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Prostitution, jeunesse et société dans les villes du Sud-Est au XVe siècle

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

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L'histoire de la prostitution n'a guère retenu l'attention des médiévistes. Les études dont nous disposons sont anciennes, locales, et leurs auteurs, médecins ou juristes qui s'essayaient à l'Histoire, privilégiaient l'anecdote. Leurs œuvres ne sont pour la plupart que des curiosa de la littérature érudite. Plus récemment, les historiens n'ont certes pas ignoré le phénomène prostitutionnel, mais fréquemment l'évocation qu'ils ont faite s'est inscrite dans une conception historiographique et un courant de pensée attribuant aux calamités du Bas Moyen Age et au désordre des mœurs l'importance des faits observés : il était tentant d'associer putain et homme de guerre, fornication et turpitude, prostibulum et cour des miracles.

Summmary

Summmary

Prostitution, flourishing and officiai, sexual violence in the form of collective rapes committed by young men of the town, such were the two apparently contradictory phenomena which affected urban life in south eastern France in the 15th century. The present study is an attempt to explain such behavior by an analysis of the matrimonial structures: middle-aged men, successful rivals of the younger men on the marriage market, provided the latter with municipally controlled fornication (the sexual needs of fellow bachelors were well understood). They accepted and supervised the noisy but socialized functions of the young men's fraternities. Thus, until the beginning of the 16th century, prostitutes were not excluded from society: they acted as mediators for clerics as well as for persons of distinction, bearing witness to humanity's sad condition but helping in the fight against vice and violence.

Type
Les Domaines de l'Histoire
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1976

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References

Notes

1. Telles sont les études de Bayle, G., « Note pour servir à l'histoire de la prostitution dans les provinces méridionales de la France », Mémoires de l'Académie du Vaucluse, t. V, 1886;Google Scholar Chalande, J., « La maison publique municipale aux xve et xvie siècles à Toulouse », La France médicale, 1912 ;Google Scholar Delannoy, J.-C., Pécheresses repenties, notes pour servir à l'histoire de la prostitution à Amiens du XIVe au XIXe siècle, Amiens, 1943 ;Google Scholar Garnier, J., Les étuves dijonnaises, Dijon, 1867 ;Google Scholar Dr.Lacassagne, J. et Picornot, A., « Vieilles étuves de Lyon et d'ailleurs », Albums du Crocodile, Lyon, 1943 ;Google Scholar Pansier, P., L'Œuvre des repenties à Avignon du XIIIe au XVIIIe siècle, Paris, 1910.Google Scholar

Quant aux histoires de la prostitution, presque toutes traitent du phénomène de sa plus haute antiquité à nos jours. Citons simplement pour mémoire : Lacroix-Dufour, P., Histoire de la prostitution chez tous les peuples du monde, Bruxelles, 1861 ;Google Scholar Dr.Pileur, Le, La prostitution du XIIIe au XVe siècle, Paris, 1908.Google Scholar On trouvera une bibliographie dans Servais, J.-J. et Laurent, J.-P., Histoire et dossier de la prostitution, Paris, 1965.Google Scholar

2. Cela commence par Ménard, L., qui, dans son Histoire civile, ecclésiastique et littéraire de la ville de Nîmes, Paris, 1754 Google Scholar (livre XII, p. 23) attribue à « la scandaleuse indulgence » des consuls l'existence d'une prostitution publique dans la viiie du xve siècle. L'idée se retrouve chez les historiens du xixe siècle et transparaît encore dans des études contemporaines.

3. Je tiens à remercier tout particulièrement le prof. G. Duby qui m'a permis de présenter ces recherches en ses séminaires d'Aix-en-Provence et du Collège de France, en novembre 1974 et février 1975. Que tous ceux qui, à Aix ou à Paris, m'ont fait part de leurs suggestions trouvent ici l'expression de ma reconnaissance ; parmi eux G. Bois, A. Burguière, N. Coulet, R. Fossier, C. Klapisch, E. Patlagean, J.-M. Pesez, F. Piponnier, K. Werner, P. Toubert et aussi N. Z. Davis, M. Morineau et J.-L. Flandrin, avec qui j'ai souvent parlé de ces problèmes. Je ne peux ici traiter en détail de tous les aspects d'un sujet que j'ai toutefois choisi de présenter dans sa totalité, au risque de restreindre la démonstration, d'abréger les notes, de supprimer presque totalement les témoignages fournis par les archives judiciaires. Mais les problèmes propres à la jeunesse urbaine seront l'objet d'un article à paraître dans les Cahiers d'Histoire, en 1976. Je compléterai ultérieurement l'étude sociale des prostituées.

4. Vaultier, R., Le folklore pendant la guerre de Cent Ans, Paris, 1965, pp. 121 et 281Google Scholar, donne des exemples de prostituées vagabondes. A Dijon, les archives de justice (A.D. Côte-d'Or, justice criminelle, B 11 360-16, 1498 et B 11 360-33, 1542) contiennent des interrogatoires de filles qui allaient dans les campagnes au temps des moissons et vendanges. En Dauphiné il est prévu, dans certains accords passés entre seigneurs et communautés villageoises, que les habitants ne pourront recevoir plus d'une nuit les prostituées de passage (cf. Lacroix-Dufour, Histoire de la prostitution, op. cit. t. IV, p. 151). Filles entretenues par des fachiers, cf. «Chronique d'un notaire d'Orange », éd. L. Duhamel, Annuaire du Vaucluse, 1881, p. 41 : « la peste a commencé par une putain que les valets de Malhet entretenions à leur grange » (1545). Voir aussi A.D. Bouches-du-Rhône, B 2043, f° 5, 1471), faits analogues. Pour les marchands cf. A.M. Lyon, FF inv. Chappe, XIII, 62/67 : procès contre les étuves de la pêcherie (1478). Selon les témoins, les marchands allemands qui venaient aux foires avaient l'habitude d'y conduire des putains avec qui ils avaient fait route. Pour les ribayriers, cf. A.D. Bouches-du-Rhône, Notaires de Tarascon, 407 E 64, f° 322 v°, juillet 1452, bagarre entre les archers de la garnison et les nautes d'un voiturier lyonnais qui s'ébattaient sur leur barque avec une femme. Les recteurs de la Charité de Lyon se plaignent à plusieurs reprises des ribayriers qui conduisent dans leurs navires des femmes venues de Savoie (Archives Charité, E 4 f, 101 v°, 1534, et E 5, f° 304, v° 1543).

5. On trouvera les preuves multipliées de l'existence du « bon hostel » dans les délibérations et comptabilités municipales. Cependant l'absence de mention du bordel dans quelques séries communales ne doit pas faire conclure à l'inexistence du lieu. Il n'est alors ni possédé ni régi par les autorités urbaines, qui en l'absence de droits de justice n'ont pas à s'en préoccuper sauf cas exceptionnel. Le meilleur exemple de cette situation est fourni par Beaucaire. Les délibérations n'évoquent que deux fois la maison, alors que les notes brèves des notaires beaucairois contiennent nombre de baux à ferme, reconnaissances de dettes ou testaments des filles publiques qui y exerçaient. Valence et Lyon sont dans une situation comparable.

6. On sait que le terme d'abbesse se trouve déjà employé dans cette acception par G. de Malmesbury (Gesta regum anglorum, Patr. Lat. col. 1384-1385) à propos du lupanar fondé par G. de Poitiers. La comparaison devait naturellement avoir grand succès. Remarquons que le titre d'abbesse était surtout en usage dans les régions où la fraternité des jeunes était qualifiée d'abbaye. L'abbesse était soit une fille commune, soit une ancienne prostituée qui pouvait être mariée. A la fin du xve ou au début du xvie siècle, des tenanciers succèdent fréquemment aux abbesses. Des officiers de justice (lieutenant du viguier à Arles, Tarascon, châtelain à Beaucaire, prévôt à Dijon, roi des ribauds à Lyon) admettent ou refusent les filles. L'abbesse, qui est aussi un agent de renseignement pour les autorités, doit faire respecter les règles du « métier » aux filles (nous verrons plus loin ce que cela signifie en matière de mœurs), veiller à ne pas faire du lupanar une maison de jeux où l'on blasphème, ne pas héberger les clients plus d'une nuit afin que le bordel ne devienne pas un repaire de truands. A Tarascon, en mai 1467, l'abbesse étant morte, deux syndics prennent en charge la maison (A. M. Tarascon, BB 9, f° 276) en attendant de trouver une remplaçante. A Dijon, dans des circonstances analogues (A. M. Dijon, K 84, 1517) deux échevins reçoivent le « serment des filles ».

7. Pour Tarascon, cf. A.M. Tarascon, BB 16, f° 16, 1449 et BB 13, f° 92, 1527. Les archives de Dijon conservent bon nombre de comptes de reconstruction ou d'entretien du bordel médiéval le mieux connu du royaume (A.M. Dijon, K 83, et I 142). Le quartier chaud d'Avignon a été décrit par Pansier, P., Dictionnaire des anciennes rues d'Avignon, Avignon 1930, p. 206.Google Scholar A. Beaucaire, le lupanar est formé par deux ou trois maisons au centre d'une rue habitée par les prostituées. A Orange une maison est tardivement construite dans la « bonne charrière » (A.M. Orange, BB 10, f° 91 v°, 1511), de même à Arles (A.M. Arles, BB 6, f° 171, 1497).

8. Nombreux exemples de cette « non résidence » à Arles, Tarascon, Dijon (A.M. Dijon, B 151, f°64, 1426; B 168, f° 151, 1508; B 169, f° 93 v°, 1517, et A.D. Côte d'Or, B 11 360-17, 1501.

