L'année 1957 marque la fin de la période d'expansion ininterrompue que l'économie belge connaît depuis 1954. Les signes de fléchissement se sont multipliés au cours de l'année : on a d'abord vu la diminution des commandes nouvelles enregistrées par l'industrie, puis celle de la production elle-même.

Sous l'influence de la chute des prix des matières premières et des frets maritimes, les importations ont baissé avant les exportations. La réduction des stocks de matières importées a été partiellement compensée par le stockage involontaire de produits domestiques restés invendus et notamment du charbon. En fin d'année, le chômage conjoncturel a refait son apparition.

L'élan qui caractérisait l'économie mondiale depuis plusieurs années ne s'est plus poursuivi en 1957. Dans presque tous les pays sont apparus progressivement des signes d'essoufflement. Bien qu'on ne dispose pas encore du recul nécessaire pour formuler un jugement, il semble bien qu'en Belgique le point culminant du cycle se soit situé vers le milieu de l'année; alors qu'on assistait au cours du premier semestre au mûrissement de la haute conjoncture, tandis que les tensions devenaient progressivement plus violentes et plus diverses, les premières manifestations de la récession apparurent au cours du second semestre.

Dans l'histoire sociale de notre pays, l'année 1957 figurera en bonne place : non pas, il est vrai, en raison de réalisations décisives qu'elle aurait appoitées, mais en raison des enseignements que les événements de ces douze mois permettront de dégager.

Un fail domine les deux premiers tiers de l'année, et ce fait est le vote d'une loi : le 12 mars 1957, le législateur créait une taxe exceptionnelle de haute conjoncture en même temps qu'il décidait un blocage des salaires et des prix. Il peut paraître paradoxal de mettre cette législation en évidence à une heure oú l'on ne parle plus que de mesures propres à enrayer une récession économique. Il convient pourtant de se rappeler ce qui était considéré comme le problème numéro l, lorsque l'année 1957 commença.

Comme tous ses partenaires de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier, hormis la France, la Belgique a connu en 1957 une production de houille inférieure à celle de l'année précédente. En fait, sauf le sursaut de l'année 1955, la production des houillères beiges est en décroissance constante depuis plusieurs années.

D'autre part, les stocks se sont accrus de façon à exiger des mesures spéciales permettant le warrantage des grosses quantités immobilisées sur le carreau des mines.

Après le ralentissement conjoncturel qui a suivi le boom de Corée, une nouvelle période d'expansion commence en 1954, au cours de laquelle la production sidérurgique atteint de nouveaux sommets historiques. Dans la C.E.C.A., la hausse conjoncturelle est rapide au début, car, à ce moment, il existe encore des capacités inutilisées, mais elle se ralentit ensuite, au fur et à mesure que l'on épuise les possibilités de production. L'extension de celles-ci est, certes, possible, mais elle ne suit pas toujours le rythme d'expansion de la demande, étant donné le temps qui s'écoule avant de pouvoir mener à bonne fin les nouveaux investissements. De cette manière, l'année 1957 se caractérise par un nouveau record de la production, bien que le rythme d'accroissement par rapport à l'année 1956 soit en général inférieur à celui enregistré pendant les trois premières années de la période de hausse 1954, 1955 et 1956. De plus, certains signes avant-coureurs d'un retournement de conjoncture apparaissent sous forme d'un effritement dans les prix et d'une baisse dans les rentrées de commandes en provenance des pays tiers à partir du deuxième trimestre de l'année 1957. Le retournement se produit done au premier abord dans les prix, alors que grâce au volant régulateur de leurs carnets de commandes, les entreprises sont même parvenues à augmenter leur production.

Vue globalement, l'activité de l'industrie textile beige a encore dépassé de 4 %, en 1957, son niveau de 1956. Son indice s'établit à 130 sur base 1937/38 = 100. Cette augmentation de 30 % en vingt ans, si elle ne situe pas l'industrie textile parmi celles qui sont en tête du progrès économique, la localise cependant dans une honnête moyenne, ce qui tout compte fait est assez encourageant pour un secteur oú règne un suroutillage endémique.

Le tableau ci-dessous retrace l'évolution des indices de la production pour les quatre principaux sous-secteurs de l'industrie textile : la filature, le tissage, la bonneterie, la fabrication de tapis, ainsi que pour l'ensemble.

Une fois de plus, le recensement agricole du 15 mai 1957 montre un sérieux recul de la superficie cultivée par rapport à celle de l'année 1956 : la réduction atteint 11.020 ha, soit 0,6 %. En même temps, nous assistons à la disparition d'un nombre impressionnant d'exploitations agricoles et horticoles, leur total tombant de 234.418 en 1956 à 226.873 pendant l'année en question.

Les exportations de l'U.E.B.L. ont atteint en 1957 un nouveau chiffre record: 159 milliards de francs. Il convient cependant d'ajouter que le taux d'accroissement comparativement à l'année précédente n'a été que de 0,7 % contre 13,8 % en 1956 et que le volume de nos ventes à l'étranger a même diminué de 5,4 %, alors qu'en 1956, il s'était maintenu au même niveau qu'en 1955. En fait, l'année sous revue n'a done pas apporté une réelle augmentation, mais plutôt une stabilisation des résultats de 1956.

Le mouvement des prix n'a apporté aucune surprise véritable, durant l'année 1957. Les tendances antérieures se sont simplement confirmées, et l'économie belge n'a pris en cette matière aucune initiative qui lui eût été propre : elle a été visiblement entraînée par la conjoncture mondiale, et par le mouvement des prix sur les marchés internationaux.

Il y a peu de chose à dire de nos prix de gros, qui suivent les tendances fondamentales. La comparaison des index des différents pays est peu significative, car leur mouvement dépend avant tout des articles qui sont observés. En Belgique, l'index des prix de gros porte sur une gamme étendue de produits allant des matières premières dominées par des cours mondiaux à, des produits finis dont les prix sont rendus rigides par les salaires étroitement incorporés.

La formation des revenus au Congo beige est basée pour une grande part sur les ressources obtenues grâce à l'exportation des produits coloniaux. De même, l'utilisation des revenus à des fins de consommation et surtout à des fins d'investissement dépend largement des produits importés de l'étranger. L'évolution du commerce extérieur exerce done une influence déterminante sur la situation économique générale du Congo beige.