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Naissance du pauvre honteux : entre l'histoire des idées et l'histoire sociale

Published online by Cambridge University Press:  26 July 2017

Giovanni Ricci*
Affiliation:
Université de Bologne

Extract

Les pages qui suivent s'insèrent dans une recherche plus vaste que je mène depuis quelque temps sur les problèmes de la pauvreté honteuse. L'enquête est centrée sur la période qui va du XVe au XVIIIe siècle, pendant laquelle la figure du déclassé honteux de sa condition apparaît le plus souvent et constitue une préoccupation constante pour les activités d'assistance, pour les auteurs de traités théoriques, pour la jurisprudence. C'est pendant cette séquence chronologique qu'apparaissent toutes les implications d'une étude comme celle-ci, qui met en cause les attitudes face à la mobilité sociale et au décalage entre richesse et « état », les conceptions de la richesse et de l'honneur, les variations historiques du sentiment de la honte. J'ai déjà abordé certains de ces thèmes, soit dans une perspective d'ensemble, soit à propos d'études de cas. Le premier chapitre de ce que pourrait être une histoire de la pauvreté honteuse reste pourtant à écrire, qui analyserait comment s'est constituée une doctrine en la matière : il s'agit là d'une réflexion entreprise par les auteurs chrétiens de l'Antiquité tardive et qui n'est parvenue à son point d'accomplissement que pendant le XIIIe siècle.

Summary

Summary

This article falls into two parts. The first part examines the emergence of the doctrine of shameful poverty between the 4th and 13th centuries, on the basis of exegetical, hagiographic, canonical, theological, and literary sources. Initially distinct concepts (poverty, shame, begging as a privilege) are shown to have gradually fused into one. The work of Thomas Aquinas is seen as the culmination of this process.

In the second part the author analyzes the earliest evidence for the actual existence ofthe shameful poor. This evidence cornes from Flanders and central-northern Italy (11th-13th centuries). The author does not believe that this late appearance is due merely to the silence of sources—to a failure to mention earlier cases. Throughout the Early Middle Ages, the shameful poor were only moral figures. In order for them to become a reality, a new factor was required: the appearance of money, which provoked a potential imbalance between individual social status and possession of material goods. Only then was the old theoretical concept of poverty embodied in tangible social forms.

Type
Au Moyen Age
Copyright
Copyright © Copyright © École des hautes études en sciences sociales Paris 1983

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References

Notes

1. Ricci, G., « Povertà, vergognae povertà vergognosa », Società estoria, II, 1979, pp. 305337 Google Scholar; id., « I primi statuti délia compagnia bolognese dei poveri vergognosi », L'Archiginnasio, LXXIV, 1979, pp. 131 -159 ; id., « Da poveri vergognosi a ex nobili poverl Privilegio nella povertà e discesasociale nella Toscana napoleonica », dans Timoré e carità. I poveri nell'ltalia moderna, sous la direction de G. Politi, M. Rosa, F. Dm.lA Peruta, Crémone, 1982, pp. 359-374.

2. Cf. Bloch, M., Apologie pour l'histoire ou métier d'historien, Paris, 1952, p. 6.Google Scholar

3. Cf. Batany, J., Contamine, P., Guenée, B., LE Goff, J., « Plan pour l'étude historique du vocabulaire social de l'Occident médiéval », dans Ordres et classes. Colloque d'histoire sociale, 1967, Paris-La Haye, 1973, p. 91.Google Scholar

4. « Eis ton bion Konstantinou tou basileos logoi », dans PG, t. XX, col. 958.

5. Des bienfaits, F. Préchac Éd., I, Paris, 1926, pp. 32-33.

6. Philosophiae consolationis libri, G. Weinberger Éd., Vienne-Leipzig, 1934, p. 28.

7. « Logoi », dans PG, t. XXXV, col. 874 (oraison XIV).

8. Sermones selecti duodeviginti, D. C. Lambot Éd., Utrecht-Bruxelles, 1950, p. 19 (sermon XIV).

9. Chez d'autres Pères des ive et ve siècles on trouve des soupçons sur les pauvres mendiants. Et l'on n'oubliera pas la sévérité des constitutions de Justinien en la matière : cf. Il libro dei vagabondi, P. Camporesi Éd., Turin, 1973, pp. XVI-XVIIL

10. « De officiis ministrorum », dans PL, t. XVI, col. 71-74, 130-131.

