Les termes de “Suisse romand,” de “Suisse français,” de “Français de Suisse,” de “Français isolé en Suisse,” de “Romand” tout court reviennent fréquemment dans la correspondance de Ramuz. Mais, disons-le d'emblée, celui-ci est le contraire d'un romancier régional-iste. Ecrivain d'expression française, c'est en plongeant profondément ses racines en terre vaudoise surtout, mais aussi valaisanne et savoyarde, qu'il atteint à l'universel. Au lendemain de la première guerre mondiale, il écrit à Elie Faure: “Nous, les Romands, représentons malgré tout la France en dehors de ses frontières politiques.” Oui, “malgré tout,” en dépit de ce que peuvent penser certains critiques de France, Ramuz appartient aussi au patrimoine spirituel du grand pays voisin. Qui contesterait que ses illustres prédécesseurs qui s'appellent J.-J. Rousseau, Mme de Staël, Benjamin Constant, Frédéric Amiel, tous de souche romande, ne représentent la littérature française au même titre que Mme de Sévigné, Voltaire et Charles Péguy? Du reste, les auteurs de manuels français les ont depuis longtemps annexés au domaine littéraire de la France.