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Survivances « féodales » dans la société rurale française XIXe siècle

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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Pour éclairer le débat qui s'est instauré sur la nature de la société d'Ancien Régime (société d'ordres ou société de classes ?), et donc sur la signification profonde de la Révolution française, il ne nous paraît pas inutile d'aborder le problème des survivances féodales dans la société rurale française au XIXe siècle.

La féodalité abolie totalement et définitivement par le décret de la Convention du 17 juillet 1793, des survivances persistèrent cependant durant le premier XIXe siècle, parfois jusqu'à l'aube du xxe . Elles affectèrent essentiellement les pays de petite culture et de métayage, France de l'Ouest et du Sud-Ouest, où la « révolution agricole » s'affirmait difficilement.

Type
Études
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1968

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References

page 965 note1 Sur le détail de cette législation, voir Bulletin d'histoire économique de la Révolution. Années 1920-1921, (Paris, 1924), p. 19 : s Recueil des textes législatifs et admi-nistratifs concernant la suppression des droits féodaux », présenté par P. Caron. Le Répertoire, de Dalloz contient à l'article « Propriété féodale », un exposé complet de la question, y compris ses prolongements, en tant que matière à contestation et à jurisprudence, jusqu'au coeur du xix° siècle .

page 966 note1 Art. 5. « Les dîmes de toute nature et les redevances qui en tiennent lieu, sous quelque dénomination qu'elles soient connues et perçues, même par abonnement, possédées par les corps séculiers et réguliers […] sont abolies » (Recueil cité, p. 20) .

page 966 note2 Art. 3. « Les dîmes de toute espèce abolies par l'article 5 du décret du 4 août dernier et jours suivants […] cesseront toutes d'être perçues à compter du 1 e r janvier 1791 » (Recueil cité, p. 33) .

page 966 note3 Recueil cité, p. 83 .

page 966 note4 Pierre MassÉ, Survivances de la dîme dans la région de Bonneuil-Matours aux xvme et xixe siècles (1790-1834), Annales historiques de la Révolution française, 1958, n° 2, p. 1 .

page 966 note5 Voir Georges Lefebvre, Les paysans du Nord pendant la Révolution française, (Lille, 1924), ehap. I de la deuxième partie, La fin de l'ancien régime agraire .

page 966 note6 Recueil cité, p. 101 .

page 967 note1 Voir Pierre MassÉ, Survivances des droits féodaux dans l'Ouest (1793-1902), Annales historiques de la Révolution française, 1965, p. 270. Que sur la part qui lui revient, le preneur doit acquitter les rentes nobles, cela apparaît clairement d'après les exemples cités. Selon Georges Lefebvre, mais s'agissant d'un pays de fermage, « comme redevances, [la dîme et les droits réels] atteignaient moins le fermier que le propriétaire » (Les paysans du Nord…, op. cit., p. 160). Même affirmation de Paul Bois : « C'est le propriétaire qui doit passer l'aveu, c'est lui qui doit effectuer le versement » (Les paysans de VOuest, Le Mans, 1960, p. 388). Encore s'agirait-il de savoir, par une analyse précise des clauses du bail, si le propriétaire ne faisait pas retomber la charge sur le preneur. Paul Bois précise à la même page (note 1) : « On pourrait objecter à cela que les baux à ferme mettent toujours à la charge du preneur « les cens et rentes qui peuvent être dues au seigneur de fief », mais cette précaution souligne justement que le propriétaire s'en décharge, plus ou moins légalement sur le fermier. » Ce qui nous importe ici ce n'est pas tant l'aspect juridique que la réalité sociale et économique : le poids des droits retombait en fait sur le fermier ou le métayer .

page 967 note2 Recueil cité, p. 180 .

page 967 note3 Art. 14. « Les dispositions de la loi du 10 avril 1791, qui règle le mode par lequel les fermiers et propriétaires s'arrangeront entre eux pour la dîme supprimée, au payement de laquelle les fermiers étaient soumis, suivant l'usage ou les clauses du bail, en sus du prix de la ferme, seront communes et exécutoires entre les fermiers et propriétaires des terres soumises aux divers droits féodaux et censuels, tels que champart, terrier, tasques et autres, supprimés sans indemnité par le présent décret, et dont le payement était aussi à la charge desdits fermiers, en sus du prix du bail. » (Recueil cité, p. 181. .

page 967 note4 Cité par Pierre MassÉ, Survivances des droits féodaux… article cité, p. 286, d'après A. N.,D III, 112.

page 968 note4 Recueil cité, p. 201.

page 969 note1 Recveil cité, p. 216.