11. « Expositio in Psalmum CXVIII », dans PL, t. XV, col. 1516 (sermon XVII).

12. « Sermones », dans PL, t. LU, col. 214 (sermon IX).

13. Sermons, R. DOJ.LE Éd., II, Paris, 1969 2, pp. 44-45 (sermon IX).

14. «Epistolae », dans PL, t. CXXXVI, col. 667-668 (lettre VI).

15. « Epistolae », dans PL, t. CLXXXII, col. 374 (lettre CCVII).

16. « De eleemosyna », dans PL, t. CXLV, col. 214.

17. « De opère monachorum », dans OEuvres de saint Augustin, III, J. Saint-Martin Éd., Paris, I9492, pp. 384-387.

18. L'édition critique est fournie par E. Faral, « Les Responsiones de Guillaume de Saint- Amour », Archives d'Histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age, XXV-XXVI (1950-1951) ; les passages cités sont aux pp. 341-342.

19. Cf. Dufeil, M.-M., « Un universitaire parisien réactionnaire vers 1250 : Guillaume de Saint- Amour »,dansil ctesdu 95e Congrès national des sociétés savantes, 1970, 1, Paris, 1975, pp. 241242.Google Scholar

20. Le Roman de la Rose, F. Lecoy Éd., Paris, 1965-1970, vv. 11419-11426. Ce passage est absent des adaptations italiennes du poème.

21. Sur le thème du mendiant valide dans les doctrines et dans les réalités sociales médiévales, voir Schmitt, J.-C., Mort d'une hérésie. L'église et les clercs face aux béghards du Rhin supérieur du XIVe au XVe siècle, Paris, 1978, pp. 137194.Google Scholar

22. Dist. LXXX VI, post c. 6 et ce. 14, 16, 17 (E. Friedberg Éd., Graz, 1955). Sur la position de Gratien face au problème de la charité sélective, voir B. Tierney, Médiéval Poor Law. A Sketch of Canonical Theory and its Applications in England, Berkeley-Los Angeles, 1959, pp. 54-58, et, du même, « The Decretists and the ‘deserving poor’ », Comparative Studies in Society and History, I, 1958-1959, pp. 362-363.

24. Cf. Tierney, Médiéval Poor Law, op. cit., pp. 59-60, et, du même, « The Decretists… », op. cit., pp. 363-372 (les citations des trois décrétistes, ibid., aux pp. 364, 365 et 372).

25. Sur tout ceci, cf. à nouveau Tierney, Médiéval Poor Law, op. cit., pp. 13-14 (les citations de Bernard de Parme et d'Hostiensis sont p. 140).

23. Dist. XLII, post c. 1 et c. 2.

26. Sum. theol., II-II, Q. XXXII, art. 10 (éd. Desclée, Paris, 1925-1968).

27. Ibid., II-II, Q. CXLIV, art. 2. On trouvera quelques Éléments sur la réflexion de saint Thomas autour de la verecundia dans les articles Verecundia (par D. Consoli) et Vergogna (par A. Bufano) de ‘Enciclopedia dantesca, V, Rome, 1976, pp. 954 et 956.

28. Le pré spirituel, M.-J. ROUËT DE Journel Éd., Paris, 1946, pp. 257-261.

29. Sur la légende de saint Nicolas, voir les indications rassemblées dans l'article S. Nicola (parN. DBL Rn) de la Bibliotheca sanctorum, IX, Rome, 1967, col. 923-924. Mais le livre de Anrich, G., Hagios Nikolaos. Der Heilige Nikolaos in der Griechischen Kirche, II (Untersuchungen), Leipzig- Berlin, 1917, reste fondamental.Google Scholar

30. Les plus anciens textes hagiographiques sur le saint furent publiés par Falconius, N. C. Sancti Confessons Pontificis et celeberrimi Thaumaturgi Nicolai acta primigenia, Naples, Typis Joseph de Bonis, 1751;Google Scholar l'allusion de Méthode à Matthieu se trouve p. 43 ; la citation de Jean le Diacre, p. 115.

31. La Légende dorée, par T. DE Wyzewa, Paris, 1902, p. 19.

32. Cf. J. Ln Goff, « Le vocabulaire des catégories sociales chez Saint François d'Assise et ses biographes du xiuc siècle », dans Ordres et classes, op. cit., p. 114.

