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A l'Université de Pavie au xve siècle : les salaires des professeurs

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Dante Zanetti*
Affiliation:
Université de Turin

Extract

Les recherches faites dans le domaine de l'histoire des salaires ont toujours envisagé, d'une façon générale, la rétribution des travailleurs manuels ; celles qui concernent spécialement l'histoire des rémunérations accordées au travail intellectuel ont, jusqu'ici, produit peu de résultats, en raison de la pauvreté des données publiées. Cette situation nous a convaincu de l'opportunité de constituer une documentation suffisamment homogène et riche. Nous avons choisi, pour centre de notre enquête, une des plus anciennes et des plus importantes universités de l'Italie, où la documentation conservée permet de connaître avec assez de précision l'organisation pédagogique et administrative. L'époque que nous examinons va de 1387 à 1499.

Type
Études
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 1962

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References

1. A propos des rétributions des professeurs des Universités au xiiie siècle, voir Post, G., « Master's salaries and Student-fees in the médiéval universities », dans Spéculum, Cambridge (Massachussetts), 1932, pages 181-198.Google Scholar Cependant le problème traité dans cet ouvrage n'est pas de savoir combienles professeurs d'université gagnaient, mais siet par quiils étaient payés. Chacun sait que, notamment pour l'enseignement de la Théologie, au début de la carrière universitaire, on ne reconnaissait aux professeurs aucune rétribution en dehors des bénéfices auxquels ils avaient droit en qualité d'ecclésiastiques. Cela était dû, d'une part à la politique pontificale qui cherchait ainsi à monopoliser l'enseignement entre les mains du clergé, et, d'autre part, à la position de certains esprits traditionnalistes qui prétendaient que «la science ne devait pas être vendue ». Voir G. POST, K. GIOCARINIS, R. KAV, « The médiéval héritage of a Humanistic Idéal : « Scientia donum Dei est, unde vendi non potest », dans TradUio,II (1955), p. 196-284. Les premières rétributions apparurent sous forme de droits que les étudiants payaient au professeur ; ensuite la rémunération vint des communautés ou des princes qui avaient fondé l'université. En ce cas aussi, la rétribution hésita longtemps entre la forme d'un bénéficeet celle d'un salaireproprement dit. Voir J. L E GOFF, Les intellectuels au Moyen Age,Paris, 1957, pages 104-108 ; et « Dépenses universitaires à Padoue au xve siècle » dans Mélanges d'Archéologie et d'Histoire,LXVIII (1956), p. 377-395. Pour Louvain, à la même époque, voir Paquet, J., Salaires et prébendes des professeurs de l'Université de Louvain au XV siècle, Léopoldville, 1958.Google Scholar

1. Voir ci-après, page 427-428.

2. Mariani, M., La vie universitaire à Pavie au XVe siècle, Pavie, 1899, page 27 Google Scholar et suivantes. E n contrepartie des nombreux et considérables privilèges dont ils bénéficiaient, les professeurs d'Université étaient soumis à une discipline rigoureuse qui leur imposait de sévères obligations. Voir, à ce sujet, le même ouvrage de M. Mariani, aux pages 25 et suivantes, et celui de Vaccabi, M., Histoire de l'Université de Pavie, Pavie, 1957, page 33 et suivantes.Google Scholar

3. M. Mariani, ouvrage cité, pages 60-68.

4. La licentia ad gradus était la première reconnaissance accordée aux études faites et donnait le droit d'enseigner des matières secondaires ou complémentaires. Le titre de docteur était acquis avec la « laurea ».

1. Majocchi, R., Code diplomatique de l'Université de Pavie, Pavie, 1905, II , p. 281.Google Scholar

2. Par exemple, pendant l'année scolaire 1426-27, Turberto Torti, professeur ordinaire de Droit civil, toucha un salaire de 850 florins, tandis que son collègue Pietro Besozzi, chargé de l'enseignement extraordinaire de la même matière, reçut 500 florins. Voir Code diplomatique, II p. 230.

