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Le mythe de l'Orient dans l'eschatologie des Juifs d'Espagne à l'époque des conversions forcées et de l'expulsion

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Jacqueline Genot-Bismuth*
Affiliation:
Centre de recherches sur la culture rabbinique Université de Paris III - Sorbonne

Extract

Il sera moins question, dans les quelques pages qui vont suivre, d'histoire que de vision de l'histoire. Nous nous situerons donc dans le domaine de l'histoire de l'idéologie, ou mieux encore de celle des idéologies en contact, à un moment critique où leur affrontement conduit à des événements tragiques. Le problème sera plus précisément celui des relations dialectiques entre la représentation que se feront les Juifs des événements qui les frappent de plein fouet depuis la vague d'oppression idéologique de 1391 , et celle que leur renverront d'abord quelques théologiens doctrinaires, dominicains surtout ou d'ordres prêcheurs divers, puis peu à peu l'ensemble de l'appareil d'État gagné de haute lutte par le travail obstiné de quelques moines hors pair comme Alonso de Espina ou Tomas de Torquemada.

Summary

Summary

The last act in the history of the Jews of the Iberian peninsula, opening in 1391 with the Marrano question and closing in 1492, derives its true meaning from contradictions inherent in Spanish society, modeled as it had been for several centuries by a Crusades ideology. This latter, stemming from old Medieval notions of history as a manifestation of divine providence, had its foundations in the very texts the Jews used to project onto the future a totally different providential history. The struggle shifted from the exegesis of texts to that of events, occasioned by the threat posed by the Turks, which was brought home to one and all by the taking of Constantinople. The Antichrist and the true Messiah faced off in a shared eschatological delusion. Confused by the array of conflicting references, the Marranos lost out. Doctrinaire monks joined in the dispute, and the Inquisition entered the fray. It is the dramatic art of tragedy that is analysed in this article.

Type
Communautés Juives
Copyright
Copyright © Copyright © École des hautes études en sciences sociales Paris 1990

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References

Notes

1. Sur les événements de 1391 et la création de la question marrane, Yizhaq Baer, A Hislory of the Jews in Christian Spain, édition originale en hébreu, 1945, 1965 (base de nos références) ; traduction anglaise en deux volumes, 1961-1966 ; deuxième partie, chapitres 5 à 7.

2. L'Espagne connaît des ordres locaux comme celui de Saint-Jérôme, fondé par Alphonse XI qui devait jouer un rôle important dans l'histoire des débuts de l'Inquisition ; cf. témoignage de Fray Sigüenza, José de, Historia de la Orden de San Jeronimo, Madrid, 1600 et 1605 (publié par Juan Catalina Garcia, Madrid, 1907), vol. II, pp. 3133 Google Scholar. Sur l'épisode du Tribunal du Monastère de Guadalupe, sous l'autorité du prieur Fray Nuflo de Arevalo, voir John Edward Longhurst, The Age of Torquemada, 1964, pp. 106-109.

3. Cf. le témoignage direct d' Abravanel, Isaac, Commentaire du livre des Rois, préface Perus ‘al hanevi'im harisonim, Jérusalem, 1955, p. 422 Google Scholar. Dans ce travail de conquête une des premières grandes étapes fut l'édit royal du 27 septembre 1480 aux termes duquel les dominicains Miguel de Morillo et Juan de San Martin furent chargés de mettre en place l'Inquisition en Andalousie. Celle-ci démarra effectivement le 1er janvier 1481 à Séville. L'édit de Saragosse de 1486 marque un pas de plus avec l'expulsion des juifs de Saragosse. L'ultime étape sera bien entendu l'édit d'expulsion générale, signé à Grenade le 31 mars 1492. Sur les problèmes de datation précise d'entrée en vigueur, voir Marx, Alexander, Jewish Quarterly Review, 1908, XX, p. 248.Google Scholar

4. Elles étaient tenues, dans ces milieux, pour exercer à l'égard des conversos, même marranes, une bienveillance, voire une protection coupable. Le roi Enrique IV (1454-1474) était accusé d'y avoir ses conseillers. Cependant, son père Jean II de Castille, avait reçu en 1451, du pape Nicolas V, pleins pouvoirs en vue d'organiser l'Inquisition épiscopale contre les conversos affichés (BAER, pp. 384, 537).

