Hostname: page-component-5c6d5d7d68-wtssw Total loading time: 0 Render date: 2024-08-14T20:21:25.466Z Has data issue: false hasContentIssue false

A Propos D'Une Liste de Fréquences des Dénominations Professionnelles dans la France du XIXe siècle

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Alain Guerreau*
Affiliation:
CNRS – CRH

Extract

Dans un article original et incisif Maurizio Gribaudi et Alain Blum entreprennent une déconstruction raisonnée des catégories ordinairement employées dans les études statistiques de la population française au XIXe siècle, considérée sous l'angle des activités professionnelles. Ils cherchent à montrer que les résultats de telles opérations statistiques sont avant tout la conséquence des a priori implicites qui fondent les catégories définissant les contours des ensembles dénombrés : des classements différents entraînent des conclusions différentes.

Leur démarche propre consiste à privilégier les dénominations empiriques de l'époque, fruits en même temps qu'instruments des pratiques sociales.

Type
Débats et Controverses
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1993

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

1. Gribaudi, Maurizio et Blum, Alain, « Des catégories aux liens individuels : l'analyse statistique de l'espace social », Annales ESC, 1990, n° 6, pp. 13651402.Google Scholar

2. Roche, Daniel éd., Ordres et classes, Paris-La Haye, Mouton, 1973.Google Scholar

3. Annales ESC, 1990, n° 6, p. 1369. Il est inexact d'intituler ce tableau « Les 100 dénominations professionnelles les plus fréquentes ». C'est sans doute par erreur que les meuniers apparaissent deux fois (20e et 52e rang), de même que les mineurs (37e et 48e rang). Les effectifs des carriers et des coiffeurs sont apparemment de 65 et non de 68. On saisit mal pourquoi, au milieu d'une liste de métiers, apparaissent quelques termes d'activité (scierie, teinturerie) ou d'objets (chapeaux, tuiles).

4. Guerreau, Alain, « Pourquoi (et comment) l'historien doit-il compter les mots ? », Histoire & Mesure, 1989, 1/2, pp. 81105, notamment pp. 90-91.CrossRefGoogle Scholar

5. Barbut, Marc, « Des bons et des moins bons usages des distributions parétiennes en analyse des données », Histoire & Mesure, 1988,1, pp. 111128.CrossRefGoogle Scholar Id., « Notes sur l'ajustement des distributions de Zipf-Mandelbrot en statistique textuelle », Histoire & Mesure, 1989, 1/2, pp. 107- 119. Id., « Distribution de type parétien et représentations des inégalités », Mathématique, informatique et sciences humaines, 106, 1989, pp. 53-69.

6. Cette méthode minimise la somme des écarts absolus, et utilise pour cela la médiane au lieu de la moyenne.

7. Dans la note 24 de leur article, M. Gribaudi et A. Blum signalent qu'ils dénombrent 1 453 dénominations avant 1848, 1125 après. Si l'on admet que les effectifs globaux sont équivalents de part et d'autre de cette charnière, cela indiquerait une diminution du stock global d'environ un quart, ce qui est beaucoup, surtout pour une période où la division technique du travail n'est pas allée en diminuant. Et ce pourrait donc être un indice en faveur de notre hypothèse : diminution du stock par homogénéisation tendancielle du vocabulaire, fruit de la fusion d'espaces lexicaux (sociaux et/ou régionaux) jusque-là séparés.

8. Il s'agit d'un des grands chapitres de la sociologie et de l'ethnologie ; depuis les pères fondateurs ( Durkheim, Emile et Mauss, Marcel, « De quelques formes primitives de classification. Contribution à l'étude des représentations collectives », l'Année sociologique, 6, 1903 Google Scholar, repris dans les Œuvres de Marcel Mauss, vol. 2, Paris, 1974, pp. 13-89), à l'ethnolinguistique contemporaine ( Calame-Griaule, Geneviève éd., Langage et cultures africaines, Paris, Maspéro, 1977 Google Scholar, notamment la première partie : « Taxinomies et systèmes de relations », pp. 37-99), en passant par les grands recueils ( Hymes, Dell éd., Language in Culture and Society, New York- Londres, 1964 ;Google Scholar Giglioli, Pier Paolo éd., Language and Social Context, Harmondsworth, 1972 Google Scholar). On doit également citer certaines orientations de la linguistique : l'analyse distributionnelle (Harris), l'analyse componentielle (Lounsbury, Nida, Bendix).

9. Goody, Jack, La raison graphique. La domestication de la pensée sauvage, trad. frse, Paris, 1979.Google Scholar

10. Ces critères sont à l'opposé de la répartition de la plupart des variables sociales : d'où les reproches constants, et inévitables, adressés aux statisticiens, dont l'idéologie n'est pas en cause, même si l'on peut mettre en évidence l'effet idéologique des découpages des statisticiens.

11. Benoît Mandelbrot, « Linguistique statistique macroscopique », dans Piaget, J. éd, Logique, langage et théorie de l'information, Paris, 1957, pp. 178,Google Scholar plus spécialement pp. 54-73 (” Etude de la loi de Willis [et de Yule] relative au vocabulaire, nombre de mots-espèces dans les mots-genres »). IcL, Les objets fractals. Forme, hasard et dimension, Paris, 1975 (chapitre 12, « Arbres de hiérarchie ou de classement et la dimension »), édition anglaise ﹛Fractals, San Francisco, 1977), pp. 239-246.

12. Sur les classes polythétiques, Meter, Karl Van, De Vries, Marten W., Kaplan, Charles D., Dijkman, Chantai I. M., « States, Syndromes, and Polythetic Classes : The Operationalization of Cross-Classification Analysis in Behavioral Science Research », Bulletin de méthodologie sociologique, 15,1987, pp. 2238.Google Scholar Sur l'analyse de réseau et les graphes, Freeman, L. C., Romney, A. K., White, D. R., eds, Research Methods in Social Network Analysis, George Mason University Press VA, USA, 1989.Google Scholar

13. En somme, en considérant comme un tout les 50 000 mentions tirées de l'enquête Tra, M. Gribaudi et A. Blum ont pratiqué à grande échelle l'agrégation subreptice sauvage, ce qui est un comble pour d'aussi farouches adversaires de toute agrégation. Mais peut-on vraiment ne pas agréger ? Jean-Luc Petit et Eric Terouanne, Résumons-nous, modèles mathématiques d'agrégation, Montpellier, 1987.

14. Au seul plan des stratégies de délimitation, entrent en jeu le vêtement, la résidence, l'élocution, toutes les formes de la « sociabilité »…

15. Une tentative de justification de l'application de la loi de Pareto à la quasi-totalité des processus sociaux est menée par Forse, Michel, L'ordre improbable. Entropie et processus sociaux, Paris, 1989.Google Scholar

16. Cette remarque ne vise nullement à disqualifier le tableau statistique, qui est bien l'un des outils les plus puissants de décryptage des relations, mais à rappeler que si toute recherche socio-historique doit inclure une analyse fine de la taille des objets considérés, elle ne peut se limiter à des analyses numériques. Il en va d'ailleurs de même pour les sciences de la nature.