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L'émigration des musulmans algériens et l'exode de Tlemcen (1830-1911)

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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L'année 1911 fut marquée en Algérie par une émigration assez importante : quelques centaines de citadins musulmans de la ville de Tlemcen réussirent à quitter l'Algérie, clandestinement ou non. Ce mince épisode de l'histoire des Musulmans algériens prit aussitôt une place considérable dans la presse coloniale et française. Généralement, outre-Méditerranée, on y vit une protestation contre le service militaire obligatoire repoussé par l'Algérie unanime ; en France, le mouvement fut plutôt interprété comme une manifestation contre le régime colonial et comme tel il fut utilisé par les partisans des réformes. L'événement fut même évoqué à la Chambre en 1912, à la fin de 1913 et au début de 1914 et la polémique qui s'institua à ce propos rappelle celle qui était née en 1901-1903 autour de l'affaire de Margueritte. Elle devait aboutir à une manifestation politique précise du Parlement.

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Travaux en Cours
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Copyright © Copyright © École des hautes études en sciences sociales Paris 1967

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References

page 1047 note 1. Depuis que l'opinion française eut en 1911 la révélation de ces départs, l'exode de Tlemcen a été mentionné par divers auteurs, mais le plus souvent très brièvement. Plusieurs historiens de l'Algérie ne lui accordent qu'une phrase : Augustin Bernard, L'Algérie (1930), p. 429 « On vit un millier d'indigènes de Tlemcen s'expatrier en Syrie » ; G. Esquer, Histoire de VAlgérie (1960), p. 63 « … et un millier de Tlemcéniens émigrèrent » ; Cl. Martin, Histoire de VAlgérie française (1962), p. 255 : «Un millier environ de musulmans de la région de Tlemcen aimèrent mieux s'expatrier en Syrie que de servir la France. » Seul M. Ch.-A. Julien, dans L'Afrique du Nord en marche (1952), a longuement présenté le problème (pp. 104 à 106) d'après une publication du Gouvernement général de l'Algérie, L'exode de Tlemcen en 1911 (1914).

page 1048 note 1. Les musulmans ont donné à toutes leurs émigrations provoquées par la conquête ou la domination d'états chrétiens le nom générique d'hijra, c'est-à-dire le nom même qui désigne l'émigration du Prophète à Médine, l'Hégire. Sont des mouhadjirines (muhâjirin) tous ceux qui émigrent définitivement en terre d'Islam pour sauvegarDer leur foi menacée. Sous la domination des Turcs, l'Algérie n'a évidemment pas connu d'hijra ; les seuls mouvements de population qui soient attestés sont liés aux pèlerinages en Terre sainte. En reVanche le Maroc recueillit à plusieurs reprises des réfugiés politiques en provenance de l'Ouest algérien. On peut ainsi signaler deux « exodes de Tlemcen ». Le premier se place en 1746, Ibrahim étant pacha-dey d'Alger : il fut provoqué par les représailles turques contre le soulèvement des Kouloughli et des h'ad'ar de Tlemcen. Le second, connu seulement par des sources marocaines, eut lieu sous le règne de Moulay Slîmân : lors de l'insurrection de Boû Cherîf les habitants de Tlemcen reconnurent le sultan marocain et assiégèrent les Kouloughli dans le méchouar ; les massacres qui suivirent le retour victorieux des Turcs déterminèrent une seconde émigration qui se porta également à Fès. Les réfugiés algériens de la période turque, qui ne bénéficièrent d'aucune faveur ni d'aucun statut spécial, se perdirent dans la masse marocaine. Au contraire les émigrés de la période française, seuls désignés comme muhâjirîn, conservèrent leur individualité jusqu'à nos jours. A Fès, les Algériens, bien que de pronenance diverse, formaient une communauté privilégiée, exemptée d'impôts coraniques et administrée par un naqîb tlemçani. Les chorfâ de la tribu des Hâchem recevaient même des dons annuels du sultan.