3. M. Mariani, ouvrage cité, p. 20.

4. Pour la période 1387-1449, les rôles sont transcrits dans Majocchi, Code diplomatique, cité, I et I I ; pour la période 1453-1499, dans le manuscrit du même auteur, conservé au Musée de la ville de Pavie. L'auteur les a tirés des originaux qui sont conservés — pour la plupart — dans les Archives du Rectorat de l'Université de Pavie, quelques-uns dans la Bibliothèque de l'Université, d'autres dans les Archives d'Etat de Milan ou bien dans d'autres recueils. Le rôle de l'année 1463, qui manque dans Majocchi, a été publié par M. Formentini, Le Duché de Milan, 1877, p. 631-634. On a retrouvé aussi des lettres ducales qui, en cours d'année, modifiaient le salaire d'un professeur déjà inscrit sur le rôle, ou bien ajoutaient de nouveaux professeurs ; en rassemblant ces données, nous avons tenu compte des variations

1. Cipolla, C. M., Etudes d'histoire de la monnaie, Pavie, 1948, I, p. 84.Google Scholar

2. Code diplomatique, I, p. 98 et suivantes. 8. Code diplomatique, I, p. 140 : « … et licet obstet ordo magnificentie vestre quod civibus pro primo anno legentibus solum dentur flor. 80 pro eorum salario, tamen iste ordo non fuit observatus sed pluries contra ipsum ordinem per vestram magnificentiam fuit dispensatum… »

1. Code diplomatique, I, p. 131-182.

2. Code diplomatique, II, p. 509 et 425

1. P. Vaccari, Ouot. cit., p. 47 et suivantes. La peste réapparut ensuite à plusieurs reprises tout au long du xve siècle (voir A. Cohbadi, Annales des épidémies sunenues en Italie depuis les premiers mémoires jusqu'à Van 1850, première partie, Bologne, 1865). La contagion faisait naÎtre la crainte d'un nouveau transfert du « Studium » dans une autre ville ; aussi en 1423, en 1451 et en 1476, les autorités de la ville adressèrent aux Ducs des lettres pleines d'inquiétude, le suppliant d'éviter à Pavie la perte du « Studiura » (voir Majocchi, Code diplomatique, II, p. 203 et Majocchi, manuscrit cité, p. 435 et 440-443).

2. « Unde mortuo nullus repertus thésaurus est ». Voir Chronica Bossiana, Milan, Zaroto, 1492 sub 1402.

3. A. Fanfani, « Les premières difficultés financières de Jean-Marie Visconti », dans Rivista Storica Italiana, série V, volume IV, fascicule I, p. 99-104 ; voir aussi Valeri, « L'état des Visconti à la mort de Gian Galeazzo », dans Nuova Bixrista Storica, 1985, p. 464 et suivantes. Pour sortir le trésor public de ces difficultés, le jeune duc fut obligé, entre autres mesures, de vendre une partie de sa propre fortune (voir Santoro, , Le registre de Giovannolo Besozzi, chancelier de Jean-Marie Visconti, Milan, 1937 Google Scholar).).

1. Code diplomatique, II, p. 33.

2. Code diplomatique, II, p. 41.

3. Code diplomatique, II, p. 77.

4. Code diplomatique, II, p. 104 : « … fuit nobis expediens cassare, et cassamus, nonnullos ex salariâtes ipsius nostri Communis, et nonnullos reduximus et alios quosdam in statu suo pristino dimisimus. »

5. Code diplomatique, I, p. 297 : « Pro meliori statu meliorique profectu et augmenta nostri Studii. »

1. Code diplomatique, II, p. 288.

2. Remarquons aussi qu'en 1448, plusieurs matières étaient enseignées par trois, quatre, cinq et même six professeurs en même temps, alors qu'en 1449 le nombre de professeurs pour chaque matière ne dépasse jamais deux. A côté des noms des professeurs qui avaient évité le licenciement, figurent des notes explicites : « Basta de questi dui, e sono li megliori. » « Ponatur solum unus scholaris quia expensa est supervacua. » Dans la lettre qui accompagne le rôle, on peut lire : « Les frais de l'Université pour l'année prochaine — suivant la limitation qui a été prescrite et comme il ressort de ce cahier —sont de sept mille neuf cent quarante florins, ce qui fait trois mille huit cent quatre-vingt-seize florins d'économie. Plusieurs jeunes professeurs de la Faculté de Droit ayant été révoqués, il me semble qu'il faudrait décréter que tout professeur de cette ville qui voudrait enseigner tous les jours dans la Faculté de Droit, y sera autorisé pour la matière qui lui convient, en touchant pour cela un salaire de trente florins par an ; à cette seule condition, qu'il le fasse sans interruption et qu'il ait au moins quatre élèves à chaque fois. On instituerait aussi un inspecteur qui irait contrôler deux ou trois fois par semaine s'ils font leurs cours, et le nombre d'élèves qu'ils ont. Il ne faut pas oublier, d'ailleurs, qu'à l'époque du premier duc, il y avait dans cette université une disposition semblable. On ne trouvera jamais huit professeurs qui font leurs cours et qui ont des élèves ; leur salaire sera de deux cent quarante florins par an, cela fera taire plusieurs personnes et les frais seront moins grands. » (Voir Code diplomatique, II, p. 586-540).