33. Je me sers ici du texte des premières vies de saint François tel qu'il est donné dans lesAnalecta franciscana, X, Florence, 1926-1941. La citation de Bonaventure se trouve p. 561. Dans la Vita II de Thomas de Celano, il est dit fort clairement que, si saint Martin « coupa son vêtement et recouvrit le pauvre », saint François «habilla le pauvre chevalier d'un vêtement complet » (ibid., p. 133).

34. « Gesta episcoporum Tungrensium, Traiectensium et Leodiensium », R. Koepke Éd., dans MGH, SS, VII, p. 221 (le texte est signalé par C. Violante, « Riflessioni sulla povertà nel secolo XI », dans Studi sul Medioevo cristiano offerti a Raffaello Morghen, II, Rome, 1974, pp. 1064-1065).

35. Il s'agit de l'Hôpital Saint-Nicaise, qui fut bientôt après complété par deux institutions comparables : cf. Folet, H., Hôpitaux lillois disparus, Lille, 1899, pp. 2224.Google Scholar

36. Voici deux exemples de la fin du xinc siècle. Le premier est l'activité de la confrérie lyonnaise de la Sainte Trinité : cf. Gutton, J.-P., La société et les pauvres. L'exemple de la Généralité de Lyon (1534-1789), Paris, 1971, p. 371.Google Scholar Le second est l'organisation à Rodez de quêtes dominicales en faveur des honteux : cf. Roberts, S. F., « Les consulats du Rouergue et l'assistance urbaine au xiiie et au début du xive siècle », dans Assistance et charité, Toulouse, 1978, p. 137.Google Scholar

37. Cf. Geremek, B., « Renfermement des pauvres en Italie (xive-xviie siècles) », dans Mélanges en l'honneur de Fernand Braudel, I, Toulouse, 1973, p. 207.Google Scholar

38. On présente ici une simple hypothèse — qui mériterait des approfondissements ultérieurs — suggérée par la lecture des articles de J. Pitt-Rivers, « Honour and Social Status », et de J. Caro Baroja, « Honour and Shame : a Historical Account ofSeveral Conflicts », tous deux dans le volume Honour and Shame. The Values of Mediterranean Society, J. C. Peristiany Éd., Londres, 1965, pp. 19-77 et 79-137. Le lien entre pauvreté et honte a Été retrouvé, aussi, rappelons-le, par E. LE ROY Ladurie dans Montaillou, village occitan de 1294 à 1321, Paris, 1975, p. 547.

39. Cf. Tiraboschi, G., Memorie storiche modenesi, III, Modène, Società Tipografica, 1794, pp. 244245.Google Scholar

40. Les statuts sont dans Meersseman, G., « études sur les anciennes confréries dominicaines », Archivum Fratrum Praedicatorum, XXII, 1952;Google Scholar les textes cités sont aux pp. 100-101 ; les notices sur la compagnie aux pp. 57-58.

41. Cf. A. Vauchez, « Sainteté laïque au xmc siècle : la vie du bienheureux Facio de Crémone (v. I 196-1272) », Mélanges de l'école française de Rome. Moyen Age-Temps Modernes, LXXXIV, 1972, pp. 25-28.

42. La bulle d'Urbain IV, qui n'a pas laissé de trace dans les registres pontificaux, a Été publiée par G. Tammi, Il codice del Consorzio dello Spirito Santo in Piacenza (1268), Plaisance, 1957 ; le passage cité est p. 11. L'édition laisse cependant entendre que la bulle fait référence à la confrérie de Plaisance (ibid., p. 5) dont on reparlera plus loin ; tandis que, pour d'évidentes raisons de chronologie, elle doit être mise en rapport avec la confrérie de Crémone, qui peut à tous Égards être considérée comme un archétype (cf. Vauchez, « Sainteté laïque… », op. cit., p. 27). La bulle de Clément IV est elle aussi publiée par Tammi, Il codice…, op. cit. ,- le passage cité est p. 7.

43. Sur l'association placentine, cf. ibid., pp. 5, 43-51 ; les passages cités de ses statuts sont aux pp. 11-12.

44. Sur la diffusion en Emilie de l'ordre du Saint-Esprit, voir Vauchez, « Sainteté laïque… », op. cit., pp. 28-29. Sur le problème plus particulier de la présence de l'ordre à Bologne, cf. G.Ricci, « I primi statuti… », op. cit., pp. 134-135.

