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Les termes transplantés : une approche réflexive de la philosophie en chinois moderne

Published online by Cambridge University Press:  12 August 2022

Xiyin Zhou*
Affiliation:
Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC), École des hautes études en sciences sociales (EHESS), Paris, France
*
*Auteure-ressource. Courriel : xiyinzhou@gmail.com
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Résumé

Après la dispute soutenue à partir des années 1990 sur la question de savoir s'il y a une philosophie chinoise, plusieurs intellectuels chinois, y compris et surtout des philosophes, ont commencé, depuis une dizaine d'années, à se réunir autour d'une problématique plus concrète : « une philosophie en langue chinoise est-elle possible ? » ou « comment raisonner en chinois moderne ? » Parmi de nombreux sujets, celui des « termes transplantés » initié par Chen Jiaying (1952-) a attiré l'attention générale. Cet article compte, en s'appuyant sur son travail, introduire et approfondir ce problème en tant que défi particulier pour la pratique philosophique en chinois.

Abstract

Abstract

After continuous dispute since the 1990s about whether there is in fact a Chinese philosophy, more and more Chinese intellectuals — including and especially philosophers — have begun in the last decade or so to centre on a more concrete problem of philosophical practice, namely: “is philosophy in the Chinese language possible?” and “how should we reason in modern Chinese?” Among many topics raised, “transplanted terms,” initiated by Chen Jiaying (1952–), has attracted widespread attention. Based on Chen's work, this article introduces and explores the problem of transplanted terms as a particular challenge for Chinese philosophical practice.

Type
Article
Copyright
Copyright © The Author(s), 2022. Published by Cambridge University Press on behalf of the Canadian Philosophical Association/Publié par Cambridge University Press au nom de l’Association canadienne de philosophie

1. Introduction

Le mot « yizhici 移植詞 » (« termes transplantés ») a été utilisé d'abord par un philosophe chinois contemporain, Chen Jiaying (陳嘉映), dans son article intitulé « 從移植詞看中國當代哲學 » (« Examiner la philosophie contemporaine en chinois du point de vue des termes transplantés » [Chen, Reference Chen2005a]Footnote 1), pour décrire et examiner le phénomène particulier de l'emploi des termes traduits dans la philosophie en chinois moderne. Chen y a consacré ensuite en 2014 un chapitre plus systématique de son livre, Shuo li (說理, Raisonnement [Chen, Reference Chen2014]).

Au début de son article de 2005, Chen déclare son intention de façon discrète :

cet article a pour objectif de définir un phénomène de ce que j'appelle provisoirement la transplantation des termes et de réfléchir sur son influence éventuelle sur la philosophie chinoise contemporaine (Chen, Reference Chen2005a, p. 60).

Nous nous proposons ici de déployer et de développer certaines positions de Chen à l’égard de cette préoccupation intellectuelle : par exemple, nous clarifierons plus systématiquement l'insensibilité comme étant le problème central des termes transplantés, un problème dû au processus de traduction qui ne conserve pas ou ne nourrit pas de lien entre l'usage théorique et l'usage quotidien des termes ; nous décrypterons méthodiquement l'asymétrie entre le chinois et les langues occidentales dominantes en ce qui concerne le phénomène des termes transplantés. Cette approche, différente de la question quasi-normative de l'existence d'une philosophie dans l'histoire de la Chine, entre dans le vif de la pratique du raisonnement au niveau du langage, en contournant de grands sujets comparatistes telles la particularité culturelle et l'hétérogénéité, au point de vue social, de la pensée chinoise par rapport à sa contrepartie occidentale. La préoccupation pour les termes transplantés trouve exactement sa place dans ce changement de problématique. De fait, nous ne trouvons pas une meilleure tournure chinoise que celle de yizhici 移植詞 (termes transplantés), proposée par Chen il y a plus de 15 ans, pour discuter ce phénomène. De plus, son influence sur la philosophie contemporaine en chinois s'est révélée non pas simplement potentielle, mais générale et incontournable.

