La première définition chronologique de la période appelée moyen âge se trouve dans un ouvrage de la fin du XVIIe siècle, l’Historia Universalis de Relier. « Accomodatius ergo facturi videamur », suggère en effet cet auteur, « si antiquam ad Gonstantinum Magnum, medii aevi historiam ad Constantinopolis expugnationem, novam denique ad nostra tempora deducamus ». Le mot « renaissance » allait être forgé par Michelet, qui dédia à la période qu'il venait aussi de créer l'un des chapitres les plus étincelants de génie de son Histoire de France : ce dix-neuvième chapitre qui sert de toile de fond à la fameuse esquisse de Rabelais, personnage représentatif de toute une époque.

Les passages transalpins ont de tout temps attiré les courants d'échanges et les rivalités n'ont jamais manqué pour s'assurer leur contrôle. Mais l'histoire ne se reproduit jamais sous les mêmes formes. Il serait maladroit, sans nul doute, d'assimiler les batailles anciennes pour les cols et les routes alpestres aux combats complexes des groupes bancaires internationaux pour les réseaux ferrés helvétiques et leurs tunnels. Si l'obstacle naturel, le mur alpin, est toujours identique à lui-même, le conditionnement général, économique et politique, est tout autre : moyens et forces en présence, intérêts, formes des luttes, rien ne peut supporter la comparaison.

Dans la quatrième partie de son remarquable exposé relatif aux développements de la piété populaire à la fin du moyen âge, M. l'abbé Delaruelle a consacré un paragraphe au problème de l'art. Qu'il soit remercié d'avoir ainsi souligné la valeur pour l'histoire du témoignage figuratif. Mais qu'il soit permis également à un historien de l'art de regretter, chez les historiens tout court, un certain manque de connaissances, parfois un peu gênant, dans son domaine propre.

Est-il possible de brièvement commenter l'article de M. TREVOR-ROPER, La Révolution anglaise de Cromwell, qui a paru dans le fascicule juillet-septembre 1955 des Annales? M. Trevor-Roper vient de s'assurer à juste titre une grande réputation en Angleterre comme critique destructeur, lui qui a accompli la tâche remarquable de remettre en question quelques interprétations généralement admises ; mais ce serait être au-dessous de la vérité de dire que sa propre thèse n'a pas gagné l'approbation universelle.

L'étude très documentée de M. R. Tresse sur le développement de la fabrication des faux en France de 1785 à 1827 apporte certainement des données solides sur les progrès techniques de l'industrie française des faux. Mais, comme l'affirme M. P. Leuilliot dans sa judicieuse note, l'article « doit provoquer quelques échos, tant il soulève de questions à résoudre ». Nous voudrions, dès maintenant, présenter quelques remarques et apporter des documents sur la dernière partie de l'étude, concernant les conséquences sur la pratique des moissons ; nous ne partageons pas les opinions de l'auteur sur les emplois de la faux dans les campagnes françaises durant la première moitié du XIXe siècle.

Dans la collection Économies-Sociétés-Civilisations vient de paraître chez Armand Colin, par les soins de Robert Dauvergne, l'indispensable complément du livre classique de Marc Bloch, Les Caractères originaux de l'histoire rurale française, qui, je le rappelle, a été réédité dans la même collection il y a quatre ans (1952). Il s'agit d'un recueil des travaux de Marc Bloch postérieurs à 1931, c'est-à-dire à l'édition princeps de son livre. Le dépouillement ne s'arrête naturellement quven 1944, date de la mort tragique de notre ami. Complément indispensable, oui, et qui vaut à la fois pour l'édition de 1930 et pour celle de 1952, puisque celle-ci comporte exactement la même pagination que l'édition de 1930.

Il semble bien qu'on ait exagéré la misère des curés de campagne à la fin du XVIIIe siècle. M. l'abbé CH. Girault a utilisé une triple série de documents : les déclarations fiscales des curés en 1790-1791, les évaluations administratives en vue de leurs traitements aux mêmes dates, enfin et surtout les ventes de biens ecclésiastiques. L'expression portion congrue a été détournée de sa primitive signification, ayant le sens de convenable, suffisant ; elle a pris (et gardé) une valeur par trop péjorative. Le domaine, la dîme donnaient, en effet, à la plupart des curés figure de bourgeois et de fermiers, de notables en somme. Par suite, « un presbytère d'ancien régime a l'allure d'une ferme ».

Assez nombreux sont les livres et articles qui attestent une curiosité utile concernant le commerce français sous l'Ancien régime, et plus particulièrement au XVIIIe siècle. Signalons tout d'abord un travail d'ensemble sur Sète que son auteur, notre collaborateur Louis Dermigny, considère modestement comme une esquisse ; dédié à la mémoire du professeur L.-J. Thomas, son travail très solide, réagit, comme l'avait indiqué déjà ce dernier, contre l'opinion que Montpellier à partir de la création du port de Sète en 1666 n'est plus une « ville marchande ».

Trois livres viennent de paraître sur le drame que la France a vécu entre 1940 et 1944 ; l'un met au net un dossier, celui du procès Pétain. Les deux autres, publiés, le premier en France, le second aux États-Unis, se présentent comme des synthèses. Il est incontestable que la publication à peu près simultanée de ces trois ouvrages fait date. Ils marquent un changement d'époque : de la saison des juges au temps de l'historien? Certes, trop de dépositions et de plaidoyers ont, à dessein, embrouillé les faits pour que ne soit pas nécessaire un immense travail critique, qui est loin de trouver ici son achèvement.