45. Cf. Roncalu, A., La» Misericordia Maggiore » di Bergamo e le altre istituzioni di beneficenza amministrate dalla Congregazione di Carità, Bergame, 1912, pp. 18, 39.Google Scholar

46. Cf. Donati, G., La Congregazione di Carità di Faenza, Faenza, 1958, p. 25.Google Scholar

47. Cf. Guasti, C., « Capitoli délia compagnia délia Santa Croce di Prato », L'Eccitamento, I, 1858, pp. 408409.Google Scholar

48. Cf. Polverini, L Fosi, « Lo stato e i poveri : l'esempio senese fra Seicento e Settecento », Ricerche storiche, X, 1980, p. 100.Google Scholar

49. Cf. M. Revel, « Le rayonnement à Rome et en Italie de l'ordre du Saint-Esprit de Montpellier », dans Assistance et charité, op. cit., p. 351.

50. Pour ne prendre qu'un exemple, cette variabilité sémantique de l'adjectif « honteux » a Été bien décrite pour la Venise du xvie siècle par Pullan, B., Rich and Poor in Renaissance Venice, Oxford, 1971, pp. 373374.Google Scholar

51. Cf. R. C. Trexeer, « Charity and the Défense of Urban Elites in the Italian Communes », dans The Rich, the Well Born and the Powerful. Elites and Upper Classes in History, F. C. Jaher Éd., Urbana (IIL), 1973, pp. 75, 85-87. On trouvera des perspectives neuves sur les Buonomini dans un tout récent travail qui repère parmi leurs assistés des artisans ou des salariés au chômage bien plus que des déclassés au sens strict :cf. A. Spicciani,« The poveri vergognosi in Fifteenth-Century Florence », dans Aspects ofPoverty in Early Modem Europe, Th. Rus Éd., Alphen-Bruxelles-Stuttgart-Florence, 1981, pp. 119-182. Cette précision confirme, en tout État de cause, le sens variable du terme honteux.

52. Cf. en particulier, Mollat, M., « En guise de préface : les problèmes de la pauvreté », dans études sur l'histoire de la pauvreté, MMollat, . Éd., Paris, 1974, p. 21.Google Scholar

53. Cf. J. DéVisse, « “ Pauperes” et “Paupertas “ dans le monde carolingien. Ce qu'en dit Hincmar de Reims », Revue du Nord, XLVIII, 1966, pp. 273-287 ; et G. Duby, « Les pauvres des campagnes dans l'Occident médiéval jusqu'au xiiie siècle », Revue d'Histoire de l'Eglise de France, LU, 1966, pp. 25-29.

54. Voir surtout K. Bosl, « Potens und Pauper. Begriffgeschichtliche Studien zur gesellschaftlichen Differenzierung im frùhen Mittelalter und zum “ Pauperismus “ des Hochmittelalters », dans Alteuropa und die moderne Gesellschaft. Festschrift fur Otto Brunner, Gôttingen, 1963, pp. 60-87. Sur les autres couples d'adjectifs, des réflexions de G. Duby, « Les laïcs et la paix de Dieu », dans I laici nella « societas christiana » dei secoli XI e XII, Milan, 1968, pp. 453-455, et Mollat, M., « Les pauvres et la société médiévale », XIIIe Congrès international des Sciences historiques, Moscou, 1970, p. 6.Google Scholar

55. Sur la nouvelle phase de l'histoire de la pauvreté qui commence à la fin du xnc siècle, je renvoie aux ouvrages cités dans les trois notes précédentes, qui permettent de recomposer une bibliographie complète.

56. Cf. Polica, G. Severino, « Storia délia povertà e storia dei poverl A proposito di una iniziativa di Michel Mollat », Studi medievali, 3 e s., XVII, 1976, n° 1, pp. 363391.Google Scholar

57. Cf. C. Violante, « Riflessioni sulla povertà… », op. cit., pp. 1061-1081. Du même auteur (et toujours contre la conception de K. Bosl), voir en outre « Pauperes e povertà nella società carolingia ». dans Cultus et cognitio. Studia z dziejow sredniowiecznej kultury, Varsovie, 1976, pp. 621-631. Ce désaccord a donné naissance à un stimulant débat historiographique: voir l'introduction d'O. Capitani à la traduction italienne de Mollat, M., Les pauvres au Moyen Age. Étude sociale, Paris, 1978 Google Scholar (I poveri nel Medioevo, Rome-Bari, 1982, en particulier pp. v-xiv).