page 1048 note 2. Coran (traduction Blachère) Sourate IV, vers. 99-100 et VIII, vers. 73-75.

page 1048 note 3. Sourate IX, vers. 20.

page 1048 note 4. Sourate XVI vers. 43.

page 1049 note 1. Autre Hadlth : « Celui qui, à cause de sa religion, quitte un pays pour se rendre dans un autre, même s'il n'avait à parcourir pour cela que la distance d'un empan, aura mérité le Paradis et il sera le compagnon de son ancêtre Abraham et des descendants de celui-ci. »

page 1049 note 2. L'Hijra est un phénomène général. Les musulmans sous domination russe émigrèrent non moins régulièrement à chaque fois que leur statut parut menacé (en 1883 par exemple exode massif des Circassiens auxquels les Russes voulaient appliquer la conscription). Lors de l'annexion de la Bosnie-Herzégovine par l'Autriche-Hongrie de nombreux musulmans quittèrent leur pays, abandonnant leurs propriétés. Le gouvernement ottoman leur accorda des concessions territoriales importantes principalement dans la région de Brousse.

page 1050 note 1. La correspondance du général de Martimprey (Arch. Guerre H 169-170) signale les premiers indices le 27 mars 1860, puis ce sont les précisions : « 500 personnes viennent d'être arrêtés dans le Hodna, fuyant la subdivision de Médéa pour gagner la Tunisie » (17 avril) « Un trois-mâts romain a embarqué 300 indigènes munis de permis d'émigration pour Saint-Jean-d'Acre » ; (25 juin). De Tunis on signalait la présence de nombreux émigrés sur la frontière : 300 tentes algériennes près du Kef, e t c ..

page 1050 note 2. D'après les militaires le ministre de l'Algérie aurait prescrit en mai 1860 de laisser partir les émigrants : « cela ferait de la place pour la colonisation ». Mais en 1861, informé de l'ampleur des départs qui se préparaient dans le Constantinois, Napoléon III intervint personnellement le 9 mars : il fallait rassurer les Arabes. Pélissier fit démen tir les bruits de cantonnement, distribuer quelques titres de propriété définitive (pour 3 000 ha seulement) et interdit les départs. Alors les musulmans multiplièrent les demandes de passeport pour pèlerinage.

page 1051 note 1. ARCH. Guerre, H 265.

page 1051 note 2. ARCH. GT. GL Algérie, A.G.G. 15 Hl (août 1874) Chanzy consulté par le ministre des Affaires étrangères s'était déjà opposé le 29 août 1873 à ce que les Ouled Moqran réfugiés en Tunisie puissent émigrer en Syrie comme ils l'avaient demandé au sultan. « Ce patronage serait aux yeux des populations musulmanes un acte de souveraineté politique s'ajoutant à la suprématie religieuse que La Porte exerce déjà en Tunisie. »

page 1051 note 3. Id., 15 H l . Un rapport Roustan du 14 août 1876 évaluait à 16 000 le nombre des émigrants demeurés en Tunisie, dont 7 000 Kabyles. Le gouvernement général qui ne tenait compte que des départs signalés obtenait des totaux plus faibles. Du côté marocain ne sont connus que les mouvements des Oulâd Sîdî Cheîkh Charâga dans l'imprécise zone frontière et le transport d'Oran à Tanger de 227 Oulâd Sîdî Cheîkh Ghâraba, fidèles à Slîmân ben Qaddour « interné au Maroc » (A.G.G., I EE 51). En fait d'internement tous les réfugiés furent accueillis comme muhâjirîn mais certains, envoyés dans la région de Marrakech ( Michaux-Bellaire, E., in Archives marocaines XI, pp. 330360 Google Scholar).

page 1052 note 1. La presse française d'opposition signala les faits sous le titre : « Soulèvement en Algérie. » Le Gaulois (18 septembre 1888), L'Autorité (19 septembre), L'Intransigeant (23 septembre et 2 octobre) La Lanterne (3 octobre), Le Soleil (9 octobre).