9. Règlements « ségrégationnistes » : A.M. Dijon, B 148, f° 15, 1410, les hommes devront se rendre dans certaines étuves, les femmes dans d'autres ; ibid. f 112, 1412 ; cette fois, deux jours sont réservés aux hommes, deux autres aux femmes. En dehors des jours et heures « réservés », il semble bien que tous les bains reçoivent des représentants des deux sexes. Pour Dijon, cf. J. Garnier, Étuves…, op. cit. Étuves du Vertbois, de Langres, du Palais, de St-Michel, de St-Seine, de La Rochelle, de St-Philibert. A Besançon, les bains étaient si notoirement prostibulaires que leurs tenanciers payaient un impôt proportionnel au nombre de prostituées qu'ils hébergeaient (cf. J. Lacassagne, « Vieilles étuves… », op. cit. A Lyon les étuves Tresmonnoye contenaient une vingtaine de chambres, celles de la Pêcherie sans doute davantage. S'y ajoutaient les étuves du Sabliz (à proximité de l'un des bourdeaux publics), de Bourgneuf, de la Chèvre (près du Pont du Rhône), des Augustins, de Combremont. Ces établissements n'étaient pas seulement réservés aux grandes villes. Cavaillon avait ses bains publics.

10. Les étuves de la Pêcherie appartenaient en 1388 à G. Marchis, un grand marchand ; en 1446 à l'illustre famille des Baronnat ; fin xve siècle l'établissement payait des rentes élevées à l'archevêché ; l'immeuble Tresmonnoye était propriété d'Aynard de Villeneuve. A Dijon les étuves St-Michel appartenaient à l'abbaye St-Étienne, celles de Langres à l'évêque, celles de la rue des Chanoines aux Faletans. A Avignon, des chambres prostibulaires étaient louées par les Buzzaffi. A Valence, Francis de Gênas, confident de Louis XI et Général de Languedoc, affermait chaque année sa maison du bordel (A.D. Drôme, Notaires de Valence, E 2541, f° 240, 1466, et E 2490, f°4v°, 1453).

11. Il est dit à Lyon en 1478 que des filles affluent pendant le temps des foires et repartent celles-ci terminées (A.M. Lyon, FF Chappe XIII, 62). A Dijon, il existe une place où les femmes s'assemblent pour se faire embaucher « es vignes » : certaines en profitent pour se prostituer (A.D. Côte-d'Or, B 11 360-7, p. 914, 1459 ; ibid. p. 968, 1468 ; B 11 360-8, pp. 2-20, 1462, etc.

Sur l'afflux de pauvresses : à Valence on dénonce la multitude des femmes « deshonnêtes » en août 1502, mais on apprend qu'elles ont été chassées de Crest, Romans et autres lieux par la disette (A.M. Valence, BB 3, fes 36 v°, 69, 115). Faits identiques à Bourg-lez-Valence en 1504 pendant l'une des plus terribles sécheresses du siècle (A.M. Bourg-lez-Valence, CC 31, f° 825 v°) ; à Montélimar en 1511 (A.M. Montélimar, BB 25, f° 20). Mais il va de soi que les périodes de calamités sont très défavorables aux amours vénales : les supplications des filles ou des tenancières pour obtenir des abattements sur la ferme sont toujours consécutives à des disettes ou des mortalités pendant lesquelles les clients ont «déserté» le bordel (A.M. Dijon, K 83, en 1476, 1484, 1495, 1502 et K 84, en 1519, 1520). A l'inverse, la ville de Villefranche-sur-Saône agrandit son bordel en 1454 (Registres consulaires de la ville de Villefranche, éd. par A. Besançon et Et. Longin, 1.1, Villefranche, 1905, p. 309). Dijon fait de même en 1446-1447 (A.M. Dijon, B 157, f” 126). Le nombre des bains y double presque entre 1410(4) et 1470(7). De nouvelles étuves s'ouvrent à Lyon en 1471 et 1473. Autrement dit la construction d'un bordel et l'ouverture de bains sont de bons révélateurs d'une reprise démographique et commerciale.

12. A Avignon, prostituées publiques, secrètes et « destrales » (Statuts de 1441, dans Annales d'Avignon et du Comtat, 1914, p. 178), « ruffiana publica vel privata » ( Girard, J. et Pansier, P., La cour temporelle d'Avignon aux XIVe et XVesiècles, Paris, 1909, p. 128 Google Scholar). A Lyon, les « cris » de l'Officialité distinguent les filles se tenant en bourdeaux, en étuves et en chambres (A.D. Rhône, 1 G 184, f” 29 v°, 1468). A Dijon, ces dernières sont appelées « claustrières » (A.M. Dijon, B 151, f° 64 v°, 1426) ou parfois « filles légières, amoureuses ou garces », termes s'appliquant aussi à des prostituées occasionnelles ou à des femmes dont la conduite laisse à désirer.

13. Règles sanitaires : à Beaucaire, les malades de l'hôpital St-Lazare, proche du bordel, s'y rendent, ce qui est de grand inconvénient pour la ville ; on fera déplacer la maison (A.M. Beaucaire, BB 2, f 29 v°, 1492). A Avignon, les filles publiques doivent obligatoirement acheter les viandes qu'elles auraient — au marché — touchées de leurs mains ; mais à Nîmes les meretrices pétrissent elles-mêmes chaque année un gâteau qui est offert aux consuls pour les pauvres !

Interdits de temps : il est très significatif que certains baux de prostibula soient délivrés à « Carême entrant ». Cela montre que très anciennement l'interdit de Carême était respecté. L'ancienne fermière partie, la nouvelle avait le temps de s'installer, pour réouvrir la maison après Pâques. Dans la plupart des villes, la maison demeure ouverte les samedi et dimanche, jours d'affluence. Mais la tenancière devait veiller à ce que l'on ne s'y « esbatte » pas pendant les offices divins.

Limites spatiales : la plupart du temps il s'agit de contenir la prostitution publique dans ses rues traditionnelles ou de l'éloigner d'une église à la requête d'habitants d'une rue « honnête » ou à la demande d'ecclésiastiques. Exemple à Lyon en 1470 (A.D. Rhône, 1 G 184, f° 29 v°), Tarascon (BB 11, F 39), Arles (A.M. Arles, BB 2, f° 59 v°, BB 6, F 166), etc.

Contraintes vestimentaires : et obligation pour les prostituées publiques de porter une « enseigne » ; ordonnances renouvelées fréquemment et partout (en 1441, 1458 à Avignon, 1468 et 1475 à Lyon, etc.). Mais il faut noter qu'en dehors de la marque (l'aiguillette), les interdits vestimentaires prenaient place dans le cadre d'ordonnances somptuaires générales s'appliquant à toutes les catégories sociales et qui n'étaient d'ailleurs jamais respectées.

Préoccupations fiscales : à Tarascon, en 1451, un nommé J. Denis est condamné par le viguier à une amende de 12 s. cor. pour avoir « tenu une mulher faillie sans licence de la cour ». Celle-ci accordait donc (ou refusait) le droit de faire exercer le « mestier » aux nouvelles venues (A.D. Bouches-du-Rhône, Viguerie de Tarascon, B 2041/3). A Tarascon, en 1473, les consuls protestent, car le sous-viguier reçoit au déjeuner comme au dîner des filles publiques, « ce qui est au détriment de l'abbé et des profits du prostibulum » (A.M. Tarascon, BB 10, F 134v°).

14. Tiédeur des consulats : à Dijon, en 1426, on découvre après une prédication de carême, que le bordel est situé tout près de l'école ; les écoliers s'y « afolissent », on décide donc de le déplacer. Voeu pieux, le bordel demeure, les écoliers aussi (A.M. Dijon, B 151, F 64 v“). A Tarascon, on renonce à faire droit aux voisins de la maison qui avaient simplement demandé la fermeture de l'une de ses issues donnant sur leur rue, car « ce n'est pas de grand tort » (A.M. Tarascon, BB 11, Fos 162 et 181 v°, 1486).

A Romans, le bordel est dit « pro servicio reipublicae eiusdem villae ». Cf. U. Chevallier, Œuvres historiques, I, Annales de Romans, Valence, 1897, p. 69, 1487. Quant aux résistances rencontrées lors des tentatives répressives, elles viennent parfois de très haut. En 1447, à Dijon, le procureur de l'évêque de Langres se fait objectivement le défenseur des filles secrètes (A.M. Dijon, B 157, F 161 v“). En 1486, les sergents qui avaient emprisonné des femmes dissolues et communes — concubines de prêtres — furent excommuniés par l'évêque et durent aller implorer son pardon. L'évêque avait même proclamé coram publico que « le maire avait fait son plaisir charnel d'aulcunes de ces femmes » (A.M. Dijon, B 166, F 35, 1486). Plus généralement, certains échevins profitaient indirectement de la prostitution et les établissements tolérés bénéficiaient de protections éminentes.

15. Le Roy Ladurie, E., Les paysans de Languedoc, Paris, 1966, p. 278 ;CrossRefGoogle Scholar et A.D. Rhône, 1G84, 1468; A.M. Dijon, K 83, 1492, 1498, K 84, 1511, 1142, 1505, etc.