2. Que sont les termes transplantés ?

Au lieu de définir de façon normative ce que sont les termes transplantés, Chen en fournit une description analytique. Il distingue tout d'abord termes transplantés et emprunts ordinaires. L'histoire chinoise a connu deux phases importantes de traduction, à savoir celle des soutras bouddhiques, qui commence sous les Hans orientaux et atteint son apogée sous les Tang, et celle débutant à la fin des Ming et s'accélérant après la guerre de l'opium ; à travers elles, beaucoup de mots étrangers sont entrés dans l'usage quotidien. Ils se sont intégrés dans la langue chinoise de trois manières possibles : emprunts phonétiques, par exemple pusa 菩薩 (traduction abrégée de « bodhisattva »), kafei 咖啡 (de l'anglais « coffee ») et shafa 沙發 (de l'anglais « sofa ») ; emprunts sémantiques, par exemple diandeng 电灯 (de l'anglais « electric light ») et yinhang 銀行 (de l'anglais « bank ») ; emprunts hybrides, par exemple xibao 細胞 (de l'anglais « cell ») et jiyin 基因 (de l'anglais « gene »). Pourtant, « la plupart des emprunts utilisés couramment sont des noms de produits naturels et d'objets » (Chen, Reference Chen2014, p. 118), et de ce fait, ils n'ont pas beaucoup à voir directement avec la pratique du raisonnementFootnote 2. Les termes transplantés, dans la discussion de Chen, sont plutôt les traductions chinoises des lunlici 論理詞, « termes de raisonnement »Footnote 3 étrangers, comme par exemple shizai 實在 pour traduire « réel », xianyan 先驗 pour « transcendantal » et yinguo 因果 pour « causalité ».

Dans un sens général, tous ces mots, y compris les termes de raisonnement, sont des emprunts parce qu'ils sont littéralement empruntés à d'autres langues, comme nous venons de l'illustrer, par le truchement d'une transcription phonétique, d'une traduction sémantique ou d'un mélange des deux. Une liste précieuse de plus de 1800 emprunts et néologismes introduits dans le chinois moderne avant 1950 a été fournie par Lydia H. Liu dans son important travail (Liu, Reference Liu1995). Néanmoins, par comparaison aux nouveaux noms de produits naturels et d'objets, les nouveaux termes conceptuels sont à l'origine d'un défi beaucoup plus important quant à leur intégration dans le chinois moderne : leur usage reste souvent très délicat aujourd'hui, comme c'est le cas pour minzhu 民主 (« démocratie »), minzu 民族 (« nation »), lixing 理性 (« raison ») et lilun 理論 (« théorie »)Footnote 4. En outre, pour les sujets intellectuels, tant dans la discussion quotidienne que dans la recherche académique, la majorité des termes de raisonnement sont importés de la tradition intellectuelle de l'Occident. Pour traduire un terme de raisonnement qui n'a pas son équivalent en chinois, soit les chinois choisissent deux caractères, voire plus rarement trois et plus, et les combinent pour construire un nouveau mot, comme par exemple cizai 此在, qui traduit « Dasein » de Heidegger, soit ils choisissent tout simplement un mot existant déjà mais abandonnent son sens original, par exemple zhenli 真理, qui signifie « la raison des choses la plus pure/la vraie raison », pour traduire « vérité ». « En tout cas, ces mots ne servent essentiellement que de termes de traduction », précise Chen (2014, p. 118) en les appelant termes transplantés. Ainsi, il arrive souvent que bien que ces termes semblent appartenir à la langue chinoise, ils ne font qu’être transplantés brutalement dans la langue chinoise sans être pour autant intégrés de façon organique dans la logique naturelle du raisonnement en chinois — ils ne sont pas intégrés dans les réseaux des concepts chinois. Il en résulte que philosopher ou raisonner aujourd'hui en chinois moderne avec ces termes transplantés revient souvent, consciemment ou inconsciemment, à parler ou écrire dans une langue quasi étrangère, ce qui représente un défi considérable pour la philosophie en chinois dont la légitimité et la validité pourraient alors être mises en question.

Pour les raisonnements quotidiens tournant autour des affaires concrètes de la vie, qui s'appuient souvent sur la narration, la description et l'interprétation répétitive de choses tangibles, l'usage des termes de raisonnement peut ne pas causer de problème malgré son éventuelle inauthenticité. Chen appelle ce genre de raisonnement yinshi shuoli 因事說理 (« raisonner sur la base des choses concrètes »). Au contraire, pour les raisonnements abstraits, à savoir les raisonnements théoriques, professionnels, en l'occurrence académiques, ce qui importe n'est plus seulement le rapport avec les choses tangibles, mais surtout la systématicité et la cohérence propres à ce type de raisonnement lui-même. Dans ce cas, ce sont les termes de raisonnement, ou plus précisément, les rapports et les connexions entre ces termes, qui garantissent la systématicité et la cohérence du raisonnement. Chen appelle ce genre de raisonnement lishi shuoli 离事說理 (« raisonner sans avoir recours aux choses concrètes »)Footnote 5. Au sens pratique, pour les intellectuels chinois, c'est sans doute le « bon usage » des termes transplantés en chinois (au lieu de la maladresse devant des termes quasi-étrangers) qui garantit la légitimité et la force du raisonnement.

