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Hybridation normative et institutionnelle dans les coopératives minières. Entre pluralisme juridique et ineffectivité du droit coopératif congolais

Published online by Cambridge University Press:  14 March 2017

Christian Bahati Bahalaokwibuye*
Affiliation:
Doctorant à la Faculté de droit et de criminologie de la Vrije Universiteit Brussel Chef de travaux à l’Université Catholique de Bukavu Avocat associé au Barreau de Bukavu bahalao@gmail.com, bachrist@vub.ac.be

Abstract

This study examines the ways in which unofficial cooperative practices hamper the effectiveness of official cooperative legislation as an expression of informal norms within mining cooperatives in South Kivu, in Eastern Democratic Republic of Congo. The study is based on interviews and the observation of the practices of small-scale miners when setting up and running their mining cooperatives. The study of the normative organisation of mining cooperatives can contribute to reflection on a participative reform of public policies in order to improve governance in the mining sector in the DRC.

Résumé

Cette étude aborde les pratiques coopératives non officielles comme plombant l’effectivité du droit coopératif officiel ou une manière d’expression d’une normativité informelle au sein des coopératives minières du Sud-Kivu à l’Est de la République Démocratique du Congo. Elle se fonde sur des entretiens et une observation des pratiques des exploitants miniers artisanaux relativement à la création et à la gouvernance de leurs coopératives minières. L’étude de l’organisation normative des coopératives contribue aux réflexions sur une réforme participative des politiques publiques afin d’améliorer la gouvernance du secteur minier en RDC.

Type
Articles
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References

1 Mirindi, P., « La coopérative minière : instrument de l’ingérence étatique dans la liberté d’association des exploitants miniers artisanaux en République Démocratique du Congo? », Librairie Africaine d’Etudes Juridiques 1 (2014): 563598.CrossRefGoogle Scholar

2 Ces valeurs représentent des repères substantiels de l’identité coopérative. Elles sont énumérées à l’article 6 des statuts de l’Alliance Coopérative Internationale du 6 juin 2008 : « (…) prise en charge et responsabilité personnelles et mutuelles, démocratie, égalité, équité, solidarité ». Toutefois, leur portée normative reste limitée. Il s’agit des règles éthiques/morales qui n’ont que la portée d’un « statement … of general ideas or moral/ethic norms which are usually accepted by people who wish to co-operate as being valid, just and reasonable » : cf. H. Münkner, « Translation of New Co-op Principles to Legal Norms », Co-op Dialogue, vol. 8, no 1 (janv.-juin 1998): 6-9. La mise en pratique de ces valeurs transite par les sept (7) principes coopératifs définis dans la déclaration de l’ACI de 1995. De même, la normativité de ces principes coopératifs n’est pas clairement établie. On les considère comme des lignes directrices qui reprennent des pratiques sociales habituelles conseillées à tout groupement qui prend la forme de coopérative. Ils sont non contraignants, moins normatifs et se réduisent à des conseils pédagogiques. Cf. F. Espagne, Principes coopératifs ? Lesquels ? Histoire et lecture des principes coopératifs selon l’Alliance Coopérative Internationale, 1-28, p. 16, 23. Ces valeurs et principes consolidés constituent l’essentiel de la déclaration de l’ACI de 1995. Cette déclaration est reconnue comme un « point de repère pour l’interprétation des droits coopératifs nationaux et pourrait être traitée comme une forme de lex mercatoria ou comme lex rectius du ius commune cooperativum ». Elle se réduit à un modèle qui n’est applicable que de façon supplétive. Cf. M. Coipel, « Les avatars de la coopérative en droit belge », dans D. Hiez, Droit comparé des sociétés coopératives européennes (Bruxelles : Larcier, 2009), 125-143, p. 142. De plus en plus, les sociétés coopératives peinent à s’identifier à ces valeurs. Elles doivent désormais, comme les autres regroupements capitalistes qui recherchent le profit maximal, faire preuve d’une efficacité économique. C’est le dilemme des sociétés coopératives illustré par I. Barsan, La société coopérative européenne. Entre identité coopérative et efficacité économique (Paris : IRJS, 2016), 224-225, 239, 250.

