L'histoire autrichienne, pendant tout le cours de son développement, a gardé d'évidents et intimes contacts avec l'histoire d'Allemagne ; elle a conservé non moins, dans toutes ses phases, son caractère particulier. Si l'on veut, elle a connu toute une suite d'oscillations, l'influence allemande se faisant tantôt plus et tantôt moins forte sur elle. Relativement faible depuis 1866, elle s'est sans aucun doute accrue depuis la guerre ; elle s'exerce en ce moment avec une force tout à fait extraordinaire : le déclanchement du mouvement nazi en fournit la preuve incontestable.

« Voyez ces antiques lignées paysannes, figées depuis des siècles sur les mêmes terroirs ! Nul mélange parmi elles, ni arrivées, ni départs. Avec l'extraordinaire mobilité des habitants des villes, quel saisissant contraste !… » Ainsi parlaient jadis, il n'y a pas si longtemps, nos vieux auteurs. L'autochtonie du paysan ! Beau thème à déclamations ; mais vieux mythe, que l'histoire dément. Véritables vagues de fond, des brassages répétés n'ont cessé d'infuser aux couches rurales un sang nouveau : telle est la vérité qu'enseigne, avec des nuances, presque toute étude régionale approfondie. Témoin, entre autres, l'Entre-Deux-Mers. L'exemple est typique : il a cependant ses originalités propres.

Parallèlement à l'enquête entreprise par les Annales sur Les archives privées et l'histoire et sans la méconnaître, voici que Mr E T . SABBE nous procure une très précise et très utile mise au point de la question. Lui aussi déplore des destructions, involontaires ou systématiques : celle, par exemple, en 1902, des archives des Rotschild de Francfort et de leur succursale de Naples. Suit tout un historique des efforts et des réalisations pour conserver et classer les archives économiques privées. En Allemagne d'abord, dès 1905, Krupp organisait ses archives utilisées dans le livre de W. Berdrow ; également Siemens-Schuckert. L'année suivante était créé le Wirtschaftsarchiv de Cologne ; après-guerre, au Bayerische Hauptstaatsarchiv, fut constitué le Wirtschaftliche Abteilung ; enfin, en 1930, le Verein Deutscher Jngenieure s'est adjoint un Fachgruppe fur die Geschichte der Technik dans le but d'établir un dépôt d'archives techniques et un musée de la technique moderne dont l'intérêt n'a pas besoin d'être souligné.

Nous avons déjà signalé cette belle découverte : les plans cadastraux de 399 communes du département du Nord — plans du Consulat, par nature de cultures — retrouvés dans les bureaux des Contributions Directes. L'honneur en revient, on ne l'a pas oublié, à Mr P. PiéTresson de Saintaubin, Archiviste en chef du département. Voici qu'aujourd'hui, dans un article de la Reçue du Nord, il nous fait part d'une bonne nouvelle de plus : grâce à ses soins, ces précieux documents ont été versés aux Archives Départementales où les travailleurs, désormais, pourront les consulter en toute commodité. Il nous en donne en même temps un inventaire qu'illustrent, avec une carte de la répartition des communes ainsi cadastrées, trois suggestives reproductions de plans.

L'excellent inventaire des plans de la Seine-et-Oise, qu'a dressé M1 H. Lemoine, Archiviste du département, se divise en quatre parties. D'abord les plans d'Ancien Régime. Ils sont ici remarquablement abondants. C'est que, dans cette région en elle-même fertile et où, par surcroît, les seigneuries se trouvaient, pour une large part, aux mains soit de vieilles et riches églises, soit de familles des plus aisées — noblesse de cour ou de robe, haute bourgeoisie parisienne, — les fortunes capables de supporter les frais assez lourds qu'imposait la confection des terriers et des cartes étaient, plus qu'ailleurs, nombreuses.

Suivre attentivement le travail d'histoire locale qui, avec des hauts et des bas, se poursuit patiemment en France ; mettre en valeur l'effort, toujours méritoire, que fournissent, auxiliaires bénévoles des historiens de carrière, tantôt des instituteurs ou des curés de campagne ; des médecins parfois et des magistrats ; plus rarement des cultivateurs et presque jamais (il le faut regretter pour nos études) des notaires : c'est là, on le sait, et depuis le premier jour, une des plus grosses préoccupations des Annales.

