google Scholar

87. Ce slogan est généralement attribué à la théoricienne américaine Robin Morgan. Voir Morgan, Robin, dir., Sisterhood is Global: The International Women's Movement Anthology, New York, Anchor Press/Doubleday, 1984.Google Scholar

88. Dans les termes de Madame Mary Two-Axe Early, qui a mené la lutte pour l'égalité des femmes autochtones, «No woman is free until all women are free». Paroles rapportées dans The Globe and Mail (29 mai 1992) A4. Elle y déplore que moins de 2% des «C-31»—les femmes autochtones ayant retrouvé leur statut d'«Indiennes» à la suite de l'adoption du projet de loi C-31 en 1985—ont été autorisées à réintégrer leur communauté d'origine.

89. Voir, par exemple, Lorde, Audre, Sister Outsider, Freedom, Crossing Press, 1984Google Scholar; bell hooks, Yearning: Race, Gender and Cultural Politics, Toronto, Between the Lines, 1990; Razack, Sherene, «Beyond Universal Women: Reflections on Theorizing Differences Among Women» (1996) 45 R.D.U.N.-B. 209.Google Scholar

90. J'emprunte la formule du titre d'un article de la sociologue Juteau-Lee, Danielle, «Visions partielles, visions partiales: Visions (des) minoritaires en sociologie» (1981) 13 Sociologie et Sociétés 33.CrossRefGoogle Scholar

91. Pour le Québec, voir à ce sujet collectif Clio, supra note 72 à la p. 466, où l'on énumère reproches et explications.

92. Voir généralement à ce sujet Rhode, Deborah L., «Feminist Critical Theories» (1990) 42 Stanford Law Review 617 à la p. 619.CrossRefGoogle Scholar

93. Ibid.

94. Les déconstructionnistes comme Derrida, Cixous, Irigaray et Kristeva remettent en cause l'existence d'une essence de l'être qui en maintient l'unité dans le temps et l'espace, soit une identité unifiée ou intégrée, et la relation essentielle entre la langue et la réalité qu'on appelle la vérité, puisque langage et réalité sont variables et en mouvement. Pour un résumé de la relation entre le féminisme et la pensée postmoderne, voir Tong, supra note 26 aux pp. 217–33.

95. Rhode, supra note 92 à la p. 619. Voir, à titre d'exemple, l'évolution du sens du mot «egregious» en anglais qui passe du prestigieux au remarquablement mauvais. The Random House Dictionary, supra note 49.

96. Voir, à titre d'exemples, Bertrand, Marie-Andrée, «Une Théorie post-moderne [sic] du Féminin» (1992) 7 R.C.D.S. 213Google Scholar; Collin, Françoise, «Praxis de la différence: Notes sur le tragique du sujet» (1992) 46 Les Cahiers du GRIF 125CrossRefGoogle Scholar; Guillaumin, Colette, «Femmes et théories de la société: Remarques sur les effets théoriques de la colère des opprimées» (1981) 13 Sociologie et Sociétés 19CrossRefGoogle Scholar; St-Hilaire, Colette, «Le Féminisme et la nostalgie des grands récits» (1994) 23 Cahiers de recherche sociologique 79.CrossRefGoogle Scholar

97. Voir généralement à ce sujet Iyer, supra note 16.

98. Voir notamment l'étude de Duclos, Nitya, «Disappearing Women: Racial Minority Women in Human Rights Cases» (1993) 6 RFD 25.Google Scholar Voir aussi Crenshaw, Kimberlé, «Mapping the Margins: Intersectionality, Identity Politics, and Violence Against Women of Color» dans Danielson, Dan et Engle, Karen, dir., After Identity: A Reader in Law and Culture, New York, Routledge, 1995, 57.Google Scholar

99. Iyer, supra note 16 à la p. 185 et s. Voir notamment le juge Décary: «[L'adoption de l'article 63 L.I.R.] favorise selon la preuve faite, davantage les femmes que les hommes, ce dont ne s'est pas plainte l'intimée. Je ne vois pas comment une disposition qui favorise toutes les femmes pourrait porter directement ou indirectement atteinte au droit des femmes à l'égalité, et je ne suis pas prêt à reconnaître que les femmes professionnelles forment un groupe défavorisé […]» Symes, supra note 9 à la p. 531.

100. de Beauvoir, supra note 40.

101. Iyer, supra note 16 à la p. 189.

102. Voir Miron, supra note 12 à la p. 498.

103. Ibid.

104. Razack, supra note 89 à la p. 217.

105. Pour reprendre les termes de Gisèle Halimi, «[l]a plus grande victoire du féminisme, ce sera sa disparition, buts atteints». Voir Halimi, Gisèle, Une Embellie perdue, Montréal, Gallimard, 1993 à la p. 184.Google Scholar

106. Voir généralement à ce sujet Brooks, Dianne L., «A Commentary on the Essence of Anti-Essentialism in Feminist Legal Theory» (1994) 2 Feminist Legal Studies 115.CrossRefGoogle Scholar

107. «[L]'appelante […] n'a pas envisagé l'importance de considérer l'art. 63 comme une réponse complète à la question des frais de garde d'enfants. [L]'appelante s'est trouvée à présenter ses arguments d'une façon curieusement isolée. On nous a demandé d'examiner la Charte par rapport aux travailleuses indépendantes seulement; on a aussi indiqué qu'une réparation pourrait être accordée sans qu'il soit nécessaire d'examiner la situation d'autres femmes ou d'autres parents, ni l'ensemble des mesures gouvernementales relatives aux besoins de garde d'enfants.» Symes, supra note 9 à la p. 773.

108. Ibid. aux pp. 767–68.

109. Ibid. à la p. 773.

110. Voir généralement à ce sujet «Les Acquis du féminisme en droit», supra note 27.