Avant de développer en détail le défi posé par les termes transplantés à la pratique philosophique en chinois, il vaut mieux préciser la distinction subtile entre la signification de zhongguo zhexue 中國哲學 (« philosophie chinoise ») et celle de hanyu zhexue 漢語哲學 (« philosophie en chinois »). Aujourd'hui, malgré le fait que l'on pourrait traduire littéralement tant中國哲學 (« philosophie chinoise »Footnote 6) que 漢語哲學 (« philosophie en chinois »Footnote 7) par « philosophie chinoise », on entend souvent plutôt par cette expression la pensée chinoise traditionnelle ou la recherche sur cette dernière, qu'elle soit réalisée en chinois ou en d'autres langues. Par contre, par « philosophie en chinois » on entend la philosophie pratiquée et réalisée en langue chinoise, en l'occurrence en chinois moderne, comme on le voit dans la discussion de Chen et cet article. Plus précisément, par « en chinois » dans « philosophie en chinois », on entend surtout philosopher en considérant et respectant les raisons et les connexions sémantiques cristallisées dans l'usage naturel des mots et des concepts chinois après que ceux-ci ont été testés et passés au crible de l'histoire. Ainsi, quoique le phénomène de la transplantation langagière puisse remonter loin dans l'histoire, ce qui nous préoccupe ici avant tout est le défi actuel qu'affrontent les intellectuels contemporains qui adoptent le chinois moderne comme langue de travail, ou du moins comme une langue parmi d'autres, étant donné que plusieurs sont polyglottes.

3. Défi causé par les termes transplantés en chinois

Concernant les termes transplantés, le défi évoqué à maintes reprises dans le texte de Chen est équivalent, comme nous le verrons plus loin, à un problème de bukegan 不可感 (« insensibilité »)Footnote 8. Que veut dire vraiment l'insensibilité associée à ces termes ? Tout simplement, il s'agit de la déconnexion entre l'usage théorique et l'usage quotidien de ces termes traduits. Ce sont ces cas de déconnexion et d'insensibilité que nous allons maintenant examiner.

Puisque les termes transplantés sont les traductions chinoises des termes de raisonnement occidentaux, une classification de ces derniers est utile pour comprendre le problème de leur transplantation. D'après Chen, parmi les termes de raisonnement, seulement un petit nombre n'apparaissent que dans les raisonnements spéciaux, à savoir ceux de la philosophie, et ils sont parfois forgés artificiellement, pour les raisons théoriques ; c'est le cas par exemple des mots « transcendantal » (xianyan 先驗), « données des sens » (ganjue cailiao 感覺材料) et « phénoménologie » (xianxiangxue 現象學)Footnote 9. Autrement dit, ces termes ne sont que d'usage théorique, mais pas d'usage quotidien. À l'exception de ceux-ci, une grande majorité de termes proviennent des mots que l'on utilise quotidiennement et qui existent depuis longtemps, tels que « vérité » (zhen 真), « réel » (shi 實), « raison » (daoli 道理), « ego » (ziwo 自我), « individu » (geti 個體), « intérêt » (liyi 利益) et « justice » (gongzheng 公正). Ils s'emploient à la fois pour le raisonnement pur et aussi pour la vie quotidienne. Après le tournant linguistique de la philosophie contemporaineFootnote 10, à part les concepts thématiques susmentionnés, beaucoup de petits termes pour les raisonnements, y compris les « opérateurs d'argumentation »Footnote 11, commencent à attirer l'attention philosophique. Pensons à des termes comme « généralement dit », « en réalité », « directement/indirectement », mais aussi à des connecteurs comme « mais » et « ou », car ceux-ci ont aussi beaucoup à voir avec notre manière de raisonner, mais sont souvent ignorés à cause de leur « petitesse » ou de leur rôle auxiliaire. Ce troisième genre de termes, philosophiquement très subtils, n'occasionnent pas tellement de problèmes de traduction, et ne concernent donc pas le problème de la transplantation.

Concernant leurs fonctions dans le raisonnement, ces termes pourraient se classer autrement ; Chen se consacre à détailler leur rôle, par exemple pour « sujet de discussion » et « élément d'une dichotomie ». Nous ne nous engageons pas ici dans des investigations aussi techniques, car notre préoccupation consiste à persévérer dans l'explication de l'insensibilité associée à des termes de différentes sortes.

