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L'alimentation en Nivernais au XIXe siècle

Published online by Cambridge University Press:  11 October 2017

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Traditionnellement, l'historien s'intéresse fort peu à l'histoire matérielle, à l'évolution du niveau de vie, aux coutumes alimentaires : ce n'est point là une histoire qui se prête à discussions érudites ni à constructions savantes de courbes. Pourtant cette histoire de la vie quotidienne est riche d'enseignements de toute nature. Certes la rareté des documents, la difficulté d'interpréter certaines données, l'impossibilité de dater les transformations limitent nécessairement la portée de toute enquête de ce genre : de bonnes mercuriales de prix, au contraire, voilà un terrain solide, ne prêtant point à contestation.

Type
Enquêtes Ouvertes
Copyright
Copyright © Les Éditions de l'EHESS 1965

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References

1. Aucune étude régionale ne semble avoir été tentée, en dehors de Poitrineau, A., L'alimentation populaire en Auvergne, au XVIIIe, Annales, 1962, pp. 323331.Google Scholar On se reportera aux quelques pages suggestives que R. Mandrou consacre à l'alimentation dans son Introduction à la France moderne, essai de psychologie historique, 1500-1640, 1961, pp. 15-35 et aux Bulletins de l'enquête sur L'histoire de la vie matérielle parus régulièrement dans les Annales à partir de 1961. Pour l'étude des consommations urbaines sur lesquelles nous possédons peu de documents, cf. R. Laurent, L'octroi de Dijon au XIXe siècle, 1961. Sur le Nivernais, on trouvera quelques pages fort utiles dans le Folklore nivernais de J . Drouillet, t. II (1961), pp. 75-97.

2. Sur le pain à Nevers au XVIIIe siècle, cf. Louis Gueneau, L'organisation du travail à Nevers aux XVIIe et XVIIIe siècles, 1919, p. 215 et suivantes.

3. Le pain jaunet est un pain de deuxième qualité fabriqué moitié froment, moitié seigle. Sur les diverses qualités de pain, cf. Drouillet, , ouv. cité, p. 53 Google Scholar et suivantes. On trouvait à Nevers 35 boulangers et 7 blatiers en 1789 ( Gueneau, L., ouv. cité, pp. 592593 Google Scholar), 36 en 1829 et 22 blatiers (dont : 1 cabaretier, 1 épicier, 2 blatiers, 35 en 1872… Une petite ville comme Pougues avait 6 boulangers au XVIIIe siècle (Massé Fougues de 1674 à 1795, Mém. Soc. Acad. Nivernais, 1942, p. 34). Sur les fours particuliers, une étude mériterait d'être menée à partir des recensements très précis effectués par les officiers topographes qui indiquent pour chaque commune le nombre de fours et moulins, leur capacité (Arch. Ministère de la Guerre, rapport du capitaine de Castelneau, sur l'arrondissement de Clamecy, publié par L. Mirot dans Bulletin Soc. Scient, de Clamecy, 1940).

page 1164 note 1. Dans le Morvan « sur plusieurs points, les hommes sont aussi misérables que le pays est ingrat. Ils se nourrissent communément d'un pain de seigle dont le son n'est pas extrait, qui est aussi mal cuit et mal fermenté » (Notice sur le Morvan, in Almanach de la Nièvre pour 1829). Rappelons Vauban : « Tout ce qu'on appelle bas peuple ne vit que de pain d'orge et d'avoine mêlée, dont ils n'ôtent même pas le son, ce qui fait qu'il y a tel pain qu'on peut lever par les pailles d'avoine dont il est mêlé… Il n'y a que les plus aisés qui mangent du pain de seigle mêlé d'orge et de froment. »

page 1164 note 2. Ainsi Isaïe Bonfils écrit-il vers 1730 dans ses Mémoires (publ. p. Gueneau, V., Mém. Soc. Acad. Nivernais, 1898, p. 71 Google Scholar) : « Un bon laboureur en battant son bled de seman doit faire deux bleds, savoir celui du bon de l'épi qui se trouve par le milieu de la batte et celui qui se trouve des deux côtés. Celui du milieu est le plus beau, le plus gros, le plus net et celui des côtés le plus sale, le plus petit et le moins nourri. Le bon laboureur prend son bled du milieu pour semer et garde l'autre pour manger, par la raison sensible que le bon et gros bled étant semé produit beaucoup mieux que le petit (…) (Le) mauvais métayer dit : Si je semais le meilleur de mon bled, le petit bled ne ferait pas de bon pain ; d'ailleurs le maître, lorsqu'il me rendra la moitié de la semaille, ne me fera pas trier le bon bled pour le rendre. »

page 1164 note 3. Sur les tromperies des meuniers et des boulangers sous la Révolution, on se reportera au général Taverna, Une ville affamée : Nevers pendant la Révolution, in Mém. Soc. Acad. Nivernais, 1919, p. 134 et suivantes. En 1859 encore, le Conseil général dénonçait les exactions frauduleuses des meuniers qui « exploitaient » les petits particuliers en substituant « le plus souvent des blés de qualité inférieure à ceux qui leur ont été confiés » (Procès-verbaux du Conseil général, 1859, p. 93).

page 1164 note 4. Les moulins étaient vers 1820 dépourvus de toute espèce de bluterie, note Montalivet (Un heureux coin de terre…, 1878).

page 1164 note 5. Bachelin, H., Le Sabreur, 1938, p. 63.Google Scholar

page 1164 note 6. On se reportera au témoignage de Martin (infra, p. 1158), de E. de Toytot (Faïenciers de Nevers, tâcherons propriétaires…, in Ouvriers des Deux Mondes, 1886) : pour une famille de 5 personnes, on consomme, en 1864, 1 168 kg de pain, soit 292 frs sur un total de dépenses alimentaires de 916 frs. Cf. également de Bourgoing, A., Mémoire en faveur des travailleurs et des indigents de la classe agricole des communes rurales de France…, Nevers, 1844, p. 14.Google Scholar

page 1165 note 1. « Les ouvriers des rivières, note le Préfet en 1813, mangent beaucoup plus de pain qu'ailleurs. »

page 1165 note 2. Delamarre, , Statistique de l'arr. de Clamecy, 1832, p. 16.Google Scholar

page 1165 note 3. En 1813, on estimait la consommation à 2,5 hl par habitant dans l'arrondissement de Château-Chinon, 3 hl dans ceux de Cosne et Nevers, 4 hl dans celui de Clamecy.

page 1165 note 4. Sur les très faibles rations à Nevers sous la Convention et le Directoire qui descendirent jusqu'à 100 gr par jour et même moins, cf. Taverna. Ouv. cité.

page 1165 note 5. Ainsi à Torteron, vers 1865, la consommation baissait de 17 % en été (par rapport à la moyenne), et en automne s'élevait de 12 % ( Reybaud, L., Rapport sur la condition morale, intellectuelle et matérielle des ouvriers qui vivent de l'industrie du fer…, 1868, p. 51 Google Scholar et suivantes). Il faudrait retrouver des comptabilités de boulangers ou de ménages pour suivre ces variations saisonnières, souvent très importantes.

page 1165 note 6. D'où les pillages de bateaux de blé en Loire, les attroupements sur les marchés, les grèves des ouvriers des ports, « obligés de se répandre dans les campagnes pour y mendier leur pain ». (Cf. André Thuillier, La crise des subsistances dans la Nièvre (1846-1847), in Actes du 90e Congrès national des sociétés savantes, 1965, à paraître.)

page 1165 note 7. Qui arrivent à dissimuler une partie du grain qu'on leur a confié, cf. Isaïe Bonfils, art cité, p. 72.