1. Nous rappellerons surtout : Cicco Simonetta, qui, pendant presque trente ans, fut le conseiller politique hors pair des Sforza ; B. Corio, historien officiel de la cour ; l'humaniste F. Filelfo ; les architectes A. Filarete, Bramante et Léonard de Vinci, qui enrichirent Milan de monuments célèbres tels que le Château, l'Eglise de Sainte-Mariedes- Grâces, l'Hôpital Majeur, e t c . Les vingt dernières années du siècle furent exceptionnellement magnifiques, grâce au faste de Ludovic le More (voir Malaguzzi-Valeri, , La cour de Ludovic le More, Milan, 1911-1920 Google Scholar). Tout cela devait prendre fin en 1499 avec la descente en Italie de Louis XII, roi de France, qui marqua pour la Lombardie le début de la domination étrangère et d'une irrémédiable décadence économique.

1. Sur le rôle de l'année scolaire 1416-17, à côté du nom de frère Pietro Torti, figure la mention : « Légat si vult sine salario. »

2. Archives de la ville de Pavie, Manuscrit A 121, feuille 118. J e tiens à remercier C. M. Cipolla qui m'a signalé ces données, et d'autres encore, et m'a présenté de plus maintes suggestions pour la rédaction de cet article.

3. Ibidem, Manuscrits B 66 et B T8.

1. Voir les intéressantes remarques sur le pouvoir d'achat de ces salaires, par rapport aux livres (manuscrits) de Droit et de Médecine, que l'on peut lire dans Cipolla, C. M., Money, Priées and Civilization, Princeton, 1956, pp. 6162.Google Scholar

2. F. Fossati, « Travaux et travailleurs à Milan en 1438 », dans Archivio Storico lombardo, 1929, p . 90-95 ; Archives notariales de Pavie, Notaire Ludovico Legge, VII, 265, année 1450.

3. Un exposé des « Syndics » des travailleurs de Pavie, à la fin du xvr8 siècle affirmait que, sur 365 jours de l'année, 96 étaient fériés. On peut calculer que soixante-dix jours environ devaient être perdus, en raison des maladies, du chômage saisonnier, etc. (voir Cipolla, C. M., Prix, salaires et théorie des salaires en Lombardie à la fin du XVIe siècle, Rome, 1956, p . 13 et suivantesGoogle Scholar).

4. Le calcul est basé sur l'équivalence habituelle : 1 florin (monnaie de calcul) = 32 sous impériaux.

1. Voir les intéressantes remarques sur le pouvoir d'achat de ces salaires, par rapport aux livres (manuscrits) de Droit et de Médecine, que l'on peut lire dans Cipolla, C.M., Money, Priées and Civilization, Princeton, 1956, pp. 6162.Google Scholar

2. F. Fossati, « Travaux et travailleurs à Milan en 1438 », dans Archivio Storico lombardo, 1929, p . 90-95 ; Archives notariales de Pavie, Notaire Ludovico Legge, VII, 265, année 1450.

3. Un exposé des « Syndics » des travailleurs de Pavie, à la fin du xvr8 siècle affirmait que, sur 365 jours de l'année, 96 étaient fériés. On peut calculer que soixante-dix jours environ devaient être perdus, en raison des maladies, du chômage saisonnier, etc. (voir Cipolla, C.M., Prix, salaires et théorie des salaires en Lombardie à la fin du XVIe siècle, Rome, 1956, p . 13 et suivantesGoogle Scholar).

4. Le calcul est basé sur l'équivalence habituelle : 1 florin (monnaie de calcul) = 32 sous impériaux.

1. On pourrait encore se poser deux questions : 1. Le salaire universitaire était-il l'unique revenu des lecteurs, ou pouvaient-ils avoir d'autres sources de gain professionnel ? 2. Les privilèges et les exemptions en matière fiscale dont ils bénéficiaient étaient-ils capables de réduire de façon sensible le coût de leur train de vie ? En ce qui concerne le premier point, il suffit de rappeler qu'il était rigoureusement interdit aux lecteurs d'exercer d'autres professions. Uniques exceptions : ceux que nous avons inclus dans le troisième groupe de salaires et ceux qui avaient une fonction à la cour. Quant au second point, il faut avoir présent à l'esprit que les privilèges et les exemptions fiscales concernaient essentiellement les lecteurs non pavesans — c'est-à-dire la majorité. Mais comme ils vivaient loin de leurs familles, ils dépensaient davantage pour leur nourriture et leur logement, sans parler des frais de voyage et de transport de leurs bagages. Ainsi ces privilèges n'avaient pas d'autre but et d'autre résultat que de rétablir l'équilibre des niveaux de vie.