Nous revenons donc sur les deux genres classiques de termes de raisonnement mentionnés ci-dessus pour examiner le défi de l'insensibilité. Le premier genre concerne les termes très spécialisés et techniques, qui, n'ayant qu'un usage théorique, circulent peu dans la vie quotidienne. Même pour les locuteurs natifs, à condition qu'ils ne soient pas des spécialistes du domaine concerné, l'usage de ces termes sera inintelligible. Autrement dit, ces termes laissent les usagers insensibles dans l'expérience quotidienne et, de ce fait, ils restent spécialisés et n'enrichissent pas directement notre compréhension naturelle du monde à cause de leur incapacité de s'incarner dans l'usage quotidien. Malgré leur rôle sans doute important dans les contextes théoriques spécialisés, cette insensibilité, causée par le décalage entre l'usage théorique et l'usage quotidien, reste un obstacle pour l'extension de leur force intellectuelle dans le raisonnement quotidien. Si l'on considère la pratique philosophique comme une manière d'approfondir la compréhension générale de notre expérience dans ce monde, ce problème d'insensibilité équivaut en effet à un désavantage pour cette pratique de la philosophie. Malheureusement, ce genre de termes, comme « transcendantal » (xianyan 先驗) et « phénoménologie » (xianxiangxue 現象學), n'a souvent pas d’équivalent chinois, et c'est pourquoi après la traduction artificielle en chinois, le problème d'insensibilité est plutôt aggravé. Au sens technique, ces termes traduits, quoique composés de caractères chinois artificiellement combinés et se prononçant de façon chinoise, ne sont pas davantage que des étiquettes pour marquer les termes étrangers, et ils sont en fait plutôt des signes chinois plutôt que de véritables mots chinois qui ont des sens authentiques. Ces termes traduits « n'ont pas poussé naturellement du sol chinois » (Chen, Reference Chen2014, p. 120), mais ont été transplantés brutalement dans le sol chinois à partir d'un sol étranger. Ainsi, la traduction « inaccessible » de ce genre de termes ne contribue pas à la compréhension en chinois de ces termes étrangers et des pensées concernées dans leur langue source. Pour les spécialistes chinois, il vaut donc mieux travailler directement en langue source sans faire le détour inutile de la traduction chinoise. Par conséquent, ils ne font plus de philosophie en chinois — ce qui pose une question éthique fondamentale : sont-ils toujours philosophes « chinois » et contribuent-ils, à travers leur travail, à la compréhension en langue chinoise de notre expérience dans ce monde ? En bref, pour ce premier genre de termes, après la traduction, le désavantage lié à l'insensibilité demeure.

Le deuxième genre de termes, le genre dominant, combinant à la fois l'usage théorique et l'usage quotidien, ne cause pas vraiment de problème d'insensibilité. Même si les deux usages peuvent souvent différer, ils se font écho l'un à l'autre, et dans ce cas, ces termes sont beaucoup plus accessibles, perceptibles et compréhensibles que les termes du premier genre. Ainsi, lors du raisonnement avec ces termes, nos expériences quotidiennes, mêlées avec notre manière quotidienne de parler, sont naturellement prises en compte et impliquées. Réciproquement, la pratique de cette sorte de raisonnement enrichit la compréhension de nos expériences.

En fait, il n'y a pas une démarcation absolue entre ces deux genres de termes : beaucoup de termes du premier genre qui ne possèdent pas d'usage quotidien aujourd'hui l'ont bel et bien possédé dans une époque plus ancienne, et c'est seulement pour des raisons historiques que leurs usages quotidiens s’éclipsent ou sont remplacés par d'autres mots, comme pour les mots grecs « paideia » et « chora ». Nous distinguons les deux genres seulement pour examiner leurs importations différentes en chinois moderne. Si le problème d'insensibilité du premier genre demeure toujours après la traduction chinoise, ce qui crée un dommage, l'avantage des termes du deuxième genre, à savoir la connexion organique entre l'usage théorique et l'usage quotidien, ne connaît pas vraiment un destin plus heureux dans la langue chinoise.

Analysons ici précisément trois exemplesFootnote 12 en vue de montrer comment cette connexion entre les deux usages devient précaire après la traduction en chinois : xingshi 形式, employé pour traduire « forme », ziwo 自我, qui traduit « ego », et benzhen 本真, pour traduire « eigentlich ». Le mot « forme » comme terme de raisonnement, en français ou en anglais, n'est jamais isolé de son usage quotidien dans lequel il veut aussi dire « formulaire », « apparence » et « allure », alors qu'en chinois, dès que l'on utilise le mot xingshi 形式, on raisonne pratiquement de façon abstraite. En effet, la contrepartie chinoise du terme « forme » n'est souvent utilisée que pour les raisonnements théoriques, et elle ne s'imbibe pas de l'usage plus quotidien du chinois. Il en est de même pour ziwo 自我, la contrepartie chinoise de « ego ». Que ce soit en français ou en anglais, « ego » possède à la fois un usage théorique désignant l'individualité d'une personne ou l’être humain en tant que sujet et des usages quotidiens renvoyant à « moi », « soi-même », à la « personnalité » ou même à l’« ami intime », comme dans « alter ego ». Néanmoins, ziwo 自我 en chinois moderne n'a d'usage théorique pratiquement qu'en psychanalyse ou en philosophie, et pas d'usage quotidien pour correspondre à « soi-même », qui doit être traduit en chinois par ziji 自己, ni à « personnalité », qui serait traduit en chinois par gexing 個性, ni encore à « alter ego », qui serait rendu en chinois par zhiyou 至友, qui veut dire « meilleur ami ». Encore une fois, nous constatons l'absence d'usage quotidien naturel du terme de raisonnement traduit en chinois à côté de son usage théorique. Finalement, l'allemand « Eigentlich », à côté de sa définition philosophique heideggérienne, s'utilise aussi quotidiennement pour signifier « effectivement », « vraiment », « à vrai dire », etc. Mais en chinois, sa traduction est benzhen 本真, et il n'y a pratiquement pas d'usage quotidien de ce mot qui a des connotations extrêmement grandioses et profondes. Même le mot-caractère zhen 真, employé seul, est utilisé presque exclusivement dans certains contextes non quotidiens, d'une manière très différente de l'usage courant de « vérité » en français. Ce ne sont là que quelques exemples de termes transplantés en chinois.