5. Le véritable enjeu du mouvement anti-conversos que les prêcheurs suscitent et alimentent dans les couches populaires est, en réalité, un enjeu de pouvoir. La collusion réelle du politique et du religieux se concrétise dans la part prise par l'élite converso, au sein des Grands d'Espagne, dans la lutte contre la toute-puissance du pouvoir monarchique ; voir la participation marrane à la conspiration du marquis de Villena et de Rodrigo Téllez Cirôn, maître de l'Ordre de Calatrava, Beinart, H., Record of the Trials of the Spanish Inquisition in Ciudad Real, Jérusalem, I, 1974, XIV, 1.Google Scholar

6. Il arrivera même que le modèle scripturaire de déchiffrement de l'histoire induise très directement les comportements individuels comme dans le cas de Miguel Vives, ce marrane de Valence, convaincu de réincarner Moïse pour sortir les Juifs d'Egypte vers la nouvelle Canaan (Jérusalem libérée dans la future guerre messianique).

7. Cette très ancienne identification d'Esau avec Edom, puis Rome, et enfin avec la chrétienté, remonte, semble-t-il, à l'époque de la révolte de Bar Kokhba (Yerusalmi Ta'anit, 1,1, 64a ; 4, 8, 68d, Beresit raba, 65, 21, Tanhuma Teruma, 3, Pesiqta derav Kahana, 7, 11). Il est intéressant de noter, symétriquement, que dans la littérature latine du Ier siècle avant notre ère, Edom désigne au contraire la Judée, Virgile, Géorgiques, III, 12, Stern, Menahem, Greek and Latin Authors on Jews and Judaism, Jérusalem, I, 1976, pp. 316317 Google Scholar. Ou encore Valerius Flacus, Argonautica (introduction). On s'interrogeait sur les origines de cette identification surtout avec Rome au sens de chrétienté dans les milieux juifs espagnols de l'époque et Isaac Abravanel avoue lui-même sa perplexité sur ce point : « et la raison pour laquelle les chrétiens et les Romains ont été appelés Edom est une grande interrogation, et les chrétiens contestent beaucoup la chose » (Ma'yene hayesu'a, 401). On trouve, en tout cas, un écho précis de cette problématique dans la plaidoirie en faveur des conversos du prélat Juan de Torquemada, Tractatus contre Madianitas et Ismaelitas (Defensa de los judios conversos), édité par Nicolas Lopez Martinez et Vicente Prano Gil, Burgos, 1957, 42. Dans certains milieux issus des expulsés, plus particulièrement chez les historiographes comme Eliahu Capsali, Edom désignera parfois plus spécifiquement les Rois Catholiques Ferdinand et Isabelle, cf. Ben Sasson, Zion, 26, 26.

8. Mort vers 1508.

9. Du côté juif, le caractère programmé de l'histoire humaine et du futur eschatologique, entièrement conçu dès l'origine et révélé par la suite à Abraham, est une vieille idée que l'on trouve déjà exprimé dans les Pirqe derabi Eliezer (midras homilétique du vme siècle, apparu dans un contexte musulman), chap. 28.

10. Comme c'est le cas pour la prise de Grenade, entre autres. Cf. le chroniqueur Cruz, Alonso de Santa, Cronica de los Reyes Catolicos (Hasta ahora inedita), Carriazo, Juan de Mata éd., Séville, 1951, I, 53 Google Scholar. Et de l'autre l'historiographe juif Eliahu Capsali, Seder Eliahu Zuta, I, 202.

11. La réflexion juive sur le régime monarchique, et plus particulièrement sur la relation monarchie-religion, est intense dans la génération de l'expulsion. Voir Josef Hiyun, Commentaire de la Tora, manuscrit Ginzburg 1052, textes cités dans Sasson, Hayim Hillel Ben, « Dor Gole Sefarad ‘al ’azmo », Zion, 26, 1961 Google Scholar, 57 (“ La génération des expulsés d'Espagne au miroir de son autotémoignage ”). Cette problématique tient, par ailleurs, une très large place chez Isaac Abravanel, par exemple dans son commentaire du premier livre de Samuel (Perus ‘al nevi’im risonim, pp. 202-206).

