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Développement Quantitatif et Développement Qualitatif en Chine a la Fin de L'Époque Imperiale

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Pierre-Étienne Will*
Affiliation:
Collège de France

Extract

Le concept de « développement » est à manier avec délicatesse, surtout par les historiens. L'historiographie chinoise continentale l'utilise pourtant d'abondance : fazhan (” développement ») reste un mot passe-partout sanctionné par la vision linéaire de l'histoire avec laquelle se confond le marxisme. En dépit des obstacles et des inévitables revers, l'économie, les forces productives, la société, la culture, etc., n'ont pu faire autrement que de « se développer » (c'est-à-dire en suivant le programme défini par la téléologie stalino-maoïste). Des notions comme celles de « piège » d'« involution », ou plus banalement de « stagnation », avancées par certains auteurs influents pour caractériser l'économie de la Chine à la veille de sa rencontre avec l'Occident scientifique et industrialise

Summary

Summary

This article starts with a brief review of the different types of economie development and growth treated in the literature, and asks the question: What the Chinese experience during the period ca. 1600-1850 may have been in this respect? The vantage point adopted here is that of the imperial government and its bureaucracy. From the beginning of the eighteenth century, an awareness of the growing imbalance between population increase and food production on a Umited land base led to various efforts to improve the quality and output of Chinese agriculture. The officiai approach to economie development was conservative: the existing order was to be made more productive, but changes in occupational distribution and an increased division of labor were considered sociaily disruptive.

Type
Économie et Techniques en Chine
Copyright
Copyright © École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris, 1994

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References

1. Allusion au concept de « high-level equilibrium trap » proposé par Elvin, Mark, The Pattern ofthe Chinese Past, Londres, 1973, pp. 298316.Google Scholar Idée comparable de « piège de la réussite », mais appliquée de façon beaucoup plus systématique, dans le récent essai de Jenner, W. J. F., The Tyranny of History : The Roots of China's Crisis, Harmondsworth, 1992: « Ce sont précisément les réussites du passé qui ont créé les difficultés actuelles », pp. 12.Google Scholar

2. La notion d'« involution » a été empruntée à l'anthropologie culturelle par Clifford Geertz pour décrire le processus d'intensification dans la riziculture inondée à Java (cf. Agricultural Involution : The Process of Ecological Change in Indonesia, Berkeley, 1963, en particulier pp. 80-82 pour les définitions). Concernant la Chine, voir Huang, Philip C. C., The Peasant Economy and Social Change in North China, Stanford, 1985 (en particulier pp. 8-16, 296-298),Google Scholar et The Peasant Family and Rural Development in the Yangzi Delta, 1350-1988, Stanford, 1990 (en particulier pp. 11-17). Pour Huang, il y a « involution » à partir du moment où la courbe corrélant l'apport en travail et la productivité tend à s'aplanir ; C. Geertz, quant à lui, met l'accent sur les aspects technologiques (et écologiques), dont découle évidemment le problème des rendements décroissants.

3. La « culture », pour reprendre le thème du livre récent et passablement désordonné de Khôi, Lê Thành, Culture, créativité et développement, Paris, 1992.Google Scholar

4. Pour une application un peu simpliste de cette notion à la Chine de la fin des temps traditionnels, cf. Lippit, Victor D., « The Development of Underdevelopment in China », dans Huang, Philip C. C. éd., The Development of Underdevelopment in China : A Symposium, Sharpe. 1980, pp. 178.Google Scholar

5. Sur les définitions des différents types de croissance et leur application éventuelle au cas chinois, on se reportera avant tout aux travaux et réflexions d'Albert Feuerwerker, et en dernier lieu : « Questions about China's Early Modem Economie History that I Wish I Could Answer », The Journal of Asian Studies, LI/4, 1992, en particulier pp. 764-765. A. Feuerwerker parle de croissance « extensive » et de croissance « intensive », ou « per capita » (avec des rendements en expansion), cette dernière se partageant à son tour entre une croissance « smithienne » — ou préindustrielle, dans le cadre d'une même « production-possibility frontier » — et une croissance « industrielle » impulsée par les progrès de la science. L'ouvrage classique sur ce dernier type de croissance reste Simon Kuznets, Modem Economie Growth : Rate, Structure, and Spread, New Haven, 1966. On se référera également aux définitions proposées par Philip Huang (notamment dans Peasant Family and Rural Development, op. cit.), et aux commentaires qu'elles ont suscités : voir en particulier Wong, R. Bin, « The Development of China's Peasant Economy : A New Formulation of Old Problems », Peasant Studies, XVIII/I, 1990, pp. 526.Google Scholar

6. Le dernier chapitre de Mark Elvin, The Pattern of the Chinese Past, op. cit., est intitulé « Quantitative growth, qualitative standstill ». D'autres (Philip Huang notamment) parlent de « croissance sans développement ». Voir aussi le commentaire d'A. Feuerwerker sur Thomas Metzger, « On the Historical Roots of Economie Modernization in China : the Increasing Dificrentiation of the Economy from the Polity during Late Ming and Early Ch'ing Times », dans Hou, C'hi-Ming et Yu, Tzong-Shian éds, Modem Chinese Economie History, Taipei, 1978, pp. 1516.Google Scholar

7. Cf. T. Metzger, art. cité, p. 5.

8. Kuhn, Philip A., Soulstealers : The Chinese Sorcery Scare of 1768, Cambridge, Mass., 1990, chap. 2, notamment pp. 3839.Google Scholar A. Kuhn attribue l'amélioration de la fin du xvur siècle à des facteurs essentiellement monétaires.

9. Skinner, G. William, « The Structure of Chinese History », The Journal of Asian Studies, XLIV/2, 1985, pp. 271292.CrossRefGoogle Scholar

10. Il va de soi que le problème de la pression démographique sur un domaine foncier limité se rencontre plus tôt (ainsi les « cantons à l'étroit » [xiaxiang] dans les classifications régissant le système de redistribution périodique des terres à l'époque des Tang, au vne et jusqu'au milieu du VIIIC siècle) ; mais avant le xvine siècle on n'en parle pas comme d'un problème irréversible et, surtout, se posant à l'échelle de l'empire.

11. Je perçois mal, à ce stade, quels informateurs et quels conseillers ont pu pousser les empereurs Kangxi, Yongzheng et Qianlong à donner à plusieurs reprises une formulation à la fois synthétique et alarmiste du problème population/subsistances, et ce bien avant qu'il n'ait acquis la visibilité et les manifestations qui conduiront, à l'extrême fin du siècle, aux sombres considérations d'un Hong Liangji (1746-1809), le « Malthus chinois ». Les mémoires de gouverneurs provinciaux traitant de la question auxquels j'ai eu accès répondent aux préoccupations impériales, bien plus qu'ils ne les suscitent.

12. Cité dans Chen Zhenhan éd., Qing shilu jingjishi ziliao nongye bian (Matériaux d'histoire économique extraits des « Chroniques véridiques » des Qing, section sur l'agriculture), vol. 2, Pékin, 1989 (ci-dessous JJSZL), p. 32. On trouvera dans cet ouvrage les références précises (date, juan et page) au texte original des « Chroniques véridiques » (Shilu). Certains des textes cités ci-dessous apparaissent aussi dans d'autres compilations.

