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La mercuriale de Cologne (1531-1797): structure du marché et conjoncture des prix céréaliers

Published online by Cambridge University Press:  25 May 2018

Franz Irsigler*
Affiliation:
Bielefeld

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En abordant des problèmes d'histoire économique relatifs au Moyen Age et au début des Temps modernes par des méthodes quantitatives, l'historien allemand d'aujourd'hui considère avec admiration, mais aussi avec un peu d'envie, les pas de géant des recherches française et belge dans ce domaine. C'est qu'il ne trouve pas beaucoup de travaux de la même envergure à mettre de son côté dans la balance, si ce n'est, bien sûr, l'oeuvre importante de Wilhelm Abel, qui a utilisé en partie les documents rassemblés par M. J. Elsas dont la collection est malheureusement restée incomplète. S'il veut entreprendre de nouvelles recherches en histoire des prix, l'historien allemand doit commencer par élargir la base des données dont il dispose déjà et par rendre ces nouvelles sources accessibles à un plus large public.

Summary

Summary

The market price-list of the city of Cologne provides an almost uninterrupted record of the average prices and of the quantifies traded of wheat, rye, barley, and oats for the period 1531-1797. The study of the relationships between priées and quantities makes it possible not only to examine the city's pricing policy, particularly during crises (for example, those of 1556-1557 and of 1740-1741), but also to analyze the seasonal structure of price movements, as well as its long-term structure. A fundamental change in the structure of the Cologne grain market can be observed in the seventeenth century: the maximum in the quantity of grain offered shifts from the autumn and winter months to the beginning of the summer. In order to account for this change the essay puts forward three hypothèses concerning modifications occuring, respectively, in agricultural production, the grain trade, and consumer behavior.

Type
Les Domaines de la Recherche
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1978

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References

Notes

* Je tiens à remercier Mme Corinne Beutler, du Centre de Recherches historiques (Paris), qui a bien voulu traduire le texte de cette conférence qui a été donnée à l'E.H.E.S.S. le 2 février 1977.

1. Traian Stoianovich, Cf., French historical method. The Annales paradigm, Ithaca-Londres, 1976 Google Scholar. En ce qui concerne la Belgique, cf. surtout les travaux de H. Van Der Wee et de M.-J. Tits-Dieuaide. Se reporter également aux articles sur l'histoire quantitative dans H.-U. Wehler, Geschichte und Ôkonomie, Neue Wissenschaftliche Bibliothek 58, Koln 1973.

2. Abel, Wilhelm, Crises agraires en Europe, XIIIe-XXe siècle, Nouvelle bibliothèque scientifique, Paris 1973 Google Scholar, traduction française de la dernière édition allemande, revue et augmentée par l'auteur ; id., Massenarmut und Hungerkrisen im vorindustriellen Europa, Hambourg-Berlin 1974.

3. Moritz J. Elsas, Umriss einer Geschichte der Preise und Lôhne in Deutschland, vol. I, II, A, B, Leyde 1936, 1940 et 1949. Concernant l'histoire des « Archives de M.-J. Elsas » à Gôttingen et les séries de prix que M.-J. Elsas n'a pas publiées, cf. W. Abel, « Preis-, Lohn- und Agrargeschichte », Wege und Forschungen des Agrargeschichte, Francfort/Main, Festschrift G. Franz, 1967, pp. 67 ss.

4. Pour la notion de « mercuriales », cf. J. Meuvret, « Les prix des grains à Paris au XVe siècle et les origines de la mercuriale », Études d'histoire économique, Cahiers des Annales 32, Paris 1971, pp. 41 ss.

5. Par exemple, Baulant, M. et Meuvret, J., Prix des céréales extraits de la mercuriale de Paris (1520-1698), 2 vol., Paris 1960-1962 Google Scholar ; M. Baulant, « Les prix des grains à Paris de 1431 à 1788 », Annales E.S.C., 23, 1968, pp. 520-540 ; G. et Frêche, G., Les prix des grains, des vins et des légumes à Toulouse (1486-1868). Extraits des mercuriales suivis d'une bibliographie d'histoire des prix, Paris, 1967 Google Scholar.

6. Pour la ville de Bonn, Tille, cf. A., Obersicht über Inhalt der kleineren Archive der Rheinprovinz, t.1, Bonn, 1899, p. 355 Google Scholar. La série va de 1692 à 1721 ; pour Aix-la-Chapelle, Boehmer, cf. C., « Kornpreise in Aachen in den Jahren 1560-1628 und 1708-1713 », Aus Aachens Vorzeit, 2, 1889, pp. 91-94 Google Scholar, et Deutsche Staatsbibliothek, Handschriftenabteilung und Literaturarchiv, mss. Boruss. quart. 260, fol. 40 r° à 43 v°.