page 1165 note 8. « 1° Lors de la moisson, il s'élève une sorte de guerre intestine entre les habitants d'une commune, les propriétaires voulant empêcher les glaneurs de les voler et les glaneurs n'omettant rien pour les piller ; 2° Le petit nombre de moissonneurs fait que ces ouvriers se paient jusqu'à 30 et [36 sols, sans y comprendre la nourriture, parce que ces glaneurs quoique très valides préfèrent ce genre de travail à celui de moissonner ; 3° L'on est forcé d'employer des étrangers qui emportent dans leur pays un numéraire qu'il serait intéressant de conserver » ; et de demander que les faneurs n'entrent dans les champs que deux heures après la récolte… (Arch. Nat. F10 329) : on retrouve à peu près la même « guerre » dans les Paysans de Balzac (éd. J. H. Donnard, 1964, p. 58) : une famille de sept personnes pouvait glaner 7 boisseaux par jour.

page 1166 note 1. Cf. Arch. Nat., F11 584. Le Préfet de Vaisne dans ses Notes sur l'administration (nov. 1819, Arch. V. Gueneau), montre bien les limites de ses pouvoirs en ce domaine : « Si… les boulangers ou blatiers lui paraissent abuser de sa protection pour vouloir faire des gains exorbitants, ce n'est point en public que [le Préfet] cherchera à les réprimer. Il les fera venir chez lui sans appareil, presque secrètement, il tâchera d'obtenir d'eux par tous les moyens possibles de persuasion d'être plus raisonnables, il pourra aller jusqu'à les menacer, modérément toutefois, mais il se gardera bien d'exécuter les menaces. Il aura soin que le plus grand ordre règne sur les marchés, qu'aucune menace, aucune injure ne s'y prononcent, autant que possible, car en pareil cas, une étincelle peut produire un vaste incendie. Il ne tolérera pas que les marchands abusent de la protection qu'il leur accorde, injurient ou plaisantent grossièrement le peuple qui souffre ; si pareille chose arrive, l'arrestation prompte et éclatante du délinquant et sa traduction aux tribunaux sera une satisfaction nécessaire au peuple… ».

page 1166 note 2. Stendhal note à propos du Nivernais dans les Mémoires d'un touriste qu'un paysan « ne mangeait de la viande que huit fois par an : il vit d'ordinaire avec du lait caillé ». Les colons de M. Aguado à Grossouvre ne mangent jamais de viande, souligne A. de Bourgoing (Mémoire précité, 1844, p. 54). De même, à Sainte-Bouize vers 1820, absence de viande « si ce n'est, pour quelques-uns, un peu de porc les jours de grande fête ou de fatigue exceptionnelle » ( Montalivet, , ouv. cité, pp. 2930)Google Scholar ; on pourrait certes multiplier les témoignages.

page 1166 note 3. « Les journaliers achètent au prix de 10 frs de petits cochons qu'ils revendent 30 frs au bout de quatre ou cinq mois ; ils en tuent très peu pour leur consommation. »

page 1166 note 4. Avril, J. B., Annales de Poussery, 1850, pp. 9899.Google Scholar Le Nivernais était traditionnellement un pays, grand pays producteur de porcs. « Le Morvan, écrivait-on en 1875, a la spécialité de l'engraissement et certaines fermes paient leurs fermages avec le prix de la vente de leurs porcs gras. La charcuterie de Château-Chinon en fait une grande consommation » (de Pazzis, Enquête sur la situation du bétail dans la Nièvre, 1875, p. 15). Sur l'élevage du porc en Morvan, cf. Dupin, Le Morvan, 1851, p. 17 et Levainville, , Le Morvan, 1908, pp. 172174 Google Scholar, et, sur le « repas du cochon», Bachelin, H., Le Serviteur (1944, p. 115)Google Scholar.

page 1166 note 5. Notons encore que nous connaissons mal les variations saisonnières de la consommation : les paysans nivernais mangeaient moins de viande en hiver, plus en été en raison des gros travaux.

page 1167 note 1. « Pendant la durée des assignats, la majeure partie des richesses reflua dans les campagnes et le cultivateur étonné de son aisance rechercha tous les moyens d'en jouir…, il contracta le goût d'un aliment dont il se passe difficilement aujourd'hui » (Considérations sur la population et la consommation générale de la France, suivies de réflexions sur l'approvisionnement de Paris en bestiaux… par J. B. F. Sauvegrain, 1806) : il en fut de même sans doute dans les campagnes nivernaises.

page 1167 note 2. Pour une famille de 5 personnes. Notons toutefois qu'à Imphy la consommation était moindre, l'ouvrier étant demeuré plus rural.

page 1167 note 3. De Toytot (ouv cité) relève une consommation de 156 kg pour une famille de 5 personnes en 1864, plus 20 kg de dindes et d'oies, soit une dépense de 218 frs sur un budget alimentaire de 916 frs. Il faudrait d'autres sondages pour essayer de vérifier le fait.

page 1167 note 4. Beaucoup de bouchers pour éviter les droits d'abattage, abattaient hors de la ville : aussi un accroissement apparent de la consommation peut signifier seulement qu'on abat plus à l'abattoir municipal. Sur les statistiques d'octroi, cf. Mandrou, R., Les consommations des villes françaises au milieu du XIXe siècle, Annales, 1961, p. 740-Google Scholar et suivantes.

page 1167 note 5. Ainsi Avril calcule (Annales de Poussery, 1850, p.94) que l'on a abattu en Nivernais 3 500 boeufs, 5 500 vaches, 20 000 veaux, 27 000 moutons, 10 000 porcs, soit 3 980 t de viande nette, et que la consommation par habitant a été de 8,75 kg de boeuf, vache ou veau, 2,10 kg de mouton, 1,60 kg de porc, 12,45 kg au total ; de tels calculs n'ont, à notre avis, pas grande signification.

page 1167 note 6. En 1851 il n'y avait encore que 5 abattoirs en Nivernais (Nevers, La Charité, Clamecy, Corbigny, Châtillon). Les Comités d'hygiène et de salubrité publique demandent en 1853 que l'on visite particulièrement les viandes dépecées au dehors de la ville et non visitées par le vétérinaire, les tueries particulières ne respectant pas les conditions d'hygiène (cf. Rapport des travaux de ces comités du 3 septembre 1850 au 31 décembre 1858, 1859, p. 46).

page 1167 note 7. Le Comité d'hygiène demande la prohibition de la vente de la viande de chevreau et de veau jeunes.

page 1167 note 8. « Tout le monde a le port d'armes dans le pays. On prétend que c'est un droit des forgerons, mais tout autre ainsi qu'eux n'est guère rencontré sans son fusil sous le bras, et tous chassent lorsque le temps leur permet. Il y a du lièvre, du sanglier et de la bécasse dans le temps, en assez grande quantité, mais plus particulièrement du chevreuil. Les marais et les étangs fournissent aussi beaucoup de gibier d'eau… » (Choses et gens du Nivernais en 1769 = les notes de voyage de J. M. Roland de la Platière, publ. p. Locquin, J., Mém. Soc. Acad. Niv., t. 46, 1944, p. 28 Google Scholar). On chassait beaucoup la bécasse, le cygne, l'oie, la grue, la cigogne, le héron : « On leur fait une guerre continuelle et d'autant plus active qu'elles peuvent satisfaire l'avidité du chasseur ou la sensualité du riche » (cf. Thomas, , « Notice historique et statistique », in Annuaire statistique… de la Nièvre pour 1829, pp. 4041 Google Scholar).

page 1168 note 1. Ainsi la pêche de l'étang d'Uxeloup rapportait en vente de tanches, carpes et brochets 1 779 1 en 1775, 2 238 en 1777, 4 345 en 1779, 3 111 en 1 781 (Comptabilité de M. de Chambrun, Arch. privées). Sur les méthodes d'empoissonnement, cf. Isaïe Bonfils, art. cité, p. 92.

page 1168 note 2. En 1831 on ne trouvait plus que 400 étangs (contre 584 en 1789), occupant 3 470 ha (contre 4 352).

