On sait repérer les causes immédiates qui déclenchent le passage à l’acte suicidaire d’un adolescent. Il s’agit principalement d’un isolement social ou affectif face à une épreuve alarmante pour cette personne. Mais dans une population qui doit affronter cette épreuve, seuls ceux qui auront acquis une vulnérabilité neuro-émotionnelle, auront des idées suicidaires. L’acquisition de cette vulnérabilité est attribuable à un appauvrissement de la niche sensorielle qui entourait le bébé au cours des premiers mois de son existence. Pendant la grossesse, un trauma maternel augmente le taux de cortisol amniotique dont le bébé déglutit 4 à 5 litres par jour, ce qui provoque une hyper-osmolarité rhinencéphalique et un éclatement des cellules. Après la naissance, l’appauvrissement de la niche est souvent provoqué par un malheur maternel, tel que l’abandon, une maladie, une dépression, un conflit conjugal ou une précarité sociale. L’appauvrissement sensoriel au cours de cette période sensible du bouillonnement synaptique explique que les lobes préfrontaux non circuités n’ont pas acquis leur capacité à inhiber l’amygdale qui quadruple de volume. Dès lors, les émotions déclenchées par les épreuves de l’existence ne sont plus neurologiquement gouvernables. Les impulsions agressives contre les autres et contre soi-même pourraient encore être contrôlées par l’effet émotionnel de la parole et la sécurisation des rituels sociaux. Mais l’enfant qui n’a pas pu apprendre à socialiser l’expression de ses émotions a été inscrit dans une spirale relationnelle rejettante. À l’adolescence, quand surviennent les deux engagements très émotionnels de la sexualité et de l’autonomie sociale, le jeune, submergé par une violente émotion ne sait pas la contrôler et, s’il est isolé, le passage à l’acte auto-agressif va s’imposer à sa conscience.