16. Pour Tarascon la liste des filles est dressée d'après les archives notariales, donc forcément très incomplète ; à Lyon, filles publiques et filles communes secrètes sont 20 dans les deux lieux publics, 30 dans les deux principales étuves, et au moins autant dans les autres bains publics. A Dijon, on en dénombre 20 à 30 « in prostibulo », sans doute autant dans les étuves, tandis que les 18 bordelages privés recensés en 1486 en retiennent une soixantaine (Dijon compte 2 614 feux en 1470). Ces chiffres sont en accord avec ce que nous connaissons par ailleurs. A Amiens, 50 filles publiques au moins en 1453 (cf. J.-C. Delannoy, Pécheresses repenties, op. cit.). A Reims en 1422 (cf. P. Desportes, « La population de Reims au xve siècle », Le Moyen Age, 1966, pp. 463- 509), on dénombre 12 « courtisanes » dans la seule paroisse St-Pierre, ce qui semble impliquer un chiffre cinq fois plus élevé pour l'ensemble de la ville. A titre de comparaison on recensait à Dijon 144 filles publiques en 1872, mais la ville comptait alors plus de 40 000 habitants. Il y en avait donc au moins trois fois plus au xve siècle.

17. Sur la justice dijonnaise, cf. Bertucat, C., La juridiction municipale de Dijon, son étendue, Dijon, 1911.Google Scholar Le vicomte-maire et les échevins possédaient toute justice dans la ville et sa banlieue et les cas autrefois réputés ducaux (rapt, vol avec récidive, feu bouté, meurtre) avaient été laissés à la connaissance du maire. Celui-ci exerce pleinement ses droits au xve siècle.

Les A.D. de la Côte-d'Or conservent un ensemble d'enquêtes et de procédures en matières criminelles : 40 grosses liasses, chacune composée de plusieurs centaines de pièces — simples feuillets ou épais cahiers — sont les vestiges du travail quotidien des procureurs-syndics jusqu'en 1550. Ces procédures constituent la source essentielle des analyses démographiques et sociales que contient notre étude (série B 11 360). Les séries B II 336 et B II 337, très incomplètes, mêlent procédures de juridiction gracieuse, civile et criminelle et portant mention de quelques sentences. Une grande partie des amendes civiles infligées se retrouve dans la série M des Archives Municipales. Enfin les sentences criminelles sont souvent transcrites dans les délibérations échevinales mais en règle générale sans les attendus. En dehors de J. Garnier, qui a trouvé là matière à ses articles sur les étuves et les Coquillards, la série criminelle a été utilisée par A. Voisin, « La nuit à Dijon au xve siècle », Annales de Bourgogne, 1937, pp. 265-279, qui a publié sous forme anecdotique deux ou trois incidents nocturnes.

18. Sur le rapport criminalité réelle-criminalité émergente (numerus obscurus), les études qui ont été menées tant en Angleterre, aux U.S.A., en Allemagne et en France dans les localités rurales comme dans les grandes villes aboutissent à des conclusions relativement concordantes. On les trouvera résumés dans Hood, R. et Sparks, R., La délinquance, Paris, 1970.Google Scholar

19. Les représailles, loin d'être exceptionnelles sont même exercées sur des femmes placées en étroite sauvegarde de la ville et du duc ; exemples dans B II 360-5, p. 538, 1453 ou B II 360-7, p. 830, 1458. Leur famille a de bonnes raisons, publiques ou privées, pour rechercher une composition amiable qui évite une intrusion judiciaire susceptible de se retourner contre la victime ou les plaignants, ou de susciter une « réaction sociale » défavorable. Exemples d'accords avec dommage de 18 gros consenti à la victime lorsque celle-ci n'est qu'une servante : dans BII 360-9, 1464, ibid. 1465. Le procureur-syndic incite lui-même à l'entente lorsque les agresseurs sont des fils de la ville et lorsque la fille violée n'était pas pucelle et n'appartenait pas à une bonne famille (B II 360 12, 1475).

20. C'est du moins le déroulement habituel de l'agression. Il en existe des variantes. L'attaque peut être commise dans la rue, la victime entraînée dans les fossés de la ville. Le guet est toujours une bonne occasion et un excellent prétexte pour les « galants » qui le désertent ou s'en réclament afin de se faire ouvrir une porte. Presque tous ces viols revêtent un caractère de brutalité inouie (des femmes enceintes traînées dans la neige, etc.) ; mais jamais les agresseurs ne cherchent à blesser grièvement ou à tuer leur victime.

21. Les agresseurs sont de toutes professions, vignerons, tisserands, foulons, bouchers, barbiers, orfèvres ; les clercs sont parmi eux en bonne place. 398 participants sont identifiés entre 1436 et 1486 (sur un total de 430 à 450 agresseurs) : 18 sont mariés en toute certitude, 99 sont célibataires (jeunes fils, fils à marier), 166 le sont certainement (compagnons, varlets) ; situations matrimoniale inconnue pour 115 autres. Sur un total de 125 viols (1436-1486), 98 sont des viols collectifs (entre 1492 et 1542, 82 viols dont 65 collectifs). Pour les 73 affaires du xve siècle dont nous conservons « l'instruction », les groupes sont en moyenne composés de 6 individus. Seuls 20 % des viols sont le fait de bandes d'une dizaine d'hommes.

L'âge des agresseurs n'est, au xve siècle, connu que dans 9 cas (20 à 29 ans, moyenne 25). Mais, dans la première moitié du xvie siècle, alors que l'âge moyen au mariage est demeuré identique à ce qu'il était entre 1450 et 1500, nous connaissons l'âge de 72 d'entre eux : 16 à 36 ans, moyenne : 24 ans 10 mois.

Une redistribution mensuelle des 207 viols commis entre 1436 et 1542 (moyenne mensuelle légèrement supérieure à 17) fait apparaître de légers fléchissements en mars (14), mai (11), septembre et octobre ( 12 et 14). Pour ces deux derniers mois rien de surprenant ; c'est une période difficile qui, de surcroît, est celle des vendanges. Le minimum de mai aurait-il une signification culturelle ? Les fêtes de la jeunesse, les danses générales y étaient nombreuses ; ce qui confirmerait les observations des moralistes (à commencer par Gerson) : les fêtes collectives « socialisaient », et tempéraient la violence des mœurs.

22. A.M. Dijon, B 161, F 50, 1458 et f° 138, 1454. J. Rabustel fut procureur pendant 36 ans (1436-1472) ; il fit preuve d'une conscience rigoureuse et appliqua avec humanité les règles d'une justice pourtant intransigeantes à l'égard des pauvres.

23. J. Du Clerq a, dans sa Chronique, évoqué le climat de violence arrageois, cf. Buchon, J. A., Choix de chroniques, Paris, 1838, pp. 1318.Google Scholar J. Deniau avait pressenti des faits semblables à Lyon, cf. La Commune de Lyon et la guerre bourguignonne, Lyon, 1934, p. 159. Mentions de «scandales» nocturnes à Valence (A.M. Valence, BB 3, f° 89 v°, 1503), à Tarascon (A.M. Tarascon, BB 12, f° 355, 1516), Beaucaire (A.M. Beaucaire, BB 5, f° 102, 1525). D'une manière générale la rareté de ces allusions ne doit guère nous surprendre, les conseillers ne se souciant pas des forfaits qui n'atteignaient qu'exceptionnellement des femmes de leur milieu.

24. Cf. E. Le Roy Ladurie, Paysans de Languedoc, op. cit. p. 398 ; J. Le Goff, La civilisation de l'Occident médiéval, Paris, 1964, p. 376 ; G. Duby, « Au xne siècle, les ‘jeunes’ dans la société aristocratique », Annales ESC, 1964, pp. 835-846.

25. Si j'applique la méthode employée par P. Desportes (La population, op. cit. p. 496) sur une population de conjoints, afin de pouvoir comparer perception masculine et perception féminine, 50 % des hommes comme 50 % des femmes choisissent des chiffres de dizaines ; 40 % et 37,5 % des chiffres pairs ; 10 % et 12,5 % des chiffres impairs. Ces résultats ne se modifient pas sensiblement dans la première moitié du xvie siècle. On peut constater, comme à Reims, que les intéressés oublient progressivement leur âge quand ils vieillissent. D'une manière générale on ne peut parler de tendance au rajeunissement chez les femmes. On assiste seulement à une sorte de viscosité des âges autour des chiffres-bornes, donc à une alternance, chez le même individu de vieillissement et de rajeunissements successifs, mais qui ne portent que sur un ou deux ans, et qui, dans un calcul statistique, s'annulent.

26. Pour les hommes s'observent seulement (52 exemples) 4 cas de mariages avant 20 ans, et 4 après 30 ans. Pour les filles le mariage demeure extrêmement rare avant 16/17 ans au xve siècle et 17/18 ans au xvie siècle.

27. On peut, en effet, lorsque des femmes témoignent, séparer sans risque d'erreur grave, les épouses des filles à marier : les premières sont toujours identifiées comme n., femme de…, les secondes n., fille de … Ne retenant que ces dernières, si nous opérons par tranches d'âge de deux années (afin de corriger les faiblesses de la perception temporelle) et sur 216 cas entre 18 et 25 ans (les témoins d'un âge inférieur sont relativement peu nombreux), les filles de 18/19 ans sont au nombre de 87, celles de 20/21 de 82, celles de 22/23, de 24/25 de 24. La rupture dans la série se situe donc bien entre 21 et 22 ans (dans ce groupe d'âge ici comme à Reims, l'attrait du chiffre 20 ne l'emporte pas nettement sur celui de 25).

