Si l’on veut préciser la direction à donner à la politique de l’alimentation, il importe d’étudier l’influence respective des principaux facteurs qui déterminent la suffisance et l’équilibre du régime alimentaire : les prix des denrées, les revenus des consommateurs, et l’éducation de ces derniers.

Il convient en effet, de connaître si le déséquilibre du régime alimentaire a pour cause principale l’insuffisance du pouvoir d’achat de la masse des consommateurs, soit que les revenus de larges couches de la population soient insuffisants pour leur permettre l’achat de denrées alimentaires d’un choix varié, soit que les prix d’articles spécialement intéressants par leur teneur en protéines de haute qualité, en vitamines ou en sels minéraux soient relativement trop élevés par rapport aux prix des aliments de première nécessité possédant principalement une grande valeur énergétique.

Cet article est le résultat de travaux et de relevés effectués en 1942. A l’époque, les études entreprises avaient été inspirées surtout par les œuvres des précurseurs Ragnar Frisch, Henry Schultz, Henry L. Moore, H. R. Tolley et M.J.B. Ezekiel. Dès avant les hostilités cependant, des développements importants avaient été apportés à l’étude de l’élasticité de la demande, en particulier par l’introduction du calcul de l’élasticité de la quantité demandée en fonction du revenu de la population, qui venait s’ajouter au calcul traditionnel de l’élasticité de la quantité demandée en fonction du prix du produit considéré.

L’économétrie connaît actuellement des développements considérables, dus surtout aux efforts déployés aux Etats-Unis d’Amérique (The University of Chicago : Cowles Commission for Research in Economics), en Grande-Bretagne (University of Cambridge : Department of Applied Economics) et en France où des travaux importants furent entrepris par des équipes dirigées par M. René Roy et par M. Maurice Allais, ainsi qu’à l’Institut des Sciences économiques appliquées, dirigé par M. François Perroux, et également par les ingénieurs des grandes entreprises nationalisées. L’école néerlandaise a continué de participer activement aux recherches.

Les salaires ont été très peu étudiés en Belgique pour la période qui précède 1789; du fait qu’aucun ouvrage ne fournit de documentation statistique suivie, il a fallu recourir aux sources et, pour cette raison, ce travail a dû être limité; les quittances se trouvant aux Archives générales du Royaume ont fourni des séries de chiffres couvrant la plus grande partie du siècle pour les salaires des manœuvres et des ouvriers de beaucoup de métiers du bâtiment à Bruxelles; les recherches menées en province n’ont visé qu’à procurer des échantillons de salaires payés dans diverses régions; par contre des séries s’étendant à travers tout le siècle ont été reconstituées pour les ouvriers du charbonnage de Bois-du-Luc et les imprimeurs de la maison Plantin à Anvers, grâce aux archives de ces entreprises; la structure de l’industrie et l’organisation du travail ont été étudiées principalement dans les travaux historiques et les monographies; la note qui suit n’a donc aucunement la prétention d’épuiser le sujet : elle est le résultat de sondages effectués en vue de répondre à certaines questions concernant la rémunération de la main-d’œuvre au XVIIIe siècle.