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Clivage linguistique et vote économique au Canada

Published online by Cambridge University Press:  10 November 2009

Daniel Guérin
Affiliation:
University of Michigan
Richard Nadeau
Affiliation:
Université de Montréal

Abstract

This study deals with the question of economic voting in Canada, notably that the electoral impact of economic perceptions with regard to the performance of the federal government has not been homogeneous among the whole Canadian electorate during the period of Liberal dominance in Quebec. Contrary to our Findings on voters in other provinces, francophone Quebeckers did not vote according to their judgment of the government on economic matters, their fidelity to the Liberal party having inhibited them in this respect. These results suggest that the absence of economic voting in Quebec during the Liberal regime may clarify, at least in part, the puzzling conclusions of previous research, that show a fragile relationship between the economy and the electoral outcomes in Canada. These findings break new ground for a better understanding of the specific electoral rationality used by minorities in long-established democracies.

Résumé

Cette étude s'intéresse à la question du vote économique au Canada, notamment à l'asymétrie de l'impact des perceptions économiques dans l'électorat canadien durant la période d'hégémonie libérale au Québec. Seuls les Canadiens des provinces autres que le Québec ont utilisé leurs jugements sur la responsabilité gouvernementale en matière économique pour orienter leur vote, la fidélité des Québécois francophones au Parti libéral du Canada ayant inhibé l'expression d'un vote de nature économique durant cette période. Ce comportement particulier des Québécois a entraîné une dilution du vote économique dans l'ensemble canadien, ce qui explique sans doute que le Canada ait parfois été perçu comme un cas ambigu en ce qui à trait a l'impact de l'économie sur la popularité des gouvernements en place. Ces résultats soulèvent des pistes de recherche en ce qui concerne la rationalité électorate particulière des groupes minoritaires en régime démocratique.

Type
Research Article
Copyright
Copyright © Canadian Political Science Association (l'Association canadienne de science politique) and/et la Société québécoise de science politique 1998

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References

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2 Norpoth, Comparing Democracies, 317. On peut aussi ajouter que la dilution de la responsabilité des partis dans une coalition gouvernementale, par exemple, rendrait plus difficile l'expression d'un vote d'approbation ou de désapprobation de la politique économique (voir Powell et Whitten, « A Cross-National Analysis »).

3 Hibbs, Douglas A. et Fassbender, Heino, Contemporary Political Economy (Amsterdam: North-Holland, 1981)Google Scholar; Hibbs, Douglas A., avec la collaboration de Douglas Rivers et N. Vasilitos, « On the Demand for Economic Outcomes: Macroeconomic Performance and Mass Political Support in the United States, Great Britain and Germany », Journal of Politics 44 (1982), 426462CrossRefGoogle Scholar; Hibbs, Douglas A., The American Political Economy: Macroeconomics and Electoral Politics in the United States (Cambridge: Harvard University Press, 1987)Google Scholar; Belluci, Paolo, « Italian Economic Voting: A Deviant Case or Making a Case for a Better Theory », dans Lewis-Beck et LaFay, dir., Economics and Politics, 6384Google Scholar; et Juan Carlos Huerta, « Economics, Latinos, and the Presidential Vote », présentation à la réunion annuelle de la Midwest Political Science Association, Chicago, 1996.

4 Fait intéressant, le comportement électoral des Québécois sur la scène provinciale aurait été lié à la conjoncture économique (voir et Johanne Simard, Jean Crête, « Conditions économiques et résultats électoraux au Québec », Crête, dans Jean, dir., Le comportement électoral au Québec [Chicoutimi: Gaétan Morin, 1984], 166197Google Scholar, et Guérin et Richard Nadeau, Daniel, « Conjoncture économique et comportement électoral au Québec », Recherches sociographiques 36 [1995], 6575CrossRefGoogle Scholar).

5 Kramer, G. H., « Short-Term Fluctuations in U.S. Voting Behavior, 1896–1964 », American Political Science Review 65 (1971), 131143CrossRefGoogle Scholar.