page 969 note2 Questions agraires au temps de la terreur, (2° édition, 1954), p. 132 .

page 969 note3 En fait, il n'est pas question des droits féodaux dans le décret des le r-10 décembre 1790, qui porte uniquement sur la dîme. C'est le décret du 25 août 1792 qui étendit aux droits féodaux les dispositions précédemment adoptées par la dîme .

page 970 note1 Recueil cité, p. 220. Rappelons que le décret du 1er brumaire an 11 (22 octobre 1793) annulait toutes stipulations, contraires « aux décrets portant suppression des droits »…, introduites dans les baux postérieurement à ces décrets. La date-limite au delà de laquelle ces stipulations sont permises est donc reportée au 1er brumaire an II .

page 970 note2 Nous n'examinons pas ici le cas des rentes nobles arroturées, qui donnèrent lieu à des cas de survivance sur lesquels Pierre MassÉ a attiré l'attention (Survivances des droits féodaux dans l'Ouest, article cité, p. 272), mais qui ne me semblent pas entrer exactement dans le cadre ici envisagé. Rente noble arroturée : entendons une rente noble, ainsi un champart portant sur des labours, vendue, mais sans le cens, c'est-àdire sans la directe du domaine, que se réserve le seigneur. Le terrage ainsi débarrassé du cens avec tout ce qu'il entraînait d'obligations seigneuriales, n'est plus qu'une rente foncière : la rente noble a été arroturée., Dès lors, elle ne tombe pas sous le coup de la loi du 17 juillet 1793, portant abolition de la féodalité. C'est une rente foncière devenue amortissable. Si elle n'a pas été rachetée en l'an III ou en l'an IV avec du papier-monnaie dévalué, elle survit. Mais son origine féodale étant parfois connu des assujettis ceux-ci, afin de se libérer, en prennent argument pour porter l'affaire devant les tribunaux. De là, de multiples procès qui constituent l'un des aspects non négligeables de la vie rurale sous l'Empire et la Restauration. Pierre MassÉ donne des exemples de survivance courte ou longue de rente noble arroturée, l'une, un terrage, à Savigné (Vienne), perçue jusque sous la Troisième République .

page 971 note1 Survivances des droits féodaux dans l'Ouest, article cité, p. 279 .

page 971 note2 Publiés par Célestin Port (Paris, 1880, 2 volumes) .

page 972 note1 Tome II, p. 264 .

page 972 note2 Par M. G., a.e.d.b. Paris, Imp. Baudouin, février 1822 ; in-8°, 12 p. (B.N., 8° Lb48, 2253). Cette brochure avait paru d'abord en 1820 dans la Chronique religieuse, t., IV, p . 533, t. V, p. 1, t . VI, p. 89 e t p . 455. Sur ce même sujet, voir Le Constitutionnel, 20 février 1821, Le courrier français, 18 février 1822, La Quotidienne, 1822, n° 39 .

page 972 note3 A. Ferrand, Éloge historique de Mme Elisabeth de France, suivi de plusieurs lettres de cette princesse, (Paris, 1814) .

page 973 note1 Catéchisme imprimé par l'ordre du dernier concile provincial d'Avignon, pour être seul enseigné dans les diocèses de la province., Avignon, 1815, in-12, 208 p. (B.N., D 14311. .

page 973 note2 Cathéchisme ou agrégé de la foi et des vérités chrétiennes… pour être seul enseigné dans l'ancien diocèse de Tarbes., Tarbes, 1814 ; in-12, 144 p. (B.N., D 29010.)

page 973 note3 Dans le cathéchisme pour le diocèse d'Auch, s.d., « mais indubitalbement depuis 1814 », selon Grégoire, on signale « comme violateurs de la loi de l'Église, ceux qui ne paient qu'une partie de la dîme, ou qui choisissent ce qu'ils ont de plus mauvais, ou qui refusent de la payer selon l'ancienne coutume » (p. 79). Ce qui est révélateur de la mentalité paysanne. Le catéchisme à l'usage du diocèse d'Oléron (1814) fut traduit en gascon et en basque, « pour mieux inculquer, selon Grégoire, la doctrine féodale aux habitants des campagnes ».

page 974 note1 « Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent seuls des traitements du Trésor royal. ».

page 974 note2 Jean Vidalbnc, Le problème du rétablissement de la dîme sous la Restauration. Rapport du 30 mars 1825 (î), Annales historiques de la Révolution française, 1961, p. 515. Il conviendrait, sur ce thème, d'entreprendre une recherche systématique dans la sous-série F19 (Cultes) des Archives nationales .

