Dans le précédent Bulletin, nous avons reproduit différents renseignements fournis par la presse médicale sur l'activité des corps de santé officiels et libres en Mandchourie.

La guerre actuelle a certainement pris la Russie au dépourvu. Il a fallu de longs mois, marqués par une douloureuse série d'échecs, pour organiser et mettre en mouvement la formidable machine qui doit, à 15,000 kilomètres du centre de la Russie, en défendre l'honneur et les intérêts. Si l'armée a dû passer par cette période d'impuissance et de hâtive préparation, en a-t-il été de même pour l'œuvre de secours aux militaires blessés ou malades, confiée à la Société russe de la Croix-Rouge? Dans quelle mesure cette institution a-t-elle rempli sa tâche? Comment a-t-elle surmonté les énormes difficultés provenant des conditions spéciales de la guerre actuelle sur terre et sur mer, des distances considerables à franchir, des effets meurtriers des nouveaux armements, des exigences de la science moderne, des différences extrêmes de climat, etc.? Tous ceux qui, de loin, suivent avec anxiété les péripéties de cette lutte terrible, désirent savoir dans quelle mesure on a pu adoucir les maux inévitables inhérents à la guerre et procurer aux blessés et aux malades les soins et les adoucissements dus à leurs souffrances. Aussi, ne lira-t-on pas sans intérêt les données officielles suivantes, extraites du rapport de la commission exécutive de la Société russe de la Croix-Rouge, présenté à l'assemblée générate du 29 aoùt-11 septembre 1904. Ce rapport embrasse une période de sept mois (février-août). La Société russe de la Croix-Rouge pnbliera à la fin de la guerre un compte-rendu complet et détaillé de son activité. Cependant, le rapport actuel suffit déjà pour faire juger du travail accompli, des moyens mis en œuvre et de l'organisation adoptée.

L'Assemblée générale annuelle de la Société centrale suisse de la Croix-Rouge avait des objets importants à son ordre du jour, ainsi que nous l'avons précédemment déjà laissé entendre. Elle avait à ratifier les décisions de sa direction sur les trois points suivants: revision des statuts quant aux rapports avec les sociétés de samaritains, transformation du secrétariat central suisse de l'assistance volontaire, enfin reprise de l'organe officiel de la Société Dis Rothe Kreuz.

La subvention de Mk. 15,000 accordée par le Comité central prussien permit à la Société en 1904 de prendre une extension réjouissante, tant au point de vue de la diffusion que de la multiplication des branches de l'activité sociale. Cette subvention facilita l'achal d'un terrain qui permit l'agrandissement des domaines de l'institut de gardes-malades. Des transformations dans les bâtiments constituèrent des améliorations sensibles. Le nombre des malades recueillis peut également être plus considérable, et l'action de la Société par conséquent plus étendue.

La Société russe de la Croix-Rouge avait commandé à la maison Stute et Blumenthal à Hanovre-Linden, une buanderie, destinée à l'armée russe en Mandchourie et pouvant s'installer sur un wagon. Cette buanderie sur wagon, appelée « Sanitas » par les constructeurs, a été livrée à l'entière satisfaction des autorités russes et doit actuellement fonctionner en Mandchourie.

Le Comité central russe de la Croix-Rouge nous communique le compte rendu financier du fonds international de la Croix-Rouge « Impératrice Marie-Féodorovna » au 1/14 Janvier 1905.

Le 30 septembre 1905, le Journal de Genéve publiait la correspondance suivante, qui fait heureusement présager comme imminente la revision de la Convention de Genéve, attendue depuis bien des années.

Nous donnons ci-dessous le rapport que la Société suédoise nousa enyoyé sur son activité en 1904.

«Immédiatement après la déclaration, au commencement de l'année 1904, de la guerre russo-japonaise qui continue à présenter le même intérêt, on fit demander par voie diplomatique l'autorisation en faveur d'un médecin militaire suédois, de suivre sur le théâtre de la guerre l'une des sections de la Croix-Rouge russe, mais les négociations traînèrent en longueur et aboutirent à une réponse défavorable. Les enseignements et les expériences qu'il est possible d'obtenir sur les champs de bataille nous furent cependant assurés par une autre voie. Grâce au bienveillant intermédiaire de la légation japonaise à Stockholm, M. le médecin d'étatmajor, Dr Joseph Hammar, connu par sa participation à la guerre sud-africaine comme chef d'ambulance boer, fut, grâce à une subvention d'Etat et avec une recommandation de la Société suédoise, attaché à la Croix-Rouge japonaise.

Les journaux ayant annoncé la convocation d'une seconde Conférence de La Haye, à l'instigation de M. le Président Roosevelt, et l'étude nouvelle des questions abordées par la première Conférence de 1899, le Comité international s'est demandé si cette seconde Conférence exercerait peut-être, dans un sens ou dans un autre, une influence sur la revision de la Convention de Genève.

