La Haute Cour d’Australie rendait en 1998 son premier et seul arrêt concernant le traité de libre-échange liant l’Australie et la Nouvelle-Zélande, l’ Australia New Zealand Closer Economie Relations Trade Agreement (ANZCERTA), dans l'affaire Project Blue Sky v. Australian Broadcasting Authority. Dans cette affaire, la Haute Cour avait à déterminer les effets juridiques d'une disposition législative qui enjoignait un organe administratif à exercer ses pouvoirs statutaires de manière compatible avec ce traité. L’organe administratif en question avait certes adopté une norme incompatible avec l’ ANZCERTA, mais les juges de la majorité ont préféré ne pas invalider la norme, même si elle était illégale. Le juge en chef dissident a rejeté cette distinction entre invalidité et illégalité, dans un long obiter dictum, et jugé invalide la norme incompatible avec le traité, afin de donner leurs pleins effets juridiques internes à ces dispositions de renvoi sectoriel au droit international conventionnel. L'audition prochaine par la Cour suprême du Canada de la cause de la société multinationale Unilever, qui s’attaque à la réglementation québécoise sur la couleur de la margarine, invite à s’intéresser à nouveau à cet arrêt de la Haute Cour d'Australie, puisqu 'elle soulèvera la question de l’invocabilité des traités de libre-échange en droit interne canadien. Dans sa clarification du droit applicable en la matière, il est à souhaiter que la Cour suprême du Canada ne suivra pas le raisonnement de la majorité dans l’arrêt Project Blue Sky, et n’inhibera pas les dispositions de renvoi sectoriel, de façon à ce que ce procédé puisse être utilisé par les législateurs, si tel devait être leur souhait.