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L’Anyōnyam. Un rituel de récitation des textes sacrés au Kerala

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Cezary Galewicz*
Affiliation:
Universytet Jagielloński (Cracovie)

Résumé

Transmettre les textes sacrés en Inde a toujours été l’affaire des communautés de lettrés. Dans le cas du Veda, longtemps préservé sous une forme orale seulement, il s’agissait de faire preuve d’une grande dextérité en matière de connaissances textuelles, nourries d’une mémorisation à la fois individuelle et collective. L’écrit n’était pas considéré comme un médium assez sûr pour préserver le savoir sacré, entraînant très tôt la croyance magique dans le fait que le Veda – le savoir sacré par excellence – devait être récité sans aucune erreur ou faute de prononciation. L’article examine les méthodes mnémotechniques sophistiquées destinées, sous forme d’une compétition, à assurer une transmission parfaite du Veda, ici dans le cas de la communauté Nambudiri du Kerala.

Abstract

Abstract

Transmitting sacred texts in India has always been an affair of elite communities of learned professionals. In the case of the Veda, which had been for a long time preserved orally, it was rather mastering dexterity in textual competence through professionally enhanced skills of individual and collective memory. Script was judged as too unreliable a medium for safe preservation; this must have been influenced an early belief: Veda, the sacred knowledge par excellence, had to be properly recited and any error or miss-pronunciation eradicated. The paper examines the sophisticated mnemotechics developed to secure a perfect transmission of the Veda, in the case of the Nambudiri community challenging in competitions of recitation.

Type
Mondes lettrés, communautés savantes
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2005

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References

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10- Cf. Ṛgveda [RV], I. 29, VI. 9, X. 71 ; 11.4.1.9.

11- Bṛhadāraṇyaka-Upaniṣad [BU], III. 1-9.

12- Pour des exemples plus tardifs d’histoires de dig-vijaya, voir Angelika Malinar, «Śaṅkara as Jagadguru according to Śaṅkara Digvijaya », in V. Dalmia, A. Malinar et M. Christof (éd.), Charisma and canon, op. cit., pp. 93-112, ici p. 93.

13- Défi de Gargya Balaki au roi Ajataśatru dans Kaśi (Bénarès), où l’on trouve la meilleure formulation du bráhman : Kauṣītaṭki-Brāhmaṇa-Upaniṣad [KBU], 4-6.

14- Bráhman – une sorte de pouvoir cosmique – était censé résider dans la formule sacrée du même nom ; cette dernière doit contenir « les connexions internes et non exprimées de la formation énigmatique ou paradoxale » ( Heesterman, Jan C., The broken world of sacrifice: An essay in ancient Indian ritual, Chicago, The University of Chicago Press, 1993, p. 152 CrossRefGoogle Scholar), ou, dans les termes de Louis Renou, « l’énergie connective comprimée en énigmes » (” Sur la notion de brahman », Journal asiatique, 237, 1949, pp. 7-46, ici p. 7).

15- Sur cette histoire, voir Witzel, Michael, « The case of the shattered head », Studien zur Indologie und Iranistik, 13/14, 1987, pp. 363415 Google Scholar.

16- Sur cette discussion, voir Insler, Stanley, « The shattered head split », Bulletin d’études indiennes, 7-8, 1989-1990, pp. 97139 Google Scholar.

17- Chāndogya-Upaniṣad [ChU], I.10-11.

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21- Les deux centres religieux de Sṛṅgeri et Kañcī Kāmakoṭi ont été et sont encore rivaux, conservant leurs propres méthodes d’enseignement.

22- Voir F. Staal, Agni. The Vedic ritual…, op. cit., t. II, pp. 359-380.

23- La question est celle du ton et de la valeur accentuelle d’un mot final dit avagraha. Voir Staal, Frits, Nambudiri Veda recitation, La Haye, Mouton & Co, 1961, p. 47 Google Scholar.

24- Rau, M. Śrinivasa, Panchadasi of Vityaranya, Srinangam, Srivanivitas Press, 1912, p. 293 Google Scholar.

25- Je me réfère à une institution de paṭa-dānam : à la cour du zamorin de Calicut, on donnait chaque année un paṭa contenant des pièces d’or aux meilleurs érudits et artistes.

26- Un Trisandha est une manifestation au cours de laquelle trois types de récitation sont mis à l’épreuve. Un Muṟajapaṃest une fête de récitation védique ; les exécutants récitent le Ṛgveda en gardant les pieds immergés.