page 1168 note 3. La lamproie, l'alose, le saumon, remontaient la Loire (et l'Yonne) : » S'il faut en croire Gui Coquille, autrefois les saumons étaient très communs dans la Loire. Mais les pêcheurs disaient qu'il y avait trente ans qu'ils s'en étaient effarouchés depuis que les mulets avaient commencé à y reparaître en abondance. Ce dernier ne s'y voit plus aujourd'hui » (Notice précitée de 1829, p. 43). Sur le commerce du poisson, à Nevers, cf. Gueneau, , ouv. cité, pp. 406413.Google Scholar

page 1168 note 4. « La pêche est une ressource pour les habitants de certaines communes qui, ne se contentant pas de prendre le poisson avec des filets ou engins défendus, pèchent au feu » ( Delamarre, , Ouv. cité, 1832, p. 20 Google Scholar). Le sous-préfet de Clamecy, Marlière, note en 1859 que « le Morvandiau jette de la chaux vive dans les rivières pour faire mourir le poisson et se l'approprier » (Statistique de l'arrondissement de Clamecy, p. 28). Une enquête sur les délits de pêche — et de braconnage — serait certainement très suggestive sur les moeurs rurales au XIXe siècle.

page 1168 note 5. Déjà, pour le XVIIIe , Gueneau relevait que « le hareng saur et salé paraissait régulièrement dans les menus des artisans », ajoutant que « cette habitude s'est conservée aujourd'hui dans la population de Nevers et des environs » (Les conditions de la vie à Nevers… à la fin de l'Ancien Régime, 1919). En 1844, 40 t de harengs blancs furent enregistrés à l'octroi de Nevers, soit 2,6 kg par habitant… (Almanach de la Nièvre pour 1846, p. 79).

page 1168 note 6. Dupin note que la soupe du matin, en Morvan est « assaisonnée avec un peu d'huile de navette ou un filet de lard. On n'y emploie pas le beurre, la majeure partie du lait étant réservée pour la nourriture des veaux ».

page 1169 note 1. En 1812, on trouvait dans l'arrondissement de Clamecy 7 265 vaches laitières produisant 240 pintes de lait, soit une fabrication de 31 860 kg de beurre (valant 1,50 frs, et 159 000 kg de fromage valant 0,50 frs. Sur les 1 911 000 1 de lait, 627 000 étaient convertis en beurre, 1 274 000 allaient à la table ou aux enfants. L'arrondissement de Nevers avec 4 141 vaches laitières produisait 289 000 1 de beurre, soit un peu plus de la moitié de sa consommation (Arch. dép. Nièvre, Enquête, 1813).

page 1169 note 2. « C'est seulement près des villes qu'on vend du lait » (1813).

page 1169 note 3. « On achète du Brie, de l'Olivet, du Rocfort, du Marolles, du Cantal. Celui-ci est pour les ouvriers. Le gruyère est grandement en usage » (1813). Ainsi, pour son carême, la comtesse Lichy achète 10 1 de fromages de Marolles et 4 1 de Cantal (Taverna, art. cité, p. 76). La famille de faïenciers de Toytot achète 25 kg de fromage par an : gruyère, olivets, fromages blancs ; le fromage jouait un rôle essentiel dans l'alimentation des ouvriers, se substituant à la viande.

page 1169 note 4. Ainsi le beurre était évalué pour le rachat des rentes fermières en 1790 à 8-10 sols à Clamecy, 10 sols à La Charité, Decize, Cosne, 12 sols ailleurs (Arch. Nat. F11 201). On relève les mêmes diversités de canton à canton lors de l'enquête sur les prix 1849-1853 (F20 715) : en 1855, la livre de beurre vaut de 0,90 à 1 fr à Brinon, Corbigny, Lormes, Nevers, Decize, mais 1,35 à La Charité, 1,40 à Pougues, 1,20 à Châtillon et à Saint-Pierre, 1,50 à Moulins-Engilbert.

page 1169 note 5. Le sous-préfet de Clamecy, Delamarre (ouvr. cité, p . 18) évalue à 700 1 le lait fourni par chaque vache, dont 150 destinés au veau, un tiers du surplus destiné à la table et à la nourriture des enfants, deux tiers à la fabrication de beurre et fromage.

page 1169 note 6. L'on ne cite guère que des fromages de chèvre de Pouilly, Anost, Dornecy (cf. R. Lallemant, La cuisine de chez nous, t. II , Le Nivernais-Morvan, 1955).

page 1169 note 7. Cf. Hémardinquer, J.-J., Essai de cartes des graisses de cuisine en France, Annales, juillet-août 1961, pp. 747771.Google Scholar Le Nivernais se trouve placé à une région charnière, entre le beurre et le saindoux.

page 1169 note 8. Ainsi que le montrent les saisies révolutionnaires, comme les inventaires après décès. De Toytot note que sa famille de faïenciers consommait : 1° 26 kg de beurre (à 2,50 frs) ; 2° 6 kg de graisse de porc achetée en panne et fondue pour la cuisine (à 1,30 frs) ; 3° 6 1 d'huile de noix pour la salade et la cuisine, soit 83,6 frs, près de 10 % des dépenses alimentaires : le poste n'est nullement négligeable.

page 1169 note 9. « Les graines oléagineuses ne sont chez nous qu'à l'état d'enfance », constate Benoist d'Azy en 1853 ( Annales de Paussery, p. 57).

page 1170 note 1. Les statistiques et les relevés topographiques d'état-major (Arch. Ministère de la Guerre) relèvent un grand nombre de pressoirs à huile. Mais à Nevers même, en 1829, il n'y avait qu'un huilier. En 1844 la ville de Nevers importait 146 hl d'huile d'olive — destinée aux plus fortunés — et 537 hl d'huiles de toute espèce ; en 1876, 143 quintaux d'huile de première qualité, 558 d'huiles diverses, soit 703 q. Notons encore que les épiciers de Nevers vendaient vers 1850 des huiles d'olives surfines d'Aix et d'Italie.

page 1170 note 2. Bonfils, Isaïe, art. cité, p. 90.Google Scholar Sur les différents produits du jardin vendus habituellement, en Nivernais, on se reportera à la taxe des légumes et des fruits en thermidor an II (cf. Taverna, , ouv. cité, 1919, p. 95 Google Scholar et suivantes). On cultivait alors « cercifis » (salsifis), choux-fleurs, haricots rouges et blancs, lentilles également.

page 1170 note 3. La treufe était traditionnellement cultivée en Nivernais dès le début du XVIIIe siècle. « Il ne faut pas arracher les treufes qu'elles ne soient bien en maturité, ainsi que les oignons et les citrouilles que l'on voudra garder… » ( Bonfils, Isaïe, art. cité, p. 91 Google Scholar). Elle devint — surtout dans le Morvan — la base de l'alimentation ; à midi, écrit Dupin, « on mange du pain avec des pommes de terre en purée (…). Le soir, soupe encore et des pommes de terre au naturel et à discrétion ». La soupe de pommes de terre et de légumes devint la base de la nourriture des paysans et des ouvriers.

page 1170 note 4. « Elle a pris surtout une très grande extension depuis 1812, époque où la rareté et la cherté des grains ne permit guère à la classe du peuple de s'en procurer. On épuisa toutes les ressources en pommes de terre, et l'habitant de la campagne sentit dès lors la nécessité d'avoir toujours une ample provision » (Préfet Nièvre, rapport publié dans la Statistique agricole de 1814, 1914). Il faut « propager et encourager la culture des pommes de terre », écrit J. B. Jourdan en 1817 (Doléances suivies de voeux à émettre…, ms., Arch. V. Guéneau).

