Quelles ont été les attitudes des hommes d'église à l'égard de tous les personnages — jongleurs, mimes, saltimbanques, charlatans, dresseurs d'animaux, danseurs, bouffons, acrobates, écuyers — qui occupaient dans la société médiévale l'espace du jeu et du spectacle ?
Pour répondre à cette question, nous avons limité notre étude aux xiie et xiiie siècles. Car c'est le moment où l'affrontement entre culture cléricale et monde laïc est le plus vif : pression permanente d'une culture populaire jamais étouffée, émergence d'une culture urbaine, choc violent des hérésies. Les intellectuels (les clercs) se trouvent alors confrontés à la nécessité de renforcer ou de réorganiser, selon les cas, l'idéologie qui permettait de penser la réalité et de régler la vie des hommes. L'image du jongleur, situé tout au bas de l'échelle sociale dans le monde laïc, devient dans les textes des clercs la pierre de touche de l'ancien et du nouveau système de représentations.