3 Elle analyse le contenu de quarante-et-une (41) entrevues d’une durée maximale de 45 minutes pour chacune dont sept (7) en focus group [3 avec des groupes des creuseurs ordinaires, 3 avec des groupes des comités des creuseurs et 1 avec un groupe des responsables des coopératives], et 34 entrevues individuelles dont 27 avec les creuseurs, 2 avec des acteurs privés impliqués dans la thématique minière (OGP et CENADEP), 5 avec les organes de l’administration minière (CEEC, SAESSCAM, Cadastre minier, Ministère provincial des mines et Division provinciale des mines). Un guide d’entretien semi-structuré a été proposé à ces acteurs. Cinq principales thématiques ont été débattues relativement à la gouvernance des coopératives, la connaissance et l’utilisation du droit coopératif (Décret de 1956 et des principes coopératifs), à l’état des lieux des pratiques développées dans le processus de création et de fonctionnement des coopératives, à l’intérêt à continuer à se regrouper en coopératives et l’opportunité de les remplacer par les comités des creuseurs. Les données ont été récoltées en trois temps. D’abord, pendant la période du 20 mars au 9 avril 2015, nous avons procédé à des entretiens exploratoires auprès des acteurs de la société civile (CEGEMI, OGP et CENADEP). Ensuite, pendant la période du 1er juillet au 10 août 2015, nous avons conduit des entrevues, dans le territoire de Walungu (nous y avons visité 6 sites, qui ont été anonymisés et remplacés par les lettres « A », « B », « C », « D », « E » et « F » par respect pour la confidentialité de nos répondants). Enfin, dans la période comprise entre le 15 avril et le 25 juin 2016, dans le cadre de nos recherches doctorales, nous avons complété certaines des données recueillies au cours des deux périodes précédentes, principalement auprès des acteurs privés et de l’administration minière basés à Bukavu.

4 Y. Leroy, « La notion d’effectivité du droit », Droit et société, 3/2011, no 79, 715-732, p. 726. Aussi, J.-G. Belley, Le contrat entre droit, économie et société (Cowansville : Yvon Blais, 1998), 246.

5 Selon F. Ost et M. van de Kerchove, De la pyramide au réseau ? Pour une théorie dialectique du droit (Bruxelles : Publications FUSL, 2002), 329 : la notion de l’effectivité s’entend « de la capacité de la règle à orienter le comportement de ses destinataires dans le sens souhaité par le législateur ». Aussi, L. Heuschling, « « Effectivité », « efficacité », « efficience » et « qualité d’une norme/du droit. Analyse des mots et des concepts », dans M. Stefanini et al., L’efficacité de la norme juridique (Bruxelles : Bruylant, 2012), 27–59.