page 1052 note 2. Rapport du 11 septembre 1888. A.N. (ARCH. NAT.), F 80, 1698.

page 1052 note 3. D'après G. d'Hugues, administrateur de commune mixte (1895).

page 1052 note 4. A.G.G., 15 HI.

page 1052 note 5. Rapport Cambon du 30 octobre 1891.

page 1052 note 6. Selon J. De Sparmet (La turcophilie en Algérie) une prophétie sortie d'on ne savait où s'était subitement répandue et avait totalement changé l'état des esprits. L'Algérie allait redevenir musulmane avec l'aide triomphante des Turcs. Ceux-ci allaient rentrer dans leur ancienne possession et, après des victoires foudroyantes, expulser les Chrétiens, livrer au pillage leurs biens. L'auteur donne le texte de cette prophétie : « Cette année même cette terre sera purifiée de la présence des chiens qui la souillent… Ces mécréants pleureront leurs villas et les routes qui nous seront restées… »

page 1052 note 7. A.G.G., HH 49 (7 janvier 1898). En sens inverse 18 tentes seulement profitèrent de l'amnistie offerte par J . Cambon aux Oulâd Sîdî Cheikh Charâga qui avaient suivi Bou ‘Amâma au Maroc. L'amân accordé par Paul Cambon en 1885 aux émigrés tunisiens de Tripolitaine avait servi de précédent.

page 1053 note 1. A.G.G., série G 28.

page 1053 note 2. Cette idée fut sans doute suggérée par l'administrateur Octave Depont qui multipliait alors les articles pour dénoncer le panislamisme. Or dans tous ses écrits, il cite toujours le n° du 8 mars 1899 Maloumat, et celui-là seulement… Il faut donc croire que ce journal n'avait pas mené campagne antérieurement. Dans la Revue des questions diplomnti [ues (décembre 1899) Depont écrit que ce journal annonçait en mai 1899 des concessions de terre à Symrne et en Tripolitaine. Le journal turc était interdit en principe en Algérie — de même que le Moayad, journal du Caire qu'on mit en cause en 1900-1901.

page 1053 note 3. Le Rapport Barbedette de 1911 rappela lui aussi comme une donnée d'évidence « la spéculation européenne poussant les indigènes à l'émigration dans la région de Milianah ».

page 1053 note 4. Numéro du 8 septembre 1899.

page 1054 note 1. Dans le même temps, les mesures d'interdiction des journaux arabes et turcs étaient prorogées ; de même il n'était plus délivré jusqu'à nouvel odre de passeport aux Musulmans (circulaire du 27 décembre 1899. HH 49).

page 1055 note 1. Union Républicaine (7 juin 1910 et juillet 1910).

page 1055 note 2. Dépêche Algérienne (22, 25 juin 1910). L'information était certainement officieuse puisqu'on en retrouve tous les éléments dans un rapport Jonnart du 8 juillet 1910.

page 1055 note 3. Frobergeii dans le Bulletin de la Réunion des Études Algériennes, juilletoctobre 1910. Idem, Le Tell (29 mai).

page 1055 note 4. Akhbar (3 juillet 1910) : « on a vu des Européens à Sedrata se faire agents d'émigration et acheter les terres des émigrés. Lors des séances de vaccination ou de recensement certains colons prêchèrent l'abandon de leurs terres aux indigènes pour échapper aux vexations ».

page 1055 note 5. Cités d'après le Temps (juillet 1910), La Revue Indigène et La Quinzaine Coloniale, 25 juin 1910.

page 1055 note 6. Nous n'avons pas pu retrouver l'original de ce rapport s'il y en eut un.

page 1056 note 1. Union Républicaine (7 juin 1910 et juillet 1910).

page 1056 note 2. Dépêche Algérienne (22, 25 juin 1910). L'information était certainement officieuse puisqu'on en retrouve tous les éléments dans un rapport Jonnart du 8 juillet 1910.

page 1056 note 3. Frobergeii dans le Bulletin de la Réunion des Études Algériennes, juilletoctobre 1910. Idem, Le Tell (29 mai).