page 1170 note 5. Cette féculerie de Magny-Cours n'eut qu'une existence éphémère ; une autre existait à Saint-Benin-d'Azy ; on avait même tenté, sans succès, avant 1846, des essais de distillation. Les variétés en usage en Nivernais étaient : la jaune hâtive, la grise, « désignée sous le nom de Brionne ou Chaumette », la jaune ordinaire, la rouge, la blanche ou allemande, la Rohan ; les rendements s'élevaient à 120 hl par hectare. En 1821 les pommes de terre occupaient 4 800 ha, en 1846, 8 000 ha (cf. Annales de Poussery, 1847, p. 28). Deux tiers de la production fut altérée en 1846 ; notons que vers 1840 « la population accusait les prêtres d'être cause de la maladie des treufes »…

page 1170 note 6. En 1849 on trouve des haricots sur 1 143 ha contre 8 939 ha pour les pommes de terre et 361 pour le colza et la navette et on récoltait 18 hl par ha de haricots ; dans le canton de Saint-Benin-d'Azy, on trouvait en 1846, 333 ha de pommes de terre, 12 ha de « blettes », 97 de haricots, 10 de navettes, 85 ha de jardins : les proportions sont caractéristiques (cf. Annales de Poussery, 1847, p. 347 ; 1850, p. 85).

page 1171 note 1. Nous n'évoquerons que pour mémoire ici le problème de la soupe de sa composition, de son assaisonnement — et des horaires des deux ou trois soupes quotidiennes : il faudrait une étude particulière, chaque terroir ayant ses traditions sur ce point. Cf. de Toytot, J. Drouillxet, ouv. cités.

page 1171 note 2. Les vignes étaient souvent plantées de cerisiers et pêchers. A la fin du XVIIIe siècle on récoltait à Nevers des prunes « abricotées, damas noir et blanc, mirabelles, Monsieur, reine-claude, Catherine ». Notons qu'on trouvait dès 1789 d'importantes pépinières à La Charité — qui subsistent toujours (cf. Statistique agricole de 1814, ouv. cité, p. 374).

page 1171 note 3. « Il y a peu d'espaliers, note le sous-préfet de Clamecy, les arbres sont à haut vent et généralement peu soignés » ; le bois des merisiers et cerisiers était « recherché ». Sur les conditions de l'arboriculture en Nivernais « région âpre et rude, d'une température variable à l'excès…, exposée trop souvent à des pluies incessantes ou à des sécheresses prolongées », cf. Trochereau, « Observation sur la culture des arbres fruitiers dans le Nivernais », extrait Bulletin Société Niv., 1863, 21 p.

page 1171 note 4. Reynier, « Mémoire sur la terre de Garchy », ms. (1800 ?) Arch. de M. David.

page 1171 note 5. « On compte 2 540 ruches d'abeilles, note en 1832, le sous-préfet de Clamecy (ouv. cité, p. 20), dont le produit se consomme dans l'arrondissement. Il est bien à regretter que cette source de richesse pour le propriétaire, dont la culture réclame si peu de soin, ne soit pas mieux appréciée des gens de la campagne qui en retiraient de très grands avantages… »

page 1171 note 6. Par exemple on trouve en Nivernais, pays de bois et d'herbages, beaucoup de champignons : or il semble que tout au long du XIXe siècle, cette ressource, sauf les champignons de pré et les girolles, ait été négligée de tous.

page 1171 note 7. A Nevers on trouve en 1788, 70 jardiniers ; c'est un groupe assez homogène qui a ses traditions, une influence particulière (cf. Bachaud, Notes d'histoire sur le Mouesse, Bulletin Soc. Nivernais, 1935).

page 1171 note 8. Cf. à titre d'exemple, le livre de raison d'un bourgeois de Moulins-Engilbert au début du XIXe siècle, dont des extraits ont été publiés par Renault, E., Contribution à l'histoire de Moulins-Engilbert, 1953, pp. 160179.Google Scholar

page 1171 note 9. On ignore l'importance de la consommation des pâtes, mais on trouve à Nevers un « fabricant de vermicelle en pâtes d'Italie » (Almanach du Commerce du département de la Nièvre, 1829). En 1856 on trouve dans la Nièvre trois « fabricants de pâtes et conserves ».

page 1171 note 10. Le riz paraît réservé aux distributions de secours au pauple. « Ce grain est susceptible d'être préparé de différentes manières peu dispendieuses. Il y aurait beaucoup de désavantage à distribuer le riz en nature et sans l'avoir fait préparer. La plus grande partie de ceux auxquels il serait distribué de cette manière ne sauraient pas en tirer profit, peut-être s'en déferaient-ils à vil prix ? Une livre de riz nourrit au moins quatre ou cinq fois autant qu'une livre de pain, parce qu'elle se renfle prodigieusement à la cuisson… » ( de Bourgoing, A., Appel à tous sur les moyens de procurer du travail aux ouvriers et des secours aux indigents, Nevers, 1846, p. 26 Google Scholar).

page 1172 note 1. Sous la Restauration, on mettait en garde le public contre les chocolats frelatés : « Beaucoup de gens n'emploient, pour composer ces pâtes, que des pois secs réduits en poudre, de la farine de riz ou de lentilles, d'autres y mettent de l'amidon ou de la fécule de pomme de terre », mais peu ou point de chocolat (Almanach de la Nièvre pour 1819, p. 152) ; une histoire des fraudes de ce temps serait certainement suggestive. Nous ne savons rien sur la consommation du café (considéré comme remède dans les campagnes), du sucre et de la cassonnade ; notons seulement que Nevers, possédait 5 confiseurs en 1829, 6 en 1842 (dont deux payaient le cens électoral) ; mais la nougatine n'est fabriquée que sous le Second Empire. Sur les sucreries établies en 1813 à La Charité et Cosne, cf. Almanach de l'arrondissement de Cosne pour 1814.

page 1172 note 2. Sur les épiciers de Nevers, cf. Gueneau, L., ouv. cité, p. 227, 592-593.Google Scholar On comptait 30 épiciers en 1753, 16 en 1788 ( Saint-Éloi, M., « Réflexions sur le rôle des tailles de la ville de Nevers en 1788 », in Mém. Soc. Acad. Niv., 1961, pp. 3233 Google Scholar) mais 54 en 1829 ; vers 1830 apparaissent deux vendeurs de « comestibles du midi » ; six épiciers figurent sur la liste des notables commerçants, l'un d'eux est même juge au tribunal de commerce. Une étude de l'ascension sociale des épiciers mériterait d'être entreprise (en 1832, six sont électeurs à Nevers). En 1856 on trouve 440 épiciers dans toute la Nièvre (soit 2 088 personnes actives).

page 1172 note 3. On compte à Nevers en 1829 trois marchands de sel ; en fait la consommation de sel est fort mal connue : la famille de faïenciers déjà étudiée achète 52 kg de sel, 10,40 frs, soit 1 % environ du budget alimentaire ; le sel représente, en 1848-1849, 2 % des dépenses de nourriture des élèves de la colonie de Drazilly (Annales de Poussery, 1850, p. 42) : le sel est donc un poste important du budget alimentaire. Notons que la Révolution avait signifié pour le paysan d'abord la baisse du sel (« Je vous parle du sel à présent qui valait 14 sols la livre, ne vaut que 6 sols, est venu à 3 sols la livre, de 3 sols est venu à 1 sol la livre. Dieu veuille que cela réussit toujours », 15 mai 1790. (” Livre de raison de Jean Guiot, de Baugy ». Arch. de M. Surugue.) En 1848 on demanda partout l'abolition de l'impôt sur le sel.

page 1172 note 4. Cf. « La vigne en Nivernais au XIXe siècle », Actes du 87e Congrès national des Sociétés Savantes, 1963, pp. 569-589.