page 974 note3 Nous ne mentionnons pas ici les tentatives de réaction à proprement parler. Ainsi tel procès intenté par un ci-devant seigneur pour retrouver son banc d'église, signalé par la Gazette des tribunaux, du 25 septembre 1829 .

page 975 note1 [Sur tous ces aspects, voir Pierre MassÉ, Survivances des droits féodaux…, article cité, p. 292-298 .

page 975 note2 Voir Chabebt, A., Essai sur les mouvements des revenus et l'activité économique en France de 1789 à 1820, (Paris, 1949 Google Scholar). La hausse des fermages, de 1798-1802 à 1817- 1820 est d'environ 50 % .

page 975 note3 Article cité plus haut .

page 975 note4 Voir en particulier Antoine Richard, Les troubles agraires des Landes en 1791 et 1792, Annales historiques de la Révolution française, 1927, p. 564 .

page 976 note1 Pierre Ferai, Le problème de la dime, de la coussure et de la glane au XVIIIe et au XIXe siècles dans le Lectourois, (Aueh, 1950), repris dans Approches. Essais d'histoire économique et sociale de la Gascogne, (Auch, 1957) .

page 976 note2 Voir André Rebsomen, La crise agraire dans les Landes, (Bordeaux, 1922), p . 142..

page 976 note3 L'Ancien Régime et la Révolution, chapitre premier du livre I I : « Pourquoi les droits féodaux étaient devenus plus odieux au peuple de France que partout ailleurs » (Édition sous la direction de J . P. Meyer, Paris, 1952, p. 105) .

page 977 note1 A.N., AD XIX J 7 et 8 ; B.N., Lf 107, 6. Voir à ce sujet, Bertrand Gille, Les sources statistiques de l'histoire de France, des enquêtes du XVIIe siècle à 1870, (Genève- Paris, 19G4), p. 170 .

page 977 note2 A.N., BB 18 et BB 80. Voir État sommaire des versements faits aux Archives nationales par Us ministères et les administrations qui en dépendent (Série BB Justice), t. IV, avec une introduction par Georges Bouhgin (Paris, 1947), p. 87 .

page 977 note3 A.N., BB 18 1186, d. 3950 et d. 3961 .

page 978 note1 A.N., BB 18 1462. Voir Albert Soboul, Les troubles agraires de 1848, dans Paysans, Sans-Culottes et Jacobins, (Paris, 1964), p. 307 .

page 978 note2 A.N., BB 18 1463 .

page 978 note3 A.N., BB 30 359, p. 440 .

page 979 note1 A.N. BB 18 1767, d. 8502 ; BB 24 721 .

page 979 note2 Eugène LE Roy, Jacquou le Croquant, (Paris, Calmann-Lévy, s.d.), p. 366.

page 980 note1 Nous repoussons ici les vues brillantes, mais peu fondées, Cobban, d'Alfred, The myth of the French Révolution, (Londres, 1955 Google Scholar). Voir Georges Lefebvre, Le mythe de la Révolution française, Annales historiques de la Révolution française, 1956, p. 337. L'argumentation d'A. Cobban porte en premier lieu sur la « féodalité », dont il conteste la réalité sociale et écobomique : la Révolution n'a pas pu l'abolir, puisqu'elle n'existait pas ; la féodalité ne correspondait plus à rien en 1789. C'est prendre le mot féodalité, dans son acception médiévale d'origine. La réalité était plus complexe. Sous ce mot abstrait qui se recommandait à eux par sa généralité, les hommes de l'époque, paysans et révolutionnaires, englobaient les droits féodaux qui n'avaient nullement disparu, l'autorité seigneuriale et les redevances d'origine soit seigneuriale, soit domaniale. Réalité économique et sociale qui était loin d'être un mythe, comme le prouvèrent les luttes paysannes pour s'en libérer et le souvenir tenace qui en persista .

page 980 note2 Étude publiée en 1933 dans les Cahiers de la Révolution française, (n° 1) et les Annales historiques de la Révolution française, reprise dans Études sur la Révolution française, (2» édition, 1963, p. 338) .

page 981 note1 Répartition de la propriété et de l'exploitation foncières à la fin de l'Ancien Régime, Revue d'histoire moderne, 1928 ; La vente des biens nationaux, Ibid., Ces deux articles ont été repris dans Études sur la Révolution française, p. 279 et p. 307 .

page 981 note2 Quomodo jura domini aucta fuerint régnante Ludovico sexto decimo, (Paris, 1898, 81 p. in-8°). La législation civile de la Révolution française. La propriété et la famille, 1789-1804, (Paris, 1898, xx-445 p. in-8’).

page 981 note3 Paris, 1919, 216 p. in-16 .