6 Le pluralisme juridique évoque l’état caractéristique d’un environnement juridique dans lequel coexiste une multiplicité d’ordres normatifs autonomes susceptibles de revendiquer la qualification de « juridiques » et de s’appliquer simultanément au comportement d’un individu. Voir J. Vanderlinden, « A propos des effectivités et des pluralismes juridiques dans le contexte des droits économiques », dans L. Boy et al. (dir.), Le pluralisme juridique et effectivité du droit économique (Bruxelles : Larcier, 2011), 39-73, p. 41. J. Vanderlinden, « Vers une conception nouvelle du pluralisme juridique », Revue de la Recherche juridiqueDroit prospectif (1993): 573-583. Le pluralisme juridique conçoit l’individu non plus uniquement comme un sujet passif sur lequel le droit agit mais également comme un sujet actif qui confectionne le droit qui lui est applicable. Il s’agit d’une insertion « de l’individu (…) dans de multiples ordres juridiques à l’élaboration, au développement et à la mise en œuvre desquels il participe dans des mesures et à des titres divers ». Voir J. Vanderlinden, « L’utopie pluraliste, solution de demain au problème de certaines minorités ? », dans L’utopie pluraliste, solution de demain au problème de certaines minorités ? Minorités et organisation de l’État (Bruxelles : Bruylant, 1998), 665-675, p. 667. Aussi, C. Younes, op. cit., p. 44. Sur cette reconsidération des individus comme sujets façonnant le droit qui doit leur être appliqué, voir J.-G. Belley, « Le pluralisme comme orthodoxie de la science du droit », op. cit., 271-275. Le terme « individus » désigne des sous-systèmes sociaux organisés qui produisent des pratiques systématisées excluant ainsi des normativités spontanées issues des comportements isolés de chaque individu. Cf. ibidem. Dans le même sens, J. Vanderlinden « Production pluraliste du droit et reconstruction de l’État africain? », Afrique contemporaine, 199 (2001): 86-97, p. 90.

7 Le pluralisme permet une légitimité, voire une effectivité, de la norme en ce sens qu’en plaçant l’individu au centre de la production normative, ce dernier y adhère parce qu’il en connaît les conséquences. En l’espèce, une élaboration et une application plurale du droit coopératif peut permettre de rendre le droit coopératif effectif dans les coopératives minières. En ce sens, J. Vanderlinden, « A propos des effectivités et des pluralismes juridiques dans le contexte des droits économiques », op. cit., p. 71. Mais, ce lien entre pluralisme juridique et effectivité reste tout de même relatif suivant la relation entre les ordres normatifs en présence. Voir F. Ost et al., « Le pluralisme, facteur d’effectivité ou d’ineffectivité du droit ? », dans L. Boy et al. (dir.), op. cit., 13-38, p. 18, lire aussi p. 33.

8 Berman, P., « Le nouveau pluralisme juridique », Revue Internationale de Droit Économique (2013): 229256.CrossRefGoogle Scholar

9 Code minier, articles 26 et 109.

10 de Brier, G., et al., « La chaîne d’approvisionnement des minerais et ses liens avec le conflit dans l’est de la RDC : bilan des 5 dernières années », dans Marysse, S. et al., op. cit. (2015): 87-112, p. 94.Google Scholar

11 L. de Brouckere, Mines industrielles et communautés locales, ABA ROLI (2016): 4.

12 Suivant les chiffres récents consolidés de l’IPIS (International Peace Institute Service), dans les seules provinces de l’Est et du Katanga on retrouve plus ou moins de 1667 sites miniers sur lesquels travaillent plus ou moins 432 582 creuseurs. Cf. G. de Brier et al., op. cit., 92-94.

13 Geenen, S., African Artisanal Mining from the Inside Out. Access, norms and power in Congo’s gold sector (New-York : Routledge, 2016), 1112.Google Scholar

14 M. Mazalto, « La réforme des législations minières en Afrique et le rôle des institutions financières internationales : la République Démocratique du Congo », Afrique des Grands Lacs. Annuaire 2004-2005, 7-31, p. 13-18.

15 Arrêté ministériel n°0706/CAB.MIN/MINES/01/2010 du 20 septembre 2010 portant mesures urgentes d’encadrement de la décision de suspension des activités minières dans les provinces du Maniema, Nord-Kivu et Sud-Kivu, article 2 al. 1 (a).

16 Ministère des Mines, La vision du Ministère des Mines pour la période 2010-2015, 2010, p. 2.

17 Articles 109 al. 4 et 6, Loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant Code minier, JORDC numéro spécial du 15 juillet 2002.