13. JJSZL, p. 32 ; également Wen Xingzhen, « Kangxi yu nongye » (Kangxi et l'agriculture), Gugong bowuyuan yuankan, 1983/1, p. 30.

14. JJSZL, p. 4.

15. Ibid., p. 13.

16. En 1748, notamment tous les gouverneurs de province sont requis de donner leur avis sur la question (la plupart des réponses sont résumées dans les « Chroniques véridiques ») ; la dis cussion porte en particulier sur le point de savoir dans quelle mesure les achats réguliers et massifs de grains pour reconstituer et même accroître les réserves des greniers publics sont à l'origine de cette tendance irrationaliste et pourraient par conséquent être réduits. Pour une vue d'ensemble du débat voir Helen Dunstan, « The High Grain Priées of 1748 : on the Importance of Due Scepticism », communication non publiée, Australian National University, 1983.

17. Cf. JJSZL, p. 38. Cette dernière remarque vaut pour l'émigration au-delà des limites delà Chine propre.

18. Ibid., pp. 40-41.

19. Ibid, pp. 22-23.

20. Il y aurait une infinité de notations, émanant des auteurs les plus divers, à citer en ce sens. Beaucoup évoquent les terres marginales (bancs d'alluvions émergées, etc.) dont on peut encore tirer quelque chose, ou les montagnes appartenant au domaine public qui pourraient être exploitées pour produire du combustible, mais ils signalent aussi les difficultés soulevées par les problèmes de droits de propriété. Le déficit en combustible dû à l'accroissement démographique est un thème fréquent, de même que l'impact accru des crises de subsistances (sur ce dernier point, cf. Will, P.-É., Bureaucratie et famine en Chine au 18'siècle, Paris, 1980, pp. 264265 CrossRefGoogle Scholar).

21. P.-É. Will, « Officiai Efforts at Improving Agriculture in Eighteenth-Century China », communication non publiée, Conférence on New Perspectives on the History of Science and Technology in China, University of California at Los Angeles, mars 1988.

22. Les empereurs Qing ne se sont jamais résolus à instituer des « fonctionnaires agricoles » (nongguan) qui eussent eu la charge de « diriger l'encouragement à l'agriculture » (si quannong) : cf. les édits de 1723 et 1729 dans JJSZL, pp. 4-5, 8.

23. Voir, pour un exemple ancien, le mémoire de 178 av. J.-C. traduit dans Wm. Théodore Dr Bary, Chan, Wing-tsit et Watson, Burton éds, Sources of Chinese Tradition, vol. 1, New York, 1960, pp. 213216.Google Scholar L'ouvrage de Song Xixiang, Zhongguo lidai quannong kao (Les politiques d'encouragement agricole en Chine à travers les âges), Pékin, 1946-Shanghai, 1947, offre une utile sélection de sources depuis la haute Antiquité jusqu'au xxe siècle.

24. Francesca Bray, The Rice Economies, Oxford, 1986, pp. 141-142 (également pp. 202- 203), parle à propos des Song d'un « well-coordinated programme of agricultural development » ; de fait, l'ensemble de mesures qu'elle mentionne évoque de près, mais en plus organise, les efforts préconisés au XVIII” siècle. Cela étant, le même auteur se demande aussi (pp. 22- 23) si la mise au point et la dissémination de variétés de riz performantes (l'un des faits majeurs de la « révolution économique médiévale », pour reprendre l'expression un peu solennelle de Mark Elvin) ne seraient pas dues à l'action spontanée des paysans, bien plus qu'à celle des fonctionnaires : en d'autres termes, si le programme en question a eu autant d'impact et de réalité qu'on est tenté de le croire.

25. L'expression apparaît à l'époque des Royaumes Combattants (V-IH'siècles av. J.-C). autrement dit l'âge d'or de la compétition inter-étatique à l'intérieur de l'aire chinoise.

26. Le slogan fuguo qiangbing (prononcé fukoku kyôhei) est également la réponse japonaise à la menace occidentale, dès les dernières années Tokugawa et pendant toute l'époque Meiji. Soulignons ici une ambiguïté essentielle dans le mot guo (jap. koku). Dans les efforts (passablement incohérents) de modernisation en Chine avant 1895 il désigne l'État dynastique et non le « pays » en tant que tel : c'est après cette date seulement que l'on commence à concevoir l'enrichissement de l'Etat et de la société (de l'État-nation) comme la source véritable de la puissance militaire. Voir à ce sujet les remarques conclusives de Jérôme CH'EN, State Economie Policies of the Ch'ing Government, 1840-1895, New York, 1980. Irokawa Daikichi, l'un des meilleurs spécialistes japonais de Meiji, propose ironiquement de détourner la formule fukoku kyôhei en la glosant « appauvrir le pays et renforcer l'armée », tant d'après lui la modernisation industrielle et militaire du Japon a été édifiée sur les « sacrifices des ouvriers et des paysans » : cf. The Culture of the Meiji Period (trad. sous la direction de Marius Jansen), Princeton, 1985, p. 71. Il s'agirait donc d'une logique de « développement » très particulière dont c'est évidemment loin d'être le seul exemple.

27. Pour reprendre le titre de l'étude classique de Zelin, Madeleine, The Magistrate's Tael : Rationalizing Fiscal Reform in Eighteenth-Century Ch'ing China, Berkeley, 1984.Google Scholar

28. Le texte est reproduit dans la collection « Huang Qing zouyi » (Mémoires et propositions de la dynastie des Qing), s. d., 41/7b-12a ; voir également la biographie de Chai Chaosheng dans l'histoire officielle des Qing (Qingshi, Taipei, 1961), 307/4156-4159.

29. On retrouve là un des thèmes favoris de W. J. F. Jenner dans son ouvrage The Tyranny of History, op. cit. : loin de se situer dans la descendance immédiate des dernières dynasties impériales, le régime communiste a fait retour aux méthodes « totalitaires » de contrôle et de mobilisation pratiquées dans l'Antiquité.

30. Cf. Gaozong shilu (Annales véridiques de l'empereur Qianlong), 45/14b-17a, 57/19b, 20b, 58/21b-22b, 63/20b, 64/8a-9b. Voir également les quelques indications que j'ai données dans VAnnuaire du Collège de France, année 1992-1993, pp. 710-711.

31. L'étude classique sur cette affaire est Timothy Brook, « The Spread of Rice Cultivation and Rice Technology into the Hebei Région in the Ming and Qing », dans Hu Daojing éd., Explorations in the History of Science and Technology in China, Shanghai, 1982, pp. 659-690 ; voir également P.-É. Will, Bureaucratie et famine, op. cit., pp. 256-257. L'indication (à vrai dire assez vague) des dépenses entraînées se trouve dans un édit de 1737 (Jjszl, pp. 430-431) où l'empereur Qianlong évalue les résultats du programme lancé par son père avec quelque nuance.

32. Cf. Lamouroux, Christian, « Politique rizicole et déséquilibres régionaux : la région du liang-Huai (vinc-xr siècles). II : Espaces du crédit et espaces rizicoles », Journal ofthe Economie and Social History of the Orient, vol. 37, 1994.Google Scholar

33. Pour les projets formulés à la fin du xvie siècle et au début du xvne, Ming huiyao (Institutions des Ming), Taipei, 1960, 53/998-999 ; pour les débats sous le règne de l'empereur Daoguang (1821-1850), voir les textes cités dans Song Xixiang, Lidai quannong kao, pp. 89-91.