page 1056 note 4. Akhbar (3 juillet 1910) : « on a vu des Européens à Sedrata se faire agents d'émigration et acheter les terres des émigrés. Lors des séances de vaccination ou de recensement certains colons prêchèrent l'abandon de leurs terres aux indigènes pour échapper aux vexations ».

page 1056 note 5. Cités d'après le Temps (juillet 1910), La Revue Indigène et La Quinzaine Coloniale, 25 juin 1910.

page 1056 note 6. Nous n'avons pas pu retrouver l'original de ce rapport s'il y en eut un.

page 1057 note 1. Georges et William Marçais, Les monuments arabes de Tlemcen, 1903.

page 1057 note 2. Alfred BEL, « La population musulmane de Tlemcen ». Revue des Études ethnographiques et sociologiques (1908).

page 1057 note 3. « Une djellaba à Tlemcen revient de 10 à 18 francs — une importée d'Europe, de 5 à 6 francs » (enquête Barbedette).

page 1057 note 4. Aux témoignages concordants de Georges Marçais, William Marçais, Alfred Bel.

page 1057 note 5. Georges MARÇAIS, Tlemcen. (AVant-propos.)

page 1057 note 6. Tous les fils d'Abd el-QâDer étaient devenus sujets ottomans sauf les émirs pensionnés par la France.

page 1058 note 1. II y avait vers 1905 quelque 5 000 Algériens à Fès ; et dans l'ensemble du Maroc une vingtaine de mille, selon Michaux-Bellaire, Archives Marocaines.

page 1058 note 2. Le maire de Tlemcen, G. Sabatier, avait bien assuré en 1892 à Jules Ferry qu'ils étaient fort satisfaits de la domination française, car le voisinage du Maroc leur faisait apprécier la douceur de notre administration, mais les doléances des citadins ne permettent pas de le croire.

page 1058 note 3. Ils protestaient contre les affichages municipaux sur les mosquées, ils demandaient l'aménagement du service obligatoire de la patrouille imposée à tous les Indigènes et la suppression d'une taxe municipale sur l'abattage du mouton de V'Aïd cl Kebir (juillet 1905).

page 1058 note 4. A.N.F. 80 1811. L'administration expliqua qu'il s'agissait d'affiliés de la secte des Madania qui voulaient aller vivre au milieu des adeptes de cet ordre. « Leur départ pourrait entraîner d'autres demandes », d'où le refus.

page 1058 note 5. Le rapport de la Commission Barbedette attribue à la menace de la Séparation un certain nombre de demandes de permis de voyage pour l'Orient qui furent faites en 1904.

page 1059 note 1. Le sous-préfet confirma, mais pour lui c'était « une manoeuvre classique pour intimiDer l'administration ».

page 1059 note 2. A.G.G., 8 H 42 .

page 1059 note 3. Rapport du 4 janvier 190!).

page 1059 note 4. Cf. également in Exode de Tlemcen. (P. 128), une lettre venue de Damas du 6 novembre 1910, elle annonçait : « le gouvernement ottoman donne à chaque individu 20 hectares de terrain, deux taureaux, des champs ensemencés et toutes les semences… les enfants reçoivent autant que les grandes personnes ».

page 1059 note 5. Interdiction du voile, de la circoncision, des fêtes religieuses, d'après le rapport de l'administrateur détaché à la sous-préfecture en date du 20 octobre 1911. Celui-ci incrimine aussi le passage du journaliste jeune algérien Sadek Denden, lequel aurait dit que « le service militaire était une nécessité inéluctable » et la présence de Ben ‘Ali Fekar, docteur en droit, professeur, alors en congé à Tlemcen.

page 1059 note 6. On allait emmener les garçons de dix-huit ans, leur enlever leur religion, les franciser, etc..

page 1060 note 1. Le mufti avait déjà été privé de son traitement pour « s'être opposé publiquement au service militaire contre la volonté du gouvernement ».

