L’Histoire du Maroc dirigée par Mohamed Kably est un ouvrage monumental auquel ont collaboré plus de cinquante auteurs, tous marocains, à une exception près. L’histoire s’est bien, de facto, marocanisée – un terme dont le volume n’a pas abusé –, et cette synthèse pourra faire date. Il paraît toutefois utile de suggérer d’autres agencements thématiques ou transversaux et de retrouver quelques lignes directrices de cette histoire : parmi d’autres, le tableau géographique introductif, la périodisation, les origines et l’Antiquité, le Maroc dit pluriel et ses relations avec le monde extérieur. Quant à la tonalité de l’ensemble, il convient aussi d’évaluer la place de cette histoire aujourd’hui. D’autres travaux récents ont mis en évidence des oscillations entre deux échelles, l’une qui tend vers des généralités, souvent simplifiées – comme le Moyen Âge, l’époque contemporaine –, l’autre vers la spécificité et l’exceptionnalité, qui ont pu sembler excessives. Sous des formes discrètes, un peu en filigrane, ces débats affleurent dans cette œuvre utile, souvent convaincante, pédagogique et accessible à divers publics, parce qu’elle n’est ni intransigeante ni polémique. Difficilement réductible à des courants historiques particuliers, elle est de facture universitaire, dans un esprit raisonnablement académique. Elle s’appuie sur des connaissances actuelles, sans frontières préconçues, et elle reste, en définitive, savante, expérimentale et pragmatique. Il est peu probable que l’histoire du Maroc nécessite désormais d’être réécrite de fond en comble.