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George L. Mosse: réflexions sur une méconnaissance française

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Stéphane Audoin-Rouzeau*
Affiliation:
Université de Picardie-Jules Verne

Extract

George Lachmann Mosse s’est donc éteint à l’âge de quatre-vingts ans, le 22 janvier 1999, sans que son œvre soit parvenue, de son vivant, à susciter l’intérêt des historiens français. La barrière de la langue, pourtant moins étanche qu’autrefois, a valeur ici d’épreuve de vérité: deux de ses livres seulement ont été traduits, le premier deux ans avant sa mort, le second à titre posthume. À notre connaissance, une seule interview a été réalisée en langue française, et deux brefs articles, tout au plus, lui ont été consacrés dans une revue de vulgarisation. Inversement, n’est-il pas révélateur que ce soit dans un périodique anglo-saxon qu’un historien français ait rendu compte, de manière d’ailleurs assez critique, d’un de ses derniers et plus grands livres? On ne compte guère que les historiens de la «culture de guerre» de 1914-1918 pour avoir pris en compte, au cours des dix dernières années, une partie au moins de l’œvre de Mosse—celle qui concerne en particulier les effets d’une «brutalisation» de la Première Guerre mondiale sur les sociétés européennes de l’entre-deux-guerres.

Type
Lire George L. Mosse
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2001 

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References

1. Il s’agit de Limage de l’homme. L’invention de la virilité moderne, Paris, Éditions Abbeville, 1997 (The Image of Man: The Creation of Modern Masculinity, New York, Oxford University Press, 1996), et de De la Grande Guerre au totalitarisme, Paris, Hachette-Littérature, 1999 (Fallen Soldiers: Reshaping the Memory of the World Wars, New York, Oxford University Press, 1990).

2. Voir l’interview due à Bruno Cabanes et parue sous le titre: «Du Baroque au nazisme: une histoire religieuse de la politique. Entretien avec George Mosse», Revue européenne d’histoire, 1-2, 1994, pp. 247-252.

3. Cabanes, Bruno, «Les deux guerres de George Mosse», L’Histoire, 199, mai 1996, pp. 13-14 Google Scholar, et Becker, Annette, «Barbarie de la Grande Guerre», L’Histoire, 241, mars 2000, p. 23 Google Scholar.

4. Cf. le compte rendu de Fallen Soldiers…, op. cit., par Prost, Antoine dans The Historical Journal, mars 1994, pp. 209-217 Google Scholar.

5. Nous voulons parler du Centre de recherche de l’Historial de Péronne (Somme), créé en 1989, et présidé par Jean-Jacques Becker. Tout un pan de l’historiographie actuelle du premier conflit mondial a contracté une dette importante à l’égard des travaux de George L. Mosse, qu’il s’agisse des concepts qu’il a mis en œuvre, de sa vision d’ensemble du conflit, de sa manière de relier celui-ci aux pratiques politiques de l’entre-deux-guerres, ou encore de sa volonté de renouer des fils trop artificiellement rompus entre 1914-1918 et 1939-1945. Depuis dix ans, une masse considérable de travaux de jeunes historiens américains, allemands, britanniques, italiens, anglais (et, heureusement, français) ont été engagés, consciemment ou non, à partir de pistes ou d’intuitions dégagées dans G. L. Mosse, De la Grande Guerre au totalitarisme, op. cit. Une table ronde a d’ailleurs été organisée autour de l’œuvre de l’historien en janvier 2000 à l’Historial de la Grande Guerre: «Les histoires culturelles de la Grande Guerre. Hommage à George Mosse.»

6. Voir en particulier: The Holy Pretence: A Study in Christianity and Reason of State from William Perkins to John Winthrop, Oxford, Basil Blackwell, 1957.

7. Mosse, George L., The Culture of Western Europe: The Nineteenth and Twentieth Centuries. An Introduction, Londres, John Murray, [1961] 1963 Google Scholar.

8. Cf. The Crisis of German Ideology: Intellectual Origins of the Third Reich, New York, The Universal Library, Grosset & Dunlap, 1964.

9. Pour une analyse de cette œuvre, qui n’est pas notre propos ici, nous renvoyons à notre préface de De la Grande Guerre au totalitarisme, op. cit. On peut toutefois juger de la fécondité de l’historien en consultant la liste de ses principaux ouvrages, en dehors de ceux déjà cités: Nazi Culture: Intellectual, Cultural and Social Life in the Third Reich, Londres, W. H. Allen, 1966; The Nationalization of the Masses: Political Symbolism and Mass Movements in Germany from the Napoleonic Wars through the Third Reich, Ithaca-Londres, Cornell University Press, 1975; Towards the Final Solution: A History of European Racism, New York, Howard Fertig, 1978; Masses and Man. Nationalist and Fascist Perceptions of Reality, Detroit, Wayne State University Press, 1980, réed. 1987; Nationalism and Sexuality. Respectability and Abnormal Sexuality in Modern Europe, New York, Howard Fertig, 1985 et The Fascist Revolution: Towards a General Theory of Fascism, New York, Howard Fertig, 1999. À quoi s’ajoute toute une série de contributions à l’histoire du judaïsme proprement dit: Germans and Jews: The Right, the Left, and the Search for a “Third Force” in Pre-Nazi Germany, New York, Howard Fertig, 1970; German Jews Beyond Judaism, Bloomington, Indiana University Press, 1985; Confronting the Nation: Jewish and Western Nationalism, Hanovre-Londres, Brandeis University Press, 1993.

10. Rioux, Jean-Pierre, Sirinelli, Jean-François (dir.), Pour une histoire culturelle, Paris, Le Seuil, 1997 Google Scholar.

11. La BNF n’en possède tout simplement aucun en langue anglaise. C’est à l’IEP de Paris et à la BDIC que l’on trouvera les échantillons les plus riches — encore que très incomplets — de l’œuvre de George L. Mosse.

12. Burguière, André, Dictionnaire des sciences historiques, Paris, PUF, 1986, p. 239 Google Scholar.

13. Pour une discussion de la thèse de la «brutalisation» opposée à celle de la «civilisation des mœurs», voir le chapitre 1 d’Annette Becker et Stéphane Audoin-Rouzeau, 14-18. Retrouver la guerre, Paris, Gallimard, 2000, chap. 1. Je remercie par ailleurs Christophe Prochasson de m’avoir suggéré cette hypothèse explicative.