27- Ap.-Dharma-Sūtra, 1.11.6-7 ( Olivelle, Patrick, Dharmasūtras, Delhi, Motilal Banarsidass, 2000, p. 43 Google Scholar).

28- Un temple éloigné du Dakṣiṇāmūrti Kṣetram de Sukapuram est l’emplacement du yōgaṃ de Trichur.

29- L. K. Anantha Krishna Iyer, The tribes…, op. cit., p. 254.

30- J’emprunte cette expression à la version électronique de l’article de CHRISTIAN JACOB, « Are scholarly traditions comparable? An approach to the transmission of Scriptures, between West and East », conférence faite au Centre Louis Marin, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 2000, p. 12 (http://www.ehess.fr/centres/GDR).

31- Comme le Pratiśakhya du Ṛgveda.

32- Voir les détails donnés par Abhyankar, Kashinath Vasudev et Devasthali, Govind Vinayak (éd.), Vedavikṛtilakṣaṇa-saṃgraha, Poona, Bhandarkar Oriental Research Institute, 1978 Google Scholar, ainsi que par F. Staal, Nambudiri Veda recitation, op. cit., pp. 22-49.

33- D’une manière générale, mon modèle suit celui élaboré par F. Staal, Nambudiri Veda recitation, op. cit.

34- « Je loue le Feu – le prêtre désigné, le dieu et chef du sacrifice. »

35- F. Staal, Nambudiri Veda recitation, op. cit., p. 47.

36- La division artificielle du Ṛgveda en aṣṭaka, adhyāya et varga semble mieux convenir en l’occurrence, pour des opérations sur le texte, que la division plus naturelle en livres (maṇḍala) et hymnes (sūkta).

37- C’est-à-dire proche du parigraha (une récitation double d’un mot devant et après une particule iti).

38- Communication personnelle du Dr Manoor Jatavedan Nambudiri, éminent virtuose de la récitation védique.

39- Cf. J. C. Heesterman, The broken world of sacrifice…, op. cit.

40- Ce qui ressemble à l’exemple de RV, 10.71.

41- Cf. Parpola, Marjatta, Kerala Brahmins in transition: A study of a Nampûtiri family, Helsinki, The Finnish Oriental Society, « Studia orientalia-91 », 2000, p. 165 Google Scholar : un informateur Nambudiri évoque son propre succès à un Sāmaveda Trisandha et les dons en or qu’il en retira.

42- Cf. C. Jacob, « Are scholarly traditions comparable ?… », art. cit., p. 5.

43- Giard, Luce, « Conserver », in Giard, L. et Jacob, C. (éd.), Des Alexandries I. Du livre au texte, Paris, BNF, 2001, pp. 291308, ici p. 293Google Scholar.

44- « Au cours des rituels de sacrifice védiques, des mantras doivent être prononcés à haute voix pour qu’ils réalisent le sens dont ils sont porteurs. » (Ṛgvedasaṃḥitābhāṣyabhū-mikā : voir p. 6 dans l’édition de Max Müller de la Ṛgvedasaṃhitā ,Varanasi, [1890] 1983).

45- Il en va ainsi de la fête rituelle de Trisandha. Celle, royale, de Murajapaṃ remplitune fonction similaire.

46- Sur l’idée de « perfectionnisme » dans les reconstructions rituelles de la renaissance védique, voir Galewicz, Cezary, « A keen eye on details: reviving ritual perfection in Trichur Somayaga 2003 », Bulletin d’études indiennes, 21, 2003, pp. 239253 Google Scholar.

47- «Le dvija qui, sans avoir étudié le Veda, porte son effort ailleurs, ne tarde pas, de son vivant même, à devenir un śūdra avec sa descendance » ( Malamoud, Charles, Le svādhyāyā. Récitation personnelle du Veda, Paris, Institut de civilisation indienne, 1977, p. 42 Google Scholar).

48- Christian Jacob, « Réunir », in L. GIARD et C. JACOB (éd.), Des Alexandries I…, op. cit., pp. 199-211, ici p. 209 : « La Bible, le Canon confucéen, […] les Veda, le Coran, […] et leurs commentaires sont aussi des bibliothèques […], des bibliothèques qui reflètent […] un désir de beauté et de perfection formelle, de symétrie et d’ordre mathématique, de cohérence et de signification, de rationalité et de spiritualité. »