7. D. Ebeling et F. Irsigler, Getreideumsatz, Getreide- und Brotpreise in Kôln 1368-1797. Première partie, Getreideumsatz und Getreidepreise. Wochen-, Monats- und Jahrestabelle, Mitteilungen aus dem Stadtarchiv von Kôln 65, Kôln 1976. Deuxième partie, Brotpreise und Brotgewichte. Graphiken, Mitteilungen aus dem Stadtarchiv von Köln 66, Köln 1977 (sous presse). Irsigler, Cf. F., « Getreidepreise, Getreidehandel und stàdtische Versorgungspolitik in Köln vornehmlich im 15. und 16. Jahrhundert », Die Stadt in der europāischen Geschichte, Bonn, Festschrift E. Ennen, 1972, pp. 571-610 Google Scholar.

8. Sa publication est en cours et paraîtra probablement en 1979. M. J. Elsas avait déjà noté l'importance de la mercuriale de Dùren ; cf. W. Abel, op. cit. à la note 3, p. 72.

9. Sur les origines de la mercuriale de Cologne, cf. D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., introduction, pp. XI ss. ; et sur la présentation des sources, ibid., pp. XIX ss.

10. La ressemblance entre ce système et celui qui était pratiqué à Paris est trop évidente pour ne pas suggérer la possibilité d'une influence directe. Comme le relevé hebdomadaire des prix à Cologne commence plus tôt qu'à Paris (où c'est manifestement à la suite de la grande famine de 1437-1438 qu'on a procédé à une réglementation plus stricte), et que les deux villes entretiennent d'étroites relations commerciales, il est tout à fait vraisemblable que Cologne ait pu exercer, même à distance, une influence dans ce domaine. Pour l'observation des prix sur le marché et pour l'organisation de celui-ci à Paris, cf. J. Meuvret, op. cit. à la note 4.

11. Stein, W., Akten zur Geschichte der Verfassung und Verwaltung der Stadt Köln im 14. und 15. Jahrhundert, t. I, Bonn 1893, n° 92, 14, p. 243 Google Scholar : « Ouch soillen sy unsen herren deme rayde zertzijt aile gūedestags in der wechen dat bescheyt van deme korenmarte rechenen. »

12. Dupāquier, J., Lachiver, M. et Meuvret, J., Mercuriales du pays de France et du Vexin français (1640-1792), Paris 1968, pp. 229 ss.Google Scholar

13. Michel Morineau, « A la halle de Charleville : fourniture et prix des grains, ou les mécanismes du marché (1647-1821)», Actes du 95e Congrès national des sociétés savantes, Reims 1970, hist. mod., t. II, pp 159-222, Paris, Bibliothèque nationale, 1974, cit. p. 161. La première période (1647-1744) concerne les quantités de céréales enregistrées à leur entrée en ville par le droit de hallage, affermé chaque année; la seconde (1799-1821), l'enregistrement même des ventes à la halle de Charleville. M. Morineau compare la structure du marché de Charleville à celle du marché de Colmar dont on connaît les dates des entrées au marché pour les années 1749 à 1789. L'auteur renvoie par ailleurs à l'étude du marché d'Auchel, près de Liège, de Ruwet, J., L'agriculture et les classes rurales au pays de Hervé sous l'Ancien Régime, Paris 1943, pp. 175-179 Google Scholar.

14. M. Baulant et J. Meuvret, op. cit., introduction pp. 23-26.

15. J. Marczewski, «Quelques observations sur l'article de Monsieur Chaunu », Cahiers Vilfredo Pareto 3, 1964, p. 177.

16. Se reporter au tableau des équivalences des prix nominaux en gr. d'or et d'argent, D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., introduction, pp. XXXVIII-XLII. Pour ce qui concerne les problèmes monétaires en général, cf. J. Meuvret, « L'histoire des prix des céréales en France dans la seconde moitié du XVIIe siècle », Études d'histoire économique, Cahiers des Annales 32, pp. 79 ss.

17. Pour Cologne, , Lindlar, J., Die Lebensmittelpolitik der Stadt Köln im Mittelalter, Cologne 1913 Google Scholar ; Kelter, E., Geschichte der obrigkeitlichen Preisregelung in der Zeit der mittelalterlichen Stadtwirtschaft, Iéna, 1935 Google Scholar ; D. Ebeling, Versorgungskrisen und Versorgungspolitik wāhrend der zweiten Hàlfte des 16. Jahrhunderts in Kôln, mémoire de maîtrise (manuscrit) Bielefeld 1976, consulter sa bibliographie ; et Franz, G., Abel, W., Cascorbi, D., Der deutsche Landwarenhandel, Hanovre, 1960, p. 27 Google Scholar, note 18.

18. D. Ebeling, op. cit. à la note 17.

19. Ces données sont reprises dans D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., essentiellement les pp. 695 ss.

20. Michel Morineau, « D'Amsterdam à Séville : de quelle réalité l'histoire des prix est-elle le miroir?», Annales ESC, 1968, pp. 178-205.

21. W. Abel, op. cit. à la note 2, Crises agraires†, a dū aussi s'en remettre partiellement aux dires des chroniqueurs pour les XIVe, XVe et XVIe siècles.