34. Dans un texte de 1744 (partiellement reproduit dans sa biographie officielle citée supra), Chai Chaosheng affirme que le programme était viable mais qu'il a été interrompu par la mort du prince Yi en 1730, et qu'il avait été de toute manière compromis par l'inexpérience des fonctionnaires stagiaires envoyés sur le terrain.

35. Cf. JJSZL, pp. 429-430.

36. Cité dans JJSZL, p. 432. Comme le montre bien l'étude de T. Brook citée supra, le problème n'était pas seulement l'irrégularité de l'approvisionnement en eau, mais aussi la densité insuffisante de la force de travail disponible sur place.

37. Je pense à la publication au palais impérial d'ouvrages richement illustrés et agrémentés de poèmes signés par les empereurs, tels le Gengzhi tu (Planches sur les labours et les tissages, 1696, modelé sur un ouvrage du même titre composé sous les Song) ou le Mianhua tu (Planches sur la culture du coton, présenté à l'empereur en 1765 par le gouverneur de la province métropolitaine, Fang Guancheng).

38. Sur le Shoushi tongkao, voir Francesca Bray, Agriculture (Joseph Needham éd., Science and Civilisation in China, vol. VI : 2), Cambridge, 1984, pp. 72-74. F. Bray insiste sur la place quelque peu disproportionnée tenue dans l'ouvrage par le discours politique et par les citations de textes anciens, mais le Shoushi tongkao n'en introduisait pas moins ses utilisateurs à des ouvrages très concrets et relativement récents (du moins si l'on se réfère au rythme où évoluaient alors les techniques agricoles), mais difficiles d'accès. Plusieurs gouverneurs ou préfets mentionnent le Shoushi tongkao parmi les ouvrages à acquérir ou à remplacer par les bibliothèques locales de publications officielles. Chen Hongmou (1696-1771), l'un des grands gouverneurs provinciaux de la période, affirme que c'est la lecture de cet ouvrage qui lui a donné l'idée du programme de diffusion de la patate douce dans la province du Shaanxi qu'il lance au milieu des années 1740 : cf. Chen Hongmou, Peiyuantang oucun gao (Archives conservées au pavillon Peiyuan), 20/la-b ; P.-É. Will, « Promoting the Sweet Potato in Eighteenth-Century China », à paraître dans Food and Foodways.

39. Voir pour les détails Wen Xingzhen, « Kangxi yu nongye », art. cit., pp. 20-26.

40. L'ouvrage de Stross, Randall, The Stubborn Earth : American Agriculturalists on Chinesc Soil, 1898-1937, Berkeley, 1986,Google Scholar s'ouvre (pp. 1-2) sur une comparaison entre George Washington et l'empereur Qianlong (morts l'un et l'autre en 1799), le premier passionné d'expérimentation et de progrès agricole, le second (d'après R. Stross) imbu de culture lettrée, se désintéressant de ce genre de problèmes concrets et incapable de percevoir « la nécessité d'un soutien gouvernemental direct en faveur de l'amélioration agricole ». Il est certainement exact que Qianlong n'était pas un « bricoleur » agronomique comme Washington (et, dans une certaine mesure, Kangxi), mais il est totalement erroné de lui attribuer cette attitude d'indifférence.

41. Plusieurs édits du règne Yongzheng et du début de Qianlong tentent d'intégrer l'énergie déployée pour « encourager l'agriculture » et les résultats obtenus aux éléments intervenant dans la notation des magistrats : cf. l'encyclopédie administrative Huangchao zhengdian leizuan (1903, ci-dessous Zdlz), 23/4a-b, 5b-6a. Dès 1743, pourtant, l'empereur est contraint d'admettre que ce genre de critère est difficile à évaluer.

42. Dans un long édit de 1727, qui s'ouvre sur un rappel de la croissance démographique et de ses conséquences, Yongzheng proclame que lorsqu'il mange du riz il prend garde de ne pas en gaspiller un seul grain et que pour lui, qui par définition ne se trouve pas dans le besoin, pareille parcimonie découle d'un « respect naturel » (tianxing ziran zhi jingshen) — entendons, un respect dont il serait dans la nature même des choses (tianxing) que tout le monde le partageât. Cf. JJSZL, pp. 5-7 ; également ZDLZ, 23/8b-9a.

43. Cf. Song Xixiang, Zhongguo lidai quannong kao, op. cit., p. 76.

44. Notamment l'utilisation du blé pour fabriquer la pâte fermentée servant de base aux alcools non distillés dans les provinces de Chine du Nord. Cf. P.-É Will, Bureaucratie et famine, op. cit., pp. 164-165. La question de savoir jusqu'où il est possible et souhaitable de prohiber la distillation des grains et la fabrication des ferments fait l'objet d'un vaste débat au début du règne de l'empereur Qianlong (à la fin des années 1730). Une interdiction est effectivement édictée en 1738, dont l'application semble avoir été fort inégale d'un endroit à l'autre. Dès la fin des années 1750, on n'en parle plus guère. Plusieurs textes d'auteurs intervenus à l'époque se retrouvent dans l'anthologie Huangchao jingshi wenbian (ci-dessous JSWB, et voir infra) : cf. Helen Dustan, An Anthology of Chinese Economie Statecraft, or : The Sprouts of Liberalism (manuscrit non publié, 1988), documents 20-25, pour une introduction détaillée au débat et un ensemble particulièrement réussi de traductions ; les traductions apparaissent aussi dans H. Dunstan, Conflicting Counsels to Confuse the Age : A Documentary Study of Qing Political Economy 1644-1840, Ann Arbor, sous presse.

45. On trouvera un choix de textes prétendant décourager la culture du tabac — et témoignant par la même occasion de l'extrême popularité du produit un peu partout dans l'empire, dont le P. Hue dans les années 1840 donne par ailleurs un témoignage tout à fait frappant (The Chinese Empire, 2= éd., Londres, 1855, vol. 1, pp. 202-205) dans Jjszl, pp. 6, 439-441. Mais les fonctionnaires qui se sont risqués à mettre en oeuvre ou simplement proposer des programmes autoritaires, et donc impopulaires, d'éradication se sont toujours fait critiquer : seule la persuasion est autorisée, et il est clair qu'elle n'a jamais donné beaucoup de résultats.

46. Pour deux synthèses richement détaillées sur le développement de l'agriculture commerciale à la fin de l'empire, voir Li Zhiqin, « Lun yapian zhanzheng yiqian Qingdai shangyeqing nongye de fazhan » (Le développement de l'agriculture commerciale sous la dynastie des Qing avant la guerre de l'opium), dans Zhongguo Renmin daxue Zhongguo lishi jiaoyanshi éd., Ming Qing shehui jingji xingtai de yanjiu (Recherches sur la situation socio-économique sous les Ming et les Qing), Shanghai, 1957, pp. 263-357 ; et Liu Cuirong, « Ming Qing shidai nanfang diqu de zhuanye shengehan » (La production spécialisée dans le sud de la Chine à l'époque des Ming et des Qing), Dalu zazhi, LVI/3-4, 1978, pp. 1-35.

