L’objet de cet article est de mettre en lumière les processus (économiques, juridiques et politiques) à l’œuvre dans la transformation en marchandise de quelque chose qui ne l’était pas auparavant. En effet, contrairement à ce qu’affirme la théorie économique standard, les marchandises ne préexistent pas au marché, mais résultent d’une construction institutionnelle complexe. Ainsi, les semences sont passées, en un peu plus d’un siècle, du statut de bien plus ou moins commun à celui de bien privé marchand. L’histoire récente permet d’isoler deux processus fondamentaux dans leur constitution en marchandise. Le premier est un processus de normalisation aboutissant à définir la variété végétale comme un objet technique, aux contours bien identifiés, ce qui permet d’une part la coordination d’un nombre de métiers de plus en plus grand, et d’autre part la définition d’un système de droits de propriété. La privatisation des semences est en effet le deuxième processus à l’œuvre dans leur transformation en marchandise et l’échange marchand ne peut exister sans propriété privée.