page 1060 note 2. Le sous-préfet alertait le gouvernement général le 19 septembre par télégramme. Il signalait que 200 immeubles étaient en vente à TIemcen et réclamait des mesures urgentes pour mettre fin à l'exode.

page 1060 note 3. A.G.G., 8 H 42.

page 1060 note 4. A.G.G., 15 H 1. Rapport du sous-préfet de TIemcen : 526 départs pour l'arrondissement de TIemcen, dont 425 seulement appartenant à la commune de plein exercice de TIemcen. Notons cependant que l'enquête de G. Sabatier signalait 800 départs pour l'arrondissement de TIemcen et l'enquête Barbedette 637.

page 1060 note 5. Écho d'Oran, numéros des 14-15-16-17-18 octobre 1911.

page 1061 note 1. C'est la population de la commune : 25 733 habitants (recensement de 1906), la ville proprement dite ne comptait que 14 567 habitants.

page 1061 note 2. Le juge de paix avait infligé, en 1910, 661 condamnations à l'indigénat, dont 569 pour retard dans le paiement des impôts et 13 pour dissimulation de matière imposable.

page 1061 note 3. Effectivement le Tribunal répressif sur 262 prévenus n'avait pas prononcé en 1910 un seul acquittement et n'avait accordé que 82 sursis seulement.

page 1062 note 1. Le Temps (31 octobre 1911) : « Nous ne souscrivons point à toutes ses conclusions qui nous paraissent trop timides. Mais c'est un symptôme tout à fait significatif. »

page 1062 note 2. La Quinzaine Coloniale (25 octobre 1911).

page 1062 note 3. « Le Conseil grandement inquiet sur les résultats que peuvent amener pour la situation économique de la région le départ de nos indigènes… convaincu cjue l'état de trouble moral dans lequel se trouvent aussi bien ceux qui s'en vont que ceux qui restent doit être imputable à des menées occulte qu'il serait intéressant de découvrir émet le voeu… qu'une commission de personnes donnant toute garantie aux indigènes (soit) chargée d'étudier sur place les causes de cette situation et les remèdes propres à y remédier. »

page 1062 note 4. A.G.G., 8 H 42. Le député modéré A. Rozet, défenseur des Musulmans algériens, était considéré par l'administration algérienne comme son plus dangereux adversaire.

page 1063 note 1. Le service des eaux et forêts tenta de répondre, mais les chiffres qu'il citait l'accablaient. Procès-verbaux : 1906, 4 304 ; 1908, 6 144 ; 1910, 6 597.Hectares ouverts au parcours (sur 51 517 hectares de terrains soumis au régime forestier) : 1908, 36 386 ; 1909, 25 683 ; 1910, 28 936.

page 1063 note 2. L'exode de Tlemcen en 1911 : publication officielle du rapport et de diverses pièces annexes. Alger 1914, 136 p. (cf., pp. 24-29).

page 1063 note 3. Souligné dans le texte. Le système était condamné depuis longtemps et après l'exode de 1910 des prescriptions sévères avaient été édictées à nouveau. Or la presse révéla en février 1911 que grâce à des complicités administratives de nouvelles affaires de spoliations avaient été commises.

page 1064 note 1. Même son de cloche chez un haut fonctionnaire du parti colonial : H. Marchand. « Quelques éléments inférieurs de la population européenne auraient aussi effrayé en parlant conscription, e t c . . » « L'exode des musulmans » in Questions diplomatiques et coloniales (16 janvier 1912).

page 1064 note 2. Le Ministre s'en étonna et réclama télégraphiquement le rapport « d'un Mr Marcel [sic] qui n'a jamais été communiqué à mon département ». On lui répondit le 17 décembre 1913 « qu'on n'avait conservé que des extraits » — ce qui est faux, puisque ce rapport figurait in extenso aux A.G.G. 8 H 4S. Mais comme le texte avait été retouché et coupé, il était difficile de fournir l'original. Ce travail de caviardage fut fait de la main de Luciani reconnaissable à son écriture et à ses manies. « D'ailleurs le mot bidaa signifie à la fois innovation et hérésie » — cette phrase qui dans la pensée de Luciani excluait toute réforme et justifiait son conservatisme revient constamment dans ses écrits. [Précisons que bid'a signifie : innovation religieuse.]

