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Métaux d'Amérique et monnaies d'Europe

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Marie-Thérèse Boyer-Xambeu
Affiliation:
Université de Paris VII
Ghislain Deleplace
Affiliation:
Université d'Orléans
Lucien Gillard
Affiliation:
CNRS

Extract

Keynes observait que Ricardo avait conquis son siècle aussi complètement que la Sainte Inquisition avait conquis l'Espagne ; sans doute est-ce en pensant à cela que Michel Morineau part en guerre dans son récent ouvrage contre « une cristallisation des esprits, analogue à celle dont les idées de Ricardo bénéficièrent de la part des économistes classiques au XIXe siècle, et qui, en fin de compte, a paralysé et la vigilance critique, et la progression de la recherche » (p. 567). Quelle est cette idée fixe? Celle selon laquelle les arrivages de métaux précieux d'Amérique sont le déterminant principal du mouvement économique en Europe du XVIe au XVIIIe siècle. A partir des informations mises au jour dans les gazettes hollandaises, l'auteur conteste cette affirmation d'un point de vue historique, et élargit sa critique à la théorie quantitative de la monnaie. C'est cette visée économique, plus que le parallèle avec Ricardo, qui autorise peut-être des économistes à prendre cet ouvrage comme angle d'attaque d'un problème qui les concerne aussi ; encore faut-il préciser tout de suite que nous ne le ferons pas d'un point de vue quantitativiste, mais au contraire avec le souci de radicaliser encore les conclusions de l'auteur.

Type
Monnaie et Pouvoir (Trois Notes critiques)
Copyright
Copyright © École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1988

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References

Notes

* A propos de l'ouvrage de Morineau, Michel, Incroyables gazettes et fabuleux métaux. Les retours des trésors américains d'après les gazettes hollandaises (XVIe-XVIIIe siècles), Londres- Paris, Cambridge Univ. Press/Maison des Sciences de l'Homme, 1985, 687 p.Google Scholar

1. Cf. ouvrage, notre, Monnaie privée et pouvoir des princes. L'économie des relations monétaires à la Renaissance, Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques/Éditions du CNRS, 1986 Google Scholar, en particulier le chapitre 4.

2. Cf. notre communication, « La relation entre unité de compte et moyen de règlement chez quelques auteurs hétérodoxes : Malynes, Law, Steuart », Colloque sur l'histoire des théories de la monnaie, Acgepe/latapses, Nice, 1987.

3. Monnaie privée…, op. cit., chapitre 8.

4. Ibid., Introduction générale et chapitre 7.

5. Dans l'écriture usuelle, P est le niveau général des prix exprimé en quantité de métal, Q un indice du niveau de la production (et donc du volume des échanges), M est le stock de monnaie métallique exprimé en quantité de métal, V la vitesse de circulation de la monnaie.

6. L'écriture courante de l'équation quantitative P x Q = M x V permet la même lecture : P est déterminé de façon autonome par rapport à M (puisque P = P Vp) et le sens de la causalité va de P vers M.

7. Les quantitativistes et Michel Morineau supposant constante la vitesse de circulation de la monnaie, ces résultats ne seraient conciliables avec la thèse quantitativiste que dans l'hypothèse de variations peu crédibles de la production globale : division par trois au xvr= siècle, multiplication par 10/3 au xvne siècle.

8. Un exemple en est donné au XVIe siècle par l'Espagne, où la perception régulière du quint autorise une quasi-stabilité des cours légaux.

9. Il n'est pas satisfaisant de considérer la lettre de change comme un simple palliatif de l'insuffisance du métal, et de limiter son effet à une augmentation institutionnelle de la vitesse de circulation (pp. 591-592). Le caractère exogène de celle-ci est d'ailleurs un des défauts de l'équation quantitative, car il exclut qu'elle puisse varier en fonction de la demande de monnaie pour la spéculation ; là réside l'origine du traitement résiduel de la thésaurisation chez Michel Morineau, déjà souligné plus haut.

10. A trop débattre de la quantité véritable de métal circulant en Europe, les historiens risquent donc de passer à côté du problème des formes monétaires. C'est ainsi que D. O. Flynn peut réhabiliter l'explication quantitativiste, en affirmant que Michel Morineau a sous-estimé les réexportations de métaux américains vers l'Extrême-Orient, et le rôle de plaque tournante joué par l'Europe au xviie siècle. Cf. D. O. FLYNN, « Reviews of Books », Journal of Economie History, 1987, 3, pp. 799-801.

11. Monnaie privée..., op. cit., pp. 352-353.

12. Ibid., chapitre 8 et conclusion générale.

13. Cf. « La relation entre unité de compte... », op. cit.