28. Chez les « jeunes couples » (maris de moins de 30 ans), la proportion des inversions est de 14,5 %, elle est de 20 % chez les trentenaires, mais tombe à 10 % chez les quadragénaires et quinquagénaires. En effet, les hommes qui se sont unis en premières noces, et assez tardivement — c'est-à-dire autour de 30 ans —, à une « ancienne femme » ont, après son décès, épousé une jeunette. Précisons qu'à Lyon au xviiie siècle, malgré une proportion relativement élevée d' « inversions », le charivari était mené contre les couples qui n'obéissaient pas à la coutume matrimoniale (cf. Garden, M., Lyon et les Lyonnais au XVIIIe siècle, Paris, 1970 Google Scholar).

29. Dans la première moitié du xvie siècle (analyse portant sur 204 couples), les ménages « inversés » ne représentent que 15 % du total, infime augmentation par rapport au xve siècle. Par contre, 31 % des maris de moins de 30 ans ont une femme plus âgée qu'eux. La seule modification notable dans les coutumes matrimoniales concerne donc uniquement les premiers mariages.

30. P. Desportes, «La population », op. cit. p. 501, donne une moyenne approximative de 10 ans, ce qui impliquerait ces écarts d'âges encore plus marqués à Reims qu'à Dijon. Pour Florence, cf. Herlihy, D., « Vieillir à Florence au Quattrocento », Annales E.S.C., 1969, p. 1341.Google Scholar

31. A cet égard, pas de différences entre les coutumes des riches et celles des pauvres. A cette situation, plusieurs motifs : à l'attrait d'une femme jeune, se joignent des soucis de sécurité, tant pour le mari qui ainsi « assure » sa vieillesse, que pour la jeune femme qui — lorsqu'elle a possibilité de choix — opte peut-être pour l'homme mûr, non parce qu'il est susceptible de lui offrir une meilleure « situation » que le jeune, mais une sécurité plus grande, étant lui-même plus éloigné des « folies » de la jeunesse. Il existe sans doute un ressort plus profond encore à ces comportements : la perception des âges de la vie n'est pas alors la même, selon que l'on considère les hommes et les femmes. Eustache Deschamps, note dans son Miroir de Mariage que la vieillesse chez la femme commence à 30 ans, mais chez l'homme à 50 (cité dans Huizinga, J., Le déclin du Moyen Age, Paris, 1961, p. 44 Google Scholar).

32. Cette remarque afin que l'on ne différencie pas trop fortement — lorsque l'on évoque le comportement des groupes de jeunes —, le village et la ville. Il est certain que la « circulation » des femmes était négligeable dans le premier, grande dans la seconde. Néanmoins, les jeunes citadins ne pouvaient demeurer insensibles à la « ponction » opérée par les aînés. Une fille sur quatre pour le moins était enlevée à ses légitimes prétendants du point de vue de l'âge.

33. Cf. Ariès, Ph., L'enfant et la vie familiale sous l'Ancien Régime, 2e édition, Paris, 1973, p. vii ;Google Scholar La France et les Français, Paris, 1972, p. 872. Voir aussi Veyne, P., Comment on écrit l'histoire, Paris, 1971, p. 236.Google Scholar

34. Geremek, B., Le salariat dans l'artisanat parisien aux XIIIe-XVesiècles, Paris, 1968, pp. 3235.Google Scholar N. Zemon Davis, « City women and religious change in XVIth century France », dans Doroty Me Guigan éd., A sampler ofwomen's studies, Ann Arbor, 1973 ; rééd. dans N. Zemon Davis, Society and culture in early modem France, chapitre 3, Stanford University Press, 1975 ; Eisenstadt, N. S., From génération to génération, âges groups and social structure, Glencoe, 1956.Google Scholar

35. D. Herlihy, «Vieillir à Florence…», art. cité, p. 1345.

36. Structure des groupes: a) homogénéité d'âge: les 15 groupes utilisables sont de la première moitié du xvie siècle, mais on sait qu'il n'y a pas de modification de l'âge au mariage entre 1450 et 1550. Je définis un groupe comme homogène quand plus de la moitié des individus qui le composent n'ont que des différences d'âge inférieures à cinq ans. b) Structure socioprofessionnelle : 34 groupes du xve siècle ; homogénéité forte = 25 (fils de valets d'une même profession, ou fils d'un identique statut social) ; homogénéité moyenne = 8 (clercs, fils de marchand mêlés à une majorité de fils d'artisans) ; homogénéité faible ou inexistante = 1 (domestiques, hommes de guerre, artisans, valets, etc.). Dans la première moitié du xvie siècle, 33 groupes retenus et respectivement 23, 8, et 2. c) importance numérique : au xve siècle, 54 groupes (sur 98) comprennent 3 à 5 participants.

37. On trouvera dans le n° 15 de Déviance et contrôle social, S.E.P.C., Paris, 1974, Image du viol collectif et reconstruction d'objet (par une équipe de chercheurs de la Chancellerie et de l'Université de Bordeaux), une analyse socio-criminologique du viol, sa signification dans les sociétés contemporaines, et un état des travaux sur les bandes d'adolescents.

38. L'image du coq domine dans les défilés carnavalesques (cf. p. 309, note 88), se retrouve fréquemment dans la littérature. Jusqu'au bon et paisible marchand lyonnais F. Garin qui écrit, vers 1460, pour l'éducation de son fils : « Quand femme homme seignorie, celluy n'est pas de grant valoir, gelline bon coq se maistrie… » (cf. R. Fédou, « Le legs du Moyen Age à l'humanisme lyonnais», dans L'humanisme lyonnais au XVIe siècle, Grenoble, P.U.G., 1974, p. 12).

39. Je me fonde ici sur le nombre de jeunes hommes de 18 à 24 ans dans une ville comparable à Dijon : Reims. Pour près de 10 000 habitants, on en comptait environ 750 en 1422. En 7 ans, à Dijon, 700 participants au moins étaient compromis. Après soustraction des catégories mentionnées, il demeure 350 à 400 célibataires !

Reste à expliquer l'existence de ces comportements collectifs en marge de la légalité. La justice ne parvenait-elle point à rejeter dans la marginalité de tels faits ?

1) La surveillance des mœurs dans la collectivité urbaine incombait à l'autorité. D'une manière tout à fait légale, lorsque la conduite d'une femme était ressentie comme particulièrement scandaleuse (adultère notoire ou concubinage intolérable), les échevins accompagnés du guet surprenaient les coupables en se faisant ouvrir leur chambre et leur imposaient une amende (exemples dans A.M. Dijon, B 157, f° 161 v°, 1447, ou A.D. Côte-d'Or, B II 360-8, p. 22, 1461 ou A.M. Dijon, série M, Amendes de nuit. Quelquefois même, des femmes qui n'avaient pas tenu compte des mises en garde, et n'étaient pas efficacement protégées, étaient publiquement conduites au bordeau par les autorités (A.D. Côte-d'Or, B II 336-63, f° 98, et A.M. Dijon, B 161, f° 110 v°). N'oublions pas enfin que les charivaris et chevauchées de l'âne, exercés « légalement » et sans doute exempts de violence physique, étaient empreints d'une extraordinaire violence morale. Cette « police des mœurs » était couramment déléguée par la justice aux fraternités de jeunesse, parfois aussi à des groupes de jeunes qui allaient demander au maire l'autorisation de surprendre tel concubin — généralement un prêtre — et sa maîtresse pour les imposer ou chasser cette dernière (A.D. Côte-d'Or, B II 360-2, pièce 150, 1450). De telles délégations aboutissaient souvent à des violences pures et simples. Mais surtout, et fort naturellement, les bandes de jeunes s'amusaient, cette fois sans aucune permission de l'autorité, à gager les amants pris sur le fait, à guetter la concubine de prêtre, à « toquer à l'huis » de « fiancés ». Il était donc facile de « légitimer » n'importe quel complot ayant pour but la prise d'une fille désirée. On peut ainsi conclure que le viol collectif se situe aux confins de la culture et de la sub-culture.

2) Toutes ces violences exercées sans délégation d'autorité étaient réprimées ; mais le viol, lorsqu'il n'était pas commis sur une épouse dijonnaise ou sur une enfant, n'encourait pas de peines exemplaires. La répression n'était guère dissuasive. Les coupables identifiés (ils ne l'étaient pas tous) étaient emprisonnés. Si la victime retirait sa plainte (le cas n'était pas rare pour d'évidentes raisons déjà exposées), les agresseurs étaient immédiatement élargis. Si la plainte était maintenue, ils étaient normalement libérés sous caution en attendant de se voir infliger une amende évaluée en fonction de leurs propres facultés et en rapport avec la renommée et le statut de la victime. S'ils étaient pauvres, on les punissaient en les maintenant en « longue prison » (plutôt quelques semaines que quelques mois), ou en leur infligeant le fouet, et parfois — lorsqu'ils étaient étrangers — le bannissement.

Enfin la concurrence des justices et l'appel devant une juridiction supérieure contribuaient à tempérer les efforts du procureur-syndic et du maire. En effet les autorités urbaines avaient à coeur de faire jouer au maximum les privilèges judiciaires dont bénéficiaient les habitants, au risque de modérer en amende civile un cas criminel, afin de ne pas remettre la personne ou les biens de l'accusé à la justice ducale. D'autre part, nombre de délinquants obtenaient rémission du duc. Beaucoup se réclamaient de la justice de Monseigneur de Langres et les privilèges de clergie semblent avoir été étrangement étendus à des chaussetiers, des bouchers, des torcheurs… De plus il était de coutume, lors des premières entrées des princes des fleurs de lys, de libérer les prisonniers (tous les criminels étaient graciés par le prince, sauf les prisonniers pour dette). Le fait se produisit sept fois entre 1450 et 1475.