18 Décret n° 038/2003 du 26 mars 2003 portant Règlement minier, JORDC, numéro Spécial du 1er avril 2003.

19 Arrêté ministériel n°0706/CAB.MIN/MINES/01/2010 op. cit., Art. 2 al. 1 (a) et (b).

20 Ces coopératives sont soumises à la Loi n°002/2002 du 2 février 2002 relative aux coopératives d’épargne et de crédit, JORDC numéro spécial mai 2002.

21 Journal officiel de l’OHADA, n° 23, 15 février 2011. Dans la pratique, les acteurs du secteur minier artisanal ne sont pas au courant de cet AUSCOOP. De même, le processus de création et d’agrément des coopératives auprès des services étatiques se déroule conformément à la législation de 1956.

22 S. Geenen, « Evident but elusive. Practical norms in the Congolese gold sector », dans T. de Herdt et al., Real Governance and Practical Norms in Sub-Saharan Africa. The Game of Rules (New York : Routledge, 2015), 228-244, p. 229.

23 Il se pose ainsi la nécessité d’adapter ce droit aux pratiques locales. En ce sens O. Ballal, Les usages et le droit OHADA (Marseille : PUAM, 2014), 219 et ss., lire aussi p. 234.

24 Cf. P. Amselek, Méthode phénoménologique et théorie du droit (Paris : LGDJ, 1964), 257. Par ailleurs, nous utilisons ici indistinctement les termes usages et pratiques comme des « comportements identiques répétés dans un secteur d’activité ». cf. P. Mousseron, « Introduction terminologique : des comportements aux « bonnes pratiques », Journal des sociétés (2011), « Dossier sur les usages professionnels », p. 12.

25 P. Lascoumes et al., « Théories et pratiques de l’effectivité du droit », Droit et société, n° 2 (1986) : 101-124, p. 101.

26 Y. Leroy, op. cit., p. 725.

27 Nous suivons en partie un des volets de l’approche de l’effectivité développée par Guy Rocher, « L’effectivité du droit », dans A. Lajoie, et al. (dir.), Théories et émergence du droit : pluralisme, surdétermination et effectivité (Montréal : Thémis, Bruxelles : Bruylant, 1998), 136.

28 AUSCOOP, article 6.

29 Article 6.

30 Déclaration ACI.

31 AUSCOOP, article 99.

32 AUSCOOP, article 102.

33 Entretien avec le chef de site membre d’une coopérative sur le Site « D », 18 juillet 2015.

34 Sauf une coopérative basée à Kaziba, où le quorum est de 60 personnes sur les 137 qu’elle compte. Mais à la suite de la rareté des creuseurs dans ses sites, la réunion peut se tenir même lorsque 40 personnes sont présentes, cf. entretien avec le président de cette coopérative, Bukavu, juillet 2015.

35 Constat partagé par les 7 responsables réunis lors de notre entretien en focus group sur le Site « B », juillet 2015.

36 Ibidem.

37 Entretien avec les membres du comité de creuseurs sur le Site « A », juillet 2015.

38 I. Barsan, op. cit., p. 245.

39 Idem, p. 246. Voir aussi, E. Moho, « Les membres de la société coopérative en droit OHADA », Penant 895 (avril-juin 2016) : 229-250.

40 AUSCOOP, art. 110 et 120.

41 Une coopérative compte plus de 1000 (mille) creuseurs. Lors d’un entretien avec son chef d’exploitation, il nous a renseigné que plus de 800 cartes de membres de la coopératives ont déjà été vendues. Cf. entretien du 17 juillet 2015.

42 Entretien avec un PDG du Site « F », 16 juillet 2015.

43 Entretien avec le président d’une coopérative, 9 juillet 2015.

44 Entretien avec le président d’une autre coopérative, le 6 juillet 2015.

45 J. de Haan et al., « Mining cooperatives in Eastern DRC. The interplay between historical power relations and formal institutions », Extractive Industries and Society doi:10.1016/j.exis.2016.05.003.