47. Ou « Recueil d'écrits de la dynastie régnante sur l'administration de la société ». Le JSWB est publié en 1827 sous le nom de son commanditaire, He Changling (1785-1848), l'exemple même de ces hauts fonctionnaires activistes, encouragés par l'attitude des empereurs mandchous, qui n'avaient de cesse d'améliorer les choses en combinant l'érudition et l'approche concrète des problèmes. L'ouvrage s'inspire de modèles remontant à la fin des Ming et aux années 1770 ; de façon caractéristique, son objet n'est pas de proposer un programme de reforme, mais de dresser une sorte de bilan de tout ce qui s'est fait (ou plutôt, écrit) de mieux dans les deux ou trois derniers siècles.

48. « Qing haijiang he mian jianzhong shu » (Mémoire demandant que l'on combine la riziculture avec la culture du coton dans les régions côtières), JSWB, 37/2a-3a. Le texte se trouve également dans Huang Qing zouyi, 61/la-4b, et dans ZDLZ, 23/7b-8b. Traduction et commentaire dans H. DUNSTAN, An Anthology of Chinese Economie Statecraft, op. cit., document 26.

49. A savoir, l'envasement et la dégradation du réseau d'irrigation dans les terroirs légèrement surélevés qui bordent l'estuaire du Yangzi.

50. Il y aurait beaucoup à dire concernant cette dernière notion. Le mot li avait en fait de multiples emplois et connotations entre lesquels il était toujours possible de jouer. Lorsque li est (comme ici) employé péjorativement, le « profit » désigné est en quelque sorte ce qui vient « en plus » du minimum souhaitable, et surtout, qui ne bénéficie qu'à l'individu (ou au foyer, ou à la firme, ou à toute autre entité privée) au détriment de la collectivité. Dans son acception positive, au contraire, li signifie l'avantage, potentiel ou actualisé, mais en fin de compte public (l'« intérêt du peuple », minli), qui peut être extrait d'une activité ou d'une infrastructure. C'est ainsi qu'un des slogans de base du programme d'amélioration agricole qui nous occupe ici s'énonce jin di li, « utiliser à fond les ressources [litt. les avantages] du sol », en d'autres termes, appliquer à l'environnement tous les facteurs de production susceptibles de lui faire rendre le maximum. Précisons que toutes les nuances se rencontrent entre ces deux extrêmes, et qu'en particulier il n'est nullement exclu que le « profit », au sens purement commercial du terme, et à condition que certaines limites soient respectées, puisse rencontrer l'« intérêt » public dans son acception la plus orthodoxe.

51. On reconnaît ici le goût des Chinois pour ces formules bien balancées auxquelles la langue écrite se prête avec bonheur. La formule redondante du Liji a même été incorporée au fameux manuel de jargon bureaucratique, le Liubu chengyu zhujie : cf. E-tu Zen Sun (trad. et éd.), Ch'ing Administrative Ternis: A Translation of the Terminology of the Six Boards with Explanatory Notes (Cambridge, Mass., 1961), p. 162. Tian Wenjing, gouverneur de la province du Henan pendant une grande partie du règne de Yongzheng, proclame au début d'une adresse à ses administrés pour les encourager à la frugalité : « Les paysans se dépensent trois saisons pour recueillir la récolte d'une saison ; ils peinent trois années pour accumuler une année de réserves ; telle est la voie des anciens : cultiver trois ans pour mettre de côté une année, cultiver neuf ans pour mettre de côté trois années (geng san yu yi, geng jiu yu san) ». Le titre même de cette adresse (” Exhorter chacun à célébrer la tempérance [jiejian] afin d'accroître la richesse du peuple [mincai] ») énonce clairement la connexion entre frugalité et prospérité : la dépense ne peut pas engendrer la richesse. Cf. Fu Yu xuanhua lu (Écrits pour propager la civilisation pendant mon gouvernorat du Henan) (préf. 1727), 3A/146a.

52. Édit reproduit dans JJSZL, pp. 5-7, à diffuser à toute la population. Yongzheng ajoute une dimension religieuse à son raisonnement : si l'on respecte et économise les nourritures offertes par le Ciel, celui-ci saura les multiplier, alors que si on les gaspille il s'en irritera, et l'on ne pourra alors éviter calamités et famines.

53. C'est le thème d'une proposition de la cour, approuvée par l'empereur, et à laquelle réagit Zhang Yunsui : les magistrats ont un rôle essentiel, tant pour améliorer la qualité de l'agriculture dans leurs circonscriptions que pour combattre l'attirance des petites gens pour la dépense et pour les métiers « inessentiels » (non agricoles) ; comme ils sont débordés et peu familiers avec un terrain immense, il conviendrait de relayer leurs efforts en désignant des paysans modèles (litt. des « vieux paysans », laonong), respectés par leurs pairs, qui éduqueraient et admonesteraient ces derniers. La proposition de la cour et le commentaire de l'empereur se trouvent dans les Chroniques véridiques de Qianlong (Gaozong shilu), 44/5a-b. L'institution des « vieux paysans » remonte en fait à 1724 et est mentionnée à plusieurs reprises pendant le règne de Yongzheng : par exemple JISZL, pp. 4-5 ; ZLDZ, 23/3b. Elle s'inspire de précédents remontant à la haute Antiquité.

54. En quoi l'on est assez loin des « maîtres paysans » (nongshi) institués à l'époque des Song, qui auraient eu pour missive explicite de disséminer les techniques nouvelles et à qui était « probablement » destinée la littérature agronomique publiée sous le patronage du gouvernement, ce qui aurait fait d'eux « the Sung équivalent of a rural extension officer » : cf. Francesca Bray, Agriculture, pp. 598-599. En revanche le rôle dévolu à ces « paysans d'élite » n'est pas sans évoquer certaines responsabilités en matière d'« encouragement à l'agriculture » incombant aux « chefs de li » institués au début des Ming, l'objectif étant non de promouvoir l'innovation mais de garantir la continuité du processus de « reproduction » socio-économique : voir par exemple Tsurumi Naohiro, « Rural Control in the Ming Dynasty », dans Growe, Linda et Daniels, Christian éds, State and Society in China : Japanese Perspectives on Ming- Qing Social and Economie History, Tokyo, 1984, en particulier p. 260 ss.Google Scholar

55. Le document original, daté QL 2/9/19, est conservé aux Archives n° 1 à Pékin, série Nongye/ tunken gengzuo, 3e liasse (je remercie James Lee pour m'en avoir communiqué une copie) ; on le retrouve dans Jswb, 36/6a-7a, sous le titre « Quannong sance shu » (Trois mesures pour encourager l'agriculture), avec quelques coupures et variantes ; ainsi que dans Huang Qing zouyi, lui-même repris dans ZDLZ, 23/6a-7a. A la place de « vieux paysans », Zhang emploie l'expression « paysans d'élite » (shangnong).

56. Cf. Gaozong shilu, 56/15b-16a.

57. Cf., parmi d'autres exemples, un mémoire du gouverneur du Henan, Yaertu, daté de la fin 1741 et cité dans JJSZL, pp. 18-19.