Si nous nous contentions de simplement traduire ces termes sans compter les utiliser pour raisonner en chinois, cette déconnexion des deux usages, théorique et quotidien, ne serait pas problématique. Pourtant, nous importons ces termes non seulement comme objet de recherche, mais aussi pour les intégrer, si possible, dans l'outillage terminologique des intellectuels chinois, en vue d'enrichir la potentialité intellectuelle de la langue chinoise. Dans ce cas, le fait que la connexion organique entre l'usage théorique et l'usage quotidien de ces termes soit dissoute lors de leur traduction en chinois est décourageant. C'est en fait uniquement grâce à la connexion entre les deux usages que nous sommes dans une position « sensible », satisfaisante en ce qui concerne ces termesFootnote 13. Autrement dit, sans cette connexion, nous n'aurions pas le bon sens pour juger de notre usage effectif de ces termes en chinois : « à cause de l'insensibilité, il devient plus difficile pour nous de savoir si nous les utilisons correctement, raisonnablement ou non » (Chen, Reference Chen2014, p. 120). Si la richesse intellectuelle de ces termes de raisonnement, incarnée dans la connexion entre les deux usages, ne peut pas s'intégrer de façon constructive dans la langue chinoise, les intellectuels sinophones n'arriveront pas à raisonner de façon légitime avec ces termes. On comprend que l'usage philosophique du chinois est alors menacé. Voici donc le défi lié aux termes transplantés, voire le préjudice que cause leur emploi.

4. D'où vient exactement cette insensibilité dans les traductions chinoises ?

Revenons à ce concept central pour notre propos : l'insensibilité. Précisons encore un peu les deux cas mentionnés ci-dessus d'insensibilité associée aux termes transplantés. Dans le premier cas, on commence par adopter deux caractères chinois, rarement plusieurs ou seulement unFootnote 14, qui ont déjà leurs propres sens respectifs, puis on les combine pour obtenir un nouveau mot, traduction d'un terme étranger. Dans ce cas, ce nouveau mot ne sert qu’à désigner le terme occidental concerné et, à cause de cette combinaison artificielle et technique, il n'a pas vraiment d'usage naturel dans la langue chinoise, ni théoriquement ni quotidiennement. C'est exactement dans ce sens qu'il laisse les sinophones insensibles ou moins sensibles : sans un vrai usage dans le chinois qui est à la base de la compréhension, ce nouveau terme n'existe pas vraiment, mais artificiellement. S'il doit suivre certains usages, il s'agit plutôt des usages que le terme original suit dans la langue étrangère. Donc, à proprement parler, si l'on insistait pour raisonner en chinois avec ce genre de termes transplantés, sans une réflexion sur ce décalage, on ne ferait que s’égarer, car l'usage des termes traduits de cette façon laisse les usagers insensibles dès le début. Dans le second cas, on adopte directement un mot chinois qui existe déjà pour traduire un terme de raisonnement, mais ce genre de mots doit souvent céder une partie de son sens original en chinois pour s'adapter au sens du terme occidental. Quelquefois, on n'utilise plus ces mots dans leur sens original, mais seulement dans le sens qui correspond à celui des mots traduits, et dans ce cas, leur sens original est tombé en désuétude. Chen nomme ce phénomène quechao jiuzhan 鵲巢鳩佔(« le pigeon ramier occupe le nid de la pie » [Chen, Reference Chen2005a]) : le pigeon ramier représente le sens des mots traduits et le nid de la pie représente le sens original du mot chinois adopté pour traduire. Ces termes, après avoir été vidés de leurs sens — et du même coup de leurs usages — pour correspondre aux termes traduits, sont devenus quasi-étrangers, et laissent ainsi les usagers peu sensibles, ou alors sensibles de façon ambivalente. Évidemment, il existe des termes chinois dont les sens originaux dominent toujours par rapport à ceux des termes traduits, mais cela pose aussi un problème : si le décalage est important entre termes chinois et termes traduits, c'est la traduction elle-même qui devient inefficace.