6 Par exemple, le taux de chômage, d'inflation, ainsi de suite (voir Key, V. O., The Responsible Electorate [Cambridge: Harvard University Press, 1966CrossRefGoogle Scholar], et Kiewiet, Roderick D.Rivers, et D., « A Retrospective on Retrospective Voting », Eulau, dans Hans et Lewis-Beck, Michael S., dirs., Economic Conditions and Electoral Outcomes in the United States and Western Europe [New York : Agathon, 1985], 206231).Google Scholar

7 Miller, W. L., « Studying How the Economy Affects Public Attitudes and Behavior : Problems and Prospects », Clarke, dans Harold D., Stewart, Marianne et Zuk, Gary, dir., Economic Decline and Political Change: Canada, Great Britain, the United States (Pittsburgh: University of Pittsburgh Press, 1989), 151Google Scholar.

8 Hibbs, par exemple, a montré que les cols bleus sont plus sensibles à l'évolution du chômage et les retraités à l'évolution des prix (« On the Demand for Economic Outcomes » et The American Political Economy).

9 Belluci définit ainsi le vote d'appartenance: « It identifies traditional, subcultural voting. It is the affirmation of voters' subjective identification with a political force that is closely connected with the social group to which the voters belong » (« Italian Economic Voting », 71). Cette caractérisation suppose souvent l'existence d'un parti antagoniste, hostile aux intérêts du groupe comme les Républicains à l'époque du « solid South » (voir Key, V. O., Southern Politics in State and Nation [New York: Alfred A. Knopf, 1949])Google Scholar ou les Conservateurs durant plusieurs décennies au Québec.

10 Wolfinger, Raymond, « The Development and Persistence of Ethnic Voting », American Political Science Review 59 (1965), 896908CrossRefGoogle Scholar.

11 Huerta, « Economics, Latinos, and the Presidential Vote », 14.

12 Johnson, Richard, Blais, André, Brady et Jean Crête, Henry E., Letting the People Decide: Dynamics of a Canadian Election (Montréal: McGill-Queen's University Press, 1992), 81.Google Scholar

13 Dion, Léon, Nationalisme et politique au Québec (Montréal: Hurtubise HMH, 1978).Google Scholar

14 Nadeau, Richard et Blais, André, « Explaining Election Outcomes in Canada: Economy and Politics », cette Revue 26 (1993), 775790Google Scholar.

15 Beck, J. Murray, Pendulum of Power (Scarborough : Prentice-Hall, 1968).Google Scholar

16 Nous avons emprunté le découpage adopté par Johnston et al. pour identifier le troisième système partisan canadien, c'est-à-dire 1963–1980 (Letting the People Decide).

17 Le cas de l'Alberta, une province qui compte pour moins de 10 pour cent de la population canadienne, peut être difficilement invoqué pour remettre en cause la tendance dominante quant au niveau de compétitivité électorale existant dans le reste du Canada pendant la plus grande partie de cette peériode.

18 Clarke, Harold D. et Kornberg, Allan, « Public Reactions to Economic Performance and Political Support in Contemporary Liberal Democracies: The Case of Canada », Clarke, dans et al. , dir., Economic Decline and Political Change, 253282.Google Scholar

19 L'é1ection d'un Québécois à la tête du parti progressiste-conservateur en 1983 en la personne de Brian Mulroney, la très dure récession des années 1982–1983 et le rapatriement de la Constitution en 1982 sans le soutien de Québec peuvent sans doute être invoqués comme explications possibles. L'interaction entre ces événements et l'effet du remplacement générationnel, les jeunes Québécois francophones étant beaucoup moins ponés à s'identifier au Parti libéral (voir Johnston et al., Letting the People Decide, tableau 3–8, 92), fournit une autre explication.

20 Une partie de cette baisse, peut-être le tiers, est attribuable à la nouvelle formulation de la question sur 1'identification partisane adoptée à compter de 1988 (ibid.).

21 La moyenne du vote recueilli par le Parti libéral du Canada au Québec, qui est passée de 58,5 pour cent (1972–1980) à 35 pour cent après 1980 est également révélatrice de ce changement du régime partisan.