page 1172 note 5. Dans le Morvan, « ils boivent peu de vin, si ce n'est les jours de dimanches et de fêtes, où ils en prennent outre mesure, parce qu'il y est à bon marché ». Sur les multiples fraudes des cabaretiers on se reportera aux registres des sociétés populaires (par exemple à Varzy, à Corbigny). « Le vin, note-t-on à propos de Châtillon-en-Bazois vers 1850, était presque inconnu dans les petites exploitations. On en buvait deux fois par an : le jour de carnaval et en fin de moisson. » ( Lavault, L., « Châtillonen-Bazois », Cahiers du Centre, août 1909, p. 16.Google Scholar)

page 1172 note 6. Archives Vyau de Lagarde et Journal de Georges Dufaud, qui procède avec le plus grand soin à sa vendange et au soutirage des vins.

page 1172 note 7. Notons que très souvent le paysan, l'ouvrier même, a son bout de vigne baillée à moitié et que l'hallebotage permettait souvent de compléter la vendange (cf. Balzac, Les Paysans : « Par le hallebotage, la famille Tonsard recueillait trois pièces de vin environ).

page 1173 note 1. Stendhal, Mémoires d'un touriste, Cosne, 12 avril 1837 (éd. Pauvert, 1955, p. 29).

page 1173 note 2. A Nevers, les ouvriers boivent, au dire de Toytot (ouvr. cité, p. 189), de la boete », boisson fermentée faite avec des sorbes ou des poires, e t un mélange de poires, de pommes, de grappes aigres et de fruits sauvages (cf. également Montalivet, ouv. cité, p. 31). A Châtillon-en-Bazois, « on buvait un peu de cidre. Il y avait plusieurs pressoirs dans la région. A La Madeleine, le pressoir à huile servait à faire du cidre. » ( Lavault, , ouv. cité, p. 16 Google Scholar). « Les cerisiers sauvages et les merisiers sont assez multipliés dans les bois pour donner au besoin la facilité de fabriquer de bon Kirschwasser ». ( Hugo, A., La France pittoresque, t. II, 1835, p. 277.Google Scholar)

page 1173 note 3. A Nevers, on trouve, en 1829, 4 brasseurs et 1 distillateur (Almanach du commerce du département de la Nièvre pour 1829). En 1840 on trouve également 4 brasseurs produisant pour 100 000 frs de bière (14 ouvriers), à Château-Chinon 3 brasseurs (25 310 frs produits, 5 ouvriers), 1 à Clamecy (17 800 frs) : il s'agit de toutes petites entreprises (Arch. dép. Nièvre, M, Statistiques). En 1844, d'après les chiffres de l'octroi, Nevers achetait 1 690 hl de bière, en 1872, 2 982 hl.

page 1173 note 4. « Le Vin Cuit a dévoré des fortunes de paysan », note Balzac dans les Paysans (éd. citée, p. 70).

page 1173 note 5. C'est le problème de la « gratte » des ménagères (infra, n. 49).

page 1174 note 1. On se reportera par exemple à l'inventaire après décès d'un artisan de Nevers (in J. Locquin, « La vie et l'œuvre d'un maître serrurier : Claude Denis (1722 ?-1782) », Mém. Soc. Acad. Niv., t. 45 (1943, pp. 43-44), on y trouve en plus du matériel usuel, chaudrons, etc… une râpe à sucre, un lèchefrite en tôle, 4 poêles, 2 grils, 1 moulin à poivre. Une étude systématique des inventaires serait sans doute très suggestive.

page 1174 note 2. Cf. E. Renault, OUV. cité.

page 1174 note 3. Par habitudes d'épargne ou par peur de paraître. Chambray (ouv. cité), signale que les plus riches paysans vivent à peu près de même façon que les plus pauvres. Bourgoing (ouv. cité, p. 9) remarque que c'est souvent par volonté d'épargne que le paysan même aisé vit misérablement. « Le besoin seul d'ajouter un morceau de terre à ceux qu'ils possèdent déjà les empêche de se donner les choses les plus nécessaires à la vie. Ainsi, ces hommes ne mangent que peu de viande et boivent rarement du vin, à peine même appellent-ils un médecin en cas de maladie. »

page 1174 note 4. Ainsi que le souligne en 1844 M. de Bourgoing, grand propriétaire : « Sa nourriture plus frugale consiste en pain de seigle (…). La viande leur est inconnue ; ils ne font jamais usage de vin ni de boisson fermentée. Deux fois par jour, ils mangent une soupe épaisse, dans laquelle l'eau vient abondamment délayer une mesure de lait, le pain sec, dur et moisi, est l'aliment des autres repas. On mange moins de ce pain, disent-ils. L'eau est la seule boisson, et pendant l'été, au milieu des champs, dans quelques localités, une eau croupie et chaude vient étancher la soif excitée par les ardeurs d'un soleil brûlant ; aussi, à combien de maladies les paysans ne sont-ils pas en proie à la suite des travaux d'été ? Dans cette saison de pénibles labeurs, rien pour réconforter ces corps fatigués par un travail de seize heures : ni aliment substantiel, ni boisson qui répare les forces constamment épuisées par des sueurs abondantes… » (Ouv. cité, pp. 18-19.)

page 1174 note 5. Rappelons ces lignes de Claude Tillier, qui firent scandale : « Au lieu de faire un bal de 700 frs, que ne les distribuez-vous à ces pauvres manœuvres de l'agriculture, à ces forçats de votre société qui n'ont pas un épi dans les sillons qu'ils fécondent, qui supportent plus de soleil en un jour que nous dans toute l'année, qui ne vivent que de pain noir et d'herbes, qui sont vêtus moins proprement que vos ballots, dont les cabanes sont plus noires que vos bûchers ; à eux, si hâves, si terreux, si desséchés, qui vous font les gros bestiaux dont on fait parade dans vos fêtes agricoles. Vous voulez qu'on améliore des races de chevaux et de bœufs, mais vous avez des races d'hommes à améliorer et vous ne les améliorez pas… Le comice agricole a alloué 40 frs au domestique le plus moral et 200 frs au cheval de selle le plus rapide. Vous entendez bien, 40 frs pour la vertu d'un homme et 200 frs pour la vitesse d'un cheval ! et cela est signé Dupin aîné ! » ( Un flotteur à la majorité du Conseil Municipal de Clamecy, septembre 1840.)

page 1174 note 6. Sur ces fièvres, on se reportera à la « Notice historique et statistique » de Thomas, en tête de l'Annuaire statistique, adm. et comm. de la Nièvre pour 1829, p. 44 et suivantes, et aux procès-verbaux de visite des médecins de la préfecture sous le consulat et l'Empire, Arch. Nat., F8 64, « La fièvre intermittente, écrit Thomas, est la maladie du pays. Elle y est endémique ; elle y règne épidémiquement dans certaines années où la température extraordinaire donne à ses causes une bien grande activité, et la produit ainsi chez un grand nombre d'individus qui, étant bien acclimatés, n'en sont pas naturellement affectés ». Les bûcherons, les ouvriers des forges, les terrassiers du canal du Nivernais étaient souvent épuisés par de telles fièvres (cf. Journal de Dufaud, 1817).

page 1175 note 1. « L'air humide et peu renouvelé » affaiblit et de proche en proche toutes les fibres, relâche tous les ressorts organiques. Il en résulte difficultés et lenteurs dans toutes les fonctions, même les plus essentielles à la vie, telles que la respiration et la circulation, et surtout dans toutes les dépendances du système musculaire. Le système nerveux participe lui-même à cet engourdissement général ; la pensée en devient lourde et tardive, l'imagination y perd toutes ses couleurs comme la peau » ( Thomas, , art. cité, p. 49.Google Scholar) Et de remarquer que « les organes principaux de la vie se trouvant dans un état de faiblesse habituelle, il est facile de présumer que l'habitant de ce pays doit être exempt de toute espèce de passions vives et ardentes. Il porte donc sur tout son extérieur l'empreinte du terrain qu'il cultive. Il offre assez généralement l'aspect de la tristesse et de la souffrance. Son regard est timide, son allure est embarrassée, sa physionomie a peu d'expression : dans l'intérieur le visage est plus pâle que coloré ; il est plus animé dans les montagnes ». (Ibidem, p. 82.)