page 982 note1 Outre l'ouvrage d'Alfred Cobban cité ci-dessus, du même auteur, The social interprétation of the French Révolution, (Cambridge, 1964). Voir encore R.R. PÂMer, Polémique américaine sur le rôle de la bourgeoisie dans la Révolution française, Annales historiques de la Révolution française, 1967, p. 369 .

page 982 note2 R. R. Palmer, The World Révolution of the West, Political Science Quarterly, 1954 ; J. Godechot et R. R. Palmer, Le problème de l'Atlantique du xvme au xxe siècle, X° Congresso internationale di Scienze storiche. Relazioni, (Firenze, 1955), t. V, p. 175 ; J. Godechot, La Grande Nation. L'expansion révolutionnaire de la France dans le monde. 1789-1799, (Paris, 1956, 2 vol.) ; R. R. Palmer, The Age of the Démocratie Révolution. A political history of Europe and America 1760-1800, t. 1. The Challenge, (Princeton, 1959) ; J. Godechot, Les Révolutions 1770-1799, (Paris, 1963, coll. « Nouvelle Clio ») .

page 982 note3 Boutruche, Robert, Seigneurie et féodalité. Le premier âge des liens d'hommes à homme, (Paris, 1959), p. 19 Google Scholar .

page 982 note4 Georges Lefebvre, Une discussion historique : du féodalisme au capitalisme, La Pensée, n° 65, 1956. Voir Transition from Feudalism to Capitalism. A Symposium, by P. M. Sweezy, M. Dobb, H. K. Takahashi, R. Hilton, C. Hill (Londres, 1954) .

page 983 note1 Rapport fait au nom du Comité des droits féodaux le 4 septembre 1789, sur l'objet et l'ordre du travail dont il est chargé…, (B.N., 8° Le 29, 193, in-8), 30 p .

page 984 note1 Guibaud, P., La sémantique, (Paris, coll. « Que sais-je ? »), p. 122 Google Scholar. Chose curieuse, le mot féodalité, ne figure pas dans l'Histoire de la langue française, de F. Bbunot, t. IX : La Révolution et l'Empire, (Paris, 1937)… Remarquons encore que les traités classiques des feudistes n'en donnent le plus souvent aucune définition ; ainsi Edme de LA Poix DE Fremenville, La pratique universelle pour la rénovation des terriers et des droits seigneuriaux, (1746-1757, 5 volumes) .

page 984 note2 L'Ancien Régime et la Révolution, livre 1, chap. V : Quelle a été l'oeuvre propre de la Révolution française ? (Éd. 1952, p. 95 et p. 96) .

page 984 note3 Jbid., livre 11, chap. I, Pourquoi les droits féodaux étaient devenus plus odieux au peuple en France que partout ailleurs (p. 99) .

page 985 note1 L'Ancien Régime et la Révolution, p. 106. Voir l'admirable tableau de la condition paysanne accablée sous le poids de la féodalité, que trace ici Tocqueville. O C'est à leur [aux seigneurs] faire des rentes que passe une partie des revenus de son petit domaine, et ces rentes sont imprescriptibles et irrachetables. » .

page 985 note2 H. Taine, Les Origines de la France contemporaine. La conquête jacobine, (éd. in-16, 1911), I, p. 176 .

page 985 note3 Voir sur ces problèmes les remarques de M. Reinhabd, Sur l'histoire de la Révolution française. Travaux récents et perspectives, Annales E.S.C., 1959, p. 558 .

page 985 note4 Voir en ce sens Pierre Vilar, La Catalogne dans l'Espagne moderne, (1962), en particulier t. II, p. 419 et suivantes. Le rôle historique de la Révolution française fut d'assurer par la destruction de la féodalité ainsi définie, la transition vers la société capitaliste. Voir Georges Lefebvre, Études sur la Révolution française, (2e éd., 1963, p. 354) : « Ils [les droits féodaux] faisaient obstacle au mode de production capitalist .

page 986 note1 qui comporte la liberté de l'individu, donc la suppression du servage, — la liberté économique, donc l'abolition des banalités et des monopoles seigneuriaux, — l'unité du marché, donc la suppression des péages, — la mobilité du capital, donc l'extinction du droit d'aînesse, du retrait féodal, du retrait lignager, du droit de franc-fief. »

page 986 note1 Les inconvénients des droits féodaux ou Réponse d'un avocat au Parlement de Paris, à plusieurs vassaux des seigneuries de…, de…, etc., (B.N., Lb 39 203, imp. s.l.n.d. [1776], in-16, iv-46 p.).

page 986 note2 Cité par Georges Lefebvre, Les paysans du Nord…, p. 887 .