12. La personnalité la plus marquante est, sans conteste, Abraham Senor, qui se résigna à plus de quatre-vingts ans, le 15 juin 1492, à se convertir au monastère de Guadalupe, parrainé par les Rois Catholiques, sous le nom de Fernando Nunez Coronel, I. Baez, pp. 396-397 ; 402-403. L'ascension des grands commis juifs des rois catholiques avait pris pour principal appui l'affermage de la capitation juive des trente deniers, relevée à quarante-cinq en 1474, REJ, 1887, 14, p. 167. Sur la théorisation juive des devoirs juifs du bon commis de cour à l'époque, Don Yosef Ben Šošan (Ben Sasson, pp. 28-34).

13. Baer, Fritz, Die Juden im Christlichen Spanien, erster Teil, Urkunden und Regesten, Berlin, 1936, n° 380, pp. 399401 Google Scholar.

14. Le revirement en matière de politique religieuse a été déchiffré par certains à travers le modèle égyptien du premier chapitre de l'Exode ; voir la chronique anonyme publiée par Hacker, Yosef, Qroniqot hadasot ‘al gerus hayehudim miSefarad, sibotaw wetoza'otaw, Sefer Zikaron leYizhaq Baer, Jérusalem, 1979-1981, p. 227.Google Scholar

15. Cf. témoignage d'Abravanel, à la publication de l'édit d'expulsion, Perus ‘al nevi'im risonim, 422, préface au commentaire du livre des Rois.

16. Selon Lea, Ferdinand se méfiait du clergé séculier, trop infiltré de conversos, surtout dans les hauts rangs ; l'argument de la contamination par le sang juif apparaît dans une lettre adressée à Sixte IV qui, lui-même, répondit le 25 mai 1464 enjoignant les archevêques d'Espagne de n'élire que des vieux chrétiens, cf. Lea, Henry Charles, A History of the Inquisition of Spain, New York, 1922 Google Scholar, t. II, 12.

17. Parmi lesquels, outre Alonso de Espina et Tomas de Torquemada, des moines à fonction épiscopale comme Fray Hernando de Talavera, évêque d'Avila, cf. Sigùenza, II, pp. 31-33. Cf. Longhurst, pp. 118-128 ; Molenes, E. de, Torquemada et l'Inquisition, Paris, 1887 Google Scholar (traduction des actes du procès publiés par F. Fita en 1887).

18. L'importance que l'on accordait en plus haut lieu aux événements turcs est illustrée par le cas de Juan de Pineda qui fut dépêché auprès de Sixte IV par le chef de l'Ordre des Chevaliers de Santiago, voir Baer, Yizhaq, « Hatenu'a hamesihit biSefarad bizeman hagerus » (le mouvement messianique en Espagne à l'époque de l'Expulsion), Me'esaf Zion, Jérusalem, 1963, p. 63.Google Scholar

19. 1964, p. 52.

20. 1965, p. 390.

21. Le cas n'est pas isolé, et l'efficacité de l'Inquisition tient très largement à ce zèle ; voir Antonio D'Avila, médecin ex-juif et Alonso Enriquez, converti devenu dominicain, tous deux moines à Ségovie au couvent de Santa Cruz, écrivant et dédiant à leur prieur, Torquemada, une Censure et réfutation du Talmud « (afin de lui procurer les moyens) de procéder avec une plus grande intimité contre ceux qui observent (secrètement) les rites talmudiques », cf. REJ, 18, 1889, p. 234 ss.

22. 1964, p. 52.

23. 1965, pp. 388-389.

24. On vit même apparaître un argument antijuif tiré du modèle du premier chapitre de l'Exode : les Marranes aident les Turcs à répandre le sang chrétien, ils se préparent à leur livrer l'Espagne. On le retrouve à la fois dans le Libro… AlBoraique (394) et dans la bouche de Torquemada.

25. Fortalitiumfidei…, Nuremberg, 1494, f° 172-173. On retrouve cette identification de Gog et Magog avec l'empire turc chez Abraham Zacuto, Sefer Yuhasin, édition Filipowsky, 6, 246a.

26. Port d'Albanie, elle-même tombée sous la domination turque en 1478. Mais dès 1458 Mohammed II s'était assuré la conquête de la Serbie, moins Belgrade, l'Albanie étant réduite à une condition de vassal payant tribut jusqu'au traité du 25 janvier 1478, signé avec Venise, consacrant l'annexion pure et simple ; la Morée, quant à elle demeurant un enjeu de la rivalité avec Venise.