page 1175 note 2. Les habitants consommaient souvent une eau bourbeuse et corrompue infectée de vers. Le sous-préfet de Clamecy, Delamarre, (ouv. cité, p. 31 Google Scholar), se plaint de l'absence d'hygiène : « Beaucoup de mairies manquent d'eau saine et parfaitement salubre, quelques-unes mêmes en sont totalement privées. L'établissement de puits artésiens serait de nature à produire les plus heureux résultats » ; Delamarre s'adressa même à la Compagnie Flachat pour étudier la création de ces puits.

page 1175 note 3. Thomas, , art. cité, pp. 3639.Google Scholar On retrouverait ainsi en Nivernais la même opposition esquissée par POITRINEAU (art. cité) à propos de la Limagne et des pays hauts.

page 1175 note 4. Arch. Nat., F8 64.

page 1175 note 5. « Les habitants des campagnes ne sont pas d'une haute stature ni d'une constitution robuste. Ceux des villes ont ordinairement une taille plus élevée. L'accroissement des uns et des autres est lent et tardif ; les jeunes gens de dix-huit et vingt ans n'en paraissent avoir que quinze ou seize (…). Il s'est trouvé (des conscrits) dont la taille, la constitution et le son de voix n'annonçaient que des enfants de douze ans. » La puberté n'était atteinte pour les garçons qu'à quinze et seize ans, pour les filles qu'à quatorze et quinze ans.

page 1175 note 6. A six ans, on confie aux enfants la garde des bestiaux, à douze ans on les met à la culture… Bourgoing confirme cette remarque pour Pouilly (Mémoire cité, p. 11) : « Dans les pays de vignobles particulièrement où le vigneron est constamment courbé les enfants qui partagent le travail de leur père se développent tardivement et ne sont formés qu'à vingt ou vingt-cinq ans… »

page 1176 note 1. « Quoique plus tard nubiles, les gens de la campagne se marient toujours plus jeunes que ceux des villes : les enfants sont la principale richesse des laboureurs. » Or ces alliances trop précoces et faites par les parents pour « marier les terres », entraînent un abâtardissement de la race : « les premiers enfants qui en naissent sont faibles et mal constitués, ils périssent presque toujours dans la première année de la naissance. Il n'est pas douteux qu'on doive attribuer à cette cause la grande mortalité qu'on remarque toujours pour les enfants de la campagne, ainsi que la débilité d'un très grand nombre de ceux qui arrivent à un âge plus avancé sans devenir des hommes forts et robustes. » (Thomas, notice citée.) Aucune étude démographique précise n'a encore été faite pour le Nivernais au xixe siècle.

page 1176 note 2. Delamarre souhaitait que les habitants « renoncent à leur pernicieuse habitude de faire rouir leur chanvre dans les mares ou ruisseaux où ils lavent leur linge et dont ils boivent les eaux » (ouv. cité). Dans telle commune « chaque habitant a devant sa porte un monceau de fumier, vrai cloaque pestilentiel, où un grand nombre d'individus puisent des fièvres intermittentes d'une durée extraordinaire ». Sur le manque d'hygiène d'une petite ville comme Luzy, on se reportera à Guéneau, L., « Luzy, nos médecins aux trois derniers siècles », extrait des Mém. Soc. Acad. Niv., 1897, pp. 2324.Google Scholar

page 1176 note 3. En particulier on dénonce la « construction vicieuse » des logements où l'air ne peut pénétrer « que par la porte ou par une ouverture de 48 à 64 centimètres en quarres » ; sur les logements à Imphy en 1812, cf. rapport du médecin Robert, Areh. Nat. F8 64, et sur les logements traditionnels, cf. Droullet, ouv. cité. — « J'ai vu une famille entière couchant dans un seul lit », écrit le député socialiste Malardier, « ou sur la paille, côte à côte avec leurs bestiaux, cela se voit encore dans le Morvan » (” Un an de prison », 1850, ms., Archives V. Guéneau).

page 1176 note 4. Arch. Nat., F8 64 et Notice précitée, p. 88. Notons que tel médecin constate à la Nocle que la dysenterie épidémique provenait « des mauvais aliments dont les habitants faisaient usage ».

page 1176 note 5. Aussi ne sera-t-on pas étonné qu'un conscrit sur 4 ou 5 ait été réformé de 1806 à 1814, soit 10 186, dont 4 360 pour défaut de taille, 1 650 pour faiblesse de complexion, 1 479 pour infirmités et difformités, 377 pour affections scrofuleuses, dartreuses, psoriques, 460 pour hernies, 451 pour ulcères, 119 pour hydropisie… (tableau par arrondissement, Notice précitée, p. 78).

page 1176 note 6. Aucune topographie médicale n'a été entreprise en Nivernais. A noter le faible nombre de médecins (124 docteurs dont 38 n'exercent plus, 114 officiers de santé, en 1851), de lits d'hôpitaux (325 en 15 hòpitaux), l'importance des pratiques superstitieuses, surtout dans le Morvan, — également la forte prostitution (60 à 80 filles visitées en 1851). Cf. « Rapport général fait par le Comité central d'hygiène et de salubrité publique du département de la Nièvre, 1851, 42 pages (Bibl. Nevers, 3 N 4029) : c'est tout un domaine de la recherche qui reste à défricher.

page 1177 note 1. Rapport du préfet Fiévée, 1815, Arch. Nat., FI III, Nièvre, 8.

page 1177 note 2. Conserves également de viande salée ou fumée, de légumes, pots de beurre fondu, de confitures, etc. : l'on connaît fort mal ces pratiques pour le siècle passé.

page 1177 note 3. Sur ces tables, cf. Drouillet, , ouvr. cité, p. 56.Google Scholar

page 1177 note 4. Aucune étude n'a été faite sur l'évolution de la meunerie ; on assiste à une forte concentration des moulins à partir de 1840 (en 1810 il y avait 593 moulins (dont 9 à vent) pouvant produire 1 103 000 qx de farine ; en 1856 on trouve 274 établissements seulement, employant 1 178 hommes).

page 1178 note 1. E. Martin avait été séduit par l'exemple de la colonie agricole de Mettray qu'il avait visitée en 1849, et comparant la boulangerie créée à Fourchambault avec : « Leur pain est bien mieux fait que le nôtre et meilleur. Chez nous 100 1 de farine ne produisent que 139 1 de pain. A Mettray, le jeune boulanger à qui j 'ai causé m'a montré leur compte de 147 1 pour 100 de farine. C'est une différence de 1 000 frs par mois chez nous. » (Arch. E. Martin.)

page 1178 note 2. On y trouvait un pétrin mécanique et un four du système Rolland ; « les achats de farine sont faits avec intelligence, des ouvriers choisis exécutent les travaux » ; or il n'y aurait eu qu'un centime de rabais sur les boulangers du voisinage, alors que la boulangerie avait été créée pour « contenir » les prix des boulangers locaux (REYBAUD, ouv. cité, 1868, p. 51).

page 1178 note 3. « Un grand nombre de boulangers se sont vu dans la nécessité d'avoir recours au pétrin mécanique, ce qui n'a pas laissé de leur occasionner un surcroît considérable de dépenses, en raison de la cherté de l'outillage nouveau et de la force motrice » [Bulletin de la Chambre de Commerce de Nevers, juin 1910).

page 1178 note 4. Notamment par la disparition du pain de seigle et du pain de méteil. En 1855, on ne trouve de cotation du pain de seigle que dans le sud du Morvan.

