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Occupation du sol, géosystèmes et systèmes sociaux. Rome et ses ennemis des montagnes et du désert dans le Maghreb antique

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Philippe Leveau*
Affiliation:
Université de Provence (Aix-Marseille)

Extract

« Entre le nomade redoutable par sa mobilité

et le montagnard inaccessible dans ses hauteurs,

le paysan des plaines et des collines

méditerranéennes avait presque toujours

succombé » (J. DESPOIS, « Géographie et histoire

en Afrique du Nord, retouche à une

thèse », dans Éventail de l'histoire vivante.

Hommage à Lucien Febvre, t. 1, Paris, 1953,

p. 194).

Pour l'historien de l'Antiquité, l'étude de l'occupation du sol ne peut être réduite à la confection de cartes de localisation des sites. De natures différentes, les sites s'organisent en réseaux qui nous renseignent sur l'organisation des espaces ruraux. Les différenciations dans l'organisation des campagnes permettent d'individualiser et de caractériser des systèmes sociaux et des périodes chronologiques. L'étude de l'occupation du sol est donc obligatoirement diachronique (on ne peut entreprendre une prospection en étant fermé à tout vestige d'occupation qui paraît relever d'une période autre) et inter- ou même trans-disciplinaire. Il faut être, comme l'historien, sensible aux successions : succession des événements, succession des formes sociales, succession des paysages ; il faut être géographe ; il faut être attentif aux structures sociales.

Summary

Summary

The author takes up the debate concerning the triad characterizing pre-industrial North-West African societies: the mountain-dweller, the nomad, and the un- Romanized peasant of the hills and plains. The hoped-for progress in this domaine does not depend upon the drawing up of more complete, precise and better documented archeological maps. It depends, rather, on a pluri-disciplinary practice which combines contributions from natural and earth sciences with reflection about the occupation of territory. We must keep in mind the evolution of ideas since L. Febvre concerning the relationship between man and his environment. Three examples, one illustrating each element of the triad, are discussed.

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Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1986

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References

Notes

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18. Sur cette question, on pourra se reporter au débat dans Annales ESC, 1978 : Y. Thébert, « Romanisation et déromanisation en Afrique : Histoire décolonisée ou histoire inversée ? », pp. 64-82 ; M. Benabou, « Les Romains ont-ils conquis l'Afrique ? », pp. 83-88 ; Ph. Leveau, « La situation coloniale de l'Afrique romaine », pp. 89-92.

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21. J'ai traité de ces problèmes dans « La question du territoire et les sciences de l'Antiquité : la géographie historique de la topographie à l'analyse de l'espace », Revue des Études anciennes, 86, 1984, 1-4, pp. 85-115 (avec bibliographie). Sur écosystème et géosystème, cf. n. 30.

22. La mobilité des paysages méditerranéens (Hommages à Pierre Birot), Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, Travaux II, Toulouse, 1984, p. 323.

23. Ibid., p. 324.

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26. A. Laraoui, L'histoire du Maghreb…, op. cit., pp. 140-146.

27. M. Rouvillois-brigol, « La steppisation en Tunisie depuis l'époque punique : déterminisme humain ou climatique ? », dans BACTHS, nlle sér., fasc. 19 B, pp. 215-224, Paris, 1985. M. Rouvillois-Brigol a fait une nouvelle communication à Montpellier en 1985 sur le sujet : « Quelques remarques sur les variations de l'occupation du sol dans le Sud-Est Algérien », à paraître. L'étude de A. Brun a été publiée dans Pollen et spores, 1984 (” Étude palynologique des sédiments holocènes de 5 000 BP à l'actuel dans le golfe de Gabès (mer Pélagienne) »).

28. Une méthodologie quantitative a été définie dans le cadre des prospectives de l'INQUA (symposium international : « Global Change in Africa during Quaternary, Past, Présent, Future », Dakar, 21-25 avril 1985). Le principe peut en être présenté ainsi : actuellement l'homme déplace 2.1010 t/an de matériaux, ce qui, sans prendre en compte les labours, représente plus que l'érosion fluviatile ou que la production volcanique. En revanche, l'augmentation du CO2 atmosphérique n'est que faiblement en rapport avec la consommation des combustibles. Vers 20 000- 18 000 ans B.P., le CO2 atmosphérique était plus faible qu'actuellement car la biomasse était inférieure du tiers à ce qu'elle est actuellement. L'augmentation du CO2 est en rapport avec la progression générale de la biomasse au cours de l'holocène. La production anthropique de CO2 est plusieurs milliers de fois inférieure à celle des sols ou des volcans océaniques (renseignement dû à S. Pomel).

29. Triat-laval, H., « Pollenanalyse de sédiments quaternaires récents du pourtour de l'Étang de Berre », Ecologia Mediterranea, 7, 1982, pp. 97115.Google Scholar

30. Géosystème paraît mieux adapté à ces problématiques qu'écosystème : écosystème attire en effet plus l'attention sur l'étude du milieu vivant (plantes, animaux), le terme qualifiant les relations naturelles et fonctionnelles entre les populations et les facteurs de leur environnement physique et biologique au sein d'un système ( Bailly, A. et al., Les concepts de la géographie humaine, Paris, 1984, p. 148 Google Scholar). Par ailleurs l'écosystème, constitué par les communautés biologiques (biocénose) et le milieu de vie (biotope) est largement contrôlé par des facteurs abiotiques dont le relief, les sols, l'hydrographie, le climat. L'ouverture à ces problématiques éviterait, à mon sens, des polémiques stériles et inutiles comme celles développées par M. Euzennat, au nom de la sauvegarde de la tradition académique, contre R. Rebuffat à propos de l'olivier dans « L'olivier et le limes. Considérations sur la frontière romaine de Tripolitaine », dans BACTHS, nlle sér., fasc. 19 B, pp. 161-171, contre une série de contestataires accusés de prendre le contre-pied systématique des « acquis réalisés par trois ou quatre générations de savants singulièrement qualifiés de coloniaux » (” Les troubles de Mauretanie », dans CRAI, 1984, p. 373). Sur « archéologie et écologie », cf. Moberg, C. A.. Introduction à l'archéologie, Paris, 1976, pp. 180188.Google Scholar