46 A. Bashizi et al., « Les limites d’une ‘gouvernance par le bas’ : les logiques des coopératives minières à Kalimbi, Sud-Kivu », dans S. Marysse et al. (dir), op. cit., 239-260, p. 252.

47 Code minier, article 1(33) et article 116.

48 Entretiens avec les creuseurs du Site « A » et du Site « F », juillet 2015.

49 Dans d’autres sites du Sud-Kivu, on trouve deux explications majeures. D’un côté, la baisse du prix s’explique par la mauvaise qualité des minerais liée à l’absence des unités de traitement près des puits d’extraction. Cf. K. Matthysen, et al., « Initiatives en matière de ‘minerais de conflit’ en RD Congo : perceptions des communautés minières locales », IPIS (2013) : 19. D’un autre côté, on y vit également un monopsone du fait de la présence d’un seul acheteur, les comptoirs d’achats agréés, reconnu par la traçabilité. cf. G. de Brier et al., op. cit., p. 89. Également A. Bashizi et al., « ‘Modernisation’ du secteur minier artisanal versus hybridation de la réforme au Sud-Kivu », Afrique des Grands Lacs, Annuaire 2014-2015, 219-244, p. 239.

50 Art. 10 de la loi du 25 août 2015 fixant le statut des chefs coutumiers. Et même sur ces terres, les conflictualités subsistent dans les relations de pouvoir entre ces chefs coutumiers, l’administration foncière et les communautés locales.

51 Art. 74 et 84 de la Loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des Entités Territoriales Décentralisées et leurs rapports avec l’État et les Provinces.

52 Cf. art. 113. Elle ne peut bénéficier que de la part de 40 % à titre de rétrocession sur les recettes à caractère commun perçues sur l’autorisation de minage ou de transformation des produits d’EMA. Cf. art. 4 et 6 de l’Ordonnance-Loi n° 13/001 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances des provinces et des entités territoriales décentralisées ainsi que leurs modalités de répartition.

53 Voir annexe à l’Ordonnance-Loi n° 13/001, point D. 2.4.

54 Cette collaboration s’aperçoit dans certains « gestes administratifs » en faveur d’une coopérative appartenant à l’épouse du Mwami. On note au passage la dissolution d’une coopérative qui la précéda sur le Site « D » considéré comme « Bushinga bwa Mwami » [la propriété privée du chef coutumier] ou encore une autre coopérative qui avait été chassée de cette Colline en vue de voir ses creuseurs rejoindre les effectifs de la « coopérative du Mwami ». cf. Entretien avec trois chefs d’équipe membres de cette coopérative sur le Site « D », 18 juillet 2015.

55 Cf. S. Mugangu, « La crise foncière à l’est de la RDC », L’Afrique des grands lacs. Annuaire 2007-2008, 385-414, p. 386.

56 Propos recueillis auprès d’un membre de l’ONG OGP, 7 juillet 2015.

57 Entretien avec l’ancien président du Conseil d’administration de cette coopérative, 15 juillet 2015.

58 Cf. notre entretien avec les chefs d’équipe du Site « A », 13 juillet 2015.

59 Il se tient chaque mardi sur le Site « A » et chaque vendredi sur le Site « D », une réunion regroupant tous les creuseurs au sein du comité de creuseurs.

60 Suivant I. Barsan, op. cit., p. 269, l’ESS « correspond à un ensemble d’organisations au service de l’homme, composées des membres égaux en droits et devoirs, gérées démocratiquement, dont les gains éventuels sont distribués de manière particulière et les excédents affectés à leur croissance et à l’amélioration du service rendu à leurs membres et/ou de la [communauté] ». Sous ce concept on regroupe « les coopératives, mutuelles, associations, [fondations] ainsi que toutes les autres initiatives solidaires qui, dans les pays africains surtout, n’ont pas un statut ou un label explicitement coopératif, mutualiste ou associatif, mais se réfèrent à peu près aux mêmes règles et pratiques ». Cf. J. Defourny et P. Develtere, « Origines et contours de l’économie sociale au Nord et au Sud », dans J. Defourny, P. Develtere, B. Fonteneau, L’économie sociale au Nord et au Sud (Bruxelles : de Boeck, 1999), 26.