Comme la réaction sociale au viol n'était que rarement favorable à la victime, un jeune citoyen dijonnais pouvait se permettre de violer une fille sans pour autant être rejeté dans la délinquance ou tenu pour « meschant ». Tel fils d'artisans commet plusieurs viols, agressions armées et participe à d'innombrables rixes avant que le maire ne se décide à le bannir à temps. Quant aux enfants de notables, les jeux cruels de leur jeunesse n'affectèrent en rien leur « carrière » et ils terminèrent dans la cité, honorablement, leur vie.

40. Les témoignages des victimes, comme ceux des coupables laissent transparaître ces ressentiments à l'égard des « nantis ». Les compagnons savaient bien que les jeunes et jolies servantes étaient fréquemment « tenues » par le maître ou ses fils. Les chambrières « engrossées » par leur patron, dédommagées et mariées, sont nombreuses. Un aide de boucher, G. Robelin dit à une jeune domestique que « son maître la tenait » et qu'il « en ferait aussi son plaisir » (A.D. Côte-d'Or, B II 360-4, pièce 364, 1449). Un fils de tisserand s'adresse à Jaquette, 22 ans, servante d'un licencié en lois : « il faut que je te besogne aussi bien que les autres » (A.D. Côte-d'Or, B II 360-31, 1533). Deux compagnons maçons interpellent la nièce du vicomte-maire dans la rue (elle a 16 ans et sa conduite est sans reproche) « nous te f… nous te pourrons aussi bien f… que les autres » (B II 360-18, 1505). L'amertume s'exprime aussi à l'égard de varlets dont les revenus sont suffisants pour l'entretien d'une domestique : Mongin, charpentier non marié en possède une, six compagnons veulent la prendre à force (B II 360-5, p. 619, 1454). D'une femme enceinte, veuve et servant un prêtre, on dit : « Nous en aurons notre part aussi bien que les prêtres » (B II 360-7, p. 817, 1458). A une femme laissée seule quelques jours par son mari parti travailler hors de Dijon, on proclamait qu’ « il fallait qu'elle fist plaisir aux compagnons, mesmement à eux et qu'ils payeraient » (B II 360-11, 1471). Les veuves sont sollicitées de la même manière (B II 360-13, 1479).

41. N. Zemon Davis, « The reasons of misrule, youth groups and charivaris in sixteenth century France », Past and Présent, n° 50, 1971, pp. 41-75. Les conclusions auxquelles je suis parvenu sur les confréries de jeunesse seront développées dans les Cahiers de l'Histoire, n° 1, 1976.

42. Comment imaginer qu'il en allait autrement dans des cités où toute « congrégation » était tenue pour suspecte ? On condamnait parfois des hommes qui, sans licence de justice, avaient organisé un prix de quilles… (A.M. Dijon, B 157, f° 99 v°, oct. 1445).

43. Gerson se fait ainsi le défenseur de la fête des fous, car «elle permet au peuple de se défouler comme on donne de l'air au vin nouveau pour éviter que le tonneau n'éclate » (cit. dans C. Gaignebet et Florentin, M. C., Le Carnaval, Paris, 1974, p. 44 Google Scholar). Beaucoup de notables étaient conscients des vertus « thérapeutiques » de la fête et nos observations sur la répartition annuelle des viols semble confirmer la justesse de leurs vues. Mais il va de soi que la participation à un charivari ne pouvait constituer un « rite de passage » pour un jeune, comme le pensent C. Gauvard et A. Gokalp (” Le charivari en France au Moyen Age », Annales E.S.C., 1974, p. 704), puisque ces tumultes rassemblaient des gens de tous âges autour des jeunes et qu'ils ne représentaient pas pour les participants une véritable épreuve.

44. L'abbé de jeunesse était assisté de 4 prieurs à Beaucaire (2 pour les célibataires, 2 pour les mariés : A.M. Beaucaire, BB 4, f 63 v°, 1515, etc.). Seule une fraction des mariés — sans doute les moins âgés — était ainsi représentée. C'était déjà le cas à la fin du xive et au début du xve siècle (cf. Vaultier, Folklore, op. cit. pp. xvii, xviii et p. 55).

45. De même pour les « bons compagnons » et les « bonnes dames », etc.

46. Comment ne pas évoquer les faits décrits par P. Vidal-Naquet, « Le Philoctète de Sophocle et l'éphébie », Annales ESC, 1971, pp. 623-638.

47. N. Zemon Davis a fort bien vu que la bachellerie de village transmettait un ensemble de traditions. Quant à P. Veyne (Comment on écrit l'histoire, op. cit., p. 236), il a partiellement raison : les jeunes se conduisent bien en fidèles, mais non d'un rite, d'une morale. L'agression est presque toujours commise au nom de la « morale matrimoniale » et les charivaris et chevauchées sanctionnent les mauvaises fiancées ou les épouses défaillantes. Cependant, aucun des compagnons ne songeait à demeurer trop longtemps jeune, et tous savaient qu'ils seraient plus tard les bénéficiaires de la coutume.

48. Cette image « culturelle » transparaît dans Bakhtin, M., L'Œuvre de Rabelais et la culture populaire au Moyen Age et sous la Renaissance, Paris, 1970 Google Scholar, et d'une manière moins nette dans C. Gaignebet, Le Carnaval, op. cit.

49. Par exemple A.D. Côte-d'Or, B II 360-3, p. 242, 1444 ; B II 360-12, 1473 ; B II 360-18, 1504.

50. Pour le xve siècle, âge connu de 40 victimes : des servantes, âge moyen 17 ans ; des jeunes filles, âge moyen 20 ans, des femmes isolées veuves ou séparées, âge moyen 25 ans. Un seul cas aberrant 47 ans (pour la première moitié du xvie siècle, 47 exemples, moyenne de 22 ans et demi).

Statut : 101 cas dont 18 servantes, 24 jeunes filles, 14 veuves, 13 femmes temporairement « laissées », 3 épouses séparées, 8 épouses vivant avec leur conjoint, 9 étrangères de passage, 6 femmes dont nous ne connaissons pas la condition. 12 des victimes avaient eu avant le viol une conduite véritablement « deshonnête ».

Attaches familiales : 95 cas utilisables : 50 ont soit mari, oncle, parents ou frères dans la ville ; les autres sont en service loin de leur famille. 64 cas. 18 servantes ; 31 filles ou femmes de manouvriers foulons, tisserands, vignerons ; 7 épouses ou filles de maîtres artisans, 3 de sergents ou de messagers, 4 d'archers ou de compagnons de guerre en garnison, 1 veuve de marchand.

51. Combien révélateur, ce jugement d'une femme sur une autre : « La dite Jacote est une femme qui ne fut jamais mariée et de petit gouvernement » (A.D. Côte-d'Or, B II 360-16, 1494), ou bien cette confession qui montre à quel point une morale pouvait être largement diffusée et intériorisée : une femme de couturier fut attaquée dans la rue par trois compagnons et aurait été violée sans sa résistance et celle de sa servante ; « Combien qu'elle fut femme de bien en son estât autant que possible (A.D. Côte-d'Or, B II 360-20, 1509). Le «petit estât » s'allie naturellement dans la pensée des notables au «mauvais gouvernement» (B II 360-2, p. 153, 1432).

52. Exemples d'une femme séparée avec l'accord de son mari (B II 360-5, p. 627, 1454), une autre qui a fui le domicile conjugal (B II 360-8, p. 35, 1461) ; des épouses qui même en compagnie de leur mari, fréquentent et reçoivent trop souvent d'autres couples (B II 360-3, 1442). Telle femme de charpentier violée « pour ce qu'elle est galloise, rit voulentiers » et appelle les gens dans la rue, par leur nom (B II 360-3, p. 317, 1447). Les femmes qui sortent le soir (même en compagnie d'un parent), car il n'est pas « heure que les femmes aillent par la ville » (B 11360-14, 1485 ou B II 360-5, 1453, ou B II 360-5, p. 607, 1453, ou B II 360-9, 1464). Et voilà qui résume la vulnérabilité des jeunes immigrées et explique la plupart des viols : Jeanne, 15 ans, raconte sa pauvre histoire. Elle avait quitté ses maîtres rôtisseurs, chez qui elle avait été violée par un valet. Logée chez une femme, elle gagnait à la journée, aux champs ou à la ville et en était contente, car elle vivait mieux que lorsqu'elle était domestique. Mais elle demeurait parfois quelques jours sans travail, « et pour ce que Ion cogneust qu'elle alloit et venoit et estoit oizeuse, elle fust tantôt mise en chasse des jeunes fils de la ville lesquels la poursuyvoient par façon qu'elle s'est adonnée à leur faire plaisir de son corps »; (B II 360-16, 1492).

53. Voilà pourquoi les familles hésitent à porter plainte ; deux cas significatifs : en juillet 1425, un valet attenta à la pudeur d'une fille de 10 ans, Regnaulde ; il ne l'avait pas violée, mais avait commis un geste fort osé. Il fut condamné à être battu un jour de marché. Les parents de la victime demandèrent et obtinrent que la sentence ne fût pas exécutée « afin que la dite Regnaulde ne fust pas deshonorée » (A.M. Dijon, B 151, f° 54 v°). En 1455, une jeune femme ayant été livrée à la prostitution par sa belle-mère, celle-ci fut bannie mais non battue, car les juges craignirent « qu'en ce cas le fils n'eust habandonné sa femme » (B II 360-6, pièce 676).