27. Baer, 1965, pp. 390-392.

28. Cas de Pedro de la Caballeria, auteur du traité antijuif Zelus Christi contra Judeos Sarracenos et infidèles, qui s'était converti avec son père Bonafus, à la suite de la disputation de Tortose, mais qui n'en fut pas moins dénoncé pour judaïser librement en famille lors de ses visites à Saragosse, voir Baer, p. 381. Voir Genot-Bismuth, J., « Recherche sur les fonctions de la prière individuelle en milieu marrane aux alentours de 1492 : prière et salut », Prière, mystique et judaïsme, Paris, PUF, 1987, pp. 159178.Google Scholar

29. Baer, , p. 387 et id., « Hatenu'a hamesihit biSefarad bitequfat hagerus », Me'asef Zion, Jérusalem, 1933, pp. 6163.Google Scholar

30. Williams, John, Manuscrits espagnols du Haut Moyen Age, New York, 1977, p. 27 Google Scholar ; Neuss, W., Die Apokalipse der Johannes in der Altspanien und altchrislischen Bibelilustration, Munster, 1931.Google Scholar

31. Durer publie en 1498, VApocalypsis cum figuris, où quatorze bois illustrent les visions de Jean. Fra Angelico, Benozzo Gozzoli et Luca Signorelli travaillent entre 1447 et 1504 aux scènes de l'Apocalypse du Dôme d'Orvieto.

32. Telle cette rumeur répandue en mars 1473 à Cordoue sur le Léviathan du repas eschatologique, apparu et tué sur les côtes du Portugal, Baer, pp. 398, 538.

33. Baer, pp. 390-393.

34. Cf. procès Juan de Fez, par exemple, Beinart, 1974, p. 205 : « Nuestro Salvador e Redentor Ihesu Christo ».

35. Abravanel, Isaac, Yesu'ot Mesiho, Kônigsberg, 1861 Google Scholar, 23b ; mais l'expression est très fréquente ; « mesiah zidqenu », état construit sur le modèle de « more zedeq » affecté du suffixe personnel (pluriel, 2e personne) doit en réalité être compris comme le symétrique, ou mieux l'antitéthique de « Nuestro… » : « notre Messie de Justice ».

36. Genot-Bismuth, Jacqueline, « Yosef ke'astronom be'Sefer hayasar », Tarbiz, Jérusalem, 51, 1982, pp. 670672 Google Scholar (Joseph sous les espèces d'un astronome de cour).

37. Baer, 387. Voir aussi n. 42 l'importance des signes astronomiques dans l'eschatologie d'Abravanel.

38. Son auteur, le Juif crétois Elihahu Capsali, né vers 1483, fit ses études à Padoue entre 1508 et 1509, où il entra en contact avec le milieu des Expulsés installés en Vénétie. C'est pendant la peste qui ravageait Candie, dont il était rabbin, qu'il rédigea son Seder Eliahu Zuta.

39. Surcroît de signe si l'on peut dire, la valeur numérique de BaT EdoM équivalait à 453, or comme l'habitude hébraïque consiste à ne pas lire les millénaires, on avait en clair, croyait-on la prédiction exacte de l'événement. Aussi les auteurs de l'époque avaient-ils adopté ce sigle pour désigner l'année 1453, voir Zucuto, Sefer Yuhasin, supplément publié par Neubauer, , Mediaeval Jewish Cronicles and Chronological Notes, Oxford, 1887-1895, Amsterdam, 1970 Google Scholar, XLVIII.

40. On y retrouve le très ancien procédé rhétorique de la dérision du mauvais croyant déjà cité par Tertullien, Adversus Gentes, Paris, 1828, 25.

41. L'essentiel de son oeuvre est produit dans le royaume de Naples, où il a trouvé un refuge d'ailleurs mouvementé, entre 1493 et 1498, puis à Venise où il s'éteint après 1506.

42. Cf. Yesu'ot mesiho (écrit en 1498), 1861, ; Ma'yene hayesu'a (composé en 1497), 394b- 395a où « mizrah » est clairement identifié non pas à la Perse géographique mais aux Perses, soit aux Turcs. Ailleurs, dans son commentaire du livre à'Ezéchiel (sans doute composé entre 1498 et 1504, dans un environnement vénitien) il verra dans les guerres de Gog et Magog l'affrontement décisif du camp occidental et du camp oriental turc qui aboutira à leur destruction commune avant que n'apparaisse la royauté messianique d'Israël restaurée en Terre Sainte. Perus ‘al nevi'im ‘aharonim, Jérusalem, 1956, p. 580. On rapprochera de ce passage les précisions données dans Ma'yene ha Yešu'a (410b).