61 P. Berman, op. cit., p. 247.

62 Entretien avec les membres du comité des creuseurs du Site « C ».

63 Entretien avec un membre de l’ONG OGP, Sud-Kivu, le 7 Juillet 2015.

64 Boltanski, L. et al., De la justification. Les économies de la grandeur (Paris : Gallimard, 1991), 249 et ss.Google Scholar

65 Entretien avec un creuseur sur le Site « F », 16 juillet 2015.

66 Ces cotisations servent, par exemple, à faire soigner les creuseurs en cas d’accident. Néanmoins, une seule coopérative affirme avoir pourvu aux soins médicaux des trois creuseurs lors d’un éboulement sur le Site « F » le 13 janvier 2015. Cf. entretien avec les PDG du Site « F », 16 juillet 2015.

67 Il s’agit du comité de creuseurs du Site « F ». Cependant, le creuseur faisant fonction du président du comité est respecté par ses pairs en raison de l’assistance qu’il porte aux autres creuseurs dans les techniques de minage, de son aptitude à les concilier en cas de problèmes qui leur permet de renforcer leurs rapports sociaux ainsi que de sa capacité à parler le français et l’anglais, ce qui lui permet de plaider leur cause auprès de la coopérative et de SAESSCAM.

68 Entretien avec les membres du comité des creuseurs du Site « A », 11 juillet 2015.

69 Entretien avec les creuseurs membres d’une coopérative sur le Site « D », 18 juillet 2015.

70 Opinion d’un membre d’une ONG, Sud-Kivu, le 7 juillet 2015.

71 On les comparerait pour cela, par exemple, aux groupements d’essence locale dénommés « groupes d’initiative commune » au Cameroun. Cf. la loi n° 92/006 du 14 août 1992 relative aux sociétés coopératives et aux groupes d’initiative commune. Ou encore ce qu’il convient d’appeler « groupements » dans la loi Burkinabé n° 014/99/AN du 15 avril 1999 portant réglementation des sociétés coopératives et groupements. Lire à ce sujet, W. Tadjudje, « Tentatives de définition de l’Economie Sociale et Solidaire : quelle place occupent les organisations traditionnelles en Afrique? », dans Elaborer un corpus théorique de l’Economie Sociale et Solidaire pour un autre modèle de société, Les Xièmes rencontres du Réseau Inter-Universitaire de l’Economie Sociale et Solidaire (RIUESS), 2 au 4 juin 2010, p. 9.

72 Entretien avec le président du comité de creuseurs du Site « C », 17 juillet 2015.

73 Entretien avec un creuseur sur le Site « C », 17 juillet 2015.

74 Entretien avec un chef de puits du Site « D », 18 juillet 2015.

75 Du moins pour le cas des creuseurs de l’épouse du Mwami.

76 Il en est ainsi d’une coopérative dont les responsables s’y expriment de manière incisive. Cf. Entretiens collectifs avec les responsables des coopératives sur le Site « B », 15 juillet 2015.

77 Entretien avec le chef de site et président du comité des creuseurs du Site « D », 18 juillet 2015.

78 Voir le conflit entre les trois coopératives qui déployaient leurs activités sur le Site « D ». Leur comité des creuseurs est installé depuis plus de sept ans.

79 Levit, J.-K., « A Bottom-Up Approach to International Law Making: the Tale of Three Trade Finance Instruments », Yale International Law Review 30.1 (2005): 125-209, p. 184.Google Scholar

80 Voir la structure administrative des comités du Site « C » et du Site « D ».

81 Les creuseurs, membres de l’une ou de l’autre des deux coopératives qui œuvrent sur le Site « E », nous ont révélé leur affiliation au comité des creuseurs du Site « C » et affirment avoir participé au vote du président. Cf. entretien du 17 juillet 2015.