58. Cité dans JJSZL, pp. 7-8.

59. Claudine Lombard-Salmon, qui a proposé une traduction de ce passage, dit « colifichet » (Un exemple d'acculturation chinoise: la province du Gui zhou au xvnrsiècle, Paris, 1972, p. 183).

60. Interpréter dans ce sens une formule comme shengeai (” produire des richesses ») est à mon avis erroné : il s'agit de produire les richesses indispensables à la conservation de l'équilibre général, et non pas de l'ambition faustienne de rendre chaque individu (ou chaque unité familiale) toujours plus riche.

61. Dans le même texte, l'empereur s'inquiète des risques d'un enseignement des humanités auquel auraient accès les gens de capacité inférieure, et pas seulement les hommes de talent et de caractère capables de devenir d'authentiques lettrés (shi) : ces futurs « ratés » doivent eux aussi être renvoyés aux champs avant d'être tentés de mettre à profit le fait qu'ils « savent quelques caractères » pour traîner çà et là et mal se conduire. Là encore les vues impériales vont à l'encontre de développements qui se produisent spontanément dans la société. (Sur le développement de l'alphabétisation à la fin de l'empire, l'ouvrage de référence reste Evelyn Sakakida Rawski, Education and Popular Literacy in Ch'ing China, Ann Arbor, 1979).

62. Pour reprendre une formule de l'empereur Qiamlong dans un édit de 1738, lui-même cité dans un édit de son successeur Jiaqing en 1818 (cf. Song Xixiang, Lidai quannong kao, p. 81).

63. A cette vision qui domine encore au xvme siècle s'oppose, à partir de 1810 environ, celle de ceux que Lin Man-houng appelle les « réalistes », par opposition aux « moralistes ». Les « réalistes » (dont Wei Yuan ou He Changling, les compilateurs du JSWB, sont de bons représentants) croient à la possibilité de produire plus de richesses à partir des ressources naturelles, d'ouvrir des mines, d'améliorer les techniques, y compris en s'inspirant de l'Occident… Cf. Man-houng, Lin, « Two Social Théories Revealed : Statecraft Controversies over China's Monetary Crisis, 1808-1854 », Late Impérial China, XII/2 (1991), pp. 135.Google Scholar

64. C'est incontestable dans le cas des religieux : dans un de ses premiers édits (encore daté de Yongzheng), le futur empereur Qianlong dénonce le luxe parasite des moines bouddhistes et taoïstes et souligne, là encore, qu'« un moine de plus c'est un paysan en moins », ce qui en l'occurrence est d'autant plus condamnable qu'il faut (affirme le texte) le dur labeur de trois agriculteurs pour assurer à un seul moine nourritures délicates et vêtements fins. Cf. JJSZL, pp. 10-11. Le ton est très anticlérical, même si l'auteur affirme vénérer les enseignements du Bouddha et de Lao et Zhuang.

65. Ainsi que l'a bien exprimé William T. Rowe, « State and Market in Mid-Qing Economie Thought : The Case of Chen Hongmou (1696-1771) », Études chinoises, XII/1 (1993), pp. 7-40, ici p. 4 : « … it can be said that mid-Qing bureaucrats had no intention of accepting as natural and désirable the conséquences of any significant market-driven structural change in the economy ». 66. JJSZL, pp. 22-23.

67. Litt. « en Chine intérieure » (neidi) ; cf. JJSZL, p. 32 : « Les fonctionnaires qui m'adressent des listes de propositions (tiaozou) parlent tous de défricher de nouvelles terres et de stocker des grains : cela prouve qu'ils sont ignorants des affaires actuelles. Aujourd'hui, la population prolifère ; ceux qu'il faut nourrir sont légion, et il y a peu de champs ; tous les terrains [susceptibles d'être mis en culture] dans les montagnes sont labourés et plantés. En dehors de cela, on se demande quelles pourraient bien être les nouvelles terres à défricher en vue d'accumuler des réserves ». En 1716, Kangxi dit encore : « Certains parlent de défrichements : ils ne savent pas qu'il n'y a plus rien d'inexploité en Chine propre » —ce qui explique, en l'occurrence, le nombre de gens allant cultiver les terres « au-delà des passes » (ibid).

68. Édit cité ibid.

69. Édit cité ibid., pp. 32-33.

70. Sur ces réformes, voir l'ouvrage de Madeleine Zelin cité supra, note 27.

71. C'est ce qui est dénoncé dans de nombreux textes, par exemple un édit de 1734, cité ibid.

72. Parmi les nombreux textes sur cette affaire, on se reportera à ceux reproduits dans JJSZL, pp. 34-36. Ce scandale, visant deux chauds partisans des réformes et plus généralement du « style » de Yongzheng (ce qui leur avait valu l'hostilité de nombreux collègues et notables), est sans doute à replacer dans le contexte général de la succession de 1735, marquée par un certain nombre de règlements de comptes et de remises en cause brutales, en pleine période de deuil, des idées et des politiques de Yongzheng par son fils. On trouve au moins trois rapports détaillés de Wang Shijun sur ses efforts de défrichement au Shandong et au Henan en 1734- 1735 dans les Archives n° 1 de Pékin, série Nongye, boîte 273 (datés respectivement YZ 12/2/26. 12/3/21 et 13/3/27). L'un des successeurs de Wang au Henan, le gouverneur Yaertu, rédige en 1740 un mémoire dénonçant à son tour les abus perpétrés au nom du programme de défrichements (repris dans JSWB, 34/13a-b).

73. Cf. l'édit de 1740 reproduit dans JJSZL, p. 37. On trouve une réaction intéressante à cet édit dans un mémoire d'un certain Yue Zhonghuang, daté QL 5/11/1 (Pékin, Archives n“l. série nongye, boîte 275) ; l'auteur, un officier en poste au Sichuan, donne une description contrastée des différents types de terrains répondant à cette définition et énumère les raisons techniques ou « transactionnelles » (conflits sur les droits de propriété, crainte de la fiscalité, exactions du petit personnel administratif) susceptibles de décourager les efforts des « petites gens » pour les défricher : contrairement à tant de bureaucrates, Yue ne met pas en cause la « stupidité » des paysans et leur incapacité à reconnaître les sources de profit qu'ils ont devant les yeux. Il suggère donc de confier la supervision de ce type de développement aux « vieux paysans » dont on a ordonné à la même époque la mobilisation (cf. supra), et de garantir aux défricheurs la protection juridique indispensable, voire de leur proposer des prêts de démarrage.