22 La période à l'étude est en fait une tranche historique limitée de ce qu'on peut identifier comme etant la grande hégémonie libérale qui a débuté au tournant du présent siècle avec l'accession au pouvoir des libéraux de Wilfrid Laurier. Notre étude ne prétend pas tirer des conclusions qui seraient valables pour l'ensemble de cette période. Toutefois, nous pensons que les elections de la plus récente partie de la domination libérale (1972–1980) sont assez représentatives des élections de la première partie du siècle, du moins lorsqu'on examine les niveaux d'appui électoral. En effet, le niveau d'appui recueilli au Québec par le Parti libéral entre 1896 et 1968 (55,6%) est très rapproché du niveau d'appui enregistré lors des demisès élections du règne libéral (1972–1980), qui fut de 58,5 pour cent. De plus, les conclusions de cette étude sur le vote économique au Canada sont compatibles avec celles d'autres études similaires émployant des stratégies de recherche différentes mais complémentaires (Richard Nadeau, « Modélisation et analyse empirique des fluctuations de court terme du comportement électoral: le cas canadien », thèse présentée a la Faculté des études supérieures en vue de l'obtention du grade de PhD en science politique, Université de Montréal, 1987). Par exemple, nos résultats quant à l'absence de vote économique pendant la période d'hégémonie libéale au Québec s'ajoutent à ceux déjà obtenus par Daniel Guérin dans son étude de la fonction de popularité au Canada (« Les déterminants économiques du vote fédéral au Québec et dans le reste du Canada de 1963 à 1993 », thèse présentée à la Faculté des études supérieures en vue de l'obtention du grade de PhD en science politique, Université de Montréal, 1996).

23 Kiewiet, Roderick D., Macroeconomics and Micropolitics (Chicago: University of Chicago Press, 1983).Google Scholar

24 Cette variable a été construite à partir des réponses des électeurs ayant voté lors de l'élection considérée. Sauf pour 1972 (où seul le sondage pré-électoral était utilisable compte tenu de notre intérêt pour les aspects économiques), la variable du vote a done été construite à partir des sondages post-électoraux.

25 La construction de la variable d'identification partisane s'est effectuée en deux étapes. Premièrement, les choix partisans à la première séquence de la question traditionnelle sur les attachements partisans ont été enregistrés. Dans un deuxième temps, les choix des électeurs ayant déclaré une préférence suite à la sous-question sur leur penchant envers l'un ou l'autre des partis ont été conservés (1 ou –1). Dans certains sondages, une catégorie « aucune, indépendant » s'ajoutait aux catégories habituelles « refus » et « ne sais pas ». Les réponses dans cette catégorie ont été classées comme « indépendant » (0). Les catégories « ne sais pas » ou « refus » ont été considérées comme manquantes.

26 Cette variable a été construite en soustrayant du score donné au chef du gouvernement (échelle de 0 à 100) le score le plus élevé accordé à l'un des divers chefs d'opposition (échelle similaire).

27 Voir note 35 pour les détails sur la construction de cette variable.

28 La catégorie manquante est done la région des Maritimes.

29 Ces variables ont été operationnalisées de la façon suivante: revenu (deux catégories : appartenance ou non au tiers supérieur); âge (deux catégories: électeurs âgés entre 18 et 54 ans et ceux entre 55 et plus).

30 Miller, W. E., « Party Identification, Realignment, and Party Voting : Back to the Basics », American Political Science Review 85 (1991), 557568CrossRefGoogle Scholar; et Clarke, Harold D. et Kornberg, Allan, « Support for the Canadian Federal Progressive Conservative Party since 1988: The Impact of Economic Evaluations and Economic Issues », cette Revue 25 (1992), 47.Google Scholar

31 McAllister, Ian, « Leaders », LeDuc, dans et al. , dir., Comparing Democracies, 280298Google Scholar.

32 II serait justifié de vouloir élargir la notion de vote économique pour y inclure les perceptions des électeurs quant à la compétence des divers partis face à une variété d'enjeux sociaux et économiques. Une telle approche a été utilisée dans certains de nos travaux antérieurs (Guérin, « Les déterminants économiques du vote fédéral »). Même si nous avons montré que ces évaluations de la performance des partis ont un effet significatif sur le comportement électoral en général, leur inclusion ne modifie en rien les tendances observées dans les modèles du vote économique présentés dans le présent article. Par souci de simplification, nous avons décidé de ne pas introduire de telles évaluations dans nos modèles de vote économique.