page 1178 note 5. « De nouvelles façons de vivre se sont imposées, les gens ont fait leur service militaire, et se sont initiés aux moeurs des villes. Beaucoup de femmes se sont placées comme nourrices à Paris ou ailleurs. D'autres ont été servantes de douze à vingt ans. » ( Bachelin, H., Le Sabreur, p. 63 Google Scholar). D'autres raisons ont joué également : la hausse du prix du bois, le manque de temps pour aller faire provision de bois, et chercher la farine au moulin (cf. Coutin, P., « Transformation de l'économie et de la vie dans une commune rurale de la Limagne, Saulzet depuis 1914 », Bulletin de la Section des Sciences écon. et soc. du Comité des travaux historiques, 1932, p. 163 Google Scholar).

page 1178 note 6. Cet usage a duré à Nevers jusqu'en 1914 et dans les campagnes alentour jusqu'en 1940.

page 1178 note 7. « La clientèle devient de plus en plus exigeante. La fabrication du gros pain a presque disparu dans les villes. Le consommateur exige de plus en plus du pain de fantaisie » (Bulletin de la Chambre de Commerce, juillet 1909, p. 17). Et encore : « Ce qu'il conviendrait de changer, ce sont les habitudes de la clientèle qui veut toujours du pain frais pour ses repas de la matinée. » (Ibidem, juin 1910.)

page 1179 note 1. L'évolution de la boulangerie mériterait une étude particulière, il serait bon en effet de calculer les profits, très importants, des boulangers (sur le calcul de la « taxe n du pain, à Nevers, cf. Annuaire de la Nièvre pour 1865, pp. 316-319) ; les boulangers fraudaient très souvent sur les poids : ainsi à Fourchambault, sous l'Empire, chaque nouveau commissaire de police multipliait à son arrivée les procès-verbaux (Arch. dép. Nièvre, M. Police) ; enfin, les frais de la tournée étaitent inclus dans le prix du pain, fixé de façon souvent assez arbitraire. Sur la « rapacité » des boulangers et la tyrannie qu'ils exercent, on se reportera aux rapports très suggestifs du Procureur général de Bourges (Arch. Nat. BB30 374, 1863-1868) sur l'application du décret du 22 juin 1863 sur la liberté de la boulangerie, qui se traduisit, en fait, par une hausse sensible des prix ; le Conseil général dénonçait en 1867 les abus de la boulangerie (Procès-verbaux des séances, pp. 141-142) et le Conseil d'arrondissement de Nevers demandait le rétablissement de la taxe ; certains maires rétablirent, de leur propre autorité, la taxe, ainsi à Varzy, les boulangers menacèrent de faire grève. A Cosne, on créa en 1868 une « société coopérative de boulangerie », qui provoqua l'opposition des marchands de farine et de grains « et il a fallu pour la combattre que l'autorité municipale rétablisse officiellement la taxe » ( Procureur général, 4 avril 1868).

page 1179 note 2. « On peut constater une diminution sensible depuis quelques années de la consommation de pain. A Nevers notamment on peut l'évaluer, toutes proportions gardées, à environ 1 /6e. A quoi tient cette diminution de la consommation ? Évidemment à l'accroissement progressif du bien-être, à une plus grande consommation de viande et de denrées alimentaires, de vin surtout… » (Ibidem, juillet 1909.)

page 1179 note 3. Le phénomène semble demeurer urbain. Notons qu'à Torteron, d'après les calculs de REYBAUD en 1868 (ouv. cité), la consommation était environ de 972 gr pour un adulte, 650 pour un vieillard, 690 pour une femme : de tels calculs semblent bien théoriques. Les chiffres de l'octroi de Nevers (publiés par la Statistique générale de la France) donnent une consommation de pain pour une population « dans le rayon de Voctroi » de 22 276 habitants, de 5 791 t de pain (1872), 4 314 t (1873), 3 374 (1874 et 1875), 4 076 (1876), 4 062 (1882) : la consommation annuelle par tête aurait été de 260 kg (1872), 190 kg (1873), 151 (1874). Il est difficile de savoir le crédit qu'on peut accorder à de tels chiffres (la présence ou l'absence d'un régiment peut faire fortement varier de telles proportions…).

page 1180 note 1. Reybaud (ouvr. cité, p. 48 et suiv.) souligne l'irrégularité de ce poste dans le budget alimentaire d'un ménage de 2 enfants : en 1864, 820 kg de pain valaient 193 frs, en 1865 : 230, en 1868 : 344 frs — alors que le budget alimentaire n'est que de 478 frs ! La hausse des salaires ouvriers ne pouvait compenser des variations aussi fortes.

page 1180 note 2. Notons cette remarque, lors de l'Enquête agricole de 1866 : « Les populations rurales voient avec inquiétude tout ce qui tend à restreindre les cultures de céréales. Le souvenir des disettes est toujours présent. » Mais Benoist d'Azy souligne que l'on convertit déjà le blé en engrais pour les bestiaux : « Plusieurs agriculteurs le font déjà sans en rien dire, mais il serait utile que cela se fit en plus grand » (p. 370).

page 1180 note 3. « Il faut s'attendre, proclamait Delafond dès 1849 (Progrès agricole et amélioration du gros bétail dans la Nièvre…, 1849, p . 219), à voir l'habitude de la viande rôtie, importée d'Angleterre, se répandre parmi la classe la plus nombreuse de la population… » En 1847, le Congrès des agriculteurs du Centre de la France réuni à Nevers déclarait : « Les populations de la campagne ne consomment pas assez de denrées animales, il faut donc les amener par une production plus grande, c'est-à-dire par le bas prix, à en consommer davantage. Il faut en même temps vaincre la force de l'habitude qui, dans les campagnes, résiste à toutes les innovations » (Annales de Poussery, 1847, p. 415) ; et de demander que « dans le but d'assurer aux populations des campagnes un genre d'alimentation plus rationnel et plus profitable, le gouvernement, les bureaux de bienfaisance, les établissements publics introduisent ou augmentent la consommation de la viande et des légumes dans le régime dont ils ont la direction ».

page 1180 note 4. Cf. Maklière, , Statistique de l'arrondissement de Clamecy, p. 49.Google Scholar

page 1180 note 5. Dans l'arrondissement de Cosne, 1 boucher pour 550, dans ceux de Château- Chinon et Clamecy, 1 pour 1 000 ; les frais annuels d'étal étaient de 2 000 frs pour les bouchers de Nevers, 1 000 frs pour ceux de Cosne et Clamecy, 600 pour ceux de Château- Chinon (Arch. Nat., F11 2838).

page 1180 note 6. Ainsi, d'après une enquête orale, un contremaître des forges de Guérigny, gagnant 5 frs par jour vers 1890, ne consommait de viande que le dimanche (pot au feu avec bas morceaux), jamais en semaine (son « quadrain », ne contenait que de la soupe au pain et parfois un peu de lard). On pourrait multiplier les témoignages sur cette sous-consommation de la viande jusqu en 1914.

page 1180 note 7. Cf. « Les transformations agricoles en Nivernais de 1815 à 1840 », Revue d'hist. écon. et soc. (1956).

page 1181 note 1. Toytot, De, Faïenciers de Nevers, ouv. cité, pp. 210211 Google Scholar : « Aujourd'hui les marchés étrangers absorbent à eux seuls la meilleure partie du bétail ; le reste se consomme sur place, mais atteint un prix trop élevé pour être la nourriture du plus grand nombre. » Dès 1840, Bonneau-Lestang — manufacturier de faïence — avait dénoncé cette hausse des prix de la viande.

page 1181 note 2. Ainsi Benoist D'Azy : « En Angleterre, on abat beaucoup de bestiaux au lieu de production, on conserve dans le pays les viandes secondaires et on exporte à Londres les viandes de première qualité qui, par le chemin de fer, arrivent en une nuit. Il en résulte que les pays éleveurs conservent toutes les issues qui seraient sans valeur ou de peu de valeur à Londres. Pensez-vous qu'il serait avantageux pour nos départements, notamment pour le nôtre, de pratiquer cette méthode î » (Enquête sur la viande, 1851, p. 183) : cent ans après, cette conception d'abattoirs industriels n'est point encore acceptée.