58. Comme c'est d'ailleurs le cas pour toutes les argumentations médiévales sur la pauvreté : cf. J. Lect.Ercq,« AUX origines bibliques du vocabulaire de la pauvreté », dans études…, op. cit., pp. 35- 43.

59. Sermones selecti, op. cit., p. 20 (sermon XIV).

60. Cf. Batany, « Les pauvres et la pauvreté dans les revues des ‘ estats du monde ‘ », dans études…, op. cit., pp. 469-470, 481-485. L'histoire sociale de la pauvreté orgueilleuse ne mériterait pas moins d'intérêt que celle de la pauvreté honteuse.

61. M. Mollat, « La notion de la pauvreté au Moyen Age : position de problèmes », Revue d'Histoire de l'église de France, LU, 1966, p. 8.

62. En fait on tend aujourd'hui à retarder — jusqu'à l'époque de la désorganisation finale de l'état romain — l'apparition de certains caractères typiquement « médiévaux » : cf. A. Chastagnol, « Classes et ordres dans le Bas-Empire », dans Ordres et classes, op. cit., pp. 56-57.

63. Epistolarum libri, dans PL, t. LXXVII, col. 1147 (lettre XXXIV).

64. Cf. É. Patlagean, « La pauvreté byzantine au vic siècle au temps de Justinien : aux origines d'un modèle politique», dans études…, op. cit., pp. 61-62, et. Pauvreté Économique et pauvreté sociale à Byzance, IVe- VIIe siècles, Paris-La Haye, 1977, pp. 9-35.

65. M. Mollat, Les pauvres au Moyen Age, op. cit., pp. 190-191, estime lui aussi que la pauvreté honteuse est une « question naissante » au XIIIC siècle, tout en se contentant de noter qu'alors seulement devient possible l'aumône en argent qui respecte le mieux la dignité du pauvre. Une simple constatation du même ordre dans Vauc-HEZ, « Assistance et charité en Occident, xnic-xvc siècles », dans Domanda econsumi, livelliestrutture(neisecoli XIII-XVII1), Florence, 1978, pp. 157-158. Selon le même auteur (” Sainteté laïque… », op. cit., p. 32) l'importance accordée aux pauvres honteux par l'ordre crémonais du Saint-Esprit semblerait indiquer que les phénomènes de déclassement ont pris des proportions inquiétantes en Lombardie vers 1260 ; mais Vauchez ajoute qu'une documentation plus complète permettrait seule d'être assuré qu'il ne s'agit pas uniquement d'un « affinement du zèle charitable ». Je partage pleinement cet appel à la prudence. Certes, les exemples que j'ai rassemblés, et qui renvoient à des situations locales disparates, et les circonstances plus générales que j'ai décrites, font-ils pencher la balance du côté de la première hypothèse. Je remarque encore que Violante, « Riflessioni sulla povertà… », op. cit., p. 1066, voit déjà dans le De eleemosyna de Pierre Damien le reflet de préoccupations pas seulement théoriques ; mais je ne suis pas aussi certain que, dans ce texte, la part du moraliste ne l'emporte pas lourdement sur l'observation sociale.

66. Cf. Couvreur, G., Les pauvres ont-ils des droits ? Recherches sur le vol en cas d'extrême nécessité depuis la Concordia de Gratien (I140)jusqu ‘à Guillaume d'A uxerre(1231), Rome, 1961, en particulier pp. 1316.Google Scholar

67. La littérature sur le thème est fort vaste, et ce n'est pas le lieu ici de la rappeler. Je veux simplement noter que la thématique qui m'intéresse ici (la pauvreté nobiliaire comme perte des signes d'une condition) a Été développée dans plusieurs Écrits de M. Mollat et de G. Duby.

68. Cf. Duby, G., Les trois ordres ou l'imaginaire du féodalisme, Paris, 1978, pp. 262263.Google Scholar

69. Si une telle attitude existait potentiellement depuis toujours, il reste significatif que les premiers textes sur les faux mendiants apparaissent vers le milieu du xine siècle : cf. Kraemer, E. V., Le type du faux mendiant dans les littératures romanes depuis de Moyen Age jusqu'au XVIIIe siècle, Helsingfors. 1944, pp. 2728.Google Scholar

70. Le Roman de la Rose, vv. 451-452, 454-455.