L'enquête sur la mémoire ouvrière à Givors a débuté largement par le fait du hasard, sans définition préalable d'un objet spécifique d'étude ni d'une méthode, sans références bibliographiques ni épistémologiques. Elle est sortie, tout naturellement, d'une approche tout à fait classique, au moins au niveau des sources et des thèmes de recherche : l'analyse sur la longue durée (fin XVIIIe-milieu du XXe siècle) des comportements collectifs et des structures sociales dans une petite ville bouleversée par ce qu'on a longtemps appelé la « révolution industrielle», puis, à deux autres reprises, dans les années 1890-1920 et après 1950-1960, par les incidences de l'adaptation technologique et du redéploiement économique. En somme, on reconnaît là le vieux projet globalisant de la tradition historiographique française, même s'il était centré sur quelques questions fondamentales et fortement repeint aux couleurs de la « new urban history » américaine des années 1960.