page 1065 note 1. Le passage sur la rue Eugène-Etienne avait été censuré par Luciani, le Directeur des Affaires indigènes, mais il fut lu à la Chambre par Abel Ferry et cela provoqua, selon le J.O., des « sourires ». Eugène Etienne était intervenu peu aVant pour révoquer en doute « les impressions de M. Barbedette » et signaler qu'il n'y avait eu « qu'à peine 200 départs ».

page 1065 note 2. Passage censuré.

page 1065 note 3. Ici encore tout un passage du rapport manuscrit fut coupé par Luciani : « Pas d'illusion à se faire : l'âge de l'abondance et des bas prix ne reviendra pas. Les nomades n'apporteront plus les outres de beurre du Sahara, l'application stricte des règlements forestiers dans la montagne maintenant reboisée fera renchérir encore le charbon, le bois de chauffage, le lait de chèvre déjà si chers, e t c . . »

page 1065 note 4. Passage également caviardé par Luciani.

page 1065 note 5. Ce passage censuré de la conclusion fut lu à la Chambre et y provoqua des applaudissements.

page 1065 note 6. Circulaire aux préfets (20 mai 1913) : « L'exode de Tlemcen, nous en connaissons les causes, presque toutes dues aux excitations émanant de l'extérieur. »

page 1065 note 7. Rapport du 28 février 1912.

page 1065 note 8. Les départs de 1910 puis l'exode de Tlemcen avaient déjà été évoqués à la Chambre par Albin Rozet le 20 juin deVant un tout petit nombre de députés. Il avait affirmé que la conscription n'expliquait pas tout et conclu : « Quand on a donné à un peuple le goût de la liberté, il faut la lui donner. »

page 1066 note 1. Il n'est guère possible, on l'a vu, de chiffrer avec exactitude les départs : l'addition des chiffres moyens donne environ 5 330 départs de 1898 à 1912. Or trois rapports préfectoraux de janvier 1913 chiffrent à 794 familles le nombre des familles émigrées au cours des années 1910 à 1912 (soit 3 à 4 000 personnes). Le nombre des « retours de Syrie » était évalué à 490 familles (soit 2 000 à 2 400 personnes) mais fixé avec précision en octobre 1912 à 1 162 individus (ou selon un autre rapport à 1 043). Les Territoires du Sud auraient fourni 172 départs entre 1910 et 1912 et 68 retours (A.G.G., 21 H 216).

page 1066 note 2. Que devenaient juridiquement les émigrés algériens ? AVant 1911 ils ne se faisaient généralement pas naturaliser. Depuis mai 1911 au contraire, le gouvernement ottoman faisait obligation aux Algériens émigrés de renoncer à leur nationalité d'origine mais le gouvernement français d'après l'accord franco-turc de 1911 pouvait s'y opposer dans les soixante-quinze jours suiVant la demande. Le 20 septembre 1912 le Gouverneur général signalait qu'il avait reçu un millier de demandes et qu'il s'y opposait (” l'expatriation définitive d'un contingent appréciable d'indigènes fera perdre une main-d'oeuvre précieuse, utile à l'essor de la colonisation »). En 1913 il n'y avait que 335 familles naturalisées depuis mai 1911. Le gouvernement général exigeait la révision de l'accord de 1911. A.G.G. 15 H 1.

page 1066 note 3. Sur les conséquences politiques de l'affaire je me permets de renvoyer à mon article « Une politique algérienne libérale sous la Troisième République (1912-1919) » dans la Revue d'Histoire moDerne et contemporaine, avril 1959 (pp. 121-151) et bien plus complètement à ma thèse : Les Algériens musulmans et la France, de l'insurrection de Moqrani (1871) aux réformes de 1919 (1965, inédite, 1700 p. dactyl.).