54. Les exemples sont très nombreux. Une femme enceinte, forcée par des archers picards, contre lesquels la ville enquête, n'avoue pas le viol ; c'est seulement après son accouchement qu'elle revient sur sa première déposition dissimulée « par honte » (B II 360-12, 1473). Une autre a accepté un accord « craignant par justice estre diffamée » (B II 360-9, 1464). Catherine, âgée de 26 ans, savait que les archers ducaux qui, depuis quelques jours, se livraient à des excès, allaient la conduire au bordel. Elle s'y rend d'elle-même « pour éviter que l'on ne l'y eust menée plus honteusement… et afin que les voisins ne fussent scandalisés » (B II 360-6, p. 772, 1457).

Et voici quelques réactions du voisinage : en décembre 1483, Jeannette, bonne servante depuis deux ans chez un ménage de serruriers, est violée par une bande ; « par crainte personne n'ose recevoir ladicte Jeannette mesmement eux ses anciens maistres » (B II 360-14). En 1527, la mère d'une victime veut l'emmener hors de Dijon car, dit-elle, « jamais n'aurait heust honneur en ceste ville » (B II 360-29). La même année une servante a été attaquée et injuriée par trois compagnons, elle s'en plaint à sa logeuse qui lui donne congé car « puisqu'on la chargeait desdites meschancetés elle ne la tiendroit plus, sinon que l'on lui heust baillé cognoissance pour savoir si elle estait femme de bien ou meschante fille » (B II 360-29).

Saint Thomas avait suggéré les conséquences possibles du stupre, en en donnant bien sûr une interprétation exprimant bien les idées contemporaines sur la sexualité féminine : si le séducteur n'épouse pas la personne séduite en guise de réparation, celle-ci trouvera plus difficilement à se marier. Elle pourra être conduite à se livrer à la débauche d'où l'éloignait jusque là une pudeur intacte…

55. Tarascon, plaintes contre sa conduite en 1444 (A.M. Tarascon, BB 7, f° 183 v°), 1470 (BB 10, f° 63, 1473), ibid., P 134 v°, etc. A Beaucaire, le sous-viguier est « illettré, mène une vie deshonnête, fréquente les truands et les souteneurs (A.M. Beaucaire, BB 2, f° 112 v°, 1495). A Avignon, Lyon et Dijon, des sergents tiennent des chambres prostibulaires, des étuves.

56. Cf. J. Bailbé, « Le thème de la vieille femme dans la poésie satirique du xvie et du début du xviie siècle », Bibliothèque Humanisme et Renaissance, Travaux et documents, t. 26, 1964, pp. 98-119. Image identique dans Villon, et dans les soties.

57. Sur les 75 maquerelles, 8 nous sont presque inconnues, 41 sont mariées, 14 concubines ou fiancées, 12 sont veuves.

58. Exemple dans A.D. Côte-d'Or, B II 360-5, p. 584, B II 360-8, B II 360-14, etc.

59. Sur J. Saignant longtemps protégée par J. Coustain, premier valet de chambre du duc Philippe le Bon, cf. J. Garnier, Etuves, op. cit. et A.D. Côte-d'Or B II 360-8, pièce 986.

60. On trouve, bien sûr, dans les délibérations consulaires des protestations contre la conduite des ruffians, mais confondus avec les vagabonds étrangers et oisifs (exemple A.M. Valence, CC, 31 juin 1483, A.M. Arles, BB 2, f° 93 v°, 1435), A.M. Tarascon, BB 12, f° 226 v°, 1507). Sur la « Coquille», cf. Garnier, J., Les compagnons de la Coquille, Dijon, 1842.Google Scholar

61. Résultats d'ensemble portant sur les prostituées publiques et secrètes de Dijon entre 1440 et 1540 : il va de soi que nous sommes ici tributaires de l'image que donnent d'elles-mêmes les prostituées ou des renseignements fournis par les hommes de justice. C'est d'après les esquisses autobiographiques contenues dans les interrogatoires et les témoignages des Dijonnais que nous avons réuni les conclusions suivantes.

1) Origine géographique : 146 cas ; 38 de Dijon, 45 du plat pays bourguignon, 63 de régions éloignées. Il semble, d'après 123 cas utilisables, que 21 filles soient originaires de grandes villes, 33 de villages, et l'immense majorité de villes moyennes ou de bourgs.

2) Stabilité : 130 cas ; 69 femmes enracinées à Dijon, 42 moyennement stables (chambrières ou domestiques depuis plus de 6 mois en service), 19 vagabondes ou femmes de passage.

3) Statut matrimonial : 136 cas ; 60 de célibataires, 32 96 d'épouses, 8 % de veuves. Par contre 20 % seulement des filles du bordel public avouent avoir été mariées.

4) Situation familiale : 96 cas ; le père est vivant dans les deux-tiers des cas, la mère dans près de la moitié. Moins d'un tiers des prostituées sont orphelines de père et de mère.

5) Condition sociale : 61 cas. Moins d'un quart sont filles de marchands ou de riches. Les autres sont, à égalité, filles de paysans ou d'artisans. Par contre, quand elles sont mariées, 2 sur 3 sont les épouses de compagnons de métier et de manouvriers.

6) Raisons données à la prostitution : 77 cas ; 12 ont été prostituées par une belle-mère, un parâtre, une mère, un parent proche (oncle ou tante), 8 y ont été conduites à la suite d'un conflit familial, 8 par la misère, 17 par maquerellages s'accompagnant de violence, 21 à la suite de viol ; 11 seulement avouent y être venues de plein gré.

7) Age à la prostitution : 48 cas, moyenne 17 ans.

62. Cf. Pansier, P., et Girard, J., La cour temporelle, op. cit. p. 196, et A.D. Côte-d'Or, B II 360-12, 1475.Google Scholar

63. Moyennes établies à partir de 39 cas pour les prostituées publiques, 10 cas pour celles des étuves et 19 pour les filles secrètes. Au xvie siècle, on constate un net abaissement de l'âge des prostituées publiques (37 cas, moyenne = 24 ans 10 mois). Plusieurs exemples confirment le sens de ces moyennes d'âge : Jeanne la Rousse qui, à 16 ans, avait quitté le domicile paternel, s'était d'abord tenue avec des prêtres, puis en une chambre seule, puis au bordeau de Troyes (B II 360-26). On retrouve au hasard des sentences de la mairie de Dijon, Simone Plateau, d'abord concubine, puis fille publique secrète, puis enfin fille de la Grande Maison.

64. Cette dominante se retrouve à Villefranche-sur Saône, Avignon, Beaucaire et Tarascon. A Dijon, sur 66 prostituées du bordel, 53 viennent de régions éloignées, dont 26 des campagnes ou des villes du Nord-Ouest. Une bonne évocation de « l'errance » est donnée par la confession de Jeanne d'Arras (A.D. Côte-d'Or, B II 360-18) qui, en quatre ans, est allée d'Arras à Amiens, puis à Lille, Douai, Thérouanne, Mex, Pont-à-Mousson, Neufchâtel, Nancy ; elle a 22 ans lorsqu'elle s'établit à Dijon en 1504. Exemples de «compagnonnages»: cinq filles communes partent au bordel de Verdun pour moissonner en Bourgogne avant de regagner une ville (B II 360-33, 1542). A Dijon, en 1433, une fille commune est condamnée pour avoir dit à une femme, que, comme elle était de leur « métier », il convenait qu'elle leur donnât le « vin », ce qui constitue l'équivalent de la « bienvenue » imposée par les compagnons dijonnais aux étrangers qui venaient travailler dans leur ville (B II 336-45, f 219). L'expression « mère des filles » se trouve dans la bouche d'un compagnon lillois (B II 360-19, 1508).

65. Elles paient loyer et guet (A.M. Dijon, I 142, 1434), sont exonérées de taille (ibid.), c'était aussi le cas à Besançon (cf. J. Lacassagne, Vieilles étuves, op. cit.), prennent leurs repas tantôt à la Grande Maison, tantôt à la taverne (A.M. Dijon, K 83 et A.D. Côte-d'Or, 8 II 360-7, pièce 964), chantent dans les rues le soir (cf. Vaultier, Folklore…, op. cit., p. 218 et Eyssette, A., Histoire administrative de Beaucaire depuis le XIIIesiècle, Beaucaire, 1884, 1889, II, p. 284 Google Scholar). F. Platter décrit leurs riches vêtements et leurs astuces pour entraîner les garçons dans le prostibulum.

Elles recevaient l'homme habituellement une demi-heure. C'est la durée toujours avancée par une fille ou la maîtresse pour faire entendre aux autorités que le « contrat » a été tenu, pour déloger un compagnon d'une chambre (A.D. Côte-d'Or, B II 360-4, 1450 et B II 360-8, 1462 et A.M. Lyon, FF, Chappe, XIII, 62/67). On sait que les chandelles servaient à mesurer le temps, et que les filles étaient en Italie « filles à la chandelle ».

Il va de soi qu'en matière de prix, il est téméraire d'avancer des chiffres ayant valeur générale. Mais la somme d'un blanc semble courante au xve siècle pour le service le plus expéditif (A.D. Côte-d'Or, B II 360-2, p. 115, 1433, B II 360-5, 1454, B II 360-10, 1467). En juin 1462, une femme était louée deux blancs pour travailler une journée dans les vignes, mais les filles secrètes de 15 à 17 ans étaient payées 2 à 6 blancs (B II 360-11, 1469 et B II 360-14, 1480). Aux étuves de St-Philibert, les compagnons — ils avaient fait aussi ripaille — laissaient à J. Saignant 3 ou 4 gros après une bonne soirée (B II 360-8, p. 986). Parfois les filles acceptaient un paiement en nature, un dîner (B II 360-17, 1500).