74. Cf. par exemple l'édit de 1760 cité dans JJSZL, p. 38. Parmi de nombreux documents d'archives, on se reportera aux quatre chapitres (47-50) du Huangchao (un recueil de pièces destinées à être résumées dans le traité économique de la future histoire dynastique) portant sur les « défrichements civils au-delà des passes » (guanwai- minken), conservés au Musée du Palais à Taipei et constituant le n° 6 d'une série intitulée « neuf volumes sur les défrichements » (Tunken jiuce). Parmi ces textes qui concernent l'ensemble des marches septentrionales de la Chine, on notera un édit de 1776 (j. 48) poussant les autorités du Gansu à encourager l'émigration vers le Xinjiang pour alléger la misère d'une province trop peuplée et nécessitant des aides continuelles ; le texte donne en exemple les distances considérables couvertes chaque année par les paysans pauvres du Shandong (dans l'est de l'empire) pour aller s'employer en Mongolie intérieure et en Mandchourie. Cet édit m'apparaît remarquable dans la mesure où les valeurs traditionnelles de stabilité et d'attachement au terroir natal y sont inversées : l'empereur et ses conseillers déplorent le côté casanier des paysans du Gansu, qui préfèrent croupir dans leur misère plutôt que de tenter un nouveau départ dans ce Far-West chinois qu'est désormais le Xinjiang, et manifestent leur approbation pour ceux du Shandong, qui n'ont pas peur de couvrir des centaines de kilomètres chaque année avec vieillards et enfants. La colonisation du Xinjiang a un intérêt avant tout stratégique pour la dynastie mandchoue, mais l'on n'en voit pas moins des textes avancer l'argument démographique (soulager la surpopulation de la Chine intérieure). C'est à la fin du xvme siècle, semble-t-il, que l'émigration spontanée vers le Xinjiang a pris une ampleur suffisante pour que la colonisation par déportation de condamnés n'ait plus d'objet : cf. Joanna Waley-Cohen, « Banishment to Xinjiang in Mid-Qing China 1758-1820 », Lute Impérial China, X/2 (1989), pp. 44-71. L'idée de coloniser le Xinjiang à grande échelle pour remédier à la pression démographique en Chine propre se retrouve chez plusieurs auteurs dans les années 1820 : cf. Fletcher, Joseph dans The Cambridge History of China, vol. 10, Late Ch'ing, 1800-1911, Part I, Cambridge, 1978, p. 155.Google Scholar

75. Il est plusieurs fois question, dans les années 1730 et 1740, de stabiliser les fonctionnaires locaux dans leurs postes pour leur laisser le temps de se familiariser avec le terrain et d'obtenir des résultats, mais les statistiques manquent pour dire si l'on a effectivement agi dans ce sens. Li Ba, un préfet réformiste en poste au Fujian (infra, note 90), affirme en 1762 qu'« à divers moments les gouverneurs comme les responsables locaux ont tenté d'encourager et de guider fies populations] par toutes sortes de méthodes ; mais à peine lançaient-ils une entreprise qu'ils étaient mutés ailleurs : cf. Funing fuzhi (monographie de la préfecture de Funing, 1762, rééd. 1880), 12/24a. La durée type d'une magistrature (située en bas de la hiérarchie, au contact direct du terrain) est de trois ans, mais il semble que bien souvent la rotation ait été nettement plus rapide. Le renouvellement des gouverneurs de province — dont le rôle d'impulsion et de contrôle était considéré comme crucial — était à la discrétion de l'empereur et sujet à toutes sortes d'aléas politiques. Un petit nombre, et non des moins interventionnistes, ont pu en fait rester de longues périodes dans la même région.

76. Le statut juridique et politique exact des règlements édictés par les fonctionnaires des différents échelons de la hiérarchie territoriale reste à explorer. Ceux publiés dans les collections de « précédents provinciaux » (shengli, ou cheng'an) étaient supposés avoir la même autorité que les précédents « nationaux » régulièrement publiés à la capitale ; ils étaient donc disjoints de la personnalité de leurs initiateurs et entraient, en quelque sorte, dans le domaine public. Localement, en revanche, il ne semble pas que les directives des magistrats aient eu le même taux de survie. Font cependant exception certains règlements spécifiques (relatifs à l'entretien d'infrastructures locales, à des problèmes d'ordre public, etc.) dont la validité « à jamais » (yong) était sanctionnée par leur inscription sur stèle. Pour une introduction commode aux textes administratifs sur stèle, voir Vermeer, Eduard B., Chinese Local History : Stone Inscriptions from Fukien in the Sung to Ch'ing Periods, Boulder, Co., 1991.Google Scholar

77. L'opposition entre Nord et Sud en matière de productivité et de prospérité est un thème omniprésent dans la littérature de l'époque. Soulignant la différence de développement entre les régions pourvues d'un dense réseau de transport par eau (donc bon marché) et les autres — ce qui recouvre grosso modo l'opposition entre Sud et Nord, respectivement —, Mark Elvin (The Pattern of the Chinese Past, op. cit., pp. 304-305) n'hésite pas à parler de « dualisme économique prémoderne ». Le contraste est aussi celui entre les conditions hydrologiques et climatiques autorisant ou non la riziculture à haut rendement : les réformistes les plus enthousiastes, dont beaucoup étaient originaires du Sud, avaient souvent tendance à sous-estimer le poids des écologies et à vouloir transférer en bloc les techniques dont ils étaient familiers dans des environnements qui ne s'y prêtaient guère.

78. Cf. Suizhou zhi (monographie du département de Suizhou), éd. 1869, 21/39b-40a (notice biographique), 32/30b-32a (stèle rédigée par un certain Yan Mu, huit ans après le départ de Li). Li Chongsi n'est pas un inconnu : sa carrière le conduira à plusieurs postes importants et il dirigera notamment, avec le titre de président du ministère des Travaux publics, l'une des campagnes de drainage des rivières du bassin du lac Tai au Jiangnan, en 1522. Cf. sa biographie dans l'histoire officielle des Ming, le Mingshi (éd. Zhonghua shuju), 201/5307-5309.

79. J'en ai relevé plusieurs dans les monographies des sous-préfectures montagnardes du bassin supérieur de la Han, dans le Sud du Shaanxi : là encore, il s'agit de régions déshéritées où c'est le rôle du gouvernement de faire sauter un certain nombre de verrous culturels et technologiques.

80. Cf. la synthèse de James Lee, State and Economy in Southwest China, 1250-1850, Cambridge, Mass., à paraître. Sur le Guizhou, cf. Cl. Lombard-Salmon, Un exemple d'acculturation chinoise, op. cit. De façon intéressante — et en contraste avec les industries textiles dont il sera question plus bas — l'industrie minière, qui dans ce cas semble bien avoir impulsé tout le 1 este, était délibérément orientée vers l'exportation, encore que ce fût dans le cadre du quasimonopole d'Etat sur les métaux monétaires.

81. En 1740, le gouverneur général du Guizhou Zhang Guangsi, relaye une série de proposilions du trésorier provincial (prêts de démarrage, développement de la sériciculture et du coton, défrichements, irrigation, pédagogie agricole, etc.) qui font l'objet d'un examen critique de la cour et sont renvoyées pour rediscussion (JJSZL, pp 15-17 ; voir aussi les deux rapports de 1741 reproduits pp. 17-18, ainsi que celui de 1742, cité p. 443, où Zhang Guangsi rappelle qu'il ne faut pas compter sur des résultats immédiats). Voir aussi ibid., pp. 20-21, concernant le Yunnan en 1744, et p. 445 (et infra) concernant le Guizhou en 1761. Bon nombre des plus éminents représentants de la haute administration territoriale au milieu du xvme siècle ont fait leurs classes au Yunnan ou au Guizhou pendant les années Yongzheng ou au début de Qianlong.