On a déjà beaucoup écrit sur le crédit. Mais le champ est vaste et la publication quasi simultanée par trois maîtres de la science économique de trois ouvrages qui, sous des angles divers, attaquent cette question capitale en est la preuve tangible.

Et d'abord à un point de vue qui est surtout de vulgarisation, au sens le meilleur du terme, le livre de Mr Louis Baudin doit être très bienvenu. C'est en quelque sorte, sous une forme plutôt historique, un panorama aussi large et complet que possible des aspects multiples de ce phénomène capital aujourd'hui qu'est le crédit. Nettement découpé, le livre comprend quatre parties.

On sait que le Comité du Folklore Champenois, qui édite un vaillant petit Bulletin trimestriel, a commencé, sous la vigoureuse impulsion de notre collaborateur Mr AndrÉ Varagnac, une vaste enquête en vue de recueillir et de mettre au point en un important classement d'ensemble tous les éléments de ce qu'on est convenu d'appeler le Folklore. Des tentatives partielles analogues avaient été déjà entreprises par Mr Van Gennep pour la Savoie et le Dauphiné.

Mr Varagnac procède par diffusion de questionnaires successifs. Il les lance dans une région, puis dans une autre, dépouille les réponses, note les particularités et les constantes — et prépare ainsi des documents solides pour des études d'ensemble sur le folklore non seulement national, mais international — car le cadre national est de toute évidence insuffisant ici.

Mr Alexandre Eck dédie son livre à la Belgique hospitalière. Il devait cet hommage au pays qui lui a permis de continuer ses travaux à l'Université de Gand d'abord, pendant neuf ans, puis à l'Université libre de Bruxelles. Né de son enseignement, l'ouvrage est introduit auprès du public par une substantielle préface de Mr Henri Pirenne. Il mérite ce haut patronage. Mr Eck fournit enfin aux médiévistes qui ne savent pas le russe, une vue pénétrante de l'évolution sociale de la Russie, du XIIIe au XVIe siècle. Il ne s'embarrasse pas, à la manière de trop d'historiens russes, de doctrines a priori. Il ne tire ses déductions que des faits déjà établis, en disciplinant la richesse de son savoir par un sentiment profond de la complexité des phénomènes.

Dans l'Histoire du Moyen Age, qui fait partie de YHistoire Générale, dirigée par Mr Gustave Glotz, le tome VIII, récemment paru, est consacré à « La civilisation occidentale… du XIe au milieu du XVe siècle ». Simple triptyque, à vrai dire, où sont décrits côte à côte, par trois auteurs différents, trois « mouvements » : « économique et social », par Mr Henri Pirenne ; «intellectuel, moral et littéraire », par Mr Gustave Cohen ; «artistiques » enfin — ici les mots ont été prudemment mis au pluriel — par Mr Henri Focillon. Cette notion de la «civilisation », ce cloisonnement surtout prêteraient, si l'on s'y laissait aller, à bien des réflexions. Certes, la réalité humaine, qui est foncièrement une, ne saurait, cependant, s'étudier, en pratique, sans coups de ciseaux. N'en accusons pas seulement la forme de notre esprit voué, par nature, à l'analyse, c'est-à-dire à la décomposition.

Que les constructions navales occupassent, au coeur des activités vénitiennes, une place de tout premier rang, on le sait — comme on sait tant de choses, d'une façon grosse et vague. Mais quels problèmes matériels et techniques sans cesse renouvelés, quels difficiles problèmes d'organisation et de discipline du travail humain posait l'existence de cette industrie : on ne se le demande point avec précision. Mr Fred. Chapin Lane, dans un livre intéressant qu'il intitule Venetian ships and shipbuilders of the Renaissance, nous donne, à la fois, l'étude d'histoire des choses et d'histoire des hommes qui nous faisait défaut.

Du XIIIe au XVe siècle, le navire vénitien par excellence, c'est la galère. La petite galère servait pour le combat. Très mobile, pouvant constituer avec d'autres navires similaires un corps de bataille homogène, sa vitesse lui permettait soit de contraindre l'adversaire à livrer bataille, soit de se dérober elle-même au combat.