5. Le phénomène de termes transplantés n'existe sans doute que dans les langues analytiques ou isolantes écrites à l'aide de caractères

Ce phénomène n'existe sans doute que dans les langues analytiques, plus précisément, dans notre cas, dans le chinois en tant qu'il est une langue composée des caractères. On peut penser aussi par exemple aux termes nouveaux, très nombreux, créés principalement à partir de caractères chinois par l’école de Kyoto pour introduire la philosophie allemandeFootnote 15. La raison en est un peu particulière. À de rares exceptions près, chaque caractère chinois, phonétiquement monosyllabique, compose tout seul une unité de sens : chaque morphème présenté par chaque caractère est lui-même déjà un mot. Avec cette particularité dite de « langue isolante/analytique », pour traduire les termes de raisonnement qui n'ont pas d’équivalent chinois — c'est souvent le cas —, il est assez facile et naturel pour les sinophones de choisir deux ou plusieurs caractères selon leurs unités de sens et de les combiner afin d'inventer un nouveau mot. Ce mot, dont le sens est donné par la combinaison de plusieurs unités de sens, est censé correspondre au sens du terme traduit. Ainsi naît un terme transplanté chinois, qui n'a que le sens artificiellement composé pour la traduction, mais pas encore d'usage authentique en chinois. Deux remarques s'imposent à l'inverse pour une langue alphabétique, souvent « flexionnelle ». Premièrement, il est presque impossible d'opérer la même combinaison qu'en chinois : l'unité de sens n'est alors pas phonétiquement monosyllabique et on ne peut pas couper un mot de plusieurs syllabes en plusieurs parties et les réassembler arbitrairement (sauf pour les « mots-valises »). Deuxièmement, même si on le fait avec l'aide de préfixes ou de suffixes, ces nouveaux mots, ou néologismes, s'ils sont toujours compréhensibles, gardent le même usage dans la langue, et de ce fait ils ne rencontrent pas le décalage que les termes transplantés chinois affrontent. Quant au phénomène de transplantation, malgré cette distinction significative bien démontrée entre la langue analytique et la langue synthétique, il ne faut pas absolutiser une langue par son caractère synthétique ou analytique, parce que cet aspect linguistique est souvent lié à la dimension historique de cette langue.

Les Occidentaux ont d'autres difficultés que celles des termes transplantés. Dans certains cas, ils n'arrivent pas à trouver un mot pour traduire un terme chinois, par exemple ren 仁 ou dao 道, des notions importantes de la pensée chinoise ; dans ce cas, ils les transcrivent phonétiquement. Par exemple, Anne Cheng, dans sa traduction de Lunyu 論語 (Entretiens de Confucius)Footnote 16, préfère garder le pinyin ren au lieu de choisir un mot français qui existe déjà. Dans d'autres cas, ils adoptent un mot qui n'est pas complètement équivalent au terme chinois, et il faut alors des explications supplémentaires pour les contextes divers. Dans ces deux cas, soit celui de la traduction explicative et celui de la transcription phonétique, le problème en est un de traduction imparfaite, mais pas de transplantation. Ce problème de traduction-transplantation, nous le rencontrons sans doute dans la reprise littérale de termes de langues étrangères, comme pneuma.

Un traducteur connu de Zhuangzi 莊子, Richard John Lynn, préfère traduire qi 氣 comme pneuma, un mot grec qui aura un rapport avec la théologie chrétienne primitiveFootnote 17. Les significations assez riches de ce mot ancien pourraient correspondre à la dimension cosmologique et mystérieuse de qi 氣. Cependant, dans divers autres sens, les deux termes sont très différents. Jean-François Billeter détaille une différence importante :

[o]n peut rapprocher le ts'i du pneuma grec, mais il y a une importante différence entre ces deux notions. Le pneuma est le souffle qui anime le corps, ou plus généralement la matière. Il donne le moyen de concevoir une opposition entre l'esprit et la matière. Le ts'i, par contre, anime la réalité entière. Rien ne lui est extérieur. Pneuma désigne en premier le souffle humain tandis que ts'i évoque en premier lieu la vapeur, puis l'air en mouvement et finalement l’énergie qui circule en toutes choses. Il est caractéristique que, dans les arts chinois du souffle, on nomme indifféremment ts'i l'air que l'on expire et inspire, l’énergie du système nerveux et le métabolisme tout entier, qui comprend les transformations des humeurs et de l'esprit. Tout cela forme un seul domaineFootnote 18.