82. Comme c'est le cas du canal de dérivation de la rivière Jjing (appelé canal Longdong à l'époque des Qing), dans la province du Shaanxi, dont la conception extrêmement audacieuse remonte au îir siècle avant notre ère, et qui aurait alors permis au royaume de Qin de prendre l'ascendant sur ses rivaux en multipliant son potentiel économique. Les programmes d'extension ou de réhabilitation du dispositif se sont succédés au cours des siècles, et jusqu'à notre époque. Cf., parmi d'autres travaux, Huang Shengzhang, « Guanzhong nongtian shuili de lishi fazhan ji qi chengjiu » (Le développement historique de l'irrigation dans le Guanzhong et ses résultats), dans Lishi dili lunji (Études de géographie historique), Pékin, 1982, pp. 111-146, qui met bien en relief la banalisation des petits dispositifs d'irrigation sous les Ming et les Qing, par opposition aux travaux de plus grande ampleur entrepris sous les régimes précédents (ce travail m'a été signalé par Christian Lamouroux) ; ainsi que P.-É. Will, « Attempts at Reviving the Zheng-Bai Irrigation System in the Wei River Valley of Shaanxi in the Late Impérial Period : A Preliminary Investigation », à paraître dans Elvin, Mark et Liu, Ts'ui-jung éds, Studies in the History of Environment in China, Cambridge.Google Scholar

83. Les mêmes difficultés se retrouvent dans le nord-ouest du Shandong, de l'autre côté de la frontière, qui crée une limite artificielle. Il est caractéristique du système que les politiques de développement soient le plus souvent définies dans le cadre de la région administrative et non de la région naturelle.

84. P.-É. Will, Bureaucratie et famine, op. cit., pp. 223-225, et les sources citées ; également JJSZL, pp. 21-22. Le caractère chronologiquement fragmentaire des sources locales fait qu'estimer l'impact à long terme de ce genre d'opération est toujours difficile, voire tout à fait impossible.

85. Le modèle traditionnel dans lequel les textiles servent à l'autoconsommation et à la fourniture de prestations en nature au gouvernement informe encore la règle édictée par le fondateur des Ming, Zhu Yuanzhang, suivant laquelle les exploitants qui ont entre 5 et 10 mu de terre sont requis de consacrer 0,5 mu aux mûriers, au chanvre et au coton, et le double pour ceux qui ont plus de 10 mu. On est donc loin d'une quelconque logique de marché, impliquant spécialisalion et recherche des avantages relatifs. L'édit de Zhu Yuanzhang est cité dans de nombreuses sources, ainsi l'encyclopédie Gujin shiwu kao (1563), éd. Guanzhong congshu (1749), 3/lla, article nongsang.

86. Dans le cadre de l'économie rurale, l'élevage du ver à soie, le filage et le tissage restent une activité d'abord féminine, par opposition au tissage dans les foyers urbains spécialisés qui se multiplient depuis le xvie siècle, en particulier dans les villes du Jiangnan cotonnier et séricicole. Le gouverneur Yin Huiyi note en 1737, à propos des foyers ruraux dans le même Jiangnan, qu'une petite fille peut filer à partir de 6 ou 7 ans et tisser à partir de 11 ou 12 ans (âges à l'occidentale), et qu'une journée de travail couvre plus que les besoins de la travailleuse (JSWB, 36/5a-6a).

87. Il existe une abondante littérature sur ces sujets ; pour une première approche on pourra se reporter aux travaux fondateurs de chercheurs japonais tels que Nishijima Sadao, « The Formation of the Early Cotton Industry », et Tanaka Masatoshi, « Rural Handicraft in Jiangnan in the Sixteenth and Seventeenth Centuries », l'un et l'autre dans L. Growe et C. Daniels, State and Society in China, op. cit., respectivement pp. 17-77 et 79-100. Voir également la contribution de Francesca Bray dans ce numéro.

88. Voir une excellente description du processus dans Xu Xiaowang, « Qingdai Jiangxi nongcun shangpin jungji de fazhan » (Le développement de l'économie commerciale dans les villages du Jiangxi à l'époque des Qing), Zhongguo shehui jingji shi yanjiu, 1990/4, pp. 30-40.

89. Rizhilu jishi (éd. Shijie shuju, Taipei, 1974), 10/243.

90. La sécheresse du climat en Chine du Nord rendait les fibres de coton cassantes et le filage plus difficile ; le problème n'a été que progressivement résolu.

91. Cf., parmi bien d'autres, les propos du gouverneur du Gansu en 1744, ceux du gouverneur militaire du Fengtian (la Mandchourie méridionale) l'année suivante, ou ceux des autorités du Sichuan en 1765 (dans Jjszl, pp. 447-448) ; de même Yin Huiyi, gouverneur du Henan, en 1737 (JSWB, 36/6a), ou encore Li Ba, préfet de Funing (Fujian) en 1759 et un peu plus tard de Fuzhou, la capitale de la province (ibid., 37/5b-6a ; également dans Mulingshu jiyao, 3/15a-b, et dans Funing fuzhi [1762, rééd. 1880], 38/43b-47a). Rappelons que, par définition, ces fonctionnaires soucieux de développer leurs circonscriptions venaient d'ailleurs (on ne pouvait être en poste dans sa province d'origine) ; de fait, ils venaient souvent de ces provinces développées du sud de la Chine dont ils souhaitaient enseigner les techniques à leurs administrés.

92. Cf. les sources mentionnées dans les notes précédentes, et infra pour les efforts de diffusion de la sériciculture au Shaanxi.

93. Cf. par exemple Li Ba introduisant la culture du coton au Fujian (supra, note 91) : il fallait qu'il vienne et qu'il procède à des essais sur un lopin attaché à ses bureaux pour que ses administrés découvrent que la plante prospérait parfaitement dans leur province. Même idée chez un Chen Hongmou cherchant à introduire la patate douce au Shaanxi (supra, note 38), et chez d'innombrables de leurs collègues.

94. La biographie de Yang Shen dans la monographie locale de sa sous-préfecture natale (Xingping xianzhi [1923], 5A/18b-19a) le présente comme une sorte de gourou entouré de centaines de disciples, qui semble avoir fasciné Chen Hongmou : celui-ci l'invite à Xi'an pour « l'interroger sur la Voie », lui achète un titre d'étudiant de l'Université impériale (jiansheng), et l'associe étroitement à ses projets séricicoles, participation qui lui vaudra diverses récompenses honorifiques. Sur le Binfeng guangyi (litt. « Amplification du sens des Chansons de la principauté de Bin »), rédigé en 1740 et publié deux ans plus tard avec une préface du gouverneur de la province, voir WANG Yuhu, Zhongguo nongxue shulu (Bibliographie descriptive des ouvrages agronomiques chinois), 2e éd. rév., Pékin, 1979, pp. 221-222. L'ouvrage tire son titre de la section des « Chansons des Principautés » (Guofeng, la première partie du Livre des odes,feng peut aussi avoir le sens de « coutumes ») consacrée à Bin, une principauté située dans l'ouest du bassin de la Wei, dont le nom a été conservé jusqu'à nos jours et où se seraient installés un temps les ancêtres du fondateur des Zhou, à la fin du deuxième millénaire avant notre ère ; la première des sept pièces du Binfeng, une sorte de calendrier agricole, mentionne effectivement la culture du mûrier et la sériciculture. Le Binfeng guangyi inspirera dans les années 1830 Yang Mingyang, un autre gouverneur soucieux de promouvoir la sériciculture au Shaanxi, et recevra même une préface de l'empereur Daoguang.