43. Cette fois l'identification ne s'établit plus sur un plan ethnique comme plus haut, mais sur le plan confessionnel : c'est le camp ottoman de l'Islam qui est désigné.

44. Ce scénario date de 1497, celui d'Ezéchiel serait donc postérieur.

45. Cf. Annexe.

46. A rapprocher d'Isaac Arama, rabbin prédicateur, né à Zamora en 1420, réfugié è Naples où il meurt en 1494 ; c'est donc un familier des milieux autour d'Abravanel, lui-même installé à Naples entre septembre 1492 et février 1494. Cf. ‘Aqedat Yizhaq ki teze', Venise, 1573, f° 262r°.

47. C'est là une très vieille conception qui remonte à la vision de l'histoire du Seder Olam qui, elle-même exprime la pensée des maîtres contemporains de la chute du Second Temple et de la révolte de Bar Kohkba, voir Seder Olam, 3, Dov Ber Rattner éd., New York, 1966, pp. 14-15. Les « 100 » années tirées de Daniel 12, 11 sont le développement chiffré de YaMiM (jours), soit Y = 10 + M = 40 + Y = 10 + M = 40.

48. Là encore surcroît de signe : Constantinople tomba après un siège de cinquante jours, Zacuto, passage cité n. 39.

49. Parallélisme de plus, tous deux mettront fin à une ère d'exil et de malheurs commencée un 9 av : première destruction du Temple (586), deuxième destruction du Temple (70), Expulsion d'Espagne dont le dernier délai fut aussi le 9 av de l'année 5252, soit le 2 août 1492.

50. Vieille problématique déjà inscrite dans le Targum pseudo-Yonatan de Ex 40, 11, Pesita Cantique, 4, 5 reprise dans le Talmud de Babylonie (Suka 52a), et explicitement évoquée par Abravanel lui-même. Sur ce point, cf. Hurwitz, Sigmund, Die Gestalt der Sterbenden Messias, Zurich, 1958 Google Scholar ; Sholem, Gershom, Le Messianisme Juif, Paris, 1974, p. 44.Google Scholar

51. Dialectique qui trouve son expression dans le débat, lui aussi, fort ancien des « souffrances prémessianiques » (hevlé hamasiah). Sur toute cette littérature voir Yehuda Even Semu'el, Midrese Ge'ula, pirqe ha'apoqalipsa hayehudit mihatimat hatalmud hababli we'ad resit ha'alef hasisi (Les Midrasim de la Rédemption, textes de l'apocalypse juive de la clôture du Talmud de Babylonie au début du vie millénaire), Jérusalem, 1954.

52. Commentaire d'Ezéchiel, Perus…, 560 ; mais surtout Ma'yene hayesu'a, 395 où Abravanel se livre à une enquête et une réinterprétation de la problématique ancienne déjà inscrite dans la littérature rabbinique antérieure.

53. Abravanel dont les calculs avaient successivement prévu la Ge'ulapour 1503, 1531 et 1534, a donc été témoin du démenti de son premier calcul. Mais notons que les trois calculs sont trois hypothèses simultanées, toutes explorées dans le Ma'yene hayesu'a (de 1497) ou le Yesu'ot mesiho (1498).

54. Selon les sources juives le Tamid (sacrifice perpétuel quotidien) a été suspendu trois ans et demi avant la destruction du Temple, soit dans le cours de 66, ceci a son importance ainsi qu'on va le voir.

55. « Kerata taqifa » (la puissante métropole) et non « kerata Roma deris'a », Abravanel est donc en possession d'une tradition espagnole de lecture du Targum, ce qui confirmerait au passage la réflexion d'Alonso de Espina.

56. La leçon du Targum de Lam 4, 21 dont témoigne Abravanel (il la cite textuellement) offre avec le texte imprimé du Targum des Miqra'ot Gedolot actuelles des différences considérables, qui confirment l'hypothèse évoquée dans la note ci-dessus.

57. Midras de type exégétique palestinien, fin ve siècle-début VIe siècle.