Qui plus est, pneuma est peu utilisé aujourd'hui, sauf comme racine de « pneumatique », alors que qi 氣 s'utilise partout dans le chinois moderne, par exemple dans zhengqi 正氣 (justice/droiture), zhengqi 爭氣 (faire l'honneur), fengqi 風氣 (mode/mœurs), qizhi 氣質 ou piqi 脾氣 (tempérament), qifen 氣氛 (atmosphère), qixiang 氣象 (paysage), qidu 氣度 (la grandeur d’âme), etc. Autrement dit, le qi 氣, tout en étant une notion ancienne, a toujours un usage vivant en chinois moderne, tandis que le calque occidental pneuma n'en a pas vraiment en anglais moderne : qi 氣 est toujours vivant en chinois moderne, mais pas pneuma en anglais non théologique. Pour les sinophones, qi 氣 est à la fois une notion élevée et aussi une unité de sens très ordinaire utilisée quotidiennement, tandis que pour les occidentaux, pneuma ne sert que la traduction ou l'exégèse érudite, qui a l'air un peu inusitée, de qi 氣, et il y manque alors toute la dimension ordinaire. On rencontre pratiquement le décalage qu'on vient de décrire pour les termes de transplantés chinois. Or, Lynn n'a ni mission ni ambition de transplanter la notion chinoise de qi 氣 dans une langue occidentale, dans son cas l'anglais, pour que les intellectuels occidentaux puissent l'utiliser comme un nouveau terme de raisonnement. Lynn peut de façon justifiée se contenter de cette traduction, puisque son travail est celui de la philologie, qui prend cette notion comme l'objet à interpréter, mais pas tellement comme un terme qu'on pourrait utiliser pour interpréter d'autres choses courantes. Il n'y a donc pas de souci pour son intégration dans la langue actuelle, pour son usage naturel dans cette langue, et par conséquent, pas de souci de transplantation. Pneuma ne peut donc pas être considéré comme un terme transplanté en anglais.

En bref, le défi des termes transplantés se manifeste dans leur usage en chinois, mais il est déjà prédestiné dans l'effort de les intégrer dans le système de la langue chinoise. Pourquoi les Chinois ont-ils besoin de les intégrer dans leur langue pour les utiliser, alors que les occidentaux n'ont pas besoin de faire de même ? D'abord, le monde intellectuel est dominé par l'Occident ou bien, autrement dit, c'est un monde plus ou moins occidentalisé. De plus, il n'y a pas encore, à ce qu'il semble, assez de grandes œuvres réalisées en chinois moderne pour que l'on ait envie d'en profiter et même d'en intégrer les concepts.

6. Conclusion

Le problème des termes transplantés est multidimensionnel : il est à la fois historique, linguistique, politique et philosophique. Le travail de Chen a marqué un véritable commencement, à partir duquel nous avons examiné et éclairci dans cet article les différents cas d'insensibilité engendrée par l'intégration chinoise des termes de raisonnement de deux genres majeurs, ainsi que les caractéristiques du chinois comme langue analytique dans son invention de mots pour la traduction. Quant aux praticiens intéressés, nous avons tâché d'analyser pourquoi il s'agit d'un défi aussi particulier qu'incontournable, propre aux intellectuels chinois qui usent du chinois moderne comme langue de travail. Ainsi l'investigation systématique de la situation de ces termes ne concerne-t-elle pas seulement une compréhension réflexive de leur propre pratique langagière, mais elle constitue aussi une partie indispensable d'une construction solide de la subjectivité intellectuelle de la langue chinoise moderne. C'est aux intellectuels chinois eux-mêmes seuls, pourrait-on dire, d'en sortir, de trouver leurs propres façons de raisonner plus à l'aise en chinois moderne, en recourant plus ou moins à ces termes qui sont déjà bien ou mal transplantés, dans cette langue qui est elle-même toujours en train d’évoluer. En fin de compte, comme Chen l'a dit dans l'article de 2005, « en réalité, je ne sais pas comment faire, sinon rédiger de la philosophie en bon chinois moderne » (Chen, Reference Chen2014, p. 65).

Parfois, la formulation même d'un problème suggère des pistes de solutions. En fait, Chen a fait de nombreuses tentatives paradigmatiques à l’égard des termes transplantés dans sa propre pratique philosophique en chinois, et si elles peuvent être considérées comme réussies, nous découvrirons une nouvelle philosophie chinoise contemporaine. Ce point, nous l'explorerons dans le futur à travers des études de cas de termes transplantés tels que « universel » (pubian 普遍), « éthique » (lunli 倫理), « raison » (lixing 理性) et « théorie » (lilun 理論). Nous disons « paradigmatique » plutôt que « normatif », car pour la pratique philosophique, en l'occurrence la pratique philosophique en chinois, il n'y a sans doute pas de normes prédéterminées, mais seulement des exemplaires émergeant des exercices persistants. Cette distinction entre le normatif et le paradigmatique fait écho au changement de problématique, que nous soulignons depuis le début, de « la philosophie chinoise » à « la philosophie en chinois ».

Footnotes

1 Cet article a été traduit en français par Frédéric Wang et Sarah Oppenheim (voir Chen, Reference Chen and Wang2009).

2 Il faut donc distinguer deux types d'emprunts, le premier concernant les termes techniques ou quotidiens et le second les termes qui servent plutôt dans le raisonnement. Cela impliquerait, à côté de notre travail actuel, une autre recherche à la fois philologique et philosophique sur les emprunts de différentes époques.

3 « Lunlici 論理詞 » (« termes de raisonnement ») est un terme qui n'existe pas dans les langues occidentales comme une locution courante et qui n'existait pas non plus en chinois : c'est une invention assez authentique de Chen. Ce terme, en associant lun 論 (« discuter »/« raisonner »), li 理 (« raison »/« principe ») et ci 詞 (« mot »), veut littéralement désigner les mots ou termes, souvent des concepts théoriques (mais pas seulement, comme nous le verrons plus tard), que nous utilisons et examinons dans le raisonnement.

4 À cela s'ajoute le rôle intermédiaire mais important du japonais dans l'invention foisonnante de nouveaux mots en caractères chinois, ce qui a déjà attiré l'attention de beaucoup d'intellectuels. Voir par exemple Chen Liwei 陳力衛 (Chen, Reference Chen2019).

5 Voir Chen, Reference Chen2014 (p. 6-9).

6 Quand bien même le problème des termes transplantés serait pertinent, en raison de la taille de cet article, nous ne touchons pas au débat fameux : « Existe-t-il une philosophie chinoise ? » (voir Cheng (dir.), Reference Cheng2005).

7 Concernant ce qu'est une philosophie en chinois et comment elle est possible, de nombreux articles et livres ont été publiés dans le monde chinois pendant les 20 dernières années ; à part Chen, pour ne mentionner que quelques personnes, philosophes pour la majorité, nommons par exemple Yang Guorong 楊國榮 (1957- ), Sun Zhouxing 孫周興 (1963- ), Jiang Yi 江怡 (1961- ), Ni Liangkang 倪梁康 (1956- ), Han Shuifa 韓水法 (1958- ), Deng Xiaomang 鄧曉芒 (1948- ) et Liu Liangjian 劉梁劍 (1975- ).

8 Pour comprendre plus précisément ce qu'entend Chen par « sens » et par « sensibilité » et leur rôle dans le raisonnement, voir Chen (Reference Chen2005b), surtout l'article éponyme.

9 Voir Chen (2014, p. 111-113). Chen a aussi expliqué soigneusement pourquoi il a préfère employer lunlici 論理詞 (« termes de raisonnement ») plutôt que simplement zhexue gainian 哲學概念 (« concepts philosophiques »).

10 Je réfère surtout au courant de la philosophie du langage ordinaire inspiré et développé par Ludwig Wittgenstein, Gilbert Ryle, John L. Austin, etc.

11 Pour des exemples concrets, voir des œuvres d'Oswald Ducrot (par exemple Anscombre et Ducrot, Reference Anscombre and Ducrot1983).

12 Dans l'article de 2005 et le livre de 2014, Chen fournit beaucoup d'autres exemples.

13 En ce qui concerne l'usage du langage, nous sommes dans cet article plutôt en faveur du courant de la philosophie du langage ordinaire, et pensons que l'usage quotidien compte beaucoup pour le bon jugement dans l'usage théorique des termes.

14 En suivant l'habitude du chinois classique, il est possible de traduire un terme avec seulement un caractère ; par exemple, Yan Fu 嚴復 (1854-1921) a traduit « concept » par ming 名 (« nom »).

15 Pour plus d'exemples au sens plus large concernant l'introduction de la philosophie occidentale au Japon, voir aussi le Dictionnaire des termes philosophiques (Tetsugaku jii 哲學字彙) compilé par Inoue Tetsujirō (Reference Inoue1912).

16 Voir Confucius (Reference Cheng1981).

17 Dans sa conférence à l'université Paris Diderot le 12 avril 2019, Lynn a justifié son choix de pneuma pour traduire qi 氣.

18 Billeter (Reference Billeter2010, p. 37, note 1). La transcription ts'i est différente de la version pinyin qi que nous avons adoptée dans cet article.

References

Références bibliographiques

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