82 Entretien avec deux chefs d’équipe du Site « F », 16 juillet 2015.

83 Cf. T. Delpeuch, « La coopération internationale au prisme du courant de recherche « droit et développement » », Droit et société 62 (2006): 119-175, p. 124, 144-145. Cet auteur explique qu’auparavant, vers le début des années 1960, le mouvement « droit et développement » considérait plus le caractère culturel et coutumier des règles informelles qui avaient cours dans les territoires des États fraîchement décolonisés. Ce mouvement promouvait des réformes juridiques et judiciaires dans ces pays par l’entremise de transferts des modèles juridiques importés des États-Unis. Ainsi, l’effectivité du droit formel devrait passer par la transformation de la culture juridique locale. Actuellement, on assiste à un changement de paradigme qui consiste à lutter contre la vulnérabilité juridique des petits acteurs économiques en soumettant le traitement de leurs problèmes sociaux à un soft law sécrété localement.

84 B.-Z. Tamanaha, « A Non-Essentialist Version of Legal Pluralism », Journal of Law and Society 27.2 (2000): 296-321, p. 313-314 : en paraphrase de « what many people would think should qualify as law ». Lire aussi « Law is whatever people identify and there through their social practices as ‘law’ (or recht, or droit, and so on) ».

85 J.-G. Belley, « Le pluralisme comme orthodoxie de la science du droit », op. cit., 276. Par ailleurs, des organisations de divers autres ordres à l’instar « des groupes ethniques transnationaux ou subnationaux, les institutions religieuses, les organisations du commerce, les syndicats, les groupes de discussion sur Internet, [etc.] produisant des normes sont susceptibles, à différents moments, d’exercer un pouvoir immense sur nos actions même si elles ne font pas partie d’un système officiel fondé sur l’État ». Voir, P. Berman, « Le nouveau pluralisme juridique », op. cit., 232.

86 L. Ingber, « Le pluralisme juridique dans l’œuvre des philosophes du droit », dans E. J. Gilissen, op. cit., 57-88, p. 83.

87 World Bank, World Development Report 2002: Building Institutions or Markets (New York : Oxford University Press, 2002).Google ScholarPubMed

88 M. Weber, Max Weber on Law in Economy and Society (Cambridge, MA : Harvard University Press, 1954). Aussi, T. de Herdt, « Hybrid orders and practical norms. A Weberian view », dans T. de Herdt et al., 95-119.

89 S. Macaulay, « Non-Contractual Relations in Business: A Preliminary Study », American Sociological Review 28 (1963): 55-67.

90 P. Berman, op. cit., 248.

91 J. Paquin, « Contrats et internormativité, de Saguenay à Dakar », Revue Canadienne Droit et Société 26(2), (2011): 329-351, p. 331.

92 C. Moore Dickerson, « Informal sector entrepreneurs, development and formal law: a function understanding of business law », American Journal of Comparative Law 59 (2011): 179-226, p. 205 : « Coordination, of course, has this effect directly by creating political power that gives the most vulnerable actors access to better government provided structures, but, important to the informal sector, also by increasing support for existing norms ». Voir également A. Cisse, « L’harmonisation du droit des affaires en Afrique : L’expérience de l’OHADA à l’épreuve de sa première décennie », Revue internationale de droit économique 2004/2 (t. XVIII, 2): 197-225.

93 S. Geenen, « Evident but not elusive… », op. cit.

94 J. Paquin, op. cit., 332, 334 : « les ordres normatifs non étatiques ne sont plus tant une forme d’opposition ou de résistance au droit de l’Etat que des solutions de rechange aux tribunaux dont la popularité dépend de l’efficacité relative de chacune des options disponibles ».