66. Il y avait du feu dans les chambres des filles. Des compagnons venaient s'y chauffer et parler (B II 360-10, 1467 et B II 360-23, 1515).

67. Un port comme Arles mis à part, on ne relève qu'exceptionnellement des attitudes provocatrices (en mai 1501, à Valence, les meretrices se sont exhibées de manière impudique à des vierges allant au lavoir (A.M. Valence, BB 3, f°21). Quant à leur propre sentiment sur le « mestier », l'une dit d'une femme qui l'a « mise au métier », qu'elle la « maudira toute sa vie » (A.D. Côte-d'Or, B II 360-5, p. 533, 1452), telle autre, « qu'elle a été mise à mal » (B II 360-18), une troisième, de 30 ans, lance à une « garçote » de 13 ans que « si elle savait qu'elle fust déjà ribaude elle lui tordroit le cou » (B II 360-31, 1532). Par contre une fille commune qui s'est fait traiter de paillarde par une jeune patricienne lui répond « qu'elle n'est pas pire qu'elle » (B II 360- 18, 1505) ; c'est seulement dans un testament, sur cinq des filles de Beaucaire-Tarascon, que je trouve mention d'une inquiétude pour les maux infernaux qui pourraient punir une vie dissolue (A.D. Gard, Notaires de Beaucaire, 2E 18-31).

68. Au xve siècle, sur 43 prostituées du bordel de Dijon dont nous connaissons l'âge, 7 ont plus de 30 ans, la plus jeune en a 21 (âge moyen 27,9). Au xvie siècle (jusqu'en 1542), 41 cas, 3 se donnent plus de 30 ans, la plus jeune a 16 ans (âge moyen 24 ans 10 mois). Il est possible que cette diminution sensible de l'âge des prostituées publiques, s'explique par la répression déjà plus efficace de la prostitution secrète et, peut-être, par les premiers effets de dégradation du travail féminin.

69. A Avignon, les statuts des repenties, dans leur traduction de la fin du xv’ siècle, sont fort savoureux : « n'y seront reçues fort seulement jeunes femmes de l'âge de vingt-cinq ans qui en leur jeunesse auront esté lubriques et qui, par leur beauté et formosité, pourroient encore estre, par fragilité mondaine, promptes et inclinées à volupté mondaine et induire à attirer à ce totallement les hommes » (cf. P. Pansier, L'Œuvre des repenties, op. cit. p. 40). A Lyon, le Grand Hôpital ne devait recevoir que 25 repenties (A.M. Lyon, BB 25, f° 206 v°, déc. 1507, rappel de règlements anciens).

70. Très nombreux exemples de prostituées dont le mariage fut favorisé par le consulat ou les aumônes de quartier dans P. Pansier, Œuvre des repenties, op. cit., III, pp. 18 et 19, IV, p. 19, etc.) ; à propos de l'une d'elles, on précise qu'elle sera honorable femme. A Beaucaire un labou- reur épouse une fille du bordel et le contrat passé devant notaire précise sa condition (A.D. Gard, Notaire de Beaucaire, 2E 18-82, nov. 1480). A Dijon, avant Pâques, une fille de la Grande Maison a été fiancée et « espérons la faire espouser dedant huit jours, et sera femme de bien » (A.M. Dijon, I 142, avril 1516). P. Lacroix-Dufour, Histoire de la prostitution, op. cit., t. IV, p. 38, cite une confirmation des statuts de la Grande Boucherie de Paris (1381) qui interdit aux apprentis du métier d'épouser une femme qui aurait été fille publique ou le serait encore. Toutefois, si l'un d'eux prenait femme commune il serait privé de la Grande Boucherie, mais pourrait tailler à l'un des étaux du Petit Pont. C'est donc que le cas n'était pas — et de très loin — exceptionnel.

71. A.M. Lyon, FF, Chappe, XIII, 62/67, 1478. Clientèle du prostibulum de Dijon : entre 1442 et 1492 : 107 individus dont 87 professionnellement qualifiés (ils appartiennent à 28 professions). Les étrangers (en comprenant aussi dans cette catégorie les serviteurs domestiques, hommes de guerre et pauvres) ne forment qu'un peu plus du quart de cette population (dans la première moitié du xvie siècle, ils sont 19 sur 63 clients). Socialement, 47 sont artisans ou manouvriers, 11 marchands ou exerçant des professions enviables, 9 clercs d'Église ou de justice, 10 domestiques, 5 hommes de guerre et 5 pauvres. On peut ainsi constater que le bordel municipal n'est ni le repaire des pauvres ou des errants, ni le havre d'une clientèle aisée qui ne compte que pour moins de 30 96.

72. A.M. Lyon, FF, Chappe, XIII, 62/67. A.D. Côte-d'Or, B II 360-8, pp. 37 et 986, enquêtes contre J. Saignant de 1461 et 1464, et B II 360-6, pièce 772, 1457, B II 360-19, 1508, etc.

73. Jugement de moralité porté par le procureur-syndic lui-même, en marge de l'enquête sur un jeune homme témoin d'une rixe dans la Grande Maison (A.D. Côte-d'Or, B II 260-15, 1490.

74. BII 360-6, pièce 772, avril 1457, et B II 360-15, 1490.

75. B II 360-6, pièce 772.

76. A Tarascon l'abbesse est condamnée à 48 s. cor. et un nommé E. Gras, marié, à 75 s. cor. (A.D. Bouches-du-Rhône, B 2043, 1477). Encore faudrait-il connaître les circonstances du délit avant de conclure qu'une certaine sévérité était de règle.

77. La rriairie de Dijon accuse le prévôt Richard Faultrey d'avoir transgressé la coutume en visitant les chambres du prostibulum et en ayant exigé des filles « de l'une ung gros de l'aultre trois, soulbz faulx leur donner à entendre qu'elles ont albergié gens mariés ou prestres ou clercs, sur quoy ledit prévost audit lieu n'a point à cognoistre s'il n'y a plaintif (A.D. Côte-d'Or, B II 360- 8, nov. 1463).

78. A.D. Côte-d'Or, BII 360-10. Ils étaient accompagnés d'autres hommes mariés qui ne furent pas poursuivis.

79. Les rares visites du guet dans les étuves étaient sans conséquence pour les clients. Ainsi, selon son propre témoignage, l'échevin O. Fremyot, commis à faire le guet, avait plusieurs fois pénétré dans la salle des étuves St-Philibert de Dijon « sans toutefois faire aucun dommage ne desplaisir à personne combien qu'il y avait trouvé des prestres et des hommes et femmes mariés à heures extraordinaires..'. » (B II 360-8, f° 2, 1463). En 1467, on entame une procédure contre le lieutenant du prévôt qui a usé de brutalités dans les étuves de Marion la Liégeoise (B II 360-10, nov. 1467).

80. L'âge moyen des clients d'étuves (27 cas) est de 30 ans 3 mois, alors qu'il est inférieur à 27 au prostibulum. Sur 104 clients (entre 1440 et 1540), on dénombre 24 clercs de justice et hommes de lois, 21 ecclésiastiques, 18 artisans, 17 compagnons, 11 marchands et bourgeois, 5 hauts officiers ducaux ou royaux, 5 domestiques de maisons nobles, 3 hommes de guerre. Les deuxtiers de la clientèle appartiennent donc à des milieux aisés : recrutement inverse de celui du prostibulum. Quant aux bordelages privés le procureur avoue qu'ils « baillent occasion à notables personnages qui pour rien ne vouldroient consentir à mal faire… » (BII 360-15, 1486).

81. La situation semble la même à Lyon. Pour Dijon je ne citerai que les faits les plus révélateurs ; des prêtres n'hésitent pas à faire scandale au bordel (B II 360-4, pièce 359, 1449) ; le chapelain de Mgr le Maréchal y va (B II 360-6, p. 783, 1457), des prêtres sont auteurs de viols nocturnes (B II 360-5, p. 624, 1454 et B II 360-12, 1475, etc.), en juin 1502 les échevins disent de l'abbé de St-Étienne qu'il a fait plusieurs insolences par nuit, armé et en habits dissimulés (A.M. Dijon, B 168, f 51) et tandis que le procureur de Monsieur de Langres défend ses fornicateurs contre la mairie (A.M. Dijon, B 157, F 161 v°, 1447), le clerc du vicaire général vit en concubinage en l'hôtel du Chapitre (B II 360-11, 1469), Messire le Promoteur tient en sa maison des putains (B II 360-18, 1506), etc. L'opinion s'inquiète surtout des ecclésiastiques qui font venir chez eux des femmes mariées (B II 360-8, 1463, B II 360-13, 1476, etc.).

82. Le terme est employé par les prostituées elles-mêmes, par les citadins et par les autorités municipales.

83. Je ne veux pas me faire l'avocat du diable ou cultiver le paradoxe, je constate simplement une série de faits : 1. Étant donnée la brutalité des mœurs et la morale ayant cours, le bordel évitait une insécurité plus grande encore. Un exemple : le soir devant la Sainte-Catherine 1439, trois compagnons « voulaient quérir une femme de prestre pour soy esbattre » (on sait ce que cela signifiait) mais comme l'un d'eux avait déjà été pris ce faisant, ils décidèrent d'aller rue des Grands Champs (au prostibulum). Ils se livrèrent ensuite à quelques farces sans gravité, mais qui motivèrent leur interrogatoire (B II 360-2, pièce 149, 1439). 2. Lors du procès contre les étuves de la Pêcherie à Lyon, les défenseurs prennent bien soin d'expliquer que les étuves publiques sont permises tant par ordonnances des rois de France que par l'usage dans les bonnes villes du royaume « ad evitandum majus malum… », et par ce moyen « on ne actempte point de corrompre les bonnes filles et preudes femmes ». Et, en 1535, c'est-à-dire en un temps où la prostitution commençait d'être condamnée plus sévèrement par les autorités ou l'opinion, les gouverneurs de Besançon, dans une ordonnance sur les bordeaux et étuves, précisent que « pour obvier aucune fois à jeunesse et éviter plus grant mal sont par Eglise tollérées les maisons des filles dissolues… » (D. Le Pileur, La prostitution, op. cit., p. 109.