De passage à Genève, la grande-duchesse de Bade n'a pas manqué de témoigner une fois de plus son vif intérél à l'œuvre de lu Crcix-Rouge, en convoquant télégraphiquement à son hôtel les membres du Comité international, et en leur accordant une audience conformément à une ancienne tradition. A défaut du président du Comité, M. G. Moynier, auquel son état de santé ne permit pas d'aller rendre ses hommages à la grande duchesse, ainsi qu'il avait antérieurement pu le faire à maintes reprises, MM. G. Ador, vice-président, E. Odier, secrétaire, Ad. Moynier, trésorier, Dr d'Espine, Dr Ferrière et Ed. Naville purent se rendre à cette gracieuse invitation.

L'activité de la Société russe de la Croix-Rouge, qui a fait l'objet d'un article détaillé dans le numéro de Janvier du Bulletin, continue à se développer et à faire face aux pressantes nécessités créées par la prolongation des hostilités. La période relativement calme qui a séparé les sanglantes batailles de Liao-Yang des terribles journées de Moukden, a été mise à profit pour apporter à l'organisation de l'œuvre de secours aux blessés les modifications et les améliorations suggérées par la pratique.

La direction de la Société centrale suisse de la Croix-Rouge est, jusqu'en 1905, composée comme suit: M. H. Haggenmacher, avocat, Zurich, président; M. le Dr Neiss, Lausanne, vice-président; M. Jean de Montmollin, Neuchâtel, caissier; M. le Dr W. Sahli, Berne, secrétaire désigné par le Conseil fédéral. Font encore partie de la direction, huit membres choisis par la Société, et deux colonels désignés par le Conseil fédéral, enfin les présidents de l'Association samaritaine, de la Société sanitaire militaire et de la Société d'utilité publique des femmes suisses.

Nous avons sous les yeux le long mémoire publié par la Croix- Rouge de l'Uruguay et relatant ses travaux en 1904. Nos lecteurs connaissent déjà par le Bulletin international d'avril et de juillet les démèlés de ce Comité avec le gouvernement de l'Uruguay, démêlés suscités par le port illicite des insignes de la Croix-Rouge; ils connaissent également la guerre civile qui en 1904 a de nouveau ensanglanté ce pays.

Dans une communication adressée à la Deutsche militärärztl. Ztschr., le Dr Kocher (St-Pétersbourg) fait remarquer que le service sanitaire de l'armée russe est en retard de quarante ans sur celui des armées modernes; aussi est-ce avec une anxiété justifiée qu'on attend les résultats de son fonctionnement sur le théâtre de la guerre. L'instruction en vigueur date de 1887 et est insuffisante sous plusieurs rapports; il en est résulté que dès la mobilisation, on fut obligé d'y déroger souvent. Le mode de mobilisation du service de santé fut trouvé lent et pénible; pas d'unité dans la direction du ressort sanitaire, pas d'action indépendante des médecins chefs, organisation défectueuse de l'évacuation du transport des malades, des premiers soins sur le champ de bataille et à la place de pansement; pas de personnel sanitaire répondant, pour le nombre, aux tableaux de mobilisation pour la préparation militaire, aux exigences du service de santé moderne. Etant donnée cette situation, il devenait nécessaire de recourir largement à l'assistance privée, tout en se demandant si son intervention pouvait être suffisante.

Pour compléter l'article ci-dessus, donnons quelques détails deplus sur l'école des infirmières de Berne qui constitue une des branches d'activité les plus intéressantes.de la Croix-Rouge suisse.

Le 28 octobre 1904 avait lieu, à l'Ecole d'infirmières de la Croix-Rouge à Berne, la cérémonie annuelle qui termine les cours et dans laquelle les diplômes sont remis aux élèves qui ont subi avec succès les examens.

Nombreux sont, dans le corps médical, les détracteurs du paquet de pansement individuel remis à la troupe au début d'une campagne. Sans doute il y a loin du matériel de pansement sortant de l'autoclave et appliqué dans nos services chirurgicaux, par des mains strictement aseptiques, au petit paquet déroulé sur le champ de bataille par un brancardier quelconque ou par le blessé lui-même et appliqué sur une plaie rien moins que propre. Le clinicien a quelque peine à ne pas hausser les épaules et déclarer ce pansement plus ou moins inutile. Le chirurgien d'armée pourtant est placé pour apprécier la question sous un autre angle. C'est ce qui ressort, une fois de plus, d'une lettre adressée de Gundschulin, en Mandchourie, par un médecin russe, le Dr Wreden, à la Russische medizinische Rundschau:

Les services de ce bureau s'étendent de plus en plus; on fait appel à lui pour obtenir des gardes de loin comme de près, non seulement en dehors du canton, mais même de l'étranger. Le nombre des infirmières qui se sont inscrites s'est accru, et le personnel s'est, d'une manière générale, montré à la hauteur de sa tâche.

Sous la haute protection de la reine, la Société wurtembergeoise a pu, pendant cette période de paix, continuer à se développer dans la direction dans laquelle elle s'était engagée. Le comité a vu avec un vif regret s'éloigner M. le conseiller Falch, pendant de longues années directeur de la Société, et que ses occupations multipliées ont contraint à démissionner; les fonctions de secrétaire général ont été confiées à M. Ritter.