95. Les papiers administratifs publiés de Chen Hongmou incluent quinze documents intéressant la promotion de la sériciculture au Shaanxi, échelonnés entre 1745 et 1757, sur lesquels s'appuient les considérations qui suivent : cf. Peiyuantang oucun gao, 19/6a-6b, 26b-28a, 20/ 38a-39b, 21/la-b, 23/14a-15b, 24/18a-20b, 30a-31a, 57b-58a, 27/31b-33b, 30/30a-32b, 35/33a-34a, 39/la-3a, 10a-12a, 13a-16a, 56a-57a.

96. La moindre n'étant pas le trouble apporté dans la région par le passage des corps expéditionnaires engagés dans les campagnes du Jinchuan (en 1748-1749) et du Turkestan (en 1755), événements dont Chen Hongmou admet en 1757 qu'ils ont compromis la continuité de son action et empêché qu'on en recueille les fruits (Peiyuantang oucun gao, 39/lb-2a).

97. De façon significative, un édit impérial de 1758 laisse entendre que le trésor provincial du Shaanxi à Xi'an, regorge de soieries inutilisées et ordonne au successeur de Chen Hongmou d'essayer de les vendre sur le marché d'Urumchi, en Mongolie occidentale. La tentative ne semble pas avoir rencontré beaucoup de succès. Cf. Gaozong shilu, 557/23b-24a et 558/10a-b.

98. Peiyuantang oucun gao, 39/13a-16a, daté du deuxième mois de 1757.

99. YAN Zhongping, « Ming Qing liangdai difangguan changdao fangzhiye shili » (Exemples de fonctionnaires locaux des Ming et des Qing ayant promu l'artisanat textile), Dongfang zazhi, XLII/8 (1946), pp. 20-26, affirme qu'un dépouillement exhaustif des biographies de fonctionnaires dans les monographies locales en livrerait entre mille et deux mille exemples pour les q uatre siècles de la fin des Ming et des Qing ; sa propre étude en cite 56, dont 42 à l'époque des Qing. Pour les programmes de promotion à l'échelon de la province, signalés de façon relativement systématique dans les « Chroniques véridiques », voir JJSZL, pp. 441-449.

100. Supra, n. 94.

101. Supra, n. 91, et JJSZL, p. 441.

102. Pour cet exemple, et quelques autres du même ordre, voir Y AN Zhongping, art. cité, p. 25.

103. Les Shilu contiennent quelques entrées mentionnant le développement, encouragé par les autorités, de la culture du coton en Asie centrale : cf. JJSZL, pp. 448-449.

104. Cf. Song Xixiang, Zhongguo lidai quannong kao, op. cit., pp. 87-89, citant plusieurs proclamations extraites du Quanmin huiji (Recueil d'écrits pour exhorter le peuple) de Zhou Lian (texte auquel je n'ai pu avoir directement accès ; les proclamations s'échelonnent entre 1818 et 1821) ; également la notice biographique sur Zhou Lian dans la monographie locale de Gaotai, Gaotai xianzhi (1921, éd. 1925), 4/7b. Zhou y est décrit comme le fonctionnaire modèle type, s'occupant aussi bien de problèmes économiques que d'éducation ; il semble avoir eu de réelles connaissances dans le domaine du travail du coton.

105. Cf. Gaotai xianzhi, chap. 2. L'ouvrage date de 1921 mais compile des matériaux couvrant toute la fin de l'empire (cette dimension historique caractérise la quasi-totalité des monographies locales).

106. J'ai proposé dans « Chinese Local Gazetteers : An Historical and Practical Introduction », Notes de recherche du Centre Chine, n° 3 (1992), un inventaire des types de matériaux compilés dans les monographies locales chinoises et des difficultés que soulève leur utilisation.

107. Perdue, Peter C., Exhausting the Earth : State and Peasant in Hunan, 1500-1850, Cambridge, Mass., 1987.CrossRefGoogle Scholar

108. C'est là tout le problème des vagabonds, moines errants, prédicateurs, patrons de tripots ambulants, acteurs et autres mendiants, dont le nombre semble s'être considérablement gonflé dans le courant du xvme siècle.

109. A cet égard, le contraste est frappant avec l'approche favorisée par les bureaucraties des domaines féodaux (les han) au Japon à la même époque, lesquelles ont rapidement acquis du développement régional une vue compétitive et extravertie : le problème était de conquérir des parts de marché pour sauvegarder les finances locales, et c'est à quoi devaient contribuer l'innovation, le développement de nouveaux produits, etc. : voir par exemple Tessa Morris-Suzuki, « Concepts of Nature and Technology in Pre-lndustrial Japan », East Asian History, I (1991), pp. 81-97, en particulier p. 91. Il n'est pas besoin d'insister sur l'impact qu'ont pu avoir de telles conceptions lorsqu'elles ont été élargies, au xixe siècle, au contexte international.

110. Yan Zhongping, « Ming Qinq liangdai difan guan changdao fangzhiye shili », art. cit., pp. 25-26. Moins lucide peut-être, mais annonçant un thème abondamment ressassé en Chine populaire après 1949, est l'idée, chez le même auteur, que sans l'intrusion occidentale, et malgré les politiques « confucéennes » dont il vient d'être question, la Chine aurait produit sa propre révolution textile.

111. Cf. le chapitre intitulé « Commercialization in a Small-Holder Economy » dans Sucheta Mazumdar, Peasants, Technology and the World Market : Sugar and Society in China, Cambridge, Mass., 1994. L'auteur insiste cependant sur le fait que la structure même de la production et de la commercialisation de la soie au Guangdong rendait improbable l'émergence d'un processus d'industrialisation.

112. Yan Zhongping, art. cité, pp. 23-24 ; Cl. Lombard-Salmon, Un exemple d'acculturation, op. cit., pp. 178-180, où l'on trouvera une description circonstanciée de la culture des vers à soie sauvages au Guizhou due à une mission commerciale lyonnaise de la fin du xixc siècle. La diffusion des vers à soie autotrophes du Shandong (qui forment leurs cocons directement sur les feuilles de certains arbres) dans toutes les régions où l'on trouvait les espèces adéquates semble avoir été une grande affaire dans les années 1740, même si le succès n'a pas partout été le même ; un manuel est publié avec l'encouragement de la cour et au Shaanxi, par exemple, Chen Hongmou diffuse plusieurs directives demandant à ses subordonnés de repérer les régions où poussent les arbres en question (il existe toute une série d'appellations ; Cl. Lombard-Salmon parle de chênes) et d'enseigner la méthode à leurs administrés : cf. plusieurs des textes cités supra, note 95. D'après Yan Zhongping, pp. 24-25, le savoir-faire acquis par les habitants de la région de Zunyi en matière de tissage aurait permis le développement, beaucoup plus limité il est vrai, d'un artisanat du coton utilisant de la matière première importée, après que diverses tentatives officielles d'acclimatation de l'arbre à coton eurent échoué.