Dans ces justifications c'est l'idée que la prostitution limite le nombre des femmes adultères qui me semble la plus forte. En effet, en matière de morale sociale, l'adultère féminin était l'un des crimes les plus graves. C'est pourquoi j'ose avancer que lorsqu'une prostituée accueillait un homme marié, c'était moindre mal pour la communauté.

84. « Descentes » des filles publiques chez les filles secrètes : ex. dans A.D. Côte-d'Or, B II 360-5, p. 633, 1454 ; B II 360-8, p. 986, 1460 ; B II 360-9, 1465 ; B II 360-15, 1489, etc. Il va de soi que le nombre des « raids » dépend de la prospérité du métier. Ils se font plus fréquents en mauvaises années et se multiplient au xvie siècle lorsque la réprobation augmente à l'égard des filles secrètes.

85. Le mari de Casotte Cristal était prévôt des ouvriers de la monnaie de Lyon, le frère de J. Saignant était prêtre ; les notaires tarasconnais ou beaucairois allaient couramment instrumenter dans le prostibulum, certains en recevaient même des revenus (A.D. Bouches-du-Rhône, Notaires Tarascon, Muratoris, 395 E 14, f°616, 1436). A Nîmes, chaque année le jour de la Charité les filles de la maison venaient offrir, en cortège une fougasse aux consuls, pour les pauvres. Le Premier consul embrassait l'abbesse et lui donnait en retour du vin ou une somme d'argent (A.M. Nîmes, RR 5 inv. ms.). A Aies, il est spécifié dans les baux du bordel que le tenancier devra y tenir « de belles et plaisantes filles putains » ou encore de « belles et agoustantes partenaires à paillardise » (A.M. Alais, inv. ms. Bardon, t. II, pp. 553 et 683). La ville de Pernes organisait à la St-Barthélemy des jeux dotés de prix ; entre un tir à l'arc et une galopade d'enfants, prenait place une course de filles publiques (A.M. Pernes, inv. ms. CC 27). Quant aux entrées princières on sait qu'elles comprenaient des tableaux vivants et que des filles nues figuraient allégoriquement la Vérité, les Grâces, etc. Peut-on imaginer que de jeunes patriciennes, ou même des filles d'artisans, offraient ainsi leurs charmes à la vue de tous ? Les tâches publiques enfin étaient un peu partout les mêmes. A Toulouse comme à Besançon ou Amiens, les filles publiques devaient contribuer à la lutte contre les incendies (comme elles luttaient contre le feu de la paillardise).

86. En dehors des années calamiteuses où l'on expulse pêle-mêle pauvres vagabonds, ribauds et filles, et malgré une attention timide portée en temps de carême aux interdits, c'est bien après un événement religieux exceptionnel que l'on éprouve quelques velléités d'assainissement ne se limitant d'ailleurs point aux conduites sexuelles. Ainsi à Dijon, en 1426, la prédication de carême de « très notable prêcheur et bon prudhomme frère J. Foucault de l'ordre des Cordeliers » émut les échevins. Frère Foucault voulait éloigner les meretrices des jeunes, « renfermer » les filles communes, mais aussi interdir blasphèmes et vilains serments, chasser les marchands des cimetières, abolir les marchés tenus les jours de fête, etc. (A.M. Dijon, B 151, P 64 v°, 19 mars 1426). La première enquête contre J. Saignant (B II 360-8, p. 986) fut entreprise peu après la tenue à Dijon d'un chapitre général des frères Prêcheurs.

87. Ainsi de « Marguerite hôtesse de la Muraille », maquereile pendant plus de 10 ans (N II 360-5, p. 533), de J. de Bouchaud pendant 11 ans (B II 360-4 et B II 360-9), de Marie du Château pendant plus de 13 ans (A.M. Dijon, B 166, P 81 v°, et B 167, P 16 v°), de P. Bouju (auteur de plusieurs viols) et de sa femme pendant une douzaine d'années (A.M. Dijon, B 166, f° 141). Apprécions le sens de cette condamnation : une maquerelle est en 1488 bannie cinq ans mais, « pour ce que ceste fois elle avait profité de sa nièce, et était par ailleurs coutumière de ce faire malgré les remonstrances » (B II 337-4). A Tarascon, « la pintresse » accusée des mêmes maux est dénoncée au consulat en 1467 (A.M. Tarn, BB 9, f° 283), mais on la retrouve en 1472-1473 (A.D. Bouches-du-Rhône, B 2043, f 7 v°), etc.

88. Petit de Julleville, L., Les comédiens en France au Moyen Age, Paris, 1885, p. 141.Google Scholar Je commenterai le dessin de la parade du roi d'amour dijonnais dans le n° 1, 1976 des Cahiers d'Histoire.

89. En 1497, clercs et compagnons jouent à Dijon « l'hystoire du roy Assuaire et de la Royne Ester » ; en 1509 ils font représenter place St-Michel le «jeu de la Ste Suzanne » (A.M. Dijon, B 131). Ces thèmes se prêtaient à de savoureuses allusions aux vieillards qui enlevaient les vierges.

90. Cf. Flandrin, J.-L., L'Église et le contrôle des naissances, Paris, 1970, pp. 55-68Google Scholar, et Noonan, J. T., Contraception et mariage, Paris, 1969.Google Scholar

91. Bien sûr la fornication ne fut jamais licéitée par l'Église, mais on sait que l'on débattit de la question aux conciles de Vienne et de Bâle.

92. A.D. Côte-d'Or, B II 360-9, 1465 ; c'est un maître charpentier qui lance cette affirmation ; quant à l'épithète de « jacobine » elle faisait partie du langage courant.

93. Cité dans Sullerot, E., Histoire et mythologie de l'amour, Paris, 1974, p. 78.Google Scholar

94. Ces mots sur les lèvres de Guillemette, femme d'un vigneron (B II 360-11, 1471). Comme on peut le constater, l'image sociale de l'épouse était fort bien intériorisée par les intéressées ellesmêmes (autres exemples de soumission féminine au modèle dans B II 360-11, 1469).

95. On constate pour le première fois en 1515, à Dijon, la participation de femmes accompagnées ou non de leur mari, aux mascarades nocturnes (B II 360-23), et ce sont des femmes « honnêtes ». En 1508 les « femmes de bien » de la rue St-Pierre adressent une suplication au maire pour dénoncer les concubines et maquerelles envahissant leur rue (A.M. Dijon, I 142). A Orange — mais en 1567 — les femmes offrent de fabriquer de la poudre pour la défense de la ville (A.M. Orange, BB 16, f° 115). Il semble bien (un premier exemple en 1533) que dès les années 1530 certaines femmes jouent dans l'organisation des charivaris un rôle initiateur. Mais surtout dans l'identification d'une épouse, le modèle jusqu'alors réservé aux filles de patriciens commence à être diffusé dans des couches variées de la population (x. fille de n… épouse de y…).

96. A. Burguière, « De Malthus à Max Weber, mariage tardif et esprit d'entreprise », Annales E.S.C., 1972, p. 1134; et N. Zemon Davies, City women, op. cit.

97. A Orange, le bordel est dévasté en 1523 par les pages de Mgr de Bayard (A.M. Orange, CC 417, P 40), en 1525-1526 par les gens d'armes (CC 419, f” 10), en 1536 (CC 428, f° 50), en 1537 par les lansquenets (CC 429, f° 12 v°). A Dijon, il est saccagé en 1495 (A.M. Dijon, K 83), 1499 (ibid.), 1514, 1525 (K 84), 1527 (I 142), 1536 (K 85), 1542 (ibid.)…

98. E. Le Roy Ladurie, Paysans de Languedoc, op. cit. p. 276.

99. Une ordonnance dijonnaise de police générale (milieu xvie siècle) décrit la situation en ces termes : « pour ce que la plupart desditz enfans masles (des familles pauvres) mendient et pour non savoir mestier s'applicquent à larrecins et mal vivre… et plusieurs filles de la sorte des susdite s'applicquent à putasser, aller au bourdeau et vivre oysivement… ». Désormais (à partir de 1520 environ), on attribue couramment les pestilences, famines et troubles à la lubricité, aux blasphèmes, à la corruption des moeurs (A.M. Dijon, I 142).

100. A partir des années 1520, à Dijon, les concubines de prêtres et filles secrètes sont chassées de la ville tous les quatre ou cinq ans, ou bien réduites en bordeau. A Lyon, les étuves Tresmonnoye, de la Pêcherie, de la Chèvre, du Sabliz sont démolies ou abandonnées. A Dijon, tous les bains sont fermés avant 1560. Au Puy, le bordel est « transmué » dans un faubourg, à Tarascon, Cavaillon, il est transformé en hôpital (1527-1528), à Aies, il disparaît en 1553, à Dijon il est définitivement clos en 1563.