page 1181 note 3. Cette régression ne concerne point seulement la viande, mais également tous les produits laitiers le lait, la beurre, même le fromage de ferme : ainsi, d'après l'enquête orale précitée, le fromage se substituait au beurre, trop cher, pour assaisonner les pommes de terre, et même les radis.

page 1181 note 4. Georges Dufaud recevait dès 1829 par les messageries des bourriches de marée de Dieppe. Dès 1830 on voit s'installer à Nevers deux marchands de marée.

page 1181 note 5. Une sucrerie s'est même installée à Plagny en 1853 (Dufaud rapporte dans son Journal le 18 décembre 1851 que des maisons du Nord veulent en créer une à Givry). Cf. Massé, A., Le Canton de Nevers, 1913, pp. 5153 Google Scholar.

page 1181 note 6. Voici ce que l'épicier Gravier proposait en 1854 : « Articles du Midi : raisins, figues, amandes en coques et cassées, noisettes, dattes, oranges, citrons, prunes d'Agen, poires tapées. Thon, câpres, olives, petits pois, champignons, sardines à l'huile et anchois (…) fromages de Gex, Roquefort, Hollande et gruyère… » Le choix semble s'être sensiblement accru depuis 1830. En 1856, on trouvait 440 épiciers en Nivernais, 109 marchands de beurre et oeufs ; des épiciers en gros qui rayonnent sur plu-sieurs départements, implantent dans les campagnes leurs réseaux de petits épiciers (tel le père de Georges Bourgin).

page 1182 note 1. Le rôle de ces « pensions » et internats (songeons à « Claudine à l'école » de Colette) est très mal connu : leur clientèle rurale y prenait le goût et l'habitude d'une alimentation plus riche et plus variée. Un sondage dans les anciens comptes de lycée serait certainement fructueux.

page 1182 note 2. Sur cette émigration, cf. le tableau dressé par Marlière, Ouv. cité.

page 1182 note 3. Cf. H. Bachelin, Juliette la jolie, 1912.

page 1182 note 4. Ainsi le directeur de l'école d'Imphy, Tramkçon, écrit en 1888 dans sa « Monographie d'Imphy » (manuscrit, Arch. privées) ces lignes caractéristiques de tels conflits : « La table (de l'ouvrier) n'égale pas encore celle du riche, mais la dépense est la même par le manque d'ordre et l'exagération du menu. Une simple promenade au marché un lendemain de solde en est la preuve. La toilette est le complément de la ruine, surtout la toilette féminine. Elle engloutit tout ce que la première a épargné quand elle n'empiète pas sur son budget par des revirements de fonds si bien combinés que nos meilleurs comptables n'en devineraient pas l'existence. Les ménagères sont rusées en fait de comptabilité domestique. Elles savent faire avaler leurs jupes à leurs maris, aussi plus d'une belle robe bien pimpante a été achetée à leur insu au compte courant du boucher et de l'épicier » : élément qu'on ne saurait certes oublier !

page 1182 note 5. Ainsi, en 1851, le Comité d'hygiène de Nevers se plaint « de la mauvaise qualité des matières indispensables à l'alimentation et débitées par les épiciers de second ordre, notamment ceux des quartiers populeux et éloignés du centre de la ville ; ainsi on signale la vente d'huile et de vinaigre avariés, de sels impurs. De tels abus… doivent être réprimés sans retard » (Rapport…, p. 16). Soulignons également l'importance des fraudes sur le poids, les demi-livres et quarts de livre étant souvent trop faibles de 5 ou 10 gr.

page 1182 note 6. Sur l'initiative d'un ingénieur du génie maritime, Masson, fut créée une coopérative devant vendre des marchandises « de qualité vraie et de poids sincère » et payées au comptant — ce qui introduisait une petite révolution des moeurs ouvrières. La société comprenait 80 sociétaires en 1866, 1 000 en 1880, 1 390 en 1900 ; en 1880 son chiffre d'affaires s'élevait à 436 000 frs dont 21 968 frs de ristournes, en 1900 à 600 000 frs, dont 70 000 de ristournes. Elle créa une boulangerie, puis vers 1910, une boucherie (cf. Massé, A., Le Canton de Pougues, 1912, pp. 245248 Google Scholar).

page 1183 note 1. Sauf dans le Morvan, au témoignage de J. Simon, Statistique de Frétoy (1889).

page 1183 note 2. Ainsi le Conseil départemental d'hygiène publique et de salubrité demande en 1878 qu'il soit procédé à l'analyse des vins chez les marchands de vins en gros, pour éviter les fraudes (Rapport, 1881, p. 62).

page 1183 note 3. L'auberge tend à disparaître : « Tout le monde va au café, depuis le maire jusqu'aux petits commerçants, en passant par les bourgeois. Tous les ouvriers vont à l'auberge, et quelques-uns même, qui ont des idées de grandeur, au café. Il y a des soirs de contentement où ils se disent : Après tout, on n'en est pas à un sou près. Et au café, ils paient six sous leur apéritif qui, à l'auberge, ne leur en aurait coûté que cinq. Mais ne sont-ils pas citoyens français comme le maire, comme tout le monde ? » ( Bachelin, H., Le serviteur, pp. 136137 Google Scholar).

page 1183 note 4. Au témoignage d'A. Desforges (Un coin du Morvan, Fléty, ouv. cité), un quart des décès en dix ans étaient dûs à la tuberculose.

page 1183 note 5. Sur la mortalité infantile en Morvan, et notamment des « petis-Paris » nourris artificiellement, on se reportera au rapport du Dr Monot, de Montsauche (De Vindustrie des nourrices et de la mortalité des petits enfants…, 1867, et Société des médecins de la Nièvre…, 1872, pp. 17-21) : vers 1870 mouraient 16 % des nourrissons du pays, 33 % des assistés, 65 à 70 % des « bourgeois » : il fallut dix ans pour obtenir une organisation des services d'assistance, et jusqu'en 1890 la mortalité demeura fort élevée.

page 1183 note 6. Les rapports du Comité d'hygiène et de salubrité publique sont éloquents à ce sujet (par exemple sur l'insalubrité des quartiers de la Nièvre à Nevers, Rapport…, 1877, pp. 33-35) : la Nièvre n'était à Nevers qu'un a bourbier puant, (un) marécage infect » et la ville n'était alimentée qu'avec un mélange des eaux de la Loire, empoisonnées par deux usines chimiques, et de la Nièvre, collecteur d'ordures ménagères : de là la fréquence des fièvres typhoïdes mortelles (cf. Dr Ranque, Mémoire sur Vinsalubrité des eaux alimentant la ville de Nevers, mai 1884).

page 1183 note 7. Pendant trente ans on n'arriva point à mettre sur pied un système d'assistance médicale gratuite : or l'on comptait un indigent sur 20 habitants dans les villes, un sur 40 dans les campagnes. « Le paysan pauvre, écrit Bourgoing, est de toutes les créatures celle qui travaille et souffre le plus, celle dont on s'occupe le moins à soulager la misère » (Mémoire…, ouv. cité, p. 13). Cf. le « Projet d'organisation de la médecine gratuite des indigents adopté par l'association des médecins de la Nièvre dans la séance du 18 octobre 1864… », 1865, 24 p. et « Assistance médicale — Extrait du rapport du Préfet… au Conseil général », 1875, 18 p. Une étude du développement de l'assistance médicale gratuite serait certainement très suggestive.

page 1184 note 1. Les enquêtes orales permettent de recueillir de précieux témoignages sur les coutumes vers 1900-1910. Il serait souhaitable de lancer en Nivernais une telle enquête — sur un questionnaire préétabli — grâce notamment à l'aide des instituteurs, bons connaisseurs du terroir.