95 J. Vanderlinden, op. cit., p. 91.

96 J.-G. Belley, « Le pluralisme juridique comme orthodoxie de la science du droit », op. cit., 272. Il définit ce concept comme des faits dépourvus de pertinence juridique, c’est-à-dire le lot des actions et des représentations sociales qui entretiennent une relation dialectique d’antinomie avec le régime de droit dominant.

97 J.-G. Belley, op. cit., p. 243.

98 Idem, p. 204.

99 F. Ost et al., Le pluralisme, facteur d’effectivité ou d’ineffectivité du droit, op. cit., p. 33. Également, F. Ost et al., De la pyramide au réseau ? op. cit., 43 et ss.

100 J. Carbonnier, « Les hypothèses fondamentales de la sociologie juridique théorique », dans Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, 6e éd., (Paris : LGDJ, 1988), 5-19, p. 18.

101 E. Bernheim, « De l’existence d’une norme de l’anormal. Portée et valeur de la recherche empirique au regard du droit vivant : une contribution à la sociologie du droit », Cahiers de Droit 52(2011): 461-496, p 483.

102 Idem, p. 461.

103 J. Vanderlinden, « A propos des effectivités… », op. cit., 72.

104 Bureau international du travail, Promotion des coopératives, Rapport V (1), 89 e session, juin 2001, 83 et ss.

105 Ibidem.

106 I. Utshudi, op. cit., 289.

107 Suivant nos enquêtes, la Coomiki (la Coopérative minière de Kimbi), qui avait été créée en marge de l’association des Propriétaires des Puits d’Or (P.P.O).

108 A. Bashizi et al., op. cit., 251.

109 Contra l’article 67 de la loi de 2008 sur les ETD, la chefferie de Ngweshe par exemple n’est pas homogène et regorge de tribus diverses de coutume shi, lega …qui n’ont pas un fonds culturel et coutumier homogène.

110 Constitution, op. cit., art. 202 § 36(f).

111 Idem, art. 203 §16. Voir aussi l’art. 36§7 de la loi n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces.

112 Cf. Code minier, art. 1§14. Les seuls droits miniers sont : le permis de recherches, le permis d’exploitation, le permis d’exploitation des rejets et le permis d’exploitation de petite mine.

113 Ils devraient s’appuyer sur les deux Comités de pilotage de l’action coopérative et associative en RDC et qui ont pour vocation de regrouper les différentes personnes intervenant dans le secteur coopératif. Cf. Arrêté interministériel n° 008/CAB/MINI/DER/PL/FIN/2005 du 6 mai 2005 portant création du comité exécutif bipartite indépendant du développement coopératif et associatif en République démocratique du Congo. Aussi, l’Arrêté interministériel n° 009/CAB/MINI/DER/PL/FIN/2005 du 6 mai 2005 portant création du comité de pilotage de l’action coopérative et associative en République démocratique du Congo. Dans le secteur agricole, le Décret-loi du 18 janvier 1965 institue l’office national des coopératives agricoles qui sert d’appui à la définition de la politique ainsi que de la promotion de ce secteur. Toutefois, ces différents Comités et conseils restent encore non opérationnels en RDC. Leur redynamisation permettrait d’imprégner les politiques ainsi que les normes sectorielles des réalités locales.

114 Patarin, J., Le problème de l’équivalence juridique des résultats (Paris : Dalloz, 1954), 26.Google Scholar

115 M. Demoulin, Droit du commerce électronique et équivalents fonctionnels. Théorie critique (Bruxelles : Larcier, 2014), n° 475, p. 370.

116 P. Dima, « Libres propos sur la validité juridique plurielle (empirique, axiologique, formelle) du droit de l’OHADA », Communication au Colloque sur l’effectivité du droit économique dans l’espace OHADA, Université du Luxembourg, 20-21 novembre 2014.

117 F. Ost et al., De la pyramide au réseau ? op. cit., 43 et ss. Voir aussi F. Ost et al., Le pluralisme, op. cit., 30, 33.