22. M. Morineau, op. cit. à la note 20, pp. 204 et 205, fig. 6 et 7.

23. Labrousse, Ernest, La crise de l'économie française à la fin de l'Ancien Régime et au début de la Révolution, Paris, 1944 Google Scholar. Cf. également W. Abel, op. cit. à la note 2, Crises agraires†, sa critique de la pensée de Labrousse aux pp. 22 et 23 de l'éd. française (” La théorie des crises de l'école d'Ernest Labrousse »).

24. Tits-Dieuaide, Marie-Jeanne, La formation des prix céréaliers en Brabant et en Flandre au XVe siècle, Bruxelles, 1975 Google Scholar.

25. Le Roy Ladurie, E., Les paysans de Languedoc, 2 vol., Paris-La-Haye 1966 CrossRefGoogle Scholar ; J. Goy et E. Le Roy Ladurie (Communications et travaux rassemblés par†), Les fluctuations du produit de la dîme. Conjoncture décimale et domaniale de la fin du Moyen Age au XVIIIe siècle, Cahiers des Études rurales n” III, Paris-La Haye, 1972; Hugues Neveux, Les grains du Cambrésis, Lille 1974, signale encore plusieurs autres travaux.

26. D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., introduction, pp. LIII-LV, tableau des prix céréaliers à Cologne de 1368 à 1530.

27. M. Morineau, op. cit. à la note 20, p. 192.

28. Hamilton, E. J., American treasure and the price Révolution in Spain, 1501-1650, Cambridge (Mass.) 1934 CrossRefGoogle Scholar. Voir également la critique qu'en a donnée D. C. North, « A New économie history for Europe », Quantitative Aspekte der Wirtschaftsgeschichte (Festschrift W. G. Hoffmann), Zeitschrift fur die gesamte Staatswissenschaft 124/1, 1968, pp 139-147; et M. Morineau, op. cit. à la note 20, pp 193 ss.

29. D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., les flg. 6 et 7, pp. L et LI de l'introduction.

30. En général cette hypothèse n'a pas été retenue par les historiens à cause de l'importance des dommages que les guerres du XVIIe siècle ont causés aux provinces du Rhin. D'un autre côté cependant il ne faut pas oublier que la « modernisation » de l'agriculture, grāce à l'introduction de nouvelles plantes fourragères (esparcette, trèfle rouge appelé trèfle du Brabant) qui rendent possible l'affouragement du bétail à l'étable durant l'été, multipliant ainsi le cheptel — et par conséquent le fumier disponible pour les champs — ; commence dès le XVIe siècle dans la région du Rhin inférieur. La pratique des cultures dérobées sur la jachère, qui va rompre peu à peu le cycle de l'assolement triennal, remonte à la même époque. Ces données, capitales pour comprendre l'évolution de l'agriculture dans nos régions et son retentissement sur la production céréalière, proviennent des séries de baux d'affermé, dont mon élève Christian Reinicke a commencé le dépouillement. En revanche, le recours aux séries décimales pour approcher la production céréalière locale risque de se révéler assez décevant, car ces sources sont moins bien conservées.

31. On commence à observer une forte tendance à la constitution de grosses fermes à mi-fruit à partir des XVIe-XVIIe siècles. La noblesse rhénane, de son côté, s'efforce de rassembler ses terres pour former de vastes ensembles. Feinendegen, Cf. R., Der niederrheinische Adel der Neuzeit und sein Grundbesitz, Bonn 1961 Google Scholar.

32. D. Ebeling et F. Irsigler, op. cit., introduction pp. XXVI-XXIX. Une analyse critique de ces données paraîtra ultérieurement.

33. D. Ebeling, op. cit. à la note 17, signale, p. 64, que sur les 7 584 Malter (setiers) achetés par la ville de Cologne durant la crise de 1570-1571, 6 103 au moins provenaient de l'Est. Au surplus on en avait encore acheté 5 322 à Amsterdam ; mais ils n'arrivèrent jamais à Cologne, car les Néerlandais eux-mêmes en interdirent l'exportation au dernier moment.

34. Herzog, A., Die Lebensmittelpolitik der Stadt Strassburg im Mittelalter, Berlin-Leipzig, 1909, p. 16 Google Scholar ; Hansen, J., Beitràge zur Geschichte des Getreidehandels und der Getreidepolitik Lubecks, Lübeck 1912, pp. 56 Google Scholar ss. et p. 59.

35. J. Dupāquier, M. Lachiver et J. Meuvret, op. cit., graphiques n” 20 (mouvement mensuel des quantités vendues), n° 15 (données annuelles) et n° 16 (données trimestrielles).

36. M. Morineau, op. cit. à la note 13, montre que durant les années 1809-1814 les plus grandes quantités de froment (par arrivage mensuel) sont vendues entre les mois d'avril, mai et juin, à l'exception des années 1812 et 1814 (années de crise) ; ce profil correspond bien à celui de la courbe des quantités vendues à Cologne à partir de 1680-1690 et durant le XVIIIe siècle.