33 Kinder, D. et Kiewiet, R. D., « Economic Discontent and Political Behavior: The Role of Personal Grievances and Collective Economic Judgments in Congressional Voting », American Journal of Political Science 23 (1979), 495527CrossRefGoogle Scholar; Kinder, D. et Kiewiet, R. D., « Sociotropic Politics: The American Case », British Journal of Political Science 11 (1981), 129161CrossRefGoogle Scholar; et Lewis-Beck, Economics and Elections.

34 Notre variable économique complexe a été construite en combinant l'item égocentrique habituel portant sur la satisfaction face à sa situation matérielle ou bien les changements perçus dans l'état des finances personnelles et une question demandant à l'électeur de préciser la part attribuable au gouvernement dans le changement de revenu de son ménage.

35 L'indice d'évaluation de la responsabilité gouvernementale, notre variable économique complexe, est une échelle variant de –2 à +2. Le score de +2 correspond aux individus qui sont satisfaits du niveau ou de l'évolution récente de leur situation matérielle et qui estiment que les politiques gouvernementales ont joué un rôle important dans cette situation. Le score de −2 renvoit aux individus insatisfaits du niveau ou de l'évolution récente de leur situation économique et rendant le gouvernement responsable pour cet état de chose. La valeur de 0 correspond quant à elle aux individus jugeant inchangée leur situation économique et/ou n'attribuant pas au gouvernement de responsabilité particulière à cet égard. Le cas de 1972 est particulier et nous avons dû utiliser une variable de responsabilité gouvernementale quelque peu différente étant donné l'absence d'une variable similaire à ce que nous retrouvons dans les autres enquêtes. Une question demandait qui était le plus responsable (gouvernement, syndicats, patrons, etc.) pour le problème économique le plus important (inflation ou chômage). Il s'agissait done dans ce cas d'une mesure de type sociotropique contrairement aux mesures égocentriques des autres enquêtes. Les réponses ont ensuite été codées en fonction de leur tendance à imputer la responsabilité au gouvernement en place (échelle de −2 à +2).

36 Morris Fiorina, Voir, Retrospective Voting in American National Elections (New Haven: Yale University Press, 1981).Google Scholar

37 Kiewiet et Rivers, « A Retrospective on Retrospective Voting », 219.

38 Dans le cas des sondages électoraux de 1972, 1974, 1979, 1980 et 1984, cet indice a été créé en soustrayant la somme des catégories négatives « très insatisfait » et« plutôt insatisfait » des deux catégories positives « très satisfait » et« plutôt satisfait ». Dans le cas des sondages de 1988 et 1993, la question était différente puisqu'elle demandait aux répondants si leur situation était meilleure, la même ou moins bonne qu'il y a un an. Nous avons alors soustrait la catégorie « moins bonne » de la catégorie « meilleure » pour obtenir notre indice de satisfaction matérielle.

39 Cet indice a été créé en soustrayant le pourcentage de répondants dans les catégories négatives, (céest-à-dire, blâme: −2, −1) de la variable d'attribution de la responsabilité des catégories positives de la même variable (céest-à-'dire, crédit: +2, +1).

40 La régression logistique est la méthode généralement employée lorsque la variable dépendante est dichotomique (DeMaris, Alfred, Logit Modelling: Practical Applications [Newbury Park: Sage, 1992], 1).CrossRefGoogle Scholar Toutefois, nous avons opté pour la méthode des moindres carrés ordinaires étant donné sa plus grande facilité d'interprétation et compte tenu que les deux approches ont produit des résultats similaires.

41 Pour s'assurer que les différences dans la nature de l'indice utilisé en 1972 n'ont pas eu d'impact sur les résultats présentes, nous avons procédé à une analyse exclusivement à partir de cette élection. Nous avons alors observé un patron similaire à ce qui est apparu pour les données regroupées: absence de vote économique au Québec et solide vote économique dans le reste du Canada. D'ailleurs, la même conclusion est vraie pour chacune des autres élections de la période I (1974, 1979, 1980) comme l'ont démontré les analyses de Guérin (« Les déterminants économiques du vote fédéral », 415).

42 Clarke et Kornberg, « Support for the Canadian Federal Progressive Conservative Party since 1988 », 31.

43 Dion, Nationalisme et politique au Québec, 48.

44 Strong, Donald S., « Durable Republicanism in the South », Sindler, dans Allan P., dir., Change in the Contemporary South (Durham: Duke University Press, 1963), 174175.Google Scholar