RÉSUMÉ. La fin du Moyen Âge marque une période d'éclosion de l'intérêt des sociétés et des États envers le fait maritime. Si les riverains des littoraux expriment une méfiance envers la mer, les ports sont les lieux privilégiés du développement du fait maritime. L'essor du commerce et de la grande pêche montre l'utilité de la mer, voie de communication, tandis que les conflits entre les États en font un enjeu stratégique, nécessitant le contrôle par un pouvoir souverain. La mer devient à la fois route, surface et territoire.
ABSTRACT. The end of the Middle Ages marked a period of growing interest in maritime issues for societies and States. While the coastal inhabitants expressed distrust of the sea, the ports were privileged places for maritime development. The rise of trade and sea fishing showed its usefulness as a communication route whereas conflicts between States made the sea a strategic element requiring a sovereign power's control. The sea became route, surface, and territory all in one.
Comment la mer était-elle perçue au Moyen Âge, avant l'époque des Grandes Découvertes et l'apogée des marines de guerre européennes ? Quelles relations l'homme entretenait-il avec elle ? Ces questions paraissent essentielles à la compréhension du fait maritime européen, dans la mesure où elles permettent de saisir l'intérêt – ou le désintérêt – des individus, des groupes sociaux et, in fine, des États envers les entreprises maritimes et océaniques.
Essentiellement consacrée aux périodes moderne et contemporaine, l'historiographie du fait maritime peut laisser penser que le Moyen Âge n'est pas une période d'ouverture à la mer. Or, je tenterai ici de montrer que cette période, et plus particulièrement ses derniers siècles, entre XIIIe et XVe, voient précisément éclore l'intérêt des sociétés et des autorités publiques européennes envers l'environnement maritime et l'usage de la mer. La construction progressive de cette curiosité et les raisons qui l'ont guidée peuvent ainsi nous éclairer sur ce